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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3620/2008

ATA/589/2009 du 10.11.2009 ( FIN ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3620/2008-FIN ATA/ 589/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 10 novembre 2009

1ère section

dans la cause

 

Madame R______

contre

 

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE ADMINISTRATIVE



EN FAIT

1. Madame R______, ressortissante suisse, a annoncé son départ de Suisse à l’office cantonal de la population pour le 31 décembre 2005. Elle s’est établie en France voisine.

2. Le 23 janvier 2006, la caisse d’assurance du personnel de la Ville de Genève et des services industriels genevois (ci-après : la CAP) lui a versé une prestation en capital de prévoyance professionnelle de CHF 212'751,55 pour cause de départ de Suisse. Un montant de CHF 10'985,80 au titre de l’impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) et une somme de CHF 3'369,05 au titre de l’impôt fédéral direct (ci-après IFD), ont été retenus à la source par la CAP, soit un total de CHF 14'354,85.

3. Le 20 octobre 2006, la contribuable a demandé à l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC) le remboursement de l’impôt prélevé à la source.

4. Par décision sur réclamation (sic) du 22 décembre 2006, l’AFC a maintenu l’imposition. Le montant calculé était exact. La convention de double imposition entre la Suisse et la France prévoyait que les prestations versées par des institutions de droit public à des ressortissants suisses ou des doubles nationaux étaient imposables en Suisse.

5. Mme R______ a recouru le 19 janvier 2007 auprès de la commission cantonale de recours en matière d’impôts, remplacée le 1er janvier 2009 par la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission), contre la décision précitée. Lorsqu’elle avait commencé son activité au sein de la Ville de Genève, elle n’avait pas eu le choix de la caisse de pension et personne ne l’avait informée de la convention de double imposition entre la Suisse et la France. Avant de donner son congé, elle s’était renseignée auprès de l’AFC et on lui avait affirmé qu’elle avait droit au remboursement de l’impôt. On lui avait même remis la formule de demande de remboursement. Elle s’était fiée de bonne foi aux renseignements qui lui avaient été donnés.

6. Par décision du 25 août 2008, la commission a rejeté le recours de la contribuable.

L’impôt avait été prélevé conformément aux art. 10 al. 1 de la loi sur l’imposition à la source des personnes physiques et morales du 23 septembre 1994 (LISP - D 3 20) et 10 al. 2 du règlement d’application de la loi sur l’imposition à la source des personnes physiques et morales du 12 décembre 1994 (RISP - D 3 20.01) ainsi qu’à la convention du 9 septembre 1966 entre la Confédération suisse et la République française en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et la fortune (CDI-F ; RS 0 :672.934.91). Elle ne pouvait se prévaloir du principe de la bonne foi, les conditions n’étant pas remplies.

7. Le 7 octobre 2008, Mme R______ a recouru auprès du Tribunal administratif contre la décision susmentionnée. Elle a été invitée à compléter ses écritures par le juge délégué, ce qu’elle a fait le 10 octobre 2008. Elle a conclu implicitement à l’annulation de la décision de la commission, reprenant et développant son argumentation sur la bonne foi.

8. Le 18 novembre 2008, l’AFC s’est opposée au recours, reprenant son argumentation antérieure.

9. Le 6 mars 2009, le juge délégué a invité la contribuable à lui indiquer, jusqu’au 20 mars 2009, si elle entendait déposer des observations complémentaires ou solliciter une mesure d’instruction. Sans réponse de sa part, la cause serait gardée à juger.

10. Mme R______ n’a pas réagi à ce courrier.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le litige porte sur le refus de l’AFC de rembourser l’impôt à la source perçu au titre de l’ICC et de l’IFD. Toutefois, selon l’art. 6 al. 1 du règlement d’application de diverses dispositions fiscales fédérales du 30 décembre 1958 (RDDFF - D 3 80.04), pour les retenues à la source aussi bien en vertu du droit fédéral que du droit cantonal, la procédure de réclamation et celle de recours sont régies la LISP. C’est ainsi à juste titre que l’AFC et la commission ont statué de manière globale sur le montant de CHF 14'854,85, sans distinguer son affectation.

3. L’application de la CDI-F à l’impôt en cause n’est plus contestée, la recourante ne contestant plus que l’appréciation selon laquelle elle ne peut se prévaloir de sa bonne foi.

4. Découlant directement de l'art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 131 II 627 consid. 6.1 p. 637 ; 129 I 161 consid. 4.1 p. 170 ; 128 II 112 consid. 10b/aa p. 125 ; 126 II 377 consid. 3a p. 387 et les arrêts cités). Selon la jurisprudence, les assurances ou les renseignements erronés donnés par les autorités confèrent des droits aux justiciables lorsque les cinq conditions cumulatives suivantes sont remplies. Tout d’abord, on doit être en présence d’une promesse concrète effectuée à l’égard d’une personne déterminée. Il faut également que l’autorité ait agi dans le cadre et dans les limites de sa compétence, que la personne concernée n’ait pas été en mesure de se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement fourni, qu’elle se soit fondée sur ce renseignement pour prendre des dispositions qu’elle ne peut ensuite modifier sans subir de préjudice et, enfin, que la loi n’ait pas subi de changement depuis le moment où la promesse a été faite (ATF131 II 627 consid. 6.1 p. 637 ; 129 I 161 consid. 4.1 p. 170 ; 122 II 113 consid. 3b/cc p. 123 et les références citées ; Arrêt du Tribunal fédéral 1P.373/2006 du 18 octobre 2006 consid. 2 ; G. MULLER/U. HÄFELIN/ F.UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, Zürich 2006, 5ème éd., p. 130ss ; A. AUER/ G. MALINVERNI/ M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, Berne 2006, Vol. 2, 2ème éd., p. 546, n. 1165ss ; P. MOOR, Droit administratif, Berne 1994, Vol. 1, 2ème éd., p. 430, n. 5.3.2.1).

Le principe de la bonne foi régit aussi les rapports entre les autorités fiscales et les contribuables; le droit fiscal est toutefois dominé par le principe de la légalité, de telle sorte que le principe de la bonne foi ne saurait avoir qu'une influence limitée en cette matière (cf. art. 5 et 9 Cst. ; ATF 131 II 627 consid. 6.1 p. 637 ; 118 Ib 312 consid. 3b p. 316 ; E. BLUMENSTEIN/ P. LOCHER, System des Steuerrechts, Zurich 2002, 6ème éd., p. 28 et les nombreuses références ; J.-M. RIVIER, Droit fiscal suisse, Lausanne 1998, 2ème éd., p. 132). Ainsi, le contribuable ne peut bénéficier d'un traitement dérogeant à la loi que si les conditions mentionnées ci-dessus - qui doivent être interprétées de manière stricte - sont remplies de manière claire et sans équivoque (Arrêt du Tribunal fédéral 2C.382/2007 du 23 novembre 2007 consid. 3 ; 2A.83/2006 du 18 octobre 2006 consid. 7 ; ATA/111/2006 du 7 mars 2006 consid. 5b).

En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante se soit adressée à une collaboratrice ou un collaborateur de l’AFC au guichet du service de l’impôt à la source. Elle a reçu des renseignements ainsi que des formulaires et des indications sur la manière de les remplir. Toutefois, elle ne prétend pas avoir reçu une assurance ou une promesse d’une personne ayant compétence décisionnelle en matière de taxation, connaissant sa situation de manière détaillée. A supposer qu’elle ait pensé que tel était le cas, elle n’indique pas qu’elle aurait renoncé à s’établir en France, ni à percevoir son capital. Elle ne peut dès lors se prévaloir du principe de la bonne foi.

5. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 500.-sera mis à la charge de la recourante (art. 87 LPA).


PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 octobre 2008 par Madame R______ contre la décision de la commission cantonale de recours en matiere administrative du 25 août 2008 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 500.- ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame R______ ainsi, à l’administration fiscale cantonale, ainsi qu'à la commission cantonale de recours en matière d'impôts.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy et Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :