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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2409/2007

ATA/588/2009 du 17.11.2009 ( FIN ) , ADMIS

Descripteurs : ; IMPÔT ; AMENDE ; INTENTION ; NÉGLIGENCE ; DOL ÉVENTUEL
Normes : LIFD.175.al1 ; LIFD.176.al1
Résumé : L'administration fiscale a retenu une tentative de soustraction à l'impôt et notifié au contribuable un bordereau d'amende. Le recours est admis car la tentative de soustraction ne peut être sanctionnée qu'en cas de comportement intentionnel. En l'occurrence, seule la négligence a pu être retenue à l'encontre du contribuable, celui-ci n'ayant commis aucun manquement coupable.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2409/2007-FIN ATA/588/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 17 novembre 2009

1ère section

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Jacques Pagan, avocat

contre

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

et

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE ADMINISTRATIVE



EN FAIT

1. Monsieur A______ est actionnaire unique et président du conseil d’administration de la société anonyme N______, inscrite au registre du commerce de Genève depuis le 20 août 1980.

2. Cette société a pour but de « procéder à toutes analyses, études, propositions, mises au point de formules de coopération entre les différentes parties intéressées par les questions touchant à l’exploration, la production et à l’approvisionnement de ressources énergétiques, notamment du pétrole et du gaz ».

3. De sa création au 9 mai 2005, l’organe de révision de N______ a été la fiduciaire F______, H______, à Genève. M. H______, décédé le ______ 2005 (ci-après : le conseiller fiscal), était en outre le conseiller fiscal de M. A______, et de son épouse, Madame A______, domiciliés dans le canton de Genève.

4. Le 11 juin 1998, le conseiller fiscal a adressé à M. A______ un avis relatif aux conséquences fiscales pour ce dernier et la société d’une augmentation du capital-actions de CHF 200'000.- à CHF 1'000'000.- par conversion du compte de profits et pertes reporté en actions gratuites.

Cet avis mentionnait que les actions gratuites constituaient un rendement de participation imposable selon l’art. 20 al. 1 let. c de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11). Sous l’angle de l’impôt cantonal et communal, la distribution d’actions gratuites n’était pas imposable, pour autant qu’elle intervienne avant le 1er juillet 1998.

5. Le 22 juin 1998, N______ a procédé à une augmentation de capital par émission de 800 actions au porteur gratuites d’une valeur nominale de CHF 1'000.-, toutes souscrites par M. A______. Cette opération a été inscrite au registre du commerce le 25 juin 1998.

6. Le 4 novembre 1998, N______ a envoyé à l’administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) la formule de demande de remplacement du paiement de l’impôt anticipé par une déclaration (ci-après : formule 105) concernant l’opération susmentionnée, son bénéficiaire ayant droit au remboursement d’impôt en question.

7. Le 6 avril 1999, l’AFC-CH a avisé N______ que la demande précitée avait été acceptée.

8. Le 7 mai 2009, le conseiller fiscal a demandé au service des titres de l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) la valeur des actions de N______ à faire figurer dans la déclaration fiscale 1999 de M. A______. Il faisait observer que ce dernier avait acquis 800 actions de plus en 1998 et détenait donc au 1er janvier 1999, 1000 actions d’une valeur nominale de CHF 1'000.-.

9. Le 12 mai 1999, l’AFC-GE a informé le conseiller fiscal que la valeur de l’action au 1er janvier 1999 était estimée à CHF 1'810.-.

10. Le 29 juillet 1999, le conseiller fiscal a signé et expédié à l’AFC-GE la déclaration pour l’impôt cantonal et communal 1999 (ci-après : ICC) pour l’impôt fédéral direct 1999-2000 (ci-après : IFD) pour les époux A______.

La formule G1 relative aux valeurs mobilières suisses mentionnait 200 actions N______ à CHF 1'810.- soit une valeur imposable de CHF 362'000.-. Ce dernier montant était compris dans une fortune mobilière totale de CHF 809'567.- mentionnée dans la feuille récapitulative Z1. Les 800 actions gratuites n’apparaissaient pas dans la déclaration.

11. Le 22 décembre 1999, l’AFC-GE a communiqué aux contribuables un bordereau provisoire pour l’ICC 1999. Le montant retenu au titre de la fortune mobilière était celui indiqué dans la déclaration.

12. Le 7 mars 2000, l’AFC-GE a transmis aux contribuables un bordereau rectificatif pour l’ICC 1999. La fortune mobilière totale retenue se montait à CHF 2'947'567.-, sans aucune indication des éléments qui avaient été rectifiés, ni motivation des changements intervenus.

13. Par courrier du 21 mars 2000, le conseiller fiscal a réclamé auprès de l’AFC-GE contre le bordereau rectificatif susmentionné, demandant à ce que le montant de la fortune mobilière soit modifié. Compte tenu des éléments composant la fortune mobilière de son client, la divergence entre le montant déclaré et celui retenu ne pouvait provenir que de la valeur retenue pour les actions N______. Or, il avait déclaré les 200 actions au montant estimé par l’AFC-GE elle-même, soit CHF 1'810.- l’unité, pour un total de CHF 362'000.-. Le montant de CHF 2'500'000.- qui avait dû être retenu dans le bordereau rectificatif était erroné.

L'AFC-GE ne statuera sur cette réclamation qu'en 2004, admettant qu'elle avait retenu une valeur erronée CHF 2'500.- l'unité pour les actions, outre qu'elle avait rectifié leur nombre à 1000, quand bien même seules 200 étaient imposables au titre de l'ICC.

14. Par courrier recommandé du 27 avril 2000, l’AFC-GE, agissant cette fois dans le cadre de ses compétences en matière d'imposition fédérale, a informé les contribuables de l’ouverture à leur encontre d’une procédure pénale fiscale pour soustraction d’impôt (art. 183 al. 1 LIFD) concernant l'IFD 1999.

Selon les informations en possession de l’AFC-GE, ils avaient bénéficié en juillet 1998 de la distribution d’actions gratuites, émises par N______. Cette prestation, imposable conformément à l’art. 20 al. 1 let. c LIFD, ne figurait pas dans leur déclaration IFD 1999-2000. L’attention des contribuables était en outre attirée sur le fait qu’en cas de tentative de soustraction, l’amende était fixée aux deux tiers de la peine qui serait infligée si la soustraction avait été commise intentionnellement et consommée et que, dans ce dernier cas, l’amende pouvait être fixée, au maximum, à trois fois l’impôt soustrait.

15. Le 4 mai 2000, se référant à la réclamation du 21 mars 2000 contre le bordereau ICC 1999, le conseiller fiscal a avisé l’AFC-GE qu’une erreur avait été commise dans la déclaration d’impôt des époux A______. La formule G1 faisait mention de 200 actions N______ à CHF 1'810.-. En réalité, M. A______ possédait 1000 actions de cette société. En conséquence, le montant de la fortune mobilière des contribuables devait être rectifiée, passant de CHF 809'567.- à CHF 2'257'567. L’erreur provenait de la reprise des bases de l’année précédente par le logiciel fiscal utilisé. La réclamation ne portait plus que sur la différence entre le montant déclaré rectifié et celui retenu par l’AFC-GE.

16. Dans un second courrier du 4 mai 2000, le conseiller fiscal a réagi à l’ouverture de la procédure pénale fiscale pour soustraction d’impôts. M. A______ lui avait en effet transmis le courrier de l’AFC-GE du 27 avril précédant. Une simple omission était à l’origine de la réaction des autorités fiscales. Ni lui-même ni les contribuables n’avaient cherché d’une manière ou d’une autre à tenter de soustraire quelque revenu soumis à l’impôt que ce soit. Lorsque son bureau avait établi la déclaration fiscale des contribuables pour l’année 1999, la personne en charge de ce travail ne s’était plus souvenue de l’attribution des actions gratuites et seules les 200 actions existantes antérieurement reprises automatiquement par le logiciel fiscal ont été reportées sur la formule G1. Le conseiller fiscal regrettait qu’avant d’ouvrir une procédure pénale contre des contribuables honnêtes, l’AFC-GE n’ait pas procédé à une demande complémentaire, alors que la taxation n’était pas encore établie.

17. Le 11 juillet 2000, l’AFC-GE a notifié aux contribuables un bordereau de taxation pour l’IFD 1999-2000 (ci-après : bordereau IFD) et un bordereau d’amende. Le premier retenait un revenu imposable de CHF 809'400.- pour un impôt annuel de CHF 93'081.-. Le second se montait à CHF 67'109.-, correspondant aux deux tiers de l’impôt, s’agissant d’une tentative. Les contribuables étaient responsables des erreurs commises par leur conseiller fiscal, dès lors qu’ils étaient en mesure de reconnaître ces erreurs. Ils avaient pu facilement se rendre compte de l’inexactitude de leur déclaration, s’agissant d’un revenu imposable supplémentaire de CHF 800'000.-. En ne vérifiant pas leur déclaration, ils avaient, pour le moins, consciemment accepté le risque d’obtenir une taxation insuffisante, ce qui était constitutif de dol éventuel. Deux circonstances aggravantes étaient retenues : M. A______ devait nécessairement disposer de connaissances fiscales particulières, étant président de la société N______ et il avait par ailleurs fait usage de la procédure de déclaration de la prestation imposable prévue aux art. 20 et ss de la loi fédérale sur l’impôt anticipé du 13 octobre 1965 (LIA - RS 642.21). En revanche, des éléments invoqués lors d’un entretien qui avait eu lieu entre l’AFC-GE et les contribuables d’une part et, d’autre part, les courriers explicatifs adressés par le conseiller fiscal, constituaient des circonstances atténuantes.

18. Le 10 août 2000, les contribuables ont réclamé contre le bordereau d’amende. Mme A______, étrangère aux activités professionnelles de son conjoint, devait être mise hors de cause. M. A______ contestait avoir commis une tentative de soustraction. Ni lui ni son conseiller fiscal n’avaient eu le moindre problème avec les autorités fiscales en plus de vingt ans. L’opération d’augmentation de capital et d’acquisition d’actions gratuites s’était faite de manière transparente. Remplir une déclaration de manière incomplète n’aurait eu aucun sens dans ce contexte. Le contribuable savait que l’acquisition de 800 actions gratuites aurait des conséquences fiscales et il était prêt à les assumer. Tout au plus pouvait-on lui reprocher la négligence de ne pas avoir vérifié sa déclaration.

19. Par décision du 21 juillet 2004, l’AFC-GE a confirmé l’amende dans son principe et sa quotité mais ne l’a plus infligée qu’à M. A______, ayant accepté les explications fournies sur la mise hors de cause de Mme A______. Pour le surplus, elle s’en tenait à l’argumentation développée à l’appui du bordereau d’amende.

20. M. A______ a recouru le 18 août 2004 auprès de la commission cantonale de recours de l’impôt fédéral direct, remplacée le 1er janvier 2009 par la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission), contre la décision susmentionnée, concluant à son annulation. Il reprenait en substance ce qu’il avait développé dans sa réclamation.

21. Le 31 janvier 2006, l’AFC-GE s’est opposée au recours, persistant dans ses décisions antérieures.

22. Par décision du 9 mai 2007, visant les époux A______, la commission a rejeté le recours. Le contribuable avait été dûment informé par son conseiller fiscal qu’il serait taxé sur le revenu en IFD suite à la remise des 800 actions gratuites. Dans son courrier à l’AFC-GE du 7 mai 1999, le conseiller fiscal avait bien mentionné l’acquisition des 800 actions mais sans préciser que c’était à titre gratuit. S’il avait donné cette précision, une omission volontaire n’aurait pas eu de sens et la thèse de l’oubli aurait été plus plausible. Vu l’importance de l’augmentation de capital ainsi que les mois écoulés entre le dépôt de la déclaration fiscale et la notification des bordereaux de taxation, il était difficile d’admettre que le contribuable et son conseiller fiscal aient pu oublier de déclarer le revenu en cause. De par ses fonctions d’administrateur de société, le recourant se devait de comprendre le contenu de sa déclaration fiscale et de le vérifier attentivement. On devait ainsi admettre que le contribuable avait intentionnellement trompé l’administration en déposant une déclaration incomplète et inexacte, afin d’obtenir une taxation moins élevée ou, du moins, qu’il avait agi par dol éventuel en s’accommodant d’un tel résultat au cas où il se produirait. Quant à la quotité de l’amende, elle était justifiée aux regards des éléments pris en considération par l’AFC-GE.

23. Le 19 juin 2007, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif contre la décision précitée. Il conclut à l’annulation de la décision attaquée. Celle-ci visait les contribuables mais dans la mesure où Mme A______ avait été mise hors de cause, il y avait lieu de considérer qu’il s’agissait d’une simple erreur de plume. Si tel ne devait pas être le cas, il faudrait alors considérer que le recours était également formulé au nom de la contribuable. La commission n’avait pas tenu compte de ses arguments, s’en tenant exclusivement à la thèse de l’AFC-GE. Il persistait dans ses développements antérieurs.

24. Le 26 juillet 2007, l’AFC-GE s’est opposée au recours, concluant à la confirmation de la décision attaquée. Elle ajoutait à son argumentation précédente que le contribuable comme son conseiller fiscal auraient pu se rendre compte que les 800 actions gratuites n’avaient pas été déclarées dans le laps de temps séparant la notification du bordereau rectificatif pour l’ICC 1999, le premier ne mentionnant pas les 800 actions gratuites, alors qu’elles étaient prises en compte dans le second. Quant à la formule 105, elle avait été adressée à l’AFC-CH et non à l’AFC-GE et elle n’avait pas été jointe à la déclaration fiscale 1999 du contribuable. Ce n’était donc pas par le fait du contribuable ou de son mandataire que l’AFC-GE a eu connaissance de la distribution des 800 actions gratuites.

25. L’AFC-CH a transmis ses observations le 27 juillet 2007. Elle considérait que la contribuable avait été mise hors de cause par l’AFC-GE et n’était pas partie à la procédure. Elle conclut au rejet du recours, appuyant l’argumentation de l’AFC-GE. Si l’on pouvait admettre que le collaborateur du conseiller fiscal ait oublié de mentionner les 800 actions gratuites, par ignorance de leur existence et/ou en raison des caractéristiques du logiciel comptable utilisé, le conseiller fiscal et, à plus forte raison, le contribuable, auraient dû contrôler et remarquer cet oubli. En ne le faisant pas, ils avaient manqué l’un et l’autre à leurs obligations et responsabilités fiscales. Le contribuable ne pouvait se cacher derrière l’erreur commise par son conseiller fiscal car il devait contrôler l’exactitude et l’intégralité des revenus à déclarer. En l’espèce, la faute ou l’erreur était reconnaissable vu les caractéristiques personnelles du contribuable. En signant une déclaration fiscale qui faisait apparaître un revenu imposable de CHF 212'000.-, le conseiller fiscal aurait dû se rendre compte de l’inexactitude de celle-ci, les actions gratuites valant à elles seules CHF 800'000.-. En ne contrôlant pas la déclaration, le contribuable et son conseiller fiscal avaient accepté le risque d’obtenir une taxation insuffisante. S’agissant de la quotité de l’amende, l’AFC-CH se ralliait aux considérants de la décision querellée.

26. Le 28 septembre 2007, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties. L’AFC-CH était excusée.

a. M. A______ avait vérifié les déclarations d’impôts remplies par son conseiller fiscal au début de leurs relations. Le temps s’écoulant, il avait acquis pleine confiance en celui-ci, de sorte qu’il ne vérifiait que très rarement les documents fiscaux qui lui étaient remis pour signature ou que son conseiller fiscal signait lui-même. C’était au moment de la réception du bordereau que, cas échéant, il pouvait se rendre compte d’une erreur, par comparaison avec les exercices précédents. Dans le cas particulier de la déclaration 1999, il n’avait rien vérifié car son conseiller fiscal était parfaitement au courant de l’augmentation de capital par émission de 800 actions gratuites, étant réviseur de N______ et ayant été présent lors de cette opération.

Il avait envoyé le bordereau rectificatif ICC 1999 à son conseiller fiscal, comme il le faisait d’habitude. Celui-ci avait constaté une différence importante au niveau de la valeur des actions N______. Sur la base de l’estimation de l’AFC-GE, il avait déclaré que les 200 actions valaient CHF 362'000.- alors que l’AFC-GE avait retenu un montant de CHF 2'500'000.- qu’il n’expliquait pas. Il avait alors déposé une réclamation, sur laquelle l’AFC-GE n’avait statué qu’en 2004. Il en résultait qu’indépendamment de la question du nombre des actions, celles-ci avaient été estimées à CHF 2'500.-. Cette différence d’estimation, ignorée du conseiller fiscal au moment de la réclamation, avait probablement eu comme conséquence qu’il n’avait pas été immédiatement en mesure de se rendre compte que l’essentiel du problème venait du nombre d’actions, et de réagir en conséquence.

b. La représentante de l’AFC-GE a indiqué que la procédure de contrôle pour l’IFD avait été ouverte après que le bordereau rectificatif pour l’ICC ait été émis, ce document rectifiant le nombre d’actions N______ dont toutefois seules 200 étaient alors imposables au niveau cantonal. Elle ignorait dans quelles circonstances le dossier du recourant avait été transmis au service du contrôle, mais ferait des recherches sur ces points. Les dossiers étaient transmis au contrôle dans leur intégralité. Normalement, ce service avait donc eu connaissance de la réclamation du 21 mars 2000 concernant le bordereau rectificatif pour l'ICC 1999, soit parce qu'elle y figurait déjà lors de la transmission du dossier, soit par remise directe si le dossier était déjà en possession du service à sa réception. Le programme informatique permettant de remplir la déclaration d’impôt était conçu de telle manière que le contribuable n’avait qu’une déclaration à remplir pour l’ICC et l’IFD, de la même manière que s’il la remplissait à la main.

Ni M. A______, ni la société N______ n’avaient posé de problèmes à l’AFC-GE avant cette affaire.

27. Malgré deux rappels, les 4 mars et 29 mai 2008, l’AFC-GE n’a pas communiqué le résultat des recherches relatives aux circonstances de la transmission du dossier du contribuable au service du contrôle.

28. Le 6 novembre 2008, le juge délégué a informé qu’il prenait acte que l’AFC-GE n’avait pas donné suite à la demande qui lui avait été adressée. Les parties ont été avisées que la cause était gardée à juger en l’état.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. L’objet du litige est circonscrit à l’amende de CHF 67'109.- infligée pour tentative de soustraction de l’IFD 1999.

3. Il convient préalablement de statuer sur la qualité de partie de la contribuable.

Le bordereau d’amende a été initialement adressé aux contribuables puis, sur réclamation, l’AFC-GE a considéré que seul le contribuable devait être sanctionné, à l’exclusion de son épouse. Le recours devant la commission a été enregistré au nom des deux contribuables, alors même que cet aspect de la décision sur réclamation n’était pas contesté et que la commission ne l’a pas remis en question. Le dispositif de la décision querellée vise pourtant les contribuables.

L’amende prononcée ayant un caractère pénal, elle ne peut être infligée qu’à un participant à l’infraction (art. 47 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0). L’AFC-GE ayant retenu que la contribuable n’était pas impliquée dans la tentative de soustraction d’impôt retenue à l’encontre du contribuable, sans que les éléments figurant au dossier permettent de contredire d’une quelconque manière cette appréciation, il y a lieu de mettre hors de cause l’épouse du recourant.

4. Selon l’art. 175 al. 1 LIFD, le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu’une taxation ne soit pas effectuée alors qu’elle devrait l’être, est puni d’une amende. La tentative de soustraction est punissable également d’une amende (art. 176 al. 1 LIFD). Il n’y a tentative de soustraction que si les actes du contribuable tendant à se soustraire à l’impôt sont découverts avant l’entrée en force de la taxation et si l’auteur a agi intentionnellement, fut-ce par dol éventuel (RDAF 2003 II 632 et les références citées). La tentative de soustraction fiscale n'est ainsi pas punissable si seule la négligence, fut-elle consciente, peut être retenue à l'encontre de son auteur.

5. Les notions d’intention et de négligence au sens des art. 175 et 176 LIFD sont identiques à celles du CP.

a. Le 1er janvier 2007 est entrée en vigueur une modification de la partie générale du CP. Les faits de la cause étant antérieurs à cette date, c’est la teneur du CP en vigueur jusqu’au 31 décembre 2006, qui sera appliquée (ci-après : aCP), la novelle n’étant pas plus favorable in casu.

b. Selon l’art. 18 al. 2 aCP, commet intentionnellement un crime ou un délit celui qui agit avec conscience et volonté. L’auteur agit déjà intentionnellement, par dol éventuel, lorsqu’il envisage le résultat dommageable, mais agit néanmoins ou ne fait pas ce qui est en son pouvoir pour l’éviter ou en atténuer les conséquences, s’accommodant de ce résultat pour le cas où il se produirait, même s’il ne le souhaite pas (ATF 105 IV 172).

Le dol éventuel ne peut être déduit du seul fait que le résultat dommageable constitue la conséquence adéquate du comportement imputé à l’auteur (ATF 119 II 1). La jurisprudence en matière pénale fiscale considère que la preuve d'un comportement intentionnel doit être considérée comme rapportée, lorsqu'il est établi avec une sécurité suffisante que le contribuable était conscient que les informations qu'il a données étaient incorrectes ou incomplètes. Si cette conscience est établie, il faut présumer qu'il a volontairement voulu tromper les autorités fiscales, ou du moins qu'il a agi par dol éventuel afin d'obtenir une taxation moins élevée ; cette présomption ne se laisse pas facilement renverser, car l'on a peine à imaginer quel autre motif pourrait conduire un contribuable à fournir au fisc des informations qu'il sait incorrectes ou incomplètes (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.351/2002 du 5 novembre 2002 ; ATA/614/2008 du 9 décembre 2008 ; ATA/496/2003 du 17 juin 2003).

c. Commet un crime ou un délit par négligence, aux termes de l’art. 18 al. 3 aCP, celui qui, par une imprévoyance coupable, agit sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. L’imprévoyance est coupable quand l’auteur de l’acte n’a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle. L’une des formes particulières de la négligence est la négligence consciente, réalisée lorsque l’auteur envisage le résultat dommageable, mais escompte, par une imprévoyance coupable, que ce résultat, qu’il refuse, ne se produira pas (ATF 96 IV 99). Pour apprécier l’imprévoyance coupable dans le domaine fiscal, l’administration et, cas échéant, le juge, devront tenir compte non seulement des circonstances objectives du cas d’espèce, mais aussi, de tout ce qui constitue, in concreto, la situation personnelle du contribuable, par exemple l’intelligence et les connaissances de celui-ci, sa formation personnelle, sa situation économique et sociale et naturellement sa profession (ATA/30/2009 du 20 janvier 2009 et les références citées).

En l’espèce, la déclaration de 1999 a été établie et signée par le conseiller fiscal, ce qui, outre les montants en cause - CHF 800'000.- ici en lieu et place de CHF 8'000'000.- - distingue ce cas de celui rapporté dans la RDAF 2003 p. 632, où le contribuable avait lui-même signé, et par là même directement attesté de la sincérité et du caractère complet et véridique de ce document. In casu, le recourant n’a pas vérifié cette déclaration, contrairement à ce que l’on peut attendre d’un responsable de société commerciale s’intéressant à l’impact fiscal de ses décisions économiques. Il explique cela par les liens de confiance acquis au fil de sa collaboration avec son conseiller fiscal, d’une part et, d’autre part parce que dernier était au courant de l’augmentation de capital par émission d’actions gratuites. Il n’est pas contesté que cette collaboration ait duré plus de vingt ans et qu’elle n’ait généré aucun problème au niveau fiscal avant cette affaire. Dans ce même contexte, le recourant a transmis le bordereau rectificatif à son conseiller fiscal, qui a réagi immédiatement par le dépôt d’une réclamation après avoir constaté une importante différence au niveau de la valeur des actions. Cette différence était due non seulement à la rectification du nombre d’actions, passé de 200 à 1000 par addition des 800 actions gratuites mais aussi à une modification de leur valeur, ce que le libellé dudit bordereau ne permet pas de constater, puisqu’il n’est pas détaillé ni explicité, seul le chiffre total de la fortune mobilière, composée d'autres éléments, étant modifié. En outre, les 800 actions gratuites n’étaient pas taxables au niveau cantonal pour cette période fiscale. Or, la réclamation relative au bordereau rectificatif ICC 1999 n’a été tranchée que quatre ans après son dépôt, aucune explication de l'AFC-GE n'ayant été reçue dans la procédure de réclamation avant que le contribuable n'ait été informé de l'ouverture de la procédure pénale fiscale pour tentative de soustraction à la taxation IFD. Ni le conseiller fiscal, ni le contribuable n'étaient donc en mesure d'identifier immédiatement le problème et de réagir à la seule lecture du bordereau rectificatif cantonal.

Ainsi, au vu de l’ensemble des circonstances, le tribunal de céans estime que l’on peut retenir à l’encontre du recourant un manquement coupable dans son obligation de vérification de l’activité de son mandataire, obligation qui perdurait nonobstant la confiance existante. En revanche, il n’y a pas d’élément suffisant permettant de conclure à satisfaction de droit que, à supposer que le recourant ait envisagé à un moment donné que son comportement pouvait avoir comme conséquence une soustraction d’impôt, il ait accepté qu’un tel résultat se produise. À cet égard, le fait qu'il s'agisse d'un incident dans l'histoire fiscale d'un contribuable n'ayant jamais posé de problème, le caractère crédible des explications données par le conseiller fiscal dès que ce dernier eut identifié la source de l'erreur, comme de celles fournies en audience de comparution personnelle par le contribuable apparaissent déterminants. L'absence de réponse de l'AFC-GE aux demandes du juge délégué de lui indiquer dans quelles circonstances le dossier du recourant avait été transmis au service du contrôle, empêche de vérifier l'existence d'autres indices permettant de retenir le dol éventuel. Dès lors, on ne peut retenir que la négligence à l'encontre du contribuable, seule en cause ici. C’est le lieu de rappeler que les conséquences des agissements ou omissions fautifs pouvant être reprochés à son conseiller fiscal et/ou à ses auxiliaires sont imputables au recourant pour le paiement de l’impôt dû en application des dispositions sur la représentation (ATA/23/2005 du 18 janvier 2005 et les réf. citées), mais pas pour la détermination de sa responsabilité pénale, qui, conformément au CP, s'apprécie en fonction des caractéristiques et circonstances personnelles de l'auteur (art. 12 à 27 et 47 CP ; art. 10 à 26 et 63 aCP).

6. Le caractère incomplet de la déclaration ayant été découvert avant même que la taxation soit établie, l’AFC-GE a retenu à juste titre une tentative de soustraction (art. 176 al. 1 LIFD). Celle-ci ne pouvant être sanctionnée qu’en cas de comportement intentionnel, le recours sera admis et la décision de la commission comme le bordereau d’amende litigieux seront annulés.

Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de l’AFC-GE et un émolument de CHF 500.- sera mis à celle de l’AFC-CH, qui succombent. Une indemnité de procédure de CHF 3'000.- sera allouée au recourant, à la charge de l’Etat de Genève.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 juin 2007 par Monsieur A______ contre la décision la commission cantonale de recours en matière administrative du 9 mai 2007 ;

préalablemment :

met hors de cause Madame A______ ;

au fond :

admet le recours ;

annule la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 9 mai 2007 ;

annule le bordereau d’amende IFD du 11 juillet 2000 ;

met à la charge de l’administration fiscale cantonale un émolument de CHF 1'000.- ;

met à la charge de l’administration fédérale des contributions un émolument de CHF 500.-

alloue aux recourants une indemnité de CHF 3'000.- à la charge de l’Etat de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jacques Pagan, avocat du recourant, à la commission cantonale de recours en matière administrative, à l’administration fiscale cantonale, ainsi qu’à l’administration fédérale des contributions.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy et Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. a.i.:

 

 

F. Rossi

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :