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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2888/2013

ATA/576/2014 du 29.07.2014 ( FPUBL ) , REJETE

Descripteurs : EMPLOYÉ PUBLIC ; FONCTIONNAIRE ; ENTREPRISE PUBLIQUE ; TRANSPORT PUBLIC ; BUS ; CHAUFFEUR PROFESSIONNEL DE VÉHICULES AUTOMOBILES ; RAPPORTS DE SERVICE ; LICENCIEMENT ADMINISTRATIF ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; CAPACITÉ DE CONDUIRE ; MÉDECIN-CONSEIL ; SECRET PROFESSIONNEL ; LIBERTÉ PERSONNELLE ; ATTEINTE À UN DROIT CONSTITUTIONNEL ; PREUVE ILLICITE ; PROPORTIONNALITÉ
Normes : Cst.29.al2; LCR.14; LCR.31.al2; OCR.2; OOCR-OFROU.34; OAC.7.al1; OAC.11.a; OAC.25; OAC.27; LaLCR.1; Cst.29.al1; CEDH.6; Cst.10.al2; Cst.5.al2
Résumé : Le fait pour un conducteur de bus de présenter, alors qu'il est en service, un taux de THC supérieur à 1,5 µg/l constitue un motif dûment justifié de licenciement au sens du Statut du personnel des TPG du 1er janvier 1999. En l'espèce, les preuves de la consommation de cannabis reprochée au recourant n'ont pas été obtenues illicitement, ce dernier ayant accepté de suivre un sevrage ambulatoire, impliquant des contrôles inopinés itératifs par le médecin-conseil de l'entreprise, respectivement la communication à l'employeur du résultat de ces contrôles. Les TPG ayant proposé et encadré le recourant dans sa tentative de sevrage, ils ont respecté le principe de la proportionnalité. Le recourant n'ayant pas tenu ses engagements, ils n'avaient notamment pas à tenter un reclassement au sein de l'entreprise, avant de le licencier.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2888/2013-FPUBL ATA/576/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 juillet 2014

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Yves Magnin, avocat

contre

TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS
représentés par Me Malek Adjadj, avocat

 



EN FAIT

1) Le 15 avril 1997, Monsieur A______, né le ______1973, a offert ses services de conducteur aux Transports publics genevois (ci-après : TPG).

2) À la demande des TPG, il s’est soumis à un examen médical effectué le 6 juin 1997 par le Dr B______, médecin-conseil de l’entreprise.

Selon le « questionnaire médical d’engagement » rempli par l’intéressé, celui-ci ne consommait pas, ni n’avait consommé de drogues par le passé. Ledit questionnaire était un instrument de travail strictement confidentiel, destiné au médecin-conseil. En cas d’inaptitude ou d’invalidité, son signataire autorisait néanmoins le médecin-conseil à en indiquer les motifs aux TPG.

Lors de l’anamnèse, M. A______ a indiqué au Dr B______ qu’il avait occasionnellement fumé du cannabis durant son adolescence. Il s’est ensuite prêté à une prise de sang et à un prélèvement d’urine, dont les résultats se sont révélés négatifs aux opiacés et au cannabis.

Dans son rapport médical destiné aux TPG, le Dr B______ a déclaré l’intéressé apte pour l’emploi postulé, ainsi qu’à la conduite de véhicules des trois premiers groupes. Dans celui destiné au service des automobiles, devenu depuis lors le service cantonal des véhicules (ci-après : SCV), il a déclaré l’intéressé apte à la conduite des véhicules du 1er groupe (voitures automobiles affectées au transport de personnes, dont le poids total excède 3'500 kg et ayant plus de huit places assises, outre le siège du conducteur et trolleybus) et préconisé une répétition de l’examen d’aptitude tous les cinq ans.

3) Par contrat du 3 juillet 1997, les TPG ont engagé M. A______ en qualité de conducteur à compter du 1er août 1997.

Les rapports de travail étaient régis par le Statut du personnel (ci-après : SP), son règlement d’application et les règlements particuliers (art. 9 du contrat précité).

Les trois premiers mois d’engagement étaient considérés comme temps d’essai, les délais réciproques de congé étant fixés à l’art. 6 du SP. La nomination de l’intéressé interviendrait au terme d’une période probatoire de 15 mois au moins et de trois ans au plus, sous réserve d’un rapport d’activité et d’un deuxième examen médical favorable (art. 7 SP) (art. 1 du contrat).

4) Le 6 octobre 1998, les TPG ont invité M. A______ à se présenter auprès de leur médecin-conseil, le Dr C______, pour un contrôle médical en vue de sa confirmation dans l’entreprise.

5) L’examen médical s’est déroulé le 30 octobre 1998. Dans ses rapports à l’attention des TPG et du SCV, le Dr C______ a déclaré l’intéressé apte à la conduite de véhicules du premier groupe.

6) Le 11 novembre 1998, les TPG ont nommé M. A______ dans sa fonction de conducteur à compter du 1er novembre 1998.

7) Le 8 mars 2002, les TPG ont invité M. A______ à se présenter auprès du Dr B______ pour un contrôle médical agendé au 12 avril 2002. Lors de la visite, un examen d’urine et de sang serait effectué.

Au verso de cette convocation, il était indiqué que l’examen périodique était une exigence du SCV qui se fondait sur la loi pour demander que la capacité de conduire des conducteurs professionnels soit contrôlée tous les trois ou cinq ans selon l’âge. Afin que l’examen médical soit réellement profitable, l’entreprise et ses médecins-conseils avaient proposé d’y inclure une prise de sang dont le but était de permettre un meilleur dépistage des maladies fréquentes. Ces analyses sanguines effectuées, avec l’accord de l’employé, dans le cadre de l’examen médical périodique portaient sur le sucre (pour le dépistage du diabète), le cholestérol et le dosage de l’enzyme « gamma-GT », dont une quantité excessive signifiait un problème de foie. Un contrôle d’urine, permettant de vérifier le fonctionnement des reins, serait pratiqué comme par le passé. Les résultats de ces analyses ne seraient pas communiqués à l’entreprise, mais remis à l’employé et feraient l’objet d’une discussion pendant la consultation.

8) Le 12 avril 2002, le Dr B______ a examiné M. A______ et l’a déclaré apte à la conduite de véhicules du premier groupe par certificat médical destiné au SCV.

9) Le 13 novembre 2006, les TPG ont invité M. A______ à se présenter auprès du Dr B______ pour une visite médicale périodique agendée au 28 novembre 2006. Un examen d’urine et de sang serait pratiqué.

La copie de la convocation figurant au dossier produit par les TPG ne contient toutefois pas les informations quant à la nature des analyses effectuées qui, initialement, devaient figurer au verso.

10) À l’issue de ce contrôle du 28 novembre 2006, le Dr B______ a déclaré M. A______ apte à la conduite de véhicules du 1er groupe par certificat médical destiné au SCV.

Par courrier du même jour adressé au TPG, il a demandé de pouvoir revoir l’intéressé dans les six à huit semaines. En arrêt de travail depuis le 4 septembre 2006 pour une affection orthopédique, l’intéressé se trouvait dans l’attente d’un rendez-vous à la policlinique de chirurgie des HUG. Dans l’intervalle, il pouvait reprendre une activité à 100% sous réserve d’être détaché de la conduite (surveillant de réseau, de chantier ou autre).

11) Le 14 mars 2007, les TPG ont invité M. A______ à se rendre auprès du Dr B______ pour un contrôle médical agendé au 27 mars 2007. L’examen durerait environ une heure et l’intéressé devait prendre les radiographies et rapports médicaux en sa possession.

12) Par courrier du 27 mars 2007, le Dr B______ a rapporté aux TPG ses conclusions d’examen. M. A______ devait subir une intervention orthopédique le 24 avril 2007. Dans l’intervalle, son détachement devait être maintenu, sa capacité à la conduite étant altérée. Lui-même voulait le revoir avant qu’il ne reprenne la conduite.

13) Le 11 juin 2007, le Dr B______ a revu M. A______ en consultation.

Sur le plan orthopédique, la situation clinique évoluait favorablement après l’intervention pratiquée le 24 avril 2007. Sur le plan de la capacité à la reprise de la conduite, la situation médicale n’était pas résolue. Si l’évolution orthopédique le permettait, une reprise du travail devrait tout d’abord se faire dans un secteur détaché. Lui-même voulait revoir l’intéressé dans six à huit semaines.

En post scriptum, le Dr B______ indiquait : « j’ai tenu informé Monsieur A______ quant à l’incompatibilité de la conduite des véhicules des TPG avec la consommation de toxiques ».

14) À une date inconnue de la juridiction de céans, M. A______ a repris son activité de conducteur des véhicules des TPG.

15) Le 20 septembre 2011, le Dr B______ a reçu M. A______ en consultation pour un examen médical périodique.

L’analyse de ses urines a débouché sur un résultat positif aux substances psychotropes.

Par certificat médical dressé le même jour à l’attention du SCV, le Dr B______ a déclaré l’intéressé apte à la conduite de véhicules du 1er groupe.

16) Le 23 septembre 2011, le Dr B______ a écrit aux TPG.

Il apparaissait que M. A______ consommait des substances illicites. Il avait indiqué à l’intéressé que cette situation devait cesser immédiatement et qu’il en informerait son employeur. Il voulait le revoir de façon inopinée dans le courant du mois de décembre 2011/janvier 2012.

17) Le 23 janvier 2012, M. A______ s’est rendu chez le Dr B______ pour un contrôle inopiné.

18) Par courrier du 30 janvier 2012, le Dr B______ a fait savoir aux TPG que le contrôle effectué demeurait positif, ce que l’intéressé ne contestait pas. Il fallait rapidement mettre sur pied une convention avec des contrôles inopinés itératifs de manière à encadrer l’intéressé. Il avait tenu ce dernier informé de ses démarches en ce sens auprès des ressources humaines.

19) Le 3 mai 2012, les TPG se sont entretenus avec M. A______ au sujet des deux derniers contrôles effectués par le Dr B______ et lui ont proposé la conclusion d’une convention d’objectifs.

20) Le 11 juin 2012, M. A______ et les TPG ont signé une convention datée du 1er juillet 2012.

Le premier s’engageait à suivre un sevrage ambulatoire du 1er juillet 2012 au 31 décembre 2012, dans le but de stopper sa consommation de substances psychotropes et de respecter les normes médicales légales auprès d’une institution spécialisée dans le traitement des addictions.

Il s’engageait formellement à (1) effectuer un suivi médical auprès de son médecin traitant, en collaboration avec le Dr B______, (2) se soumettre à des contrôles inopinés itératifs auprès dudit médecin-conseil, afin que les TPG puissent s’assurer de la bonne évolution du suivi mis en place, (3) au terme de la période prévue, effectuer un bilan médical afin que les TPG puissent s’assurer de son aptitude légale à la conduite.

Une décision serait ensuite prise à propos de sa situation dans l’entreprise. En cas d’appréciations satisfaisantes et de maintien de ses aptitudes physiques et psychiques à la conduite d’un véhicule professionnel, un courrier confirmerait la poursuite des rapports de travail. Dans le cas contraire, les TPG se réservaient le droit d’appliquer l’art. 71 SP. L’arrêt unilatéral du suivi médical précité serait considéré comme une rupture de la présente convention.

21) Le même jour, les TPG ont invité M. A______ à se rendre à la consultation du Dr B______ pour un suivi médical agendé au 21 juin 2012.

22) Par courrier du 26 juin 2012, le Dr B______ a informé les TPG du déroulement de la consultation.

M. A______ lui avait confirmé avoir signé une convention avec son employeur, valable à compter du 1er juillet 2012. Pour la troisième fois, ses urines avaient révélé un résultat positif au cannabis. Il proposait donc que l’intéressé soit détaché jusqu’au prochain contrôle médical.

23) Le 29 juin 2012, les TPG ont informé M. A______ de ce qu’il était retiré avec effet immédiat de la conduite jusqu’à son prochain contrôle médical, compte tenu des résultats positifs aux substances psychotropes du 21 juin 2012 et de la convention d’objectifs conclue. Ils tenaient à réaffirmer leur intention de l’aider et de l’accompagner dans sa démarche engageante. En cas d’échec, ils seraient toutefois contraints de prendre les mesures prévues par la convention.

24) Le 10 septembre 2012, M. A______ s’est rendu chez le Dr B______ pour un contrôle inopiné.

25) Par courrier du 11 septembre 2012, le Dr B______ a rapporté aux TPG le résultat de ses observations et analyses.

Les urines de M. A______ présentaient des valeurs normales, de sorte qu’une reprise de la conduite pouvait être envisagée. Comme l’intéressé n’avait toutefois pas eu de contact avec la Fondation Phénix, il se justifiait de poursuivre un suivi avec des contrôles inopinés.

26) Le 24 septembre 2012, les TPG ont réaffecté M. A______ à la conduite.

27) Le 19 novembre 2012, M. A______ s’est rendu chez le Dr B______ pour un contrôle inopiné.

Selon le rapport du médecin-conseil aux TPG du 27 novembre 2012, l’examen clinique et le contrôle des toxiques dans les urines s’étaient révélés parfaitement normaux. Un contrôle inopiné dans les trois mois était préconisé.

28) Le 16 avril 2013, les TPG ont invité M. A______ à se présenter à la consultation du Dr B______ pour un suivi médical agendé au 14 mai 2013.

29) M. A______ a pris des vacances du 27 avril au 5 mai 2013.

30) Lors de la consultation du 14 mai 2013, le Dr B______ a prélevé les urines de l’intéressé. Celles-ci se sont révélées positives au cannabis.

31) Le 23 mai 2013, le Dr B______ a notamment effectué une prise de sang sur M. A______ à des fins d’analyses. Celles-ci ont révélé un taux de Tétrahydrocannabinol (ci-après : THC) de 2,1 µg/l.

32) Par courrier du 10 juin 2013, le Dr B______ a communiqué aux TPG le résultat de ses contrôles.

Les prélèvements urinaires effectués les 14 et 23 mai s’étaient avérés positifs au cannabis. Il en avait informé M. A______ par téléphone du même jour. Les résultats de la prise de sang du 23 mai 2013 lui parviendraient ultérieurement.

33) Par courriel du 30 juillet 2013, le Dr B______ a rapporté aux TPG les résultats d’analyse sanguine de M. A______.

Selon le responsable du laboratoire médical sollicité, la consommation de cannabis de M. A______ était contemporaine, « de quelques jours », à la prise de sang du 23 mai 2013. Dans ces conditions, il proposait que l’intéressé soit écarté de la conduite.

34) Le 5 août 2013, les TPG ont convoqué M. A______ à un entretien, à sa prise de service, pour lui faire part de leur intention de résilier son contrat de travail.

Par courrier remis en mains propres le même jour, ils lui ont confirmé qu’en raison du résultat des contrôles des 14 et 23 mai 2013, ils avaient l’intention de mettre un terme à leurs rapports de travail pour le 30 novembre 2013. Afin de lui « donner » le droit d’être entendu, ils lui laissaient la possibilité de leur faire part, d’ici au 6 août 2013, d’éventuels compléments d’information.

35) A cette même date, les TPG ont suspendu M. A______ de son activité de conducteur.

36) Le 6 août 2013, les TPG ont convoqué M. A______ par téléphone à un nouvel entretien fixé au lendemain. Ils ont confirmé la tenue de cet entretien par courrier du même jour intitulé « décision relative au maintien des rapports de travail », sans parvenir à le lui délivrer à son domicile.

37) Selon le procès-verbal dressé en cette occasion, l’entretien du 7 août 2013 avait lieu dans le cadre du droit d’être entendu suite (1) aux résultats positifs des analyses de consommation de substances incompatibles avec l’exercice du métier de conducteur professionnel communiqués par le médecin-conseil, (2) à l’incapacité de conduire immédiate qui en avait résulté, (3) au fait qu’il s’agissait d’un cas de récidive, alors que les TPG avaient précédemment soutenu M. A______ qui s’était formellement engagé à mettre un terme définitif à sa consommation de substances psychotropes et (4) à l’entretien du 5 août 2013 lors duquel ils avaient informé l’intéressé de son retrait immédiat de la conduite et de leur intention de mettre un terme aux rapports de travail.

À la question de savoir s’il voulait faire usage de son droit d’être accompagné, M. A______ a répondu par l’affirmative, précisant qu’il avait eu un contact téléphonique avec sa protection juridique, dont il attendait des nouvelles. Il a pris note des motifs de l’entretien rappelés ci-dessus et déclaré que les faits rapportés étaient exacts. Il a relevé que l’invitation aux contrôles périodiques n’indiquait pas que le taux de THC serait contrôlé et que c’était suite à ces contrôles que sa consommation occasionnelle, qui n’avait eu lieu que dans le cadre de sa vie privée, avait été dépistée. Il ne s’était pas senti sous pression lors de cette audition, mais il avait eu le sentiment désagréable qu’on le poussait à démissionner. Lorsqu’il avait indiqué à deux reprises qu’il ne voulait pas le faire, le responsable des ressources humaines lui avait en effet demandé s’il avait bien réfléchi aux conséquences.

38) Par décision du même jour, les TPG ont résilié le contrat de travail de M. A______ avec effet au 30 novembre 2013 et l’ont libéré de son obligation de travailler durant le délai de congé. La décision était exécutoire nonobstant recours.

39) Par courrier de son avocat du 4 septembre 2013, M. A______ a fait opposition à son licenciement qu’il considérait comme abusif. Il demandait à ce que les TPG lui délivrent une copie intégrale de son dossier.

40) Par acte du 10 septembre 2013, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision des TPG du 7 août 2013, concluant principalement à son annulation, ainsi qu’à l’octroi d’une indemnité de procédure, subsidiairement, à ce que le caractère injustifié et disproportionné de son licenciement soit constaté et à ce que sa réintégration au sein des TPG soit prononcée, respectivement proposée et, plus subsidiairement encore, au cas où sa réintégration serait refusée, à la condamnation des TPG au paiement en sa faveur d’une indemnité de CHF 66'776.-. Préalablement, il demandait à ce que la chambre administrative ordonne aux TPG et au Dr B______ de produire l’intégralité de leurs dossiers et de lui impartir un délai raisonnable pour compléter son recours.

Son travail avait toujours donné pleine et entière satisfaction aux TPG, ainsi qu’à leurs clients. À l’époque de la conclusion de la convention, il ne consommait du cannabis que de manière occasionnelle, à des fins festives, et uniquement les jours de congé ou de vacances. Il n’avait jamais consommé de cannabis durant les jours de service, ni la veille de ceux-ci. Depuis lors, il avait cessé toute consommation. Durant sa semaine de vacances du 27 avril au 5 mai 2013, soit le 4 mai 2013, il avait participé à la fête d’anniversaire d’un membre de sa famille, lors de laquelle il avait bu de l’alcool plus que de raison et n’avait pas su refuser l’invitation d’un tiers à consommer du cannabis.

Avant de le licencier, les TPG ne lui avaient pas réellement permis d’exercer son droit d’être entendu. Suite à la réunion du 5 août 2013, ils lui avaient imparti un délai échéant le lendemain pour faire valoir son point de vue. Un tel délai ne lui permettait pas d’avoir accès à son dossier, de requérir des mesures d’instruction ou de pouvoir consulter un conseil. Dans ce bref laps de temps, il n’était pas parvenu à se faire accompagner à l’entretien du 7 août 2013, bien qu’il eût contacté sa protection juridique. Dans la mesure où ils envisageaient de procéder à son licenciement ordinaire, les TPG auraient dû reporter cet entretien à une date ultérieure, afin qu’il puisse organiser sa défense. Il était, en principe, susceptible d’exercer son droit d’être entendu dans la procédure de recours, mais ne pouvait en l’espèce le faire que de manière limitée, faute d’avoir eu accès au dossier des TPG et d’avoir pu requérir des mesures d’instruction supplémentaires. Pour ce motif, il se justifiait d’annuler purement et simplement la décision du 7 août 2013.

La question se posait de savoir si les TPG étaient autorisés à faire effectuer par leurs médecins-conseils des dépistages de psychotropes (ou même d’alcool) et à se prévaloir des résultats de ces tests pour licencier un employé. L’obligation de se soumettre à un contrôle médical subséquent, effectué par un médecin-conseil, était prévue par le droit fédéral pour les conducteurs professionnels. Les examens et analyses pratiqués étaient précisément fixés et ne s’étendaient pas à une analyse du sang. Une analyse d’urine n’était en outre pratiquée que pour détecter l’albumine et le diabète. Hormis l’obligation de se présenter à des visites médicales auprès de médecins-conseils, le SP ne donnait aucune précision quant aux modalités de ces visites. Il produisait un exemplaire de la feuille d’information datée du mois d’avril 2007 que les TPG annexaient habituellement à leurs courriers d’invitation à effectuer des contrôles médicaux périodiques auprès de leur médecin-conseil. Ce document indiquait que des examens de sang et d’urine seraient effectués pour analyser le sucre (dépistage du diabète), les cholestérols et le dosage de l’enzyme gamma-GT, respectivement vérifier le bon fonctionnement des reins. Il précisait que les résultats étaient confidentiels et n’étaient pas communiqués à l’entreprise. Il ne mentionnait pas qu’un dépistage de psychotropes aurait lieu.

Des tests visant à découvrir la présence de psychotropes dans le corps d’un employé constituaient une atteinte à la personnalité. Ils ne pouvaient pas être mis en œuvre de manière préventive (contrôles inopinés à titre prophylactique), sauf dans des cas très particuliers et moyennant d’importantes précautions. Des dépistages systématiques violaient le principe de la proportionnalité. Les TPG ne disposaient d’aucune base légale pour procéder à de tels tests. Les résultats obtenus par ce biais constituaient des preuves illicites qui ne pouvaient être utilisées à l’appui d’un licenciement ordinaire pour faute, sauf à violer les garanties offertes par les art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). Les preuves recueillies en l’espèce étaient d’autant plus illicites qu’elles avaient été acquises en violation du secret médical auquel était soumis le Dr B______. Ce dernier avait révélé aux TPG les résultats de ses tests sans son consentement. Il aurait pu éviter une telle infraction, en se limitant à le déclarer inapte ou apte à la conduite.

Son licenciement était injustifié et arbitraire. Sauf exceptions, les directives et instructions particulières qu’un employeur était susceptible de donner à ses travailleurs ne pouvaient en principe pas s’étendre à leur comportement en dehors de leur temps de travail. Dans le SP et les instructions générales d’exploitation du 1er novembre 1997 (ci-après : IGE), les TPG avaient fixé une valeur limite et une présomption de conduite sous l’effet de l’alcool, mais n’avaient rien prévu pour les stupéfiants et en particulier pour le cannabis. L’office fédéral des routes (ci-après : OFROU) admettait qu’à elle seule, une consommation régulière mais contrôlée de cannabis ne diminuait pas nécessairement l’aptitude à conduire. Les habitudes de consommation de chaque individu étaient déterminantes. En raison du faible danger de dépendance au cannabis, une procédure devait être mise en place pour déterminer si l’employé concerné était un fumeur régulier ou occasionnel de cannabis, qui plus est en dehors du travail comme c’était son cas. Une telle procédure permettait d’éviter une inégalité de traitement entre la consommation d’alcool, tolérée dans les limites fixées, et celle de cannabis. Le préposé fédéral à la protection des données et à la transparence l’avait notamment préconisée s’agissant des tests de dépistage effectués en la matière par les Chemins de fers fédéraux (CFF). Si les agissements des employés n’avaient pas d’impact sur la sécurité du trafic, les TPG ne pouvaient pas exiger des personnes testées positivement de s’engager par écrit à ne plus consommer du cannabis pendant leur temps libre, ni à plus forte raison ne pouvaient les licencier pour ce motif.

Son licenciement violait le principe de la proportionnalité. En vertu de ce dernier, un reclassement devait être tenté dès l’instant où les éléments pour un licenciement pour motif fondé étaient établis. L’art. 69 al. 1 SP prévoyait une telle obligation de reclassement. En l’espèce, les TPG avaient implicitement considéré qu’il n’était plus apte à la conduite en raison de sa consommation de cannabis. A supposer que le motif soit avéré, celui-ci était d’ordre médical et aurait donc dû donner lieu à une procédure de reclassement qui n’avait même pas été tentée. Une telle mesure se justifiait d’autant plus que ses états de service avaient été irréprochables durant seize ans et que sa consommation de cannabis exclusivement en dehors du service n’avait eu aucune incidence sur la qualité de ses prestations.

En application de l’art. 72 ch. 1 SP, sa réintégration devait donc être proposée aux TPG. En cas de refus de leur part, ceux-ci devaient être condamnés à lui verser CHF 66'776.- d’indemnité correspondant à huit mois de son traitement brut mensualisé d’environ CHF 8'347.-. Une telle indemnité se justifiait au regard de ses charges familiales (une épouse ne travaillant pas et deux enfants de 11 et 13 ans), de ses excellents états de services et des conséquences extrêmement négatives que la décision querellée aurait sur son avenir professionnel.

41) Par courrier du 26 septembre 2013, M. A______ a saisi la commission de conciliation des TPG. Celle-ci devait inviter les TPG à revenir sur leur décision et à le réintégrer dans ses fonctions.

42) Le 2 octobre 2013, la commission de conciliation des TPG a répondu au recourant. N’ayant pas été déposée dans le délai de recours, sa demande en ouverture d’une procédure de conciliation était tardive. Le sursis à l’instruction de la procédure de recours prévu par l’art. 89 SP ne s’appliquait donc pas. La non-conciliation serait communiquée à la chambre administrative.

43) Le 15 novembre 2013, les TPG ont conclu au rejet du recours et à l’allocation d’une indemnité de procédure.

Ils devaient s’assurer que chaque conducteur était parfaitement apte à exercer sa charge qui consistait dans le transport de nombreux passagers. La sécurité des usagers était une priorité absolue. Conformément aux prescriptions en matière de circulation routière, tous les conducteurs de l’entreprise étaient périodiquement soumis à des examens médicaux pratiqués par un médecin-conseil et destinés à vérifier leur aptitude à la conduite. Il s’agissait de médecins-conseils indépendants, agréés par l’Office fédéral des transports (OFT), ainsi que par le SCV. En fonction des résultats d’examen, deux alternatives étaient possibles : soit les tests étaient bons et le médecin-conseil leur communiquait que l’examiné était apte à poursuivre son activité de conducteur, soit les résultats étaient mauvais et le médecin-conseil devait leur indiquer que l’employé était inapte à la conduite. Dans cette hypothèse, les TPG pouvaient soit réaffecter le conducteur à une autre tâche, soit le licencier.

Le SP prévoyait deux sortes de licenciements. Un licenciement disciplinaire au sens de l’art. 64 let. d SP et un licenciement pour rupture du lien de confiance au sens de l’art. 71 SP. La présente procédure portait sur un licenciement pour rupture du lien de confiance, M. A______ ayant à diverses reprises été contrôlé positif au cannabis, malgré la signature d’une convention d’objectifs aux termes de laquelle il s’était engagé à poursuivre un sevrage ambulatoire et à cesser définitivement sa consommation.

Suite à l’examen médical pratiqué le 20 septembre 2011, le Dr B______ aurait pu leur indiquer sans autre précision que M. A______ était inapte à la conduite, ce qui aurait potentiellement signifié sa mise à pied et son licenciement subséquent. Sur sollicitation du recourant et avec l’accord de ce dernier, il avait préféré leur communiquer que la présence de substances illicites avait été découverte dans les urines du recourant et leur avait recommandé de procéder à un nouveau contrôle inopiné avant de prendre une quelconque mesure. Ils avaient suivi les recommandations de leur médecin-conseil. Le contrôle inopiné du 23 janvier 2012 avait abouti au même résultat. Devant la réitération de la consommation de stupéfiants du recourant, le Dr B______ aurait une nouvelle fois dû le déclarer inapte à la conduite. Devant l’insistance de M. A______ qui craignait pour son emploi, il avait toutefois décidé de lui laisser une nouvelle chance. Avec son accord, il leur avait communiqué les résultats d’analyse et avait proposé la conclusion d’une convention d’objectifs. Celle-ci avait été conclue le 11 juin 2012 et imposait au recourant un sevrage ambulatoire que ce dernier aurait dû effectuer à la Fondation Phénix, institution spécialisée dans le traitement des addictions. Lors du contrôle ordinaire périodique de M. A______ du 21 juin 2012, les résultats des examens pratiqués étaient à nouveau positifs au cannabis, de sorte que le Dr B______ avait demandé que le recourant soit détaché de la conduite, recommandation qu’ils avaient suivie. Suite au contrôle inopiné du 10 septembre 2012, M. A______ avait repris son activité de conducteur. Le prélèvement d’urines effectué lors du contrôle inopiné du 14 mai 2013 et la prise de sang pratiqué le 23 mai 2013 avaient toutefois à nouveau démontré la présence de cannabis dans l’organisme du recourant, de sorte que le médecin-conseil avait recommandé de le détacher immédiatement de la conduite.

Ils avaient respecté le droit d’être entendu du recourant. Avant de procéder à son licenciement ordinaire, ce dernier avait pu s’expliquer à deux reprises, les 5 et 7 août 2013. Lors du premier entretien, ils lui avaient communiqué l’intégralité des griefs qui lui étaient reprochés et lui avaient fait part de leur intention de le licencier. Ils lui avaient ensuite laissé un délai d’un jour pour fournir d’éventuels compléments d’information, faculté dont M. A______ n’avait pas fait usage. Lors du second entretien, l’intéressé avait une nouvelle fois pu s’expliquer oralement. Si la chambre administrative devait néanmoins retenir une violation de son droit d’être entendu, celle-ci devrait être qualifiée de légère et pourrait être réparée dans le cadre de la présente procédure.

Le fait de procéder à une prise de sang était considéré en doctrine comme une atteinte légère à la liberté personnelle, tandis que M. A______ était soumis à un rapport de droit spécial en sa qualité d’employé d’un établissement public. Ces circonstances réduisaient les exigences en matière de base légale. L’art. 27 al. 1 let. a de l’ordonnance réglant l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière du 27 octobre 1976 (OAC - RS 741.51) prescrivait l’obligation pour les conducteurs professionnels de se soumettre à un contrôle médical tous les cinq ans, tandis que l’art. 39 ch. 3 du règlement d’application du statut du personnel du 1er janvier 1999 (ci-après : RSP) imposait aux employés des TPG de se présenter à des visites médicales périodiques auprès de médecins-conseils de l’entreprise. Ces deux bases légales étaient suffisantes pour autoriser les TPG à effectuer des prises de sang sur le recourant. Les contrôles qui avaient permis de mettre en lumière la récidive du recourant avaient en outre été réalisés dans le cadre de la mise en œuvre de la convention d’objectifs. Dans le cadre de celle-ci, M. A______ avait consenti à ce que des prises de sang soient effectuées sur sa personne. Les preuves recueillies par les TPG n’étaient donc pas illicites et justifiaient parfaitement le licenciement. Le Dr B______ n’avait pas violé le secret médical. C’était le recourant qui lui avait demandé de transmettre ses résultats positifs au cannabis à son employeur pour éviter un licenciement. À chaque fois, M. A______ avait délié le médecin-conseil de son secret professionnel. Même à considérer les preuves de sa consommation de cannabis, ils pouvaient en tenir compte, compte tenu de l’intérêt public à la sécurité du trafic.

Il était évident que la consommation de cannabis était incompatible avec le métier de conducteur professionnel, de sorte qu’ils n’avaient pas à instaurer une procédure particulière destinée à déterminer si le recourant était ou non un fumeur occasionnel de cannabis, ni à fixer un seuil de THC à partir duquel l’incapacité de conduire serait présumée. L’art. 4.6 des IGE prévoyait en outre qu’était tenu de s’abstenir de conduire quiconque n’en était pas apte parce qu’il était surmené, sous l’effet de l’alcool, d’un médicament ou d’une drogue. Les TPG avait octroyé une seconde chance au recourant qui n’avait pas honoré ses promesses. M. A______ n’avait pas suivi le traitement ambulatoire au sein de la Fondation Phénix et était finalement retombé dans ses travers. Il avait démontré son incapacité à s’amender et à tenir compte des avertissements qui lui avaient été donnés. Dans ces conditions, ils pouvaient légitimement considérer que le lien de confiance avait été rompu. Ils n’avaient pas d’obligation de tenter un reclassement au sens de l’art. 69 al. 1 SP, dans la mesure où l’inaptitude du recourant à la conduite ne résultait pas d’un motif médical, mais de sa consommation réitérée de cannabis. Ils avaient respecté le principe de la proportionnalité, étant donné que le licenciement n’était intervenu qu’après l’échec de la convention d’objectifs.

Quel que puisse être le sort du recours, ils n’entendaient, sous aucun motif, poursuivre leurs rapports de travail avec le recourant.

44) Le 18 novembre 2013, les TPG ont versé à la procédure le dossier administratif du recourant.

45) Le 21 novembre 2013, le juge délégué a transmis au recourant une copie du courrier des TPG du 18 novembre 2013.

L’instruction de la cause lui apparaissait terminée. Cela étant, il lui impartissait un délai au 19 décembre 2013 pour formuler toute requête complémentaire et/ou exercer son droit à la réplique.

46) Le 19 décembre 2013, M. A______ a persisté dans ses conclusions.

Les explications des TPG concernant les agissements du médecin-conseil étaient fantaisistes et contestées. Le Dr B______ avait recherché puis communiqué aux TPG des données sans l’en informer. Il n’avait jamais eu l’obligation de consulter la Fondation Phénix et avait respecté la convention puisque les résultats des contrôles effectués durant la validité de celle-ci s’étaient avérés négatifs au cannabis. Les TPG n’avaient pas produit le dossier « conducteur » incluant les évaluations, qui se tenaient initialement tous les deux ans, puis tous les ans à compter de 2010, ainsi que les lettres de remerciement ou d’incidents. Les TPG devaient impérativement produire ce dossier afin que la chambre de céans soit en mesure d’apprécier la qualité du travail du recourant durant ses seize années passées à leur service.

47) Le 23 décembre 2013, le juge délégué a ordonnée une comparution personnelle des parties au 27 janvier 2014.

48) Lors de cette audience, M. A______ a confirmé les termes de son recours. En annexe à sa convocation au premier examen médical (celui du 20 septembre 2011), il avait reçu une feuille d’information similaire à celle qu’il avait versée à la procédure. Lors de la consultation, le Dr B______ ne lui avait pas parlé d’une recherche d’opiacés dans les analyses d’urine et de sang auxquelles il allait procéder. Il lui avait ensuite indiqué par téléphone que des traces de haschich avaient été décelées dans ses urines. Lui-même s’était étonné que de telles analyses aient été effectuées. Le Dr B______ lui avait répondu qu’il en avait le droit. Il avait alors expliqué à ce dernier qu’il lui était arrivé de fumer un joint en début de week-end, alors qu’il ne travaillait pas. Le Dr B______ lui avait répondu que sa vie appartenait tout le temps aux TPG et qu’il allait informer
ceux-ci. Il ne s’agissait pas d’une question mais d’une information. À l’époque, il consommait très occasionnellement du haschich, dans des soirées où on lui en proposait. Ce n’était plus le cas désormais. Il n’avait pas pris contact avec la Fondation Phénix, ayant compris que ce serait elle qui allait le convoquer. Après sa première suspension de conduite, son médecin-traitant, le Dr D______ avait fait une analyse d’urines dont le résultat était négatif. S’agissant des analyses effectuées en mai 2013, il était en congé la semaine précédente, raison pour laquelle il avait fait reporter le rendez-vous d’un jour. Le Dr B______ ne lui avait pas parlé d’un éventuel signalement au SCV qui, à sa connaissance, n’était à ce jour toujours pas au courant.

Confirmant ce dernier point, les TPG ont expliqué que le SCV leur avait délégué la gestion des visites médicales de leurs chauffeurs. Ils transmettaient à ce service un certificat final que leur remettait le médecin-conseil. Lorsque ce dernier voulait revoir un conducteur, ils n’informaient pas le SCV du détail de ces démarches. Ils recevaient un rapport qui déclarait leur chauffeur apte ou inapte et, cas échéant, une information avec l’accord de la personne concernée concernant des investigations supplémentaires menées par le médecin-conseil. Cet accord devait être demandé et obtenu par ce dernier. Leurs médecins-conseils effectuaient des consultations conformes aux directives de l’OFROU.

49) Le 30 janvier 2014, le juge délégué a ordonné la tenue d’une audience d’enquêtes et de comparution personnelle des parties au 10 février 2014.

50) Le 6 février 2014, M. A______ a délié le Dr B______ de son secret médical en ce qui concernait sa consommation de cannabis uniquement.

51) Lors de l’audience du 10 février 2014, le Dr B______ a été auditionné en qualité de témoin et a été délié de son secret médical par le recourant concernant tous les éléments relatifs à sa conduite professionnelle et à la présente procédure.

Il connaissait le recourant depuis 1997, époque à laquelle il avait pratiqué l’examen médical nécessaire à son engagement. M. A______ avait indiqué dans le questionnaire n’avoir jamais consommé de cannabis. Lors de l’anamnèse, il lui avait néanmoins indiqué avoir consommé ce produit durant son adolescence. L’analyse de ses urines s’était révélée négative. Il avait régulièrement abordé ce thème avec le recourant lors des examens médicaux ultérieurs. Une analyse d’urines était systématiquement effectuée au cours de ceux-ci pour le dépistage du cannabis. Lors de chacun des contrôles de M. A______, il lui avait annoncé qu’un dépistage de cannabis aurait lieu.

Lors de l’examen périodique de 2006, le prélèvement d’urines s’était révélé positif au cannabis. À l’époque, M. A______ ne conduisait pas de véhicules pour d’autres motifs. Lui-même n’avait dès lors pas à réagir auprès des TPG. Il avait toutefois demandé à revoir M. A______ six semaines plus tard, consultation qui avait finalement eu lieu le 27 mars 2007. À cette époque, le recourant devait subir une intervention chirurgicale et ne conduisait donc pas. Il avait revu M. A______ en juin 2007. Lors de cette consultation, celui-ci lui avait indiqué avoir fumé du cannabis à deux reprises dans les dix jours précédents. Après en avoir parlé avec le recourant, il en avait informé les TPG et leur avait demandé de revoir celui-ci dans les six à huit semaines, mais cela ne s’était pas fait. Il n’avait pas autorisé la reprise de la conduite. En 2011, il avait revu M. A______, qui avait repris la conduite, pour un contrôle périodique. L’intéressé lui avait indiqué qu’il ne consommait plus de cannabis depuis 2007. Le contrôle de ses urines était toutefois positif. Il avait communiqué ces résultats aux TPG le 23 septembre 2011, après en avoir informé M. A______ la veille, par téléphone. Lors du contrôle inopiné du 23 janvier 2012, le recourant avait admis avoir consommé du haschich occasionnellement, c’est-à-dire avec des copains, pour la dernière fois deux semaines auparavant. L’analyse de ses urines, qui, selon le laboratoire, étaient très diluées, avait donné un résultat positif. Il avait donc proposé aux TPG de conclure une convention avec M. A______ pour assurer son abstinence par des contrôles inopinés et un soutien par la Fondation Phénix. Lors des contrôles de septembre et de novembre 2012, les analyses étaient négatives et les urines non diluées. Il avait revu M. A______ pour une analyse inopinée en mai 2013. Ses urines étaient diluées et le contrôle positif. Il lui avait donc demandé de repasser quelques jours après pour répéter cette analyse et faire une prise de sang. Le 23 mai 2013, l’analyse de ses urines, qui étaient diluées, était à nouveau positive. Selon les informations fournies par le laboratoire, l’analyse sanguine révélait un taux de THC de 2,1 µg/l, ce qui correspondait à une consommation datant de quatre à cinq jours.

Les recherches dans les urines indiquaient uniquement la présence ou l’absence du produit. Les analyses sanguines permettaient en revanche de déterminer un taux et un calendrier de consommation. Les analyses d’urine pouvaient demeurer positives jusqu’à trois mois après la consommation de cannabis. Les unes comme les autres donnaient des indications ponctuelles, mais ne fournissaient pas d’information sur les habitudes de consommation.

Avec l’accord du recourant, le Dr B______ a versé à la procédure une copie de son courrier du 12 juin 2007, les résultats d’analyse du laboratoire médical consulté, ainsi que le questionnaire rempli lors de l’embauche dont il ressortait, à son sens, que M. A______ l’avait autorisé à transmettre aux TPG les éventuels motifs d’inaptitude à la conduite.

52) Le 13 mars 2014, M. A______ a versé à la procédure les résultats d’analyse de laboratoire que son médecin-traitant avait fait effectuer les 4 juillet 2012 et 5 mars 2014. Lesdits résultats étaient négatifs au cannabis.

53) Le 16 avril 2014, les TPG ont transmis leurs observations finales, persistant dans leurs conclusions du 15 novembre 2013.

Comme tous leurs employés, le recourant avait signé le questionnaire médical d’engagement et avait, ce faisant, consenti à ce que le médecin-conseil leur transmette les motifs à l’origine d’une inaptitude à la conduite. Le recourant avait admis ne pas avoir pris contact avec la Fondation Phénix, alors qu’il s’y était engagé. Dès 2006, le problème du recourant relatif à la consommation de cannabis avait été détecté. Il s’avérait que M. A______ avait consommé du cannabis durant son adolescence, consommation qui n’avait pas cessé par la suite puisqu’il avait été contrôlé positif à six reprises sur une période de huit ans. Une telle addiction était incompatible avec le métier de chauffeur professionnel. Lors de chaque examen médical, le médecin-conseil avait indiqué qu’un prélèvement urinaire et/ou sanguin destiné à déceler la présence de cannabis serait pratiqué, ce à quoi le recourant ne s’était pas opposé. Celui-ci avait donc consenti à ces examens.

Pour le reste, ils reprenaient leur précédente argumentation tendant au rejet du recours.

54) Le 2 mai 2014, M. A______ a également persisté dans ses précédents motifs et conclusions.

Le Dr B______ ne faisait pas partie de la liste des médecins-conseils du SCV, publiée à l’adresse. Les analyses médicales à l’origine de son licenciement avaient été effectuées en violation des procédures définies par les loi et règlements sur la circulation routière. Ceux-ci prescrivaient que de tels prélèvements ne pouvaient être ordonnés que par des autorités définies selon des procédures particulières et dont les résultats devaient être délivrés par des laboratoires agréés. A ce titre également, la faute invoquée à l’appui du licenciement ordinaire du recourant reposait donc sur des preuves illicites, la décision querellée étant contraire au droit.

Contrairement aux engagements et aux indications clairs donnés à leurs employés, les TPG avaient admis procéder systématiquement à la recherche de substances psychotropes. Dans son cas, le médecin-conseil l’avait fait sans l’en informer et avait, de surcroît, communiqué les résultats de ses analyses aux TPG, sans avoir été délié de son secret médical. Le Dr B______ avait soutenu le contraire, comme le commandaient ses intérêts, mais il n’avait pas pu produire le moindre document pour l’attester. La formule utilisée dans son post scriptum du 12 juin 2007 infirmait par ailleurs sa thèse. L’on voyait au demeurant mal ce qui aurait pu le conduire à accepter librement et d’une manière éclairée la communication d’informations non obligatoires et négatives le concernant à son employeur. Il ressortait de la procédure que sa consommation de cannabis n’avait été qu’occasionnelle. Il avait respecté la convention durant sa période de validité. Il ne consommait plus de cannabis et était prêt à subir toute expertise que la chambre de céans estimerait utile.

55) Le 5 mai 2014, le juge délégué a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) La chambre administrative est l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Sauf exceptions prévues par la loi, elle statue sur les recours formés contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4a, 5, 6 al. 1 let. a et e et 57 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10 ; art. 132 al. 2 LOJ). Sont notamment réputées autorités administratives au sens de l’art. 1 LPA, les corporations et établissements de droit public (art. 5 let. e LPA). Le délai de recours est de 30 jours s’il s’agit d’une décision finale ou d’une décision en matière de compétence (art. 62 al. 1 let. a LPA). Il ne court pas du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 63 al.1 let. b LPA). Lorsque le dernier jour du délai tombe un samedi, un dimanche ou sur un jour légalement férié, il est reporté au premier jour utile (art. 17 al. 3 LPA).

établissement de droit public autonome dans les limites fixées par la loi sur les transports publics genevois du 21 novembre 1975 (LTPG - H 1 55), les TPG sont une autorité administrative au sens de l’art. 5 let. e LPA. Les rapports de travail les liant à leurs employés sont soumis au droit public en vertu de
l’art. 2 SP. Par décision du 7 août 2013, les TPG ont en l’espèce licencié le recourant avec effet au 30 novembre 2013. Compte tenu de la suspension des délais mentionnée ci-dessus et du mécanisme de report au premier jour utile, M. A______ pouvait recourir contre cette décision jusqu’au 16 septembre 2013. Remis à la poste le 9 septembre 2013 à l’attention de la juridiction compétente, le recours est, partant, recevable.

2) Le recourant se plaint de n’avoir pas pu valablement exercer son droit d’être entendu, avant que la décision querellée ne soit rendue. Une réparation de ce vice au cours de la présente procédure n’aurait pas eu lieu, faute pour les TPG de n’avoir pas produit le dossier contenant les évaluations le concernant qui auraient seules permis d’apprécier la qualité de son travail durant les seize années qu’il a passées à leur service.

a. Le droit d’être entendu est une garantie de nature formelle dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l'autorité de recours n'est pas possible, l'annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2 p. 197 ; 133 III 235 consid. 5.3 p. 250 ; ATA/276/2012 du 8 mai 2012 consid. 2 et arrêts cités). Ce moyen doit par conséquent être examiné en premier lieu (ATF 137 I 195 consid. 2.2 p. 197). Sa portée est déterminée par le droit cantonal (art. 41 ss LPA) et le droit administratif spécial (ATF 126 I 15 consid. 2 p. 16; 124 I 49 consid. 3a p. 51 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_11/2009 du 31 mars 2009 ; 2P.39/2006 du 3 juillet 2006 consid. 3.2). Si la protection prévue par ces lois est insuffisante, ce sont les règles minimales déduites de la Constitution de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) qui s’appliquent (arrêt du Tribunal fédéral 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.1 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, Genève-Zurich-Bâle 2011, p. 509 n. 1526 ; Andreas AUER/ Giorgio MALINVERNI/ Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, Berne 2006, Vol. 2, 2ème éd., p. 603 n. 1315 ss).

La décision querellée n’a pas été prise au terme de la procédure disciplinaire prévue par les art. 64 ss SP, lesquels offrent des garanties particulières en matière de droit d’être entendu (art. 67 SP). Le recourant a fait l’objet d’un licenciement ordinaire pour motif justifié au sens de l’art. 71 SP, disposition qui ne contient pas de réglementation spécifique quant à l’exercice, par l’employé, de son droit d’être entendu. Il convient donc de se référer aux règles minimales déduites de
l’art. 29 al. 2 Cst., les art. 41 et suivants LPA n’offrant pas de garanties supplémentaires.

b. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 138 II 252 consid. 2.2 p. 255; arrêts du Tribunal fédéral 8C_866/2010 du 12 mars 2012 c. 4.1.1 ; 8C_643/2011 du 9 mars 2012 c. 4.3 et réf. citées ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; ATA/276/2012 du 8 mai 2012 consid. 2 et les arrêts cités).

c. En matière de rapports de travail de droit public, des occasions relativement informelles de s’exprimer avant le licenciement peuvent remplir les exigences du droit constitutionnel d’être entendu, pour autant que la personne concernée ait compris qu’une telle mesure pouvait entrer en ligne de compte à son encontre (SJ 2013 I 55 consid. 4.1.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_560/2008 du 6 avril 2009 et 1C_103/2007 du 7 décembre 2007 consid. 5.3). La personne concernée ne doit pas seulement connaître les faits qui lui sont reprochés, mais doit également savoir qu’une décision allant dans une certaine direction est envisagée à son égard (arrêt du Tribunal fédéral 8C_269/2013 du 25 févier 2014 ; 8C_158/2009 du 2 septembre 2009 consid. 5.2 non publié aux ATF 136 I 39 ; 8C_643/2011 du 21 juin 2011 consid. 4.3 et les arrêts cités).

d. La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 p. 197 s. ; 133 I 201 consid. 2.2 p. 204 ; 132 V 387 consid. 5.1 p. 390 ; 129 I 129 consid. 2.2.3 p. 135 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_306/2012 du 18 juillet 2012 ; 1C_572/2011 du 3 avril 2012 consid. 2.1 et références citées ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 8C_104/2010 du 29 septembre 2010 consid. 3.2 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; 1C_104/2010 du 29 avril 2010 consid. 2 ; ATA/304/2013 du 14 mai 2013; ATA/192/2012 du 3 avril 2012 ; Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, ch. 2.2.7.4 p. 322 et 2.3.3.1 p. 362 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., p. 516 s. n. 1553 s.). Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 126 I 68 consid. 2 p. 72 et la jurisprudence citée ; arrêts du Tribunal fédéral précités) ; elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure qui serait incompatible avec l’intérêt de la partie concernée à un traitement rapide de la cause (ATF 133 I 201 consid. 2.2 p. 204 ; 132 V 387 consid. 5.1 ; ATA/197/2013 du 26 mars 2013). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/304/2013 précité).

e. Une décision entreprise pour violation du droit d’être entendu n’est en principe pas nulle mais annulable (ATF 136 V 117 ; 133 III 235 consid. 5.3 p. 250 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3 ; 1C_568/2011 du 13 février 2012 consid. 3 ; ATA/304/2013 du 14 mai 2013 consid. 4 ; ATA/862/2010 du 7 décembre 2010 consid 2 et arrêts cités). D'après la jurisprudence, la nullité d'une décision n'est admise que si le vice dont elle est entachée est particulièrement grave, est manifeste ou du moins facilement décelable et si, en outre, la constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit (ATA/149/2013 précité ; ATA/386/2011 du 21 juin 2011 et les références citées ; Thierry TANQUEREL, op. cit., p. 310, n. 910).

3) En l’espèce, M. A______ a conclu une convention avec son employeur le 11 juin 2012 selon laquelle il s’engageait à suivre un sevrage ambulatoire du 1er juillet 2012 au 31 décembre 2012 dans le but de stopper sa consommation de substances psychotropes. Cette convention prévoyait expressément qu’au terme de cette période, son aptitude à la conduite serait réévaluée et que les TPG se réservaient, cas échéant, le droit d’appliquer l’art. 71 SP, soit de mettre fin aux rapports de travail. Lors de la consultation médicale du 14 mai 2013, les urines du recourants se sont révélées positives au cannabis. Il en est allé de même du prélèvement sanguin effectué le 23 mai 2013, ce dont le recourant a été informé par le médecin-conseil. Compte tenu de la convention conclue, M. A______ ne pouvait pas ignorer que ces résultats seraient communiqués à son employeur, ni qu’ils pourraient conduire à son licenciement.

A l’entretien du 5 août 2013, les TPG ont clairement informé le recourant des griefs qui lui étaient reprochés, comme de leur intention de le licencier. Ils lui ont donné la faculté de fournir des explications supplémentaires jusqu’au lendemain et se sont à nouveau entretenus avec lui le 7 août 2013, séance au terme de laquelle ils ont rendu la décision querellée. Alors qu’il ne contestait pas les faits qui lui étaient reprochés, le recourant a donc pu faire valoir son point de vue en deux occasions, avant que son licenciement ne soit prononcé.

L’on pourrait tout au plus reprocher aux TPG, qui envisageaient un licenciement ordinaire avec effet au 30 novembre 2013, de n’avoir pas repoussé l’entretien du 7 août 2013, alors que le recourant leur avait fait savoir qu’il souhaitait faire usage de son droit d’être accompagné, mais qu’il n’était pas parvenu à obtenir les services d’un avocat dans le court délai imparti.

Dût-elle être admise que cette violation du droit d’être entendu aurait néanmoins été réparée au cours de la présente procédure. La chambre administrative ne peut certes pas revoir l’opportunité des décisions qui lui sont soumises (art. 61 al. 2 LPA), son pouvoir d’examen étant limité à la violation du droit (y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation) et à la constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). Dans la présente espèce, la question litigieuse consiste toutefois à déterminer si les TPG disposaient d’un motif dûment justifié au sens de l’art. 71 SP pour licencier le recourant. Or, il s’agit d’une notion, certes indéterminée, mais néanmoins juridique à l’égard de laquelle le chambre administrative dispose d’un plein pouvoir d’examen, dans la mesure où elle a elle-même procédé à des mesures d’instruction.

En cours de procédure, les TPG ont produit le dossier administratif du recourant que ce dernier a pu consulter avec l’assistance de son avocat. M. A______ s’est en outre déterminé à plusieurs reprises, par écrit et en audience de comparution personnelle des parties, sur les faits de la cause. La chambre de céans a également recueilli le témoignage du Dr B______, procédant à une instruction complète du complexe de faits litigieux. S’agissant de la qualité des prestations fournies par le recourant dans l’exercice de sa tâche, elle n’est pas contestée par les TPG, de sorte que la chambre de céans la tiendra pour établie, sans qu’il soit nécessaire d’ordonner l’apport des pièces y relatives, encore en mains de l’intimée.

Pour ces motifs, le grief du recourant en violation de son droit d’être entendu sera rejeté.

4) Conducteur professionnel, le recourant est soumis à la législation en matière de circulation routière. Au moment où la décision querellée a été rendue, cette réglementation avait la teneur suivante, compte notamment tenu de l’entrée en vigueur au 1er janvier 2013 des modifications à la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), adoptées le 15 juin 2012 (RO 2012 6291 ; FF 2010 7703) :

a. D’une manière générale, tout conducteur de véhicule automobile doit posséder l’aptitude et les qualifications nécessaires à la conduite (art. 14 al. 1 LCR). Est apte à la conduite celui qui, notamment, ne souffre d’aucune dépendance qui l’empêche de conduire un véhicule automobile en toute sécurité (art. 14 al. 2 let. c LCR). Toute personne qui n’a pas les capacités physiques et psychiques nécessaires pour conduire un véhicule parce qu’elle est sous l’influence de l’alcool, de stupéfiants, de médicaments ou pour d’autres raisons, est réputée incapable de conduire pendant cette période et doit s’en abstenir (art. 31 al. 2 LCR).

b. Selon l’art. 2 al. 1 de l’ordonnance sur les règles de la circulation routière du 13 novembre 1962 (OCR - RS 741.11), est tenu de s’abstenir de conduire quiconque n’en est pas capable parce qu’il est surmené, sous l’effet de l’alcool, d’un médicament, d’un stupéfiant ou pour toute autre raison. L’alinéa 2 let. a de cette même disposition précise qu’un conducteur est réputé incapable de conduire chaque fois qu’il est prouvé que son sang contient du tétrahydrocannabinol (cannabis). En application de l’art. 2 al. 2bis OCR, l’OFROU a édicté, après entente avec les experts, des directives sur la preuve de la présence de cette substance. Selon l’art. 34 de l’ordonnance de l’OFROU concernant l’ordonnance sur le contrôle de la circulation routière du 28 mai 2008 (OOCCR-OFROU - RS 741.013.1), la présence de stupéfiants au sens de l’art. 2 al. 1 OCR est considérée comme prouvée lorsque leur quantité dans le sang atteint ou dépasse la valeur de 1,5 µg/l s’agissant du THC.

c. Aux termes de l’art. 7 al. 1 de l’ordonnance réglant l’admission des personnes et des véhicules à la circulation routière du 27 octobre 1976 (OAC - RS 741.51), tout candidat au permis d’élève conducteur, au permis de conduire ou à une autorisation de transporter des personnes à titre professionnel doit satisfaire aux exigences médicales de l’annexe 1. Le transport professionnel de personnes est en effet sujet à autorisation en vertu de l’art. 25 OAC. Selon l’art. 11a al. 1 let. b OAC, un examen effectué par un médecin-conseil ou un institut spécialisé à désigner par l’autorité cantonale est nécessaire pour les candidats à une autorisation de transporter des personnes à titre professionnel au sens de
l’art. 25 OAC. Le premier examen effectué par un médecin-conseil porte sur les points énumérés dans le certificat médical figurant à l’annexe 2. Son résultat est communiqué à l’autorité cantonale au moyen de la formule prévue à l’annexe 3 (art. 11 a al. 2 OAC). L’annexe 2 précitée énumère les différents points sur lequel l’examen médical doit porter, dont une analyse d’urine pour déceler l’albumine et le diabète. Une prise de sang n’est pas expressément prévue. Le rapport médical destiné à l’autorité cantonale compétente prévu à l’annexe 3 consiste à déclarer le candidat « apte » ou « inapte » à la conduite des véhicules concernés.

d. En outre, les titulaires d’une autorisation de transporter des personnes à titre professionnel ont, tous les cinq ans jusqu’à leur 50ème année, puis tous les trois ans, l’obligation de se soumettre à un contrôle subséquent effectué par un médecin-conseil (art. 27 al. 1 let. a ch. 2 OAC). À nouveau, l’examen fait par un médecin-conseil doit s’étendre aux points prévus par l’annexe 2 (certificat médical) et les résultats doivent être communiqués à l’autorité cantonale au moyen de la formule prévue à l’annexe 3 (art. 27 al. 3 OAC).

e. À Genève, c’est le département de l’environnement, des transports et de l’agriculture, soit pour lui le SCV, qui est compétent en matière de circulation routière (art. 2 al. 1 de la loi d’application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05). Le SCV a publié sur son site Internet une liste de médecins-conseils (disponible sur http://ge.ch/vehicules/permis-de-conduire-et-permis-eleve/medecins-conseil), dont le Dr B______ ne fait pas partie.

Selon les TPG, le SCV leur aurait délégué la mission de contrôler l’aptitude des conducteurs professionnels travaillant à leur service. L’on ne trouve toutefois pas trace d’une telle délégation ni dans la LaLCR, ni dans la LTPG. Examiner la légalité de cette délégation de tâches ou de la façon dont les TPG les assument concrètement, par l’intermédiaire de leurs médecins-conseils, sortirait toutefois du cadre de présent litige. Celui-ci consiste uniquement à déterminer si, en sa qualité d’employeur, les TPG pouvaient licencier le recourant pour les motifs invoqués dans sa décision du 7 août 2013.

5) a. Selon l’art. 71 SP, les TPG peuvent mettre fin aux rapports de service de leurs employés pour des motifs dûment justifiés en respectant les délais de congé (al. 1). Est considéré comme dûment justifié, tout motif démontrant que la poursuite des rapports de service n’est pas, objectivement, dans l’intérêt du bon fonctionnement de l’entreprise (al. 2). Aucun motif abusif, au sens de l’art. 336 de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations (CO - RS 220), ne peut être considéré comme justifié.

Cette clause équivaut au licenciement pour motif fondé prévu par les art. 21 al. 3 et 22 de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05). Comme pour les fonctionnaires de l’administration cantonale (MGC 2006-2007/VI A 4529 et MGC 2005-2006/XI A 10420), elle n’impose pas aux TPG de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue difficile, mais uniquement qu’elle n’est plus compatible avec le bon fonctionnement de l’entreprise. L’intérêt public au bon fonctionnement des TPG sert en effet de base à la notion de motif dûment justifié qui doit exister pour justifier un licenciement en application de l’art. 71 SP.

b. Le SP n’énumère pas tous les devoirs de service incombant aux employés affectés à la conduite de véhicules. Il prescrit notamment que ceux-ci ne doivent pas consommer de boissons alcooliques pendant le travail et les six heures qui précèdent celui-ci (art. 8 al. 3 SP). L’obligation de se soumettre à des contrôles médicaux périodiques ressort quant à elle de l’art. 39 al. 3 RSP. À teneur de cette disposition, les visites médicales auprès des médecins-conseils de l’entreprise, y compris les visites périodiques, CVS et ceux ordonnés par la division des ressources humaines, sont pris en charge par l’entreprise. Ils sont fixés, dans la mesure du possible, durant les heures de travail. Les examens complémentaires ordonnés par les médecins-conseils sont pris en charge par l’entreprise. À l’art. 2.2.8 des IGE, il est également prévu que les visites médicales périodiques ordonnées par le SCV sont prises en charge par les TPG et gérées par le bureau du personnel. Les IGE rappellent ensuite les principales règles en matière de circulation routière, dont celles relatives à la maîtrise du véhicule au sens de l’art. 31 al. 2 LCR et à l’état du conducteur selon l’art. 2 OCR (ch. 4.4 et 4.6 IGE).

En l’espèce, il n’est pas contesté que les urines du recourant contenaient des traces de cannabis le 14 mai 2013, alors qu’il était en service. Le fait que le 23 mai 2013, alors qu’il était à nouveau affecté à la conduite de véhicules, son organisme ait présenté un taux de THC de 2,1 µg/l, soit supérieur à la limite de 1,5 µg/l fixée par l’art. 34 OOCCR-OFROU, n’est de même pas litigieux. Selon le laboratoire médical, cela correspondait à une consommation contemporaine de 4 à 5 jours, soit postérieure aux vacances du recourant durant lesquelles il a admis avoir fumé du cannabis.

Constitutif d’infraction aux art. 31 al. 2 LCR et 2 OCR, le comportement du recourant représentait incontestablement un motif dûment justifié de licenciement au sens de l’art. 71 SP. La résiliation de son contrat de travail se justifiait d’autant plus que le recourant s’était précédemment engagé vis-à-vis des TPG à ne plus consommer de cannabis, à tout le moins dans une mesure incompatible avec ses devoirs de conducteur professionnel. Le motif invoqué était en outre susceptible de porter un grave préjudice à son travail dans l’entreprise, de sorte qu’il n’est pas abusif au sens de l’art. 336 CO.

6) M. A______ soutient que les preuves de sa consommation de cannabis
au-delà de la limite légale autorisée auraient toutefois été recueillies illicitement, soit en violation de sa liberté personnelle et du secret médical, de sorte qu’elles ne pourraient pas fonder son licenciement.

a. La LPA ne règle pas le sort des preuves obtenues illégalement. Pour la doctrine, la problématique doit être traitée en relation avec le principe du procès équitable inscrit à l’art. 29 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH. Selon certains auteurs, les preuves obtenues par des moyens illégaux ne peuvent être utilisées que si elles auraient pu être recueillies d’une façon légale ou si un intérêt public important le justifie (Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2000, p. 190 ; Pierre MOOR / Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., 2011, p. 297). D’autres précisent que les moyens de preuve obtenus sans respecter des prescriptions d’ordre doivent faire l’objet d’une pesée d’intérêts pour être exploités : il s’agit de mettre en balance, d’une part, l’intérêt public à la manifestation de la vérité et, d’autre part, l’intérêt de la personne concernée à ce que le moyen de preuve ne soit pas exploité (Christoph AUER, Kommentar zum Bundesgesetz über das Vervaltungsverfahren, 2008, ad art. 12 PA). D’autres, enfin, plaident pour une application analogique des règles très détaillées contenues à l’art. 141 du code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP - RS 312.0), lesquelles seraient l’expression du procès équitable selon l’art. 29 al. 1 Cst. (voir les références doctrinales citées au consid. 3.1 de l’ATF 139 II 95). En procédure civile, le législateur n’a pas renvoyé au système prévu pour la procédure pénale, mais a opté pour une formulation laissant au juge un large pouvoir d’appréciation. À teneur de l’art. 152 al. 2 du code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272), le tribunal ne prend en considération les moyens de preuve obtenus de manière illicite que si l’intérêt à la manifestation de la vérité est prépondérant.

b. S’agissant du Tribunal fédéral, il déduit du droit à un procès équitable l’interdiction de principe d’utiliser des preuves acquises illicitement (ATF 139 II 7 résumé in SJ 2013 I 179 ; ATF 136 V 117 consid. 4.2.2). L’exclusion de tels moyens n’est toutefois pas absolue, le juge devant opérer une pesée des intérêts en présence (ATF 131 I 272 consid. 4). Ces règles sont également applicables aux procédures régies par la maxime d’office, telle la présente procédure (art. 19 LPA). L’utilisation de moyens de preuves acquis en violation de la sphère privée ne doit en outre être admis qu’avec une grande réserve (ATF 139 II 7 résumé in SJ 2013 I 179 ; ATF 120 V 435 consid. 3b).

c. Un prélèvement urinaire et une prise de sang constituent des atteintes à la liberté personnelle qui protège l’intangibilité du corps humain en tant qu’élément central de la dignité humaine (art. 10 al. 2 Cst. ; Andreas AUER / Giorgio MALINVERNI / Michel HOTTELIER, op. cit., p. 149, n. 327 et les références jurisprudentielles citées).

d. De telles atteintes ne sont conformes à la Constitution que si elles reposent sur une base légale (art. 36 al. 1 Cst.) ou si elles sont consenties par la personne qui en fait l’objet (cf. art. 28 al. 2 CC s’agissant des rapports de droit privé). Elles doivent en outre répondre à un intérêt public ou à la protection d’un droit fondamental d’autrui (art. 36 al. 2 Cst.) et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.). L’accord de la personne concernée est libre et éclairé s’il est donné à la suite d’une information objective et complète quant à la nature de l’intervention pratiquée, en l’absence de toute pression de tiers (Andreas AUER / Giorgio MALINVERNI / Michel HOTTELIER, op. cit., p. 149, n. 328).

e. L’exigence de la base légale varie en fonction de l’intensité de l’atteinte en cause. Lorsque cette dernière est grave, elle doit être clairement et nettement prévue dans une loi au sens formel, tandis qu’en cas d’atteinte légère, une base légale matérielle peut suffire (Andreas AUER / Giorgio MALINVERNI / Michel HOTTELIER, op. cit., p.86-87, n. 190 et 191). Il en va de même lorsqu’il est question de restreindre la liberté de personnes qui, comme le recourant en sa qualité d’employé d’un établissement de droit public, se trouvent dans un rapport de droit spécial vis-à-vis de l’état (Andreas AUER / Giorgio MALINVERNI / Michel HOTTELIER, op. cit., p. 92 ss, n. 201). En toute hypothèse, l’essence de la liberté en cause doit néanmoins être préservée (art. 36 al. 4 Cst.)

7) Selon les déclarations du médecin-conseil des TPG, les prélèvements d’urines et prises de sang qu’il a effectués lors des différents contrôles périodiques ou inopinés du recourant, ont systématiquement fait l’objet d’analyses destinées à dépister la présence de cannabis dans son organisme. De telles atteintes à la liberté personnelle du recourant visaient incontestablement à sauvegarder la santé publique, respectivement permettaient seules de garantir son aptitude à la conduite, compte tenu des antécédents dont l’intéressé avait fait part lors de l’anamnèse.

Force est toutefois constater qu’elles n’étaient prévues par aucune base légale. La législation en matière de circulation routière soumet les conducteurs qui transportent des personnes à titre professionnel à des contrôles médicaux (art. 27 al. 1 let. a ch. 2 OAC), au cours desquels une analyse d’urine doit être effectuée. Celle-ci ne sert toutefois qu’à déceler l’albumine et le diabète (cf. annexe 2 à l’OAC). Ces dispositions ne constituent donc pas une base légale autorisant les TPG ou leurs médecins-conseils, sur « délégation » du SCV, à procéder à un dépistage systématique de drogues ou d’autres substances psychotropes dans les urines ou le sang de leurs conducteurs. En l’état, le droit fédéral soumet ceux-ci au même régime que les conducteurs ordinaires, lesquels ne peuvent être astreints à un contrôle d’urine ou à une prise de sang destinés à détecter la consommation de stupéfiants que s’ils présentent des indices laissant présumer une incapacité de conduire (cf. art. 55 LCR ; ATF 139 II 95 consid. 2.1 à 2.2).

Le SP, son règlement d’application ou les IGE ne prévoient pas plus l’obligation pour les conducteurs des TPG de se soumettre à un dépistage de drogues ou d’autres substances psychotropes lors des contrôles périodiques chez le médecin-conseil. Les informations, que les TPG transmettent à leurs employés lorsqu’ils les convoquent à ces contrôles, n’en font de même nullement état. Dans leur teneur d’avril 2007, elles indiquent certes qu’une prise de sang est effectuée, mais en limitent l’analyse au « sucre (pour le dépistage du diabète), [aux] cholestérols (dont l’excès conduit à des maladies cardiaques) et [au] dosage d’une enzyme appelé “gamma-GT”, dont une quantité excessive dans le sang est signe d’un problème de foie ». Si cette dernière enzyme permet notoirement de déceler une consommation excessive d’alcool, les autres analyses énumérées sont sans rapport avec le dépistage de drogues ou de substances psychotropes. Les mêmes informations indiquent enfin que le contrôle d’urine doit permettre de vérifier le bon fonctionnement des reins.

Si des contrôles urinaires, voire une prise de sang, peuvent être qualifiés d’atteintes légères à la liberté personnelle de personnes qui, comme les conducteurs des TPG, se trouvent dans un rapport de droit spécial vis-à-vis de l’état et qui sont par ailleurs tenus de s’abstenir de tout comportement susceptible d’affecter leur aptitude à la conduite, il n’en demeure pas moins que l’obligation de se soumettre à de tels examens à des fins de dépistage de drogues ou d’autres substances psychotropes devrait, pour répondre aux exigences de l’art. 36 al. 1 Cst., figurer dans le SP ou, à tout le moins, dans le RSP ou les IGE.

En l’absence de toute indication y relative dans la réglementation générale en matière de circulation routière ou dans celle fixant le statut des conducteurs des TPG, il s’avère donc que les différents dépistages de cannabis, dont le recourant a fait l’objet durant ses années de service, ont été effectués sans base légale.

8) Avant de conclure à leur illicéité, il reste à déterminer si le recourant a librement consenti à ce que ces dépistages soient effectués.

Lors de son témoignage, le Dr B______ a déclaré qu’il avait annoncé, lors de chacun de ses contrôles, qu’un dépistage de cannabis serait effectué, ce que le recourant conteste. Celui-ci a soutenu par-devant les TPG, puis devant la chambre de céans qu’il ne savait pas que le prélèvement urinaire effectué durant lesdits contrôles servirait à dépister la présence de cannabis dans son organisme. Sur ce point et s’agissant des dépistages effectués entre le 12 avril 2002 et le 23 janvier 2013, les déclarations du recourant et du témoin sont irréconciliables, sans que la chambre de céans ne puisse les départager. Celle-ci soulignera néanmoins qu’à l’époque précitée, de tels dépistages n’étaient pas mentionnés dans la feuille d’information officielle qui énumérait les analyses pratiquées.

Il n’est de même pas possible de déterminer si le Dr B______ a violé le secret médical les 11 juin 2007, 23 septembre 2011 et 30 janvier 2012, en communiquant aux TPG les résultats des dépistages pratiqués sur M. A______. Le questionnaire médical du 6 juin 1997 ne tranche notamment pas la question. En signant ce questionnaire, le recourant a donné l’autorisation au médecin-conseil de communiquer aux TPG d’éventuels motifs d’inaptitude ou d’invalidité lors de son engagement. Dite autorisation ne couvrait toutefois pas les contrôles médicaux subséquents et ne peut d’autant moins être comprise comme telle que la feuille d’information y relative indiquait expressément que les résultats d’analyse étaient confidentiels et ne serait pas communiqués à l’entreprise. Pour le reste, les déclarations du recourant et du témoin sont à nouveau contradictoires. Le premier conteste avoir délié le Dr B______ de son secret médical, tandis que le second affirme l’avoir tenu informé de ses communications et n’avoir pas rencontré d’opposition de sa part, puisqu’une déclaration d’inaptitude aurait également conduit les TPG à s’en séparer.

La question d’une éventuelle violation du secret médical par le Dr B______ souffrira toutefois demeurer indécise, compte tenu de ce qui suit.

9) Même à considérer que les premiers dépistages de cannabis auraient été effectués sans le consentement libre et éclairé de M. A______, respectivement communiqués aux TPG en violation du secret médical, il n’en irait pas de même des contrôles subséquents.

Le 11 juin 2012, le recourant a en effet conclu une convention avec son employeur dans laquelle il s’est engagé à suivre un sevrage ambulatoire du 1er juillet au 31 décembre 2012, dans le but de stopper sa consommation de cannabis. En signant ce document, M. A______ a accepté de se soumettre (1) à un suivi médical auprès de son médecin-traitant en collaboration avec le Dr B______, (2) à des contrôles inopinés itératifs effectués par ce dernier, afin que les TPG puissent s’assurer de la bonne évolution du suivi et (3), au terme de la période susmentionnée, à un bilan médical permettant aux TPG de s’assurer de son aptitude légale à la conduite et de prendre une décision quant à la poursuite des rapports de travail.

Compte tenu de leur formulation, ces différentes clauses ne laissaient planer aucun doute sur le fait que les contrôles inopinés et le bilan final consisteraient à déceler l’éventuelle présence de cannabis dans son organisme au moyen d’un prélèvement urinaire, voire d’une prise de sang, qui permet seule d’établir un calendrier de consommation. De même, elles impliquaient la communication aux TPG du résultat de ces tests, afin que ceux-là puissent statuer en connaissance de cause. En concluant la convention, M. A______ s’est librement soumis à cette procédure et a, ce faisant, non seulement consenti à ce que des dépistages de cannabis soient effectués, mais a également délié le Dr B______ de son secret médical sur ces questions vis-à-vis des TPG. En outre, le recourant n’ignorait pas que l’invitation des TPG du 16 avril 2013 à se rendre à la consultation du Dr B______ s’inscrivait dans le cadre de cette convention, puisque le bilan médical, dont les intimés avaient fait dépendre leur décision sur la poursuite des relations de travail, n’avait pas encore eu lieu. Or, c’est bien le dépistage urinaire du 14 mai 2013, complété par la prise de sang du 23 mai 2013, qui est à l’origine de la décision du 5 août 2013, dont le caractère justifié a été précédemment démontré.

Il en résulte que les moyens de preuve fondant le licenciement prononcé par les TPG n’ont pas été recueillis de manière illicite, le recourant ayant consenti à ce que sa liberté personnelle soit restreinte dans la mesure prévue par la convention du 11 juin 2012.

10) Dans un dernier grief, le recourant soutient que son licenciement violerait le principe de la proportionnalité garanti par l’art. 5 al. 2 Cst., les TPG n’ayant pas respecté leur obligation de le reclasser au sein de l’entreprise, alors qu’ils le considéraient inapte à la conduite.

Selon l’art. 69 SP, si pour des raisons médicales, un employé ne peut plus exercer sa fonction et qu’il s’est avéré impossible de le reclasser dans l’entreprise, l’autorité d’engagement peut mettre fin aux rapports de service (al. 1). Les raisons médicales doivent être dûment établies par le médecin traitant de l’employé, en collaboration avec le médecin-conseil désigné par la direction (al. 2).

Comme l’ont pertinemment relevé les TPG, une telle clause ne peut être interprétée comme impartissant une obligation générale de tenter un reclassement, avant tout licenciement prononcé en application de l’art. 71 SP. Si tel était le cas cette obligation n’aurait pas fait l’objet d’une disposition distincte. L’obligation de tenter un reclassement figurant à l’art. 69 SP n’a au contraire été prévue que pour les cas où l’incapacité d’exercer une fonction tient dans des raisons purement médicales, sans faute concomitante de l’employé.

Dans la présente espèce, les TPG ont certes licencié le recourant en raison de sa consommation de cannabis jugée incompatible avec sa fonction de conducteur, mais également et surtout parce que l’intéressé n’a pas tenu les engagements qu’il avait pris le 11 juin 2012, après que les TPG lui avaient dûment exposé le comportement attendu de leurs chauffeurs en matière de consommation de stupéfiants. Cela ressort clairement du procès-verbal d’entretien du 7 août 2013, à l’issue duquel la décision querellée a été rendue.

En bon respect du principe de la proportionnalité, les TPG n’ont pas immédiatement licencié le recourant lorsqu’ils ont eu connaissance de sa consommation de cannabis. Afin de garantir son aptitude à la conduite et lui permettre de conserver son poste, ils lui ont proposé de se sevrer et l’ont encadré dans sa démarche. Au lieu de s’en tenir à ses engagements, M. A______ a toutefois fait preuve de légèreté et a repris sa consommation de cannabis dans une mesure telle (2,1 µg/l de THC le 23 mai 2013) que son inaptitude à la conduite devait se présumer en application de la législation sur la circulation routière. Alors qu’il soutient n’avoir consommé cette substance qu’occasionnellement et en dehors de son travail, il est au demeurant surprenant que le recourant ait pris le risque de fumer du cannabis durant ses vacances, alors qu’il se savait convoqué à un contrôle médical le 14 mai 2014, et que son organisme présentait encore un taux de THC aussi élevé le 23 mai 2013.

Ce faisant, le recourant a incontestablement fait preuve d’un comportement fautif qui dispensait les TPG de tenter un reclassement dans une autre fonction. Compte tenu de sa consommation de cannabis, l’on verrait au demeurant mal quelle autre fonction le recourant aurait pu exercer au sein de l’entreprise, une activité de mécanicien, de surveillant de chantier ou de réseau exigeant de son titulaire qu’il dispose de ses pleines capacités.

Au vu de ce qui précède, le grief de violation du principe de la proportionnalité doit être écarté.

11) La décision de licenciement du 5 août 2013 n’étant pas contraire au droit, le recours sera rejeté.

Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera en revanche allouée aux intimés, la taille de cet établissement de droit public leur permettant de disposer d’un service juridique apte à assumer leur défense, sans avoir à recourir aux services d’un avocat (ATA/309/2009 du 23 juin 2009 et les références citées).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 septembre 2013 par Monsieur A______ contre la décision rendue par les Transports publics genevois le 7 août 2013 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 1'500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yves Magnin, avocat du recourant, ainsi qu’à Me Malek Adjadj, avocat des Transports publics genevois.

Siégeants : M. Verniory, président, M. Thélin, Mme Junod, MM. Dumartheray et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :