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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/622/2018

ATA/474/2018 du 15.05.2018 ( FORMA ) , ADMIS

Descripteurs : PRATIQUE JUDICIAIRE ET ADMINISTRATIVE ; CHANGEMENT DE PRATIQUE ; PRINCIPE DE LA BONNE FOI
Normes : REP.23; REP.23A
Résumé : Rappel des principes régissant le changement de pratique administrative. En l'occurrence le DIP ne pouvait pas laisser se dérouler le processus d'admission des élèves domiciliés hors canton pour la rentrée 2018 comme il le faisait depuis des années, sans mise en garde particulière pour les administrés appelés à prendre des décisions importantes pour la scolarisation de leurs enfants, alors qu'il savait que sa pratique changerait. En donnant une réponse favorable selon la pratique en vigueur aux premières demandes arrivées et en donnant une réponse négative à celles présentées plus tard mais néanmoins dans le délai qu'il avait imparti en invoquant pour la première fois l'absence des places disponibles.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/622/2018-FORMA ATA/474/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 15 mai 2018

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______

 

contre

 

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA CULTURE ET DU SPORT

 



EN FAIT

1) Madame A______ et Monsieur B______, tous deux de nationalité suisse, sont domiciliés en France, dans une commune proche de la frontière genevoise. Ils exercent une activité professionnelle salariée dans le canton de Genève.

Ils ont deux enfants, C______ B______, née le ______ 2007 et D______ B______, née le ______ 2010. Elles sont scolarisées en France voisine dans un établissement privé sous contrat d’association avec l’État français.

2) Le 19 janvier 2018, Mme A______ et M. B______ ont adressé à la direction générale de l’enseignement obligatoire (ci-après : DGEO) du département de l’instruction publique, de la culture et du sport (ci-après : DIP), une demande d’admission dans les écoles genevoises pour chacune de leurs filles.

3) Le 9 février 2018, par deux décisions déclarées exécutoires nonobstant recours, le DIP a refusé les demandes d’admission en raison du manque de places disponibles dans les écoles du canton.

4) Le 20 février 2018, Mme A______ et M. B______ ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre les décisions susmentionnées, concluant à leur annulation.

Ils étaient contribuables dans le canton de Genève depuis dix-huit ans et ils y résidaient à la naissance de leur première fille. En raison de la pénurie de logements et pour des motifs budgétaires, ils avaient dû déménager en France. Souhaitant offrir à leurs enfants un système éducatif suisse, ils avaient entrepris des démarches en 2013 pour inscrire leur aînée en 3P Harmos, mais avaient dû renoncer faute d’avoir trouvé des possibilités de garde. Leurs filles ayant grandi, ils avaient vu venir l’occasion de les transférer dans un établissement scolaire genevois.

Ils avaient été surpris de constater que le refus d’admission couvrait tout le territoire genevois. S’ils comprenaient que certains établissements pouvaient être complets, ils demandaient la démonstration que tel était le cas pour l’ensemble de ceux-ci. Ils avaient rempli les demandes d’admission en indiquant leurs souhaits d’écoles mais ils pouvaient envisager d’autres établissements, ainsi que de séquencer l’entrée de leurs enfants dans le système scolaire genevois ou de les placer dans des écoles différentes. S’il n’y avait réellement plus de places disponibles, ils se demandaient pourquoi le Conseil d’État avait décidé le 7 février 2018, soit deux jours avant les décisions querellées, de maintenir jusqu’en 2019 les conditions d’admission dans les écoles genevoises. La rentrée scolaire 2018 était leur dernière chance, vu la modification des critères pour la rentrée scolaire suivante.

Enfin, ils se sentaient victimes d’une forme de discrimination par rapport à l’admission d’autres catégories d’enfants dans le système scolaire genevois.

5) Le 21 mars 2018, le DIP a conclu au rejet du recours.

Le droit à l’enseignement de base suffisant, obligatoire et gratuit était applicable aux seuls enfants domiciliés dans le canton de Genève. Les élèves domiciliés en France voisine dont l’un des parents au moins était assujetti à Genève à l’impôt sur le revenu de l’activité rémunérée qu’il exerce de manière permanente, pouvaient être admis dans l’enseignement obligatoirepublic genevois dans la limite des places disponibles et pour autant qu’ils aient déposé leur demande d’admission dans le délai fixé par le DIP.

Indépendamment des aspects organisationnels et infrastructurels, le nombre de places disponibles dans l’enseignement obligatoire était principalement fixé par les ressources attribuées par le Grand Conseil dans le cadre du processus budgétaire. Il ne s’agissait pas seulement du nombre concret de places dans chaque école ou classe mais, principalement, d’un critère budgétaire permettant de prévoir l’encadrement nécessaire pour fournir une scolarité de qualité à l’ensemble des élèves, dans une approche cantonale différenciée entre les classes et les élèves dans une optique de compensation des facteurs sociaux.

Jusqu’à la rentrée 2017, l’enveloppe budgétaire était attribuée sur la base d’une estimation du nombre d’élèves prévus, effectuée dix-huit mois avant la rentrée considérée par le service de recherche en éducation (ci-après : SRED). Une nouvelle estimation intervenait six mois avant la rentrée considérée. Lorsqu’il apparaissait que l’enveloppe budgétaire serait insuffisante, le Conseil d’État, à la demande du DIP, sollicitait des ressources supplémentaires auprès du Grand Conseil, qui les attribuait, pour créer les places nécessaires. Grâce à cette possibilité, le critère des places disponibles n’avait jamais dû être utilisé, nonobstant l’augmentation constante depuis de nombreuses années du nombre d’élèves dans l’école obligatoire. Selon les chiffres publiés par le SRED en mai 2017, entre 2000 et 2015 cette augmentation avait été de 1868 élèves, représentant une hausse de 4,14 % toutes catégories confondues, et de 891 élèves, correspondant à une hausse de 177, 49 %, pour les demandes de scolarisation d’élèves domiciliés hors canton.

Pour la rentrée 2018, l’écart entre la première estimation publiée par le SRED en janvier 2017 et la seconde parue en janvier 2018, était de 194 élèves en plus, toutes catégories confondues. Cela était notamment dû à un accroissement de l’ordre de 30 % des demandes de scolarisation d’élèves domiciliés hors canton, qui étaient passées de 342 pour 2017 à 435pour 2018. La dotation budgétaire était donc dépassée. Toutefois, contrairement aux années précédentes, le DIP n’avait pas demandé au Conseil d’État de solliciter des ressources supplémentaires auprès du Grand Conseil. Cette option n’était en effet plus à l’ordre du jour en raison de la volonté du gouvernement de trouver des pistes d’économie, affichée le 22 novembre 2017 dans son rapport au Grand Conseil relatif au plan financier quadriennal 2018-2021 (ci-après : PFQ 2018-2021), parmi lesquelles l’application stricte des  « règlements actuels indiquant que les élèves hors canton sont acceptés dans les limites des places disponibles » dans l’enseignement obligatoire, dès lors que le canton allait devoir faire face à une importante augmentation du nombre d’élèves au cours des prochaines années. Dans ces circonstances, le DIP s’était vu contraint de refuser des dossiers d’admission des élèves hors canton, faute de places disponibles, ne pouvant obtenir leur création par le biais du processus budgétaire.

Conformément à sa pratique, la DGEO avait publié au mois de novembre 2017 sur son site internet les documents nécessaires aux formalités d’admission des élèves domiciliés hors canton, avec délai de retour au 31 janvier 2018. 280 dossiers avaient été traités avant la publication de la seconde estimation du SRED et la prise de connaissance par la DGEO de la position du Conseil d’État de limitation des élèves hors canton. En revanche, 133 demandes encore pendantes avaient été mises en attente dès que la position du Conseil d’État de n’admettre, pour la rentrée 2018, les élèves hors canton que dans la seule limite des places prévues au budget, avait été manifestée publiquement fin janvier 2018. Ces dossiers, dont celui des enfants B______, avaient reçu une réponse négative, afin de garantir aux élèves inscrits dans l’école publique obligatoire un enseignement de qualité, à défaut de quoi l’accueil, l’encadrement et les conditions de scolarité de ceux-ci seraient péjorées. Les 133 places supplémentaires auraient eu un coût de plus de dix postes d’enseignants, soit CHF 1'500'000.-. L’intérêt public à assurer une école de qualité dans le cadre du budget imparti l’emportait sur le souhait, compréhensible, des recourants mais relevant de la convenance personnelle. La scolarité de leurs enfants n’était pas péjorée dans leur pays de domicile.

6) Le 29 mars 2018, Mme A______ et M. B______ ont répliqué, persistant dans leurs conclusions, l’argumentation du DIP révélant une mauvaise planification budgétaire n’exonérant pas le canton de ses responsabilités en matière d’enseignement obligatoire vis-à-vis de ses contribuables et citoyens. Leur souhait ne relevait pas de la convenance personnelle mais de donner à leurs filles une éducation et un enseignement correspondant à leur identité nationale, alors même qu’ils s’étaient installés en France faute de disposer du budget nécessaire pour mener à bien leur projet familial à Genève.

7) Le 5 avril 2018, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

8) Le 19 avril 2018, Mme A______ et M. B______ ont transmis un avis de droit relatif « au refus de scolariser les enfants domiciliés sur territoire français », en complément de leurs écritures.

9) Le 24 avril 2018, le document susmentionné a été transmis au DIP.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) À titre préalable, il convient de définir le droit applicable au présent litige.

a. L’art. 23 du règlement de l’enseignement primaire du 7 juillet 1993, entré en vigueur le 15 juillet 1993 (REP - C 1 10.21) relatif à l’admission dans l’enseignement primaire public genevois des élèves domiciliés hors canton a en effet été modifié le 7 février 2018, avec entrée en vigueur le 14 février 2018.

Conformément aux principes généraux du droit intertemporel, lorsqu'un changement de droit intervient au cours d'une procédure administrative contentieuse ou non contentieuse, la question de savoir si le cas doit être tranché sous l'angle du nouveau ou de l'ancien droit se pose. En l'absence de dispositions transitoires, s'il s'agit de tirer les conséquences juridiques d'un événement passé constituant le fondement de la naissance d'un droit ou d'une obligation, le droit applicable est celui en vigueur au moment dudit événement. Dès lors, en cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste en principe celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 403 ss).

b. En l’espèce, le REP a réglé à l’art. 23A l’admission des élèves pour les années scolaires 2017-2018 et 2018-2019 :

« 1 Peuvent être admis dans l’enseignement primaire public genevois dans la limite des places disponibles et pour autant qu'ils aient déposé leur demande d'admission dans le délai fixé par le département :

a)  les élèves genevois domiciliés hors canton ;

b)  les élèves habitant en France voisine dont l'un des parents au moins est assujetti à Genève à l'impôt sur le revenu de l'activité rémunérée qu'il exerce de manière permanente dans le canton.

2 Les enfants non genevois domiciliés hors canton peuvent être scolarisés très exceptionnellement à Genève, selon les termes fixés par la convention intercantonale réglant la fréquentation d'une école située dans un autre canton que celui de domicile.

3 La demande d’admission au sens de l’alinéa 1 doit être déposée auprès de la direction générale de l’enseignement obligatoire dans le délai fixé chaque année par le département et publié sur le site Internet de ce dernier ».

Cette teneur reprend celle de l’art. 23 en vigueur jusqu’au 14 février 2018.

Une disposition transitoire prévoit en outre que « les enfants domiciliés hors canton et scolarisés dans l'enseignement primaire public genevois pendant l'année scolaire 2018-2019 peuvent poursuivre leur scolarisation au sein de celui-ci, pour autant qu'ils remplissent, sans interruption, les conditions prévues à l'art. 23A. » (art. 75 REP).

En l’espèce, les demandes d’admission pour l’année scolaire ont été adressées à l’autorité compétente le 19 janvier 2018. Elles tombaient alors sous le coup de l’art. 23 aREP. Compte tenu de la teneur identique de ce dernier article à celle de de l’art. 23A REP et du texte de ladisposition transitoire, le cas peut être tranché dans le cadre du droit actuel.

3) Il n’est pas contesté que les demandes d’admission en cause ont été présentées dans le délai fixé par le DIP, publié sur son site internet, échéant le 31 janvier 2018.

4) Il ressort des écritures du DIP que jusquedans le courant du mois de janvier 2018, la pratique était d’accepter toutes les demandes d’admission dans l’enseignement obligatoire genevois d’élèves remplissant les critères scolaires qui étaient domiciliés hors canton, celasans qu’il y ait une limite de places disponibles. Cette pratique a été appliquée aux 280 demandesdéjà traitées pour la rentrée scolaire 2018-2019. Le refus des demandes d’admission des enfants des recourants en raison du seul manque de places disponibles, intervenu en cours du processus d’admission pour la rentrée 2018, constitue ainsi un changement de la pratique administrative.

a. La notion de pratique administrative désigne en effet la répétition constante et régulière dans l’application d’une norme par les autorités administratives. De cette répétition peuvent apparaître, comme en ce qui concerne la jurisprudence, des règles sur la manière d’interpréter la loi ou de faire usage d’une liberté d’appréciation. Elle vise notamment à résoudre de manière uniforme des questions de fait, d’opportunité ou d’efficacité. Cette pratique ne peut être source de droit et ne lie donc pas le juge, mais peut néanmoins avoir indirectement un effet juridique par le biais du principe de l’égalité de traitement (ATA/596/2015 du 9 juin 2015 consid 7d et les références citées).

b. Un changement de pratique administrative doit reposer sur des motifs sérieux et objectifs, c’est-à-dire rétablir une pratique conforme au droit, mieux tenir compte des divers intérêts en présence ou d’une connaissance plus approfondie des intentions du législateur, d’un changement de circonstances extérieures, de l’évolution des conceptions juridiques ou des mœurs. Les motifs doivent être d’autant plus sérieux que la pratique suivie jusqu’ici est ancienne. À défaut, elle doit être maintenue (ATF 135 I 79 consid. 3 ; 132 III 770 consid. 4 ; 127 I 49 consid. 3c ; 127 II 289 consid. 3a ; ATA/596/2015 déjà cité).

c. Le droit à la protection de la bonne foi doit en outreêtre pris en considération.

Valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi, exprime aux art. 9 et 5 al. 3 Cst. exige que l’administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l’administration doit s’abstenir de toute attitude propre a tromper l’administre et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; 129 I 161 consid. 4 ; 129 II 361 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_18/2015 du 22 mai 2015 consid. 3). Il protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a règle sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 ; 137 I 69 consid. 2.5.1). La protection de la bonne foi ne s’applique pas si l’intéressé connaissait l’inexactitude de l’indication ou aurait pu la connaître en consultant simplement les dispositions légales pertinentes (ATF 135 III 489 consid. 4.4 ; 134 I 199 consid. 1.3.1).

En matière de changement de pratique, le Tribunal fédéral a ainsi jugé que la modification d’une jurisprudence relative aux conditions de recevabilité d’un recours ne doit pas intervenir sans avertissement, si elle provoque la péremption d’un droit (ATF 140 IV 74 consid. 4.2).

d. En l’espèce, le changement de pratique trouve son origine dans la volonté du Conseil d’État d’appliquer strictement l’admission des élèves domiciliés hors canton dans la seule mesure des places budgétairement disponibles, exprimée dans le PFQ 2018-2021 de novembre 2017 et réaffirmée courant janvier 2018. Cette position a dissuadé le DIP de procéder comme il le faisait jusqu’alors et de solliciter du gouvernement qu’il demande au Grand Conseil un crédit supplémentaire pour financer l’écart positif de 194 pour la rentrée 2018 apparu entre la première estimation publiée par le SRED en janvier 2017 et la seconde parue en janvier 2018.

S’il n’est pas douteux que le motif à l’origine du changement de pratique soit sérieux et objectif, il est difficile de comprendre pour quelle raison il est intervenu en cours du processus d’admission pour la rentrée scolaire 2018, alors que 280 demandes d’admission d’élèves domiciliés hors canton avaient déjà été acceptées selon la pratique alors usuelle. Au vu des statistiques du SRED pour les années antérieures, il n’était en effet pas inattendu d’avoir un écart positif entre les estimations de janvier 2017 et celles de janvier 2018. Par ailleurs, la volonté du Conseil d’État était connue officiellement depuis novembre 2017, sans que sa formulation puisse permettre à des tiers de connaître les modalités d’application. Dès lors que pour concrétiser cette volonté, le DIP a choisi de renoncer à demander par la voie budgétaire les ressources nécessaires au financement de la création de places supplémentaires, il ne pouvait laisser se dérouler le processus d’admission pour la rentrée 2018 comme il le faisait depuis des années, sans mise en garde particulière pour les administrés appelés à prendre des dispositions importantes pour la scolarisation de leurs enfants, alors qu’il savait que sa pratique changerait. Au lieu de cela, il a donné une réponse favorable, selon la pratique en vigueur, aux premières demandes arrivées et a interrompu abruptement le processus pour celles présentées plus tard, mais néanmoins dans le délai qu’il avait imparti, et leur a donné une réponse négative sans autre examen, en invoquant pour la première fois l’absence de places disponibles. Les administrés intéressés n’ont pas pu anticiper une telle situation, d’autant plus difficile à appréhender que la distinction entre place disponible au sens budgétaire et place disponible au sens commun n’est pas notoire.

Dans ces circonstances, le changement de pratique ne pouvait être appliqué immédiatement aux demandes pendantes pour l’admission d’un enfant à la rentrée 2018-2019, dont celles des intéressés.

5) Au vu de ce qui précède, le recours sera admis et les décisions querellées seront annulées. Le dossier sera retourné au DIP pour nouvelles décisions conformes à la pratique en matière d’admission dans l’école obligatoire genevoise d’enfants domiciliés hors canton, telle qu’elle était en vigueur avant que le DIP renonce à demander au Conseil d’État desaisir le Grand Conseil d’une demande de crédit supplémentaire pour financer les places supplémentaires nécessaires pour la rentrée 2018-2019 selon la dernière estimation du SRED.

6) Cette solution emporte que demeurera indécise la question de la portée des art. 23 et 23A REP en regard du droit constitutionnel à un enseignement de base suffisant, ouvert à tous les enfants, obligatoire, et gratuit dans les écoles publiques (art. 19 et 62 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999  - RS 101 ; art. 24 al. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - A 2 00).

 

7) Aucun émolument ne sera perçu malgré l’issue du litige (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée, les recourants agissant en personne et n’ayant pas exposé avoir encouru de frais pour la défense de leurs intérêts.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 février 2018 par Madame A______ et Monsieur B______ contre les décisions du département de l’instruction publique, de la culture et du sport du 9 février 2018 refusant l’admission d’C______ B______ et D______ B______ à l’école primaire publique genevoise à la rentrée 2018-2019 ;

au fond :

l’admet ;

annule les susdites décisions du département de l’instruction publique, de la culture et du sport du 9 février 2018 ;

retourne le dossier au département de l’instruction publique, de la culture et du sport pour nouvelles décisions dans le sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ et Monsieur B______, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la culture et du sport.

 

Siégeant : Mme Junod, présidente, Mme Krauskopf, MM. Pagan et Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :