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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/681/2010

ATA/455/2012 du 30.07.2012 sur JTAPI/1116/2011 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 18.09.2012, rendu le 13.05.2013, REJETE, 2C_905/2012
Descripteurs : ; RESSORTISSANT ÉTRANGER ; AUTORISATION DE SÉJOUR
Normes : LEtr.34; LACP.4; LACP.24; OLCP.16
Résumé : Refus de prolongation de l'autorisation de séjour d'un ressortissant portugais, au motif qu'il ne remplissait pas les conditions pour séjourner en Suisse. Ses moyens financiers étaient insuffisants et il dépendait de l'aide sociale. N'exerçant pas d'activité économique et ne disposant pas de revenus suffisants pour ne pas devoir faire appel à l'aide sociale, le recourant ne pouvait pas bénéficier d'une autorisation de séjour, faute de se trouver dans un cas de libre circulation.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/681/2010-PE ATA/455/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 juillet 2012

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par le Syndicat interprofessionnel des travailleuses et travailleurs, mandataire

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 octobre 2011 (JTAPI/1116/2011)


EN FAIT

Monsieur A______, né le ______ 1955, est ressortissant du Portugal.

Le 6 avril 2001, M. A______ a été interpellé à Puplinge par une patrouille volante des gardes-frontière. Entendu par la police, il a déclaré qu'il travaillait en qualité de maçon auprès de la société B______ S.A. (ci-après : la société) depuis le mois de décembre 2000, qu'il n'était pas au bénéfice d'une autorisation de séjour et n'avait déposé aucune demande en ce sens.

Le 9 avril 2001, la société a déposé une demande d'autorisation de séjour avec activité lucrative en faveur de M. A______, auprès de l'office cantonal de la population (ci-après : OCP).

Du mois de septembre 2001 au mois de décembre 2002, M. A______ a été mis au bénéfice d'un permis saisonnier.

Le 1er mars 2003, l'intéressé a obtenu une autorisation de séjour de courte durée (permis L), avec activité lucrative, valable jusqu'au 25 février 2004.

Par courrier du 24 février 2004, M. A______ a solllicité de l'OCP le renouvellement de son permis de séjour en indiquant qu’il était incapable de travailler pour cause de longue maladie, à la suite d'un accident de travail dont il avait été victime le 6 mars 2002.

Le 25 mai 2004, M. A______ a adressé à l'OCP, conformément à la demande de celui-ci, la copie d'un certificat médical établi par le centre médical de Chêne-Bourg le 11 mai 2004, attestant qu’il était en traitement médical depuis le 9 mars 2002 pour une durée indéterminée.

Le 22 juin 2004, l'OCP a délivré à l'intéressé une autorisation de séjour de courte durée (permis L), pour traitement médical, valable jusqu'au 23 février 2005.

Le 3 février 2005, dans le cadre du renouvellement de cette autorisation, M. A______ a adressé à l'OCP un certificat médical établi le 3 février 2005 par le centre médical de Chêne-Bourg attestant qu'il était toujours en traitement médical. Il avait déposé une demande de rente invalidité auprès de l’office cantonal de l’assurance-invalidité (ci-après : OCAI), laquelle était en cours d'instruction.

A la demande de l'OCP, l’intéressé a produit divers rapports médicaux, ainsi qu'une attestation de l'Hospice général (ci-après : l’hospice) du 22 juillet 2005 selon laquelle il avait perçu, au titre de l'assistance publique, un montant de CHF 1'650.- par mois pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2004.

Le 9 août 2005, l'OCP a renouvelé son autorisation de séjour de courte durée (permis L) pour traitement médical, valable jusqu'au 22 février 2006.

Le 10 février 2006, M. A______ a adressé à l'OCP, avec sa demande de renouvellement de son autorisation de séjour, une attestation d'aide financière établie par l'hospice le 27 avril 2006, selon laquelle il percevait un montant de CHF 1'445.- par mois au titre de l'aide sociale, frais complémentaires non compris.

Par décision du 24 mars 2006, l’OCAI a refusé l'octroi d'une mesure de reclassement à M. A______ dans une nouvelle profession, compte tenu d'un degré d'invalidité insuffisant, de 4,8 %. Par ailleurs, par décision du 27 mars 2006, il a rejeté sa demande de rente assurance-invalidité (ci-après : AI) pour le même motif. Faute d'opposition, ces deux décisions sont devenues définitives.

Le 12 septembre 2006, l'OCP lui a délivré une autorisation de séjour (permis B), pour traitement médical, valable jusqu'au 7 mai 2007.

Suite à son inscription le 21 mars 2006 au chômage, M. A______ a produit à l'OCP, dans le cadre d'une nouvelle demande de renouvellement de son autorisation de séjour, la copie de trois décomptes de chômage pour les mois d'avril à juin 2007.

Le 13 décembre 2007, l'OCP lui a délivré une autorisation de séjour de courte durée (permis L) avec prise d'emploi, valable jusqu'au 7 mai 2008, en raison de son placement dans le cadre des mesures cantonales.

Le 14 mai 2008, l'OCP a ensuite prolongé cette autorisation de séjour (permis L) jusqu'au 22 septembre 2008.

Par courrier du 10 juin 2008 adressé à l'OCP, l'intéressé a constaté que lors de son renouvellement, l’autorisation de séjour (permis B) avait été transformé en autorisation de courte durée (permis L). Il a demandé à l'OCP de le mettre au bénéfice d'un permis B.

En septembre 2008, M. A______ a demandé à l'OCP le renouvellement de son autorisation de séjour en indiquant qu'il était toujours au chômage.

Le 29 septembre 2008, l’OCP a reçu de l’office cantonal de l’emploi une déclaration de fin de service, suite à la cessation par l’intéressé de son activité lucrative au 22 septembre 2008.

Le 24 novembre 2008, M. A______ a transmis à l’OCP la copie du décompte de chômage pour le mois d’octobre 2008 ainsi qu’une attestation de l’hospice, selon laquelle il avait été mis au bénéfice de prestations financières du 1er décembre 2004 au 28 février 2005 et du 1er septembre 2005 au 31 octobre 2006.

Le 15 décembre 2008, l’OCP a renouvelé son autorisation de séjour de courte durée (permis L), aux fins de recherches d’emploi, valable jusqu’au 8 décembre 2009.

Le 9 décembre 2009, M. A______ a produit, dans le cadre du renouvellement de son autorisation de séjour, une attestation de l’hospice du 30 novembre 2009, selon laquelle il percevait depuis le 1er mars 2009 une aide financière de CHF 1'344,20 par mois.

Par décision du 1er février 2010, l’OCP a refusé de prolonger l’autorisation de séjour de M. A______, au motif qu’il ne remplissait pas les conditions pour séjourner en Suisse, car ses moyens financiers étaient insuffisants et qu'il émargeait à l’aide sociale depuis le 1er mars 2009.

Le 23 février 2010, l’intéressé a interjeté recours contre la décision précitée auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative, devenue depuis le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation et à la délivrance d’une autorisation d’établissement, subsidiairement au renouvellement de son autorisation de séjour.

L’accident dont il avait été victime le 6 mars 2002 le handicapait toujours, et sa santé précaire l’avait obligé à rester à Genève pour suivre les traitements médicaux nécessaires. Il avait déposé une première demande de rente AI auprès de l'OCAI en octobre 2003, laquelle avait été rejetée en mars 2005. En février 2009, il avait déposé une nouvelle demande de rente AI. L'OCAI avait refusé d’entrer en matière. Il avait recouru contre cette décision auprès du Tribunal cantonal des assurances sociales (ci-après : TCAS), devenu dès le 1er janvier 2011 la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales). Dans l’attente de l'arrêt de cette juridiction, il était soutenu financièrement par l’hospice. Il a fait valoir qu’il séjournait en Suisse de manière ininterrompue et régulière depuis plus de cinq ans et qu’en vertu de l’accord d’établissement conclu entre la Suisse et le Portugal, il avait droit à une autorisation d’établissement. Par ailleurs, il avait toujours informé l’OCP de sa situation financière. Il n’avait jamais été averti que son titre de séjour pouvait ne pas être renouvelé. Enfin, il a relevé qu’il était en attente d’une décision de rente AI et que sa dépendance à l’aide sociale était temporaire.

Dans ses observations du 25 mai 2010, l’OCP a conclu au rejet du recours.

Le recourant séjournait en Suisse de manière continue depuis plus de cinq ans, mais les permis qui lui avaient été successivement délivrés revêtaient un caractère temporaire, de sorte que son séjour n’avait pas un caractère durable donnant droit à un permis d’établissement.

Le recourant n’alléguait pas qu’il était à la recherche d’un emploi ou qu’il disposait des moyens financiers suffisants pour séjourner en Suisse sans y exercer d’activité lucrative, mais uniquement que l’OCAI avait refusé d’entre en matière sur sa deuxième demande de rente AI et qu’il était dans l’attente de l’arrêt du TCAS. Le recourant ne pouvait se prévaloir du droit de demeurer en Suisse, dans la mesure où il n’avait pas résidé de manière continue en Suisse pendant plus de deux ans avant de cesser d’y occuper un emploi salarié à la suite de son incapacité de travail.

Lors de l’audience de comparution personnelle du 20 septembre 2011, devant le TAPI, le recourant a produit diverses pièces, à savoir :

la copie d’un arrêt du TCAS du 4 mai 2010 (ATAS/498/2010) lui allouant une rente d’invalidité entière fondée sur un taux d'activité de 100 % à compter du 1er février 2009 ;

la copie d’un arrêt du Tribunal fédéral du 25 mars 2011 (9C_478/2010) annulant l’arrêt du TCAS et lui renvoyant la cause pour qu’il complète l’instruction du dossier en réalisant une expertise ;

des extraits de son compte auprès de l’Union de Banques Suisses S.A. (ci-après : UBS) ;

des décomptes de l’hospice attestant du versement d’un montant de CHF 1'532,95 par mois au titre de l’aide sociale pour les mois de janvier à septembre 2011, ainsi qu’une attestation faisant état d’un versement de CHF 20'043,45 pour l’année 2010.

Le recourant ne s’exprimant pas en français et ne comprenant pas cette langue, ce dont il n’avait pas informé le tribunal, une nouvelle audience en présence d’un interprète a été fixée au 11 octobre 2011.

A cette occasion, le recourant a déclaré attendre que le lieu et l’heure de l’expertise lui soit communiqués, la mission de l'expert ayant déjà été arrêtée. Sa présence en Suisse était nécessaire pendant le déroulement de la procédure devant la chambre des assurances sociales, afin que l’expertise ordonnée puisse être effectuée. Il n’était en outre pas opposé à une suspension de la procédure devant le TAPI.

L’OCP a quant à lui persisté dans sa décision. Il s’en est rapporté à justice s’agissant d’une éventuelle suspension de la procédure jusqu’à droit connu dans la procédure ayant pour objet l’octroi d’une rente d’invalidité au recourant, relevant néanmoins que le recourant était depuis de nombreuse années entièrement à la charge de l’hospice. Il a précisé que si, au terme de la procédure, une rente AI suffisante pour lui permettre de subvenir à ses besoins lui était allouée, il aurait la possibilité de déposer une nouvelle demande d’autorisation qui, vraisemblablement, lui serait accordée.

Par jugement du 11 octobre 2011, le TAPI a rejeté le recours.

Au cours des cinq dernières années, le recourant avait principalement été mis au bénéfice d'autorisations temporaires pour traitement médical. Il n'avait donc pas séjourné en Suisse de manière ininterrompue au bénéfice d'autorisations de séjour au sens de l'art. 34 al. 2 let. a de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) et ne pouvait donc pas prétendre la délivrance d'une autorisation d'établissement.

M. A______ n'avait pas allégué être à la recherche d'un emploi et, il avait largement dépassé le délai raisonnable lui permettant de séjourner en Suisse afin de prendre connaissance des offres d'emploi correspondant à ses qualifications professionnelles. Par ailleurs, il ne pouvait pas se prévaloir de son accident pour obtenir un droit de séjour, car il n'avait pas résidé et travaillé de façon continue en Suisse pendant au moins deux ans avant la survenance de son accident. L'OCAI avait refusé de lui accorder une rente AI, par décision du 27 mars 2006, au motif que son incapacité de travail n'était que de 4,8 %. L'OCAI avait également refusé sa deuxième demande de rente AI, décision contre laquelle le recourant avait recouru auprès du TCAS. Le recours formé par l'OCAI avait été admis par le Tribunal fédéral, qui a annulé l'arrêt du TCAS du 4 mai 2010 et renvoyé la cause à cette juridiction pour complément d'instruction, de sorte qu'à ce jour, le recourant n'avait droit à aucune prestation AI. En outre, le recourant était entièrement à la charge de l'hospice et il ne disposait pas des moyens financiers nécessaires pour subvenir à ses besoins. Il ne pouvait donc prétendre à l'octroi d'une autorisation de séjour sans activité lucrative.

Par pli recommandé du 4 novembre 2011, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à son annulation ainsi qu'à la délivrance d'un permis de résidence en Suisse. Il a persisté dans l'argumentation déjà développée dans ses précédentes écritures.

Par courrier daté du 10 novembre 2011, la chambre administrative a accordé à l’intimé un délai au 25 décembre 2011 pour formuler d'éventuelles observations.

Le 21 novembre 2011, le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

Le 14 décembre 2011, l'OCP a présenté ses observations en concluant au rejet du recours.

En vertu de l'accord d'établissement, de la LEtr et des déclarations du Conseil fédéral, les ressortissants du Portugal obtiennent l'autorisation d'établissement après un séjour régulier et ininterrompu de cinq ans en Suisse. Le recourant avait été au bénéfice de permis temporaires, de sorte que les conditions pour avoir une autorisation d'établissement n'étaient pas remplies.

Quant à l'octroi d'une autorisation de séjour, le recourant n'avait pas allégué qu'il était à la recherche d'un emploi ou qu'il disposait de moyens financiers suffisants pour séjourner en Suisse sans y exercer une activité lucrative. Par ailleurs, il était dépendant de l'aide sociale. Le recourant n'avait pas résidé d'une façon continue en Suisse depuis plus de deux ans avant de cesser d'y occuper un emploi salarié à la suite d'une incapacité permanente de travail, et donc ne remplissait pas les conditions pour demeurer en Suisse. Enfin, il ne pouvait pas prétendre à un droit de rester en Suisse pendant la procédure devant la chambre des assurances sociales, car il pouvait s'y faire représenter par un mandataire.

Dans sa réplique du 6 février 2012, le recourant a persisté dans ses conclusions, en précisant que l'OCP n'avait pas tenu compte de l'art. 2 al. 1 let. b du règlement CEE n° 1251/70.

Le 1er mars 2012, l’OCP a maintenu ses précédentes conclusions dans leur intégralité.

Il avait examiné toutes les hypothèses donnant le droit au travailleur CE/AELE, victime d'une incapacité de travail permanente en raison d'une maladie ou d'un accident professionnel, d'obtenir un titre de séjour en Suisse. Le recourant résidait en Suisse depuis moins de deux ans lorsqu'il avait été victime d'une incapacité de travail. De surcroît, il n'avait obtenu aucune rente invalidité à ce jour.

Par courrier du 5 mars 2012, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

La procédure de refus de renouveler l'autorisation de séjour et d'octroyer une autorisation d'établissement qui est à la base du présent litige a été initiée le 1er février 2010, soit après l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2008, de la LEtr. Il y a donc lieu d'appliquer le nouveau droit (art. 126 al. 1 LEtr a contrario ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_114/2009 du 4 août 2009 consid. 2.3 ; 2C_98/2009 du 10 juin 2009 consid. 1.4 ; 2C_745/2008 du 24 février 2009 consid. 1.2.3 et la jurisprudence citée). Sous réserve de l'accord entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes du 21 juin 1999 (ALCP - RS 0.142.112.681), entré en vigueur le 1er juin 2002, le cas est ainsi régi par la loi sur les étrangers.

La LEtr s'applique, selon son art. 2 al. 1, aux étrangers dans la mesure où leur statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse.

Les ressortissants de la CE et de l'AELE ainsi que les membres de leur famille reçoivent une autorisation d'établissement CE/AELE de durée indéterminée sur la base de l'art. 34 LEtr et des art. 60 à 63 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), en conformité avec les conventions d’établissement conclues avec la Suisse (art. 5 de l'ordonnance fédérale sur l'introduction progressive de la libre circulation des personnes entre, d’une part, la Confédération suisse et, d’autre part, la Communauté européenne et ses Etats membres, ainsi qu’entre les Etats membres de l’Association européenne de libre-échange du 22 mai 2002 - OLCP - RS 142.203).

S'agissant de l'art. 34 LEtr relatif à l'octroi d'une autorisation d'établissement, cette disposition a un caractère potestatif. Selon l'art. 34 al. 2 let. a et b LEtr, l'autorité compétente peut octroyer une autorisation d'établissement à un étranger lorsqu’il a séjourné en Suisse au moins dix ans au titre d’une autorisation de courte durée ou de séjour, dont les cinq dernières années de manière ininterrompu au titre d’une autorisation de séjour et qu’il n’existe aucune motif de révocation au sens de l’art. 62 LEtr (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_382/2010 du 4 octobre 2010 consid. 5.3 et la jurisprudence citée).

Selon le ch. 2 de l'Echange de lettres entre la Suisse et le Portugal concernant le traitement administratif des ressortissants d’un pays dans l’autre après une résidence régulière et ininterrompue de cinq ans du 12 avril 1990 (Echange de lettres du 12 avril 1990 - RS 0.142.116.546) les ressortissants du Portugal justifiant d’une résidence régulière et ininterrompue en Suisse pendant cinq ans reçoivent une autorisation d'établissement. Les séjours temporaires effectués en Suisse à des fins d’études, de traitement médical et de cure ne sont pas pris en compte dans le calcul de ce délai (http://www.bfm.admin.ch/content/ dam/data/migration/rechtsgrundlagen/weisungen_und_kreisschreiben/weisungen_fza/weisungen-fza-f.pdf - directives ODM, consulté le 9 juillet 2012).

En l’espèce, le recourant réside en Suisse de façon permanente depuis le mois de février 2003, soit à partir du moment où il a été mis au bénéfice d’un permis de séjour de courte durée pour la première fois. Il a d’abord bénéficié d’une autorisation de séjour de courte durée avec activité lucrative, valable jusqu’au 25 février 2004, puis, entre février 2004 et mai 2008, d’autorisations de séjour de courte durée pour traitement médical et enfin, en 2008 et 2009, d’une autorisation de séjour de courte durée aux fins de recherche d’emploi. Force est d’admettre, que le recourant n’a pas séjourné en Suisse de manière régulière et ininterrompue pendant cinq ans, au sens des dispositions précitées.

Le recourant reproche ou TAPI et à l'OCP d'avoir considéré faussement qu'il ne remplissait pas les conditions pour demeurer en Suisse.

Le champ d'application personnel et temporel de l'ALCP ne dépend pas du moment où un ressortissant communautaire est arrivé en Suisse, mais seulement de l'existence d'un droit de séjour garanti par l'accord au moment déterminant, soit lorsque le droit litigieux est exercé. Les ressortissants communautaires résidant déjà en Suisse lors de son entrée en vigueur peuvent se prévaloir de l'accord dès qu'ils relèvent de l'une ou l'autre des situations de libre circulation prévues à cet effet et qu'ils remplissent les conditions afférentes à leur statut (ATF 134 II 10 consid. 2 et la jurisprudence citée). Une autorisation de séjour CE/AELE a une portée purement déclaratoire, son retrait ou sa non-prolongation supposant donc que les conditions constitutives qui fondent une telle autorisation aient disparues (ATF 136 II 329 consid. 2.2 in fine et la jurisprudence citée ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_148/2010 du 11 octobre 2010 consid. 5.3).

Le recourant, qui résidait en Suisse le 1er juin 2002, date de l'entrée en vigueur de l'ALCP, peut en principe se prévaloir des dispositions de cet accord compte tenu de sa nationalité portugaise.

Le droit de séjour et d'accès à une activité économique est accordé aux ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne conformément aux dispositions de l'ALCP, qui leur permettent en outre, à certaines conditions, de demeurer sur le territoire d'une autre partie contractante après la fin de leur activité économique (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_746/2011 du 25 janvier 2012 consid. 3.1 et la jurisprudence citée).

En vertu des art. 4 ALCP et 2 Annexe I ALCP, le droit de séjour et d'accès à une activité économique est garanti aux ressortissants des Etats signataires. Selon les art. 7 let. c ALCP et 4 al. 1 Annexe I ALCP, les ressortissants d'une partie contractante ont en outre le droit de demeurer sur le territoire d'une autre partie contractante après la fin de leur activité économique. L'art. 4 al. 2 Annexe I ALCP précise que, conformément à l'art. 16 de l'ALCP, il est fait référence au règlement (CEE) 1251/70 et à la directive 75/34/CEE, tels qu'en vigueur à la date de la signature de l'ALCP le 21 juin 1999. L'art. 2 § 1 let. b du règlement 1251/70 prévoit qu'a le droit de demeurer sur le territoire d'un Etat membre le travailleur qui, résidant d'une façon continue sur le territoire de cet Etat depuis plus de deux ans, cesse d'y occuper un emploi salarié à la suite d'une incapacité de travail ; si cette incapacité résulte d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ouvrant droit à une rente entièrement ou partiellement à charge d'une institution de cet Etat, aucune condition de durée de résidence n'est requise (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_1008/2011 du 17 mars 2012 consid. 3.1 et la jurisprudence citée).

En l'espèce, le recourant ne bénéficie d'aucune formation professionnelle et est à la charge des services sociaux depuis de nombreuses années. Hormis des activités en qualité de maçon auprès de la société, il n'a pas exercé d'activité lucrative depuis le mois de décembre 2000 jusqu'au jour de son accident de travail, soit le 6 mars 2002 - soit moins de deux ans -. Dans ces conditions, l'art. 4 et l'art. 7 ALCP ne lui sont pas applicables. Il ne s'en prévaut d'ailleurs pas.

L'ALCP a aussi pour objectif d'accorder un droit d'entrée et de séjour aux personnes sans activité économique dans le pays d'accueil (art. 6 ALCP). A cet effet, l'art. 2 al. 2 Annexe I ALCP stipule que les ressortissants des parties contractantes n'exerçant pas d'activité économique dans l'Etat d'accueil et qui ne bénéficient pas d'un droit de séjour en vertu d'autres dispositions de l'accord ont, pour autant qu'ils remplissent les conditions préalables requises dans le chapitre V, un droit de séjour. Faisant partie du chapitre V, l'art. 24 al. 1 Annexe I ALCP prévoit qu'une personne ressortissante d'une partie contractante, n'exerçant pas d'activité économique dans l'Etat de résidence et qui ne bénéficie pas d'un droit de séjour en vertu d'autres dispositions de l'accord, reçoit un titre de séjour d'une durée de cinq ans au moins, à condition qu'elle prouve aux autorités nationales compétentes qu'elle dispose pour elle-même et les membres de sa famille de moyens financiers suffisants pour ne [pas] devoir faire appel à l'aide sociale pendant son séjour, ainsi que d'une assurance-maladie couvrant l'ensemble des risques. L'art. 24 al. 2 Annexe I ALCP définit comme suffisants les moyens financiers qui dépassent le montant en dessous duquel les nationaux, eu égard à leur situation personnelle et celle des membres de leur famille, peuvent prétendre à des prestations d'assistance (http://www.bfm.admin.ch/content/dam/data/ migration/rechtsgrundlagen/weisungen_und_kreisschreiben/weisungen_fza/ausser-kraft_weisungen-vep-f.pd - directives OLCP, consulté le 9 juillet 2012 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_989/2011 du 2 avril 2012 consid 3.3.3 ; 2C_190/2011 du 23 novembre 2011 consid. 4.2.1 et la jurisprudence citée).

Selon l'art. 16 al. 1 OLCP, tel est le cas si ces moyens dépassent les prestations d'assistance qui seraient allouées en vertu des directives « Aide sociale : concepts et normes de calcul » de la Conférence suisse des institutions d'action sociale (CSIAS), à un ressortissant suisse, éventuellement aux membres de sa famille, sur demande de l'intéressé et compte tenu de sa situation personnelle. En d'autres termes, la condition de l'art. 16 al. 1 OLCP est remplie si les moyens financiers d'un citoyen suisse, dans la même situation, étaient tels qu'ils lui fermeraient l'accès à l'aide sociale (2C_190/2011 Arrêt du 23 novembre 2011 consid. 4.2.1 ; ATF 135 II 265 consid. 3.3. p. 269 et la jurisprudence citée).

En l'espèce, le recourant fait valoir son droit de demeurer en Suisse car il est toujours dans l'attente d'une décision de rente AI. Il ressort du dossier qu'il a été au bénéfice de différents types d'autorisations de séjour de courte durée (CE/AELE) entre 2003 et 2010. Suite à son accident de travail, le 6 mars 2002, il s'est trouvé en incapacité de travail. A cet égard, le recourant ne résidait pas en Suisse d'une façon continue pendant deux ans avant de cesser d'y occuper son emploi salarié à la suite de son incapacité permanente de travail. Cet élément et, par conséquent, l'existence matérielle d'un droit de demeurer en Suisse en application de l'ALCP, (CEE) 1251/70 et à la directive 75/34/CEE, n'est pas remplie en l'espèce. Par ailleurs, l'OCAI a refusé de lui accorder une rente AI, par décision du 27 mars 2006, au motif que son incapacité de travail n'était que de 4,8 % et donc insuffisante. Il a également refusé sa deuxième demande de rente AI, décision contre laquelle le recourant a recouru auprès du TCAS. Le recours formé par l'OCAI contre cette arrêt a été admis par le Tribunal fédéral, qui l'a annulé et renvoyé la cause à la chambre des assurances sociales pour complément d'instruction, de sorte qu'à ce jour, le recourant n'est au bénéfice d'aucune prestation de l'assurance invalidité. Dans ces conditions il ne saurait se prévaloir d'un droit de demeurer en Suisse à cet égard non plus. Le fait qu'une procédure soit actuellement pendante devant la chambre des assurances sociales n'y change rien. En effet, le recourant n'a pas besoin de rester en Suisse pendant la procédure actuellement en cours (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_6/2007 du 16 mars 2007, qui précise la portée de l'ATF 121 II 97 consid. 4a p. 103/104 et la jurisprudence citée). Pour ladite procédure, il peut se faire représenter par un mandataire ou effectuer en Suisse des séjours de nature touristique (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.518/2005 du 6 septembre 2005, consid. 3 et la jurisprudence citée), notamment s'il doit se présenter devant l'expert désigné.

Enfin, si au terme de la procédure devant la chambre des assurances sociales, une rente AI suffisante pour subvenir à ses besoins lui était finalement allouée, rien n'empêcherait le recourant de formuler une nouvelle demande d'autorisation de séjour en présentant aux autorités compétentes les documents requis.

En outre, le recourant ne peut pas non plus déduire de l'ALCP un droit de séjour à un autre titre. En particulier, il n'allègue pas qu'il pourrait s'établir en Suisse en qualité de personne n'exerçant pas une activité économique au sens de l'art. 24 annexe I ALCP. Le recourant a été mis au bénéfice de l'aide de l'hospice du 1er décembre 2004 au 28 février 2005, puis du 1er septembre 2005 au 31 octobre 2006. Il est à nouveau entièrement à la charge de l'hospice depuis le 1er mars 2009, de sorte qu'il ne dispose pas des moyens financiers nécessaires pour subvenir à ses besoins. En effet, n'exerçant pas d'activité économique et ne disposant pas de revenus suffisants pour ne pas devoir faire appel à l'aide sociale, le recourant ne saurait bénéficier d'une autorisation de séjour au sens de l'art. 24 par. 1 let. a et par 2 annexe I ALCP (ATF 135 II 265 consid. 3.3 et la jurisprudence citée ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_710/2011 du 10 février 2012 consid. 3.2). Dans ces conditions, le recourant ne peut déduire ni de l'ALCP ni d'une autre disposition le droit à une autorisation de séjour en Suisse, faute de se trouver dans un cas de libre circulation.

Compte tenu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 novembre 2011 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 octobre 2011 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, représenté par le Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs, mandataire, à l'office cantonal de la population, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu’à l'office fédéral des migrations.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Hurni, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction a.i. :

 

 

C. Sudre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.