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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1028/2022

ATA/451/2022 du 28.04.2022 sur JTAPI/335/2022 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1028/2022-MC ATA/451/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 avril 2022

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Léonard Micheli-Jeannet, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________




Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 4 avril 2022 (JTAPI/335/2022)


EN FAIT

1) Le 16 septembre 2008, Monsieur A______ (également connu sous six autres identités), né le ______ 1977, se disant originaire du Rwanda, s'est vu notifier une décision déclarée exécutoire nonobstant recours prise par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) ordonnant son renvoi de Suisse, les services de police étant requis d'exécuter cette mesure sans délai.

2) Le 28 novembre 2008, le Secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) a prononcé à son encontre une interdiction d'entrée en Suisse d'une durée indéterminée pour « atteinte à et mise en danger de la sécurité et de l'ordre publics, dommages à la propriété, violations de domicile, discrimination raciale, injures, voies de fait, vols d'importance mineure, infraction et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121), vols et menaces », notifiée le 2 janvier 2009.

3) Par décision déclarée exécutoire nonobstant recours du 3 août 2012, l'OCPM a ordonné une nouvelle fois le renvoi de Suisse de M. A______, alors qu'il était incarcéré à la prison de Champ-Dollon, la mesure devant être exécutée dès sa remise en liberté, mais ne l'ayant toutefois pas été.

4) Par décision du commissaire de police du 9 octobre 2018, alors qu'il sortait de Champ-Dollon où il venait de purger une peine de prison depuis le 27 août 2018, il lui a été fait interdiction de quitter le territoire de la commune d'Onex pour une durée de douze mois, en application de l'art. 74 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), décision confirmée par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI). Cette décision a ensuite été annulée et remplacée le 6 novembre 2018 par une interdiction de quitter le territoire de Carouge pour une durée de douze mois, confirmée par le TAPI le 15 novembre 2018, avec obligation de se rendre les lundis à 9h30 auprès du service asile et départs de l'OCPM pour attester sa présence.

5) Par jugement du 1er juillet 2019, une mesure d'expulsion judiciaire d'une durée de cinq ans a été prononcée à son encontre par le Tribunal de police.

6) Le 12 septembre 2019, l'OCPM a mandaté les services de police aux fins d'acheminer M. A______ à Berne le 15 septembre 2019, en vue de sa présentation à une délégation de la République du Sénégal, en vain, l'intéressé ayant disparu du foyer où il était censé loger.

7) Le 3 octobre 2019, il a été condamné par ordonnance pénale pour violation de domicile et rupture de ban.

8) Le 4 décembre 2019, une décision de non-report de la mesure d'expulsion judiciaire lui a été notifiée par le commissaire de police, de même qu'une assignation à la commune de Carouge pour une durée de douze mois, son lieu d'assignation ayant ensuite été localisé à la commune de Vernier.

9) Il a été condamné le 23 novembre 2020 par le Tribunal de police pour contravention à la LStup, violations de domicile et d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée, à une peine privative de liberté de sept mois.

10) À sa sortie de prison le 12 avril 2021, le commissaire de police a ordonné son assignation à la commune de Vernier pour une durée de douze mois.

11) La prolongation de cette mesure a été requise le 1er avril 2022 par l'OCPM, pour une nouvelle durée de douze mois.

L'intéressé s'obstinait à rester sur le territoire helvétique alors qu'il faisait l'objet de plusieurs décisions de renvoi ainsi que d'une mesure d'expulsion judiciaire, adoptait un comportement qui constituait un trouble et une menace pour l'ordre et la sécurité publics. La mesure d'assignation constituait l'unique moyen de mener à terme son rapatriement à destination de son pays d'origine et de protéger l'ordre et la sécurité publics dans l'intervalle. Des auditions centralisées par les représentants du Sénégal étaient prévues en été 2022, M. A______ devant encore leur être présenté en vue de l'exécution de son renvoi et de son expulsion de Suisse.

12) Le même jour, le TAPI a convoqué une audience pour le lundi 4 avril 2022 à 14h, la convocation étant envoyée électroniquement tant à son conseil, nommé d'office le même jour, que directement à l'intéressé, par courrier A+, au foyer B______ censé l'héberger.

13) Par courrier électronique au matin du 4 avril 2022, le conseil de l'intéressé a sollicité le report de l'audience, au motif qu'il n'avait pas été en mesure de contacter son mandant, malgré tous ses efforts. En particulier, en l'absence de numéro de téléphone ou d'adresse électronique auxquels le joindre, il avait obtenu d'un collaborateur de l'Hospice général qu'un mot soit mis sur la porte de son appartement afin de lui transmettre son numéro de portable, de l'informer de la tenue de l'audience et de l'inviter à le contacter immédiatement, sa seule autre alternative ayant été de se poster tout le week-end devant la porte, ce qui lui avait paru disproportionné. Il n'y avait aucune nécessité à convoquer une audience le vendredi pour le lundi suivant, la demande de prolongation de la mesure ayant été déposée dans les délais par l'OCPM.

14) Le TAPI a maintenu l'audience, après s'être renseigné auprès du foyer B______, selon lequel la convocation à l'audience du 4 avril 2022 avait été déposée dans la chambre de l'intéressé le vendredi 1er avril 2022 et un mot lui demandant de contacter son avocat lui avait par ailleurs été remis. Mme C______, collaboratrice du foyer, avait pour le surplus indiqué au TAPI que M. A______ était souvent absent de sa chambre pour de longues périodes. Il passait beaucoup de temps dans la rue et n'avait pas de téléphone. Elle ignorait s'il était rentré au foyer depuis le vendredi. Il n'y avait pas de registre des entrées et sorties des résidents. Quand bien même l'intéressé aurait eu connaissance de la convocation, elle pensait qu'il n'y donnerait pas suite.

15) Lors de l’audience, M. A______ ne s'est pas présenté, mais le TAPI a considéré qu'il était valablement représenté par son avocat, qui a réitéré sa demande de report de l'audience, estimant ne pas pouvoir défendre son client avec toute la diligence requise, s'étonnant que la demande de prolongation de la mesure ait été faite plus de dix jours avant son terme, un aussi long délai n'étant pas nécessaire. Le fait qu'elle ait été déposée un vendredi, soit la veille du week-end, rendait par ailleurs difficile la prise de contact avec son client. Il s'en est rapporté à justice s'agissant du principe de la prolongation et a conclu à la réduction de sa durée à six mois.

Pour sa part, la représentante de l'OCPM a confirmé la demande de prolongation pour une durée de douze mois, rappelant qu'au vu de ses condamnations, l'intéressé n'avait pas toujours respecté la mesure d'assignation prononcée à son encontre, que l'OCPM tentait de longue date de le faire identifier par les autorités sénégalaises, première démarche utile en vue d'un éventuel renvoi, mais que son identification n'avait jamais pu avoir lieu en raison de ses disparitions. La dernière fois qu'une audition par une délégation sénégalaise avait pu être organisée remontait à 2019. La prochaine audition, à laquelle il était inscrit, aurait lieu dans le courant de l'été 2022. La prolongation de la mesure d'assignation était utile dans la mesure où, d'une part, il se présentait régulièrement au VHP comme il en était requis et, d'autre part, il devait pouvoir être à disposition en vue de son audition par la délégation sénégalaise. Une prolongation de douze mois était adéquate compte tenu des démarches restant à entreprendre.

16) Dans son jugement du 4 avril 2022, le TAPI a admis partiellement la requête de l'OCPM, ordonnant la prolongation de la mesure pour une durée de six mois, soit jusqu'au 10 octobre 2022, au regard des prochaines auditions centralisées prévues par les autorités sénégalaises au courant de l'été 2022, des antécédents de l'intéressé et du principe de la proportionnalité.

17) Le 19 avril 2022, M. A______ a recouru contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative).

Les faits avaient été établis de manière inexacte, en lien avec la convocation dans un foyer hébergeant plus de 650 personnes dans les 24 heures ouvrables avant l'audience, avec la représentation par un conseil qui ne disposait d'aucun moyen pour le contacter et ne connaissait pas le complexe de faits en dehors des allégués de l'OCPM et qui avait donc demandé le renvoi de l'audience.

En refusant de reporter l'audience, le TAPI avait violé son droit d'être entendu, d'une part de s'exprimer sur les éléments pertinents, de produire et de participer à l'administration des preuves essentielles, avant qu'une décision touchant sa situation juridique ne soit prise, alors que son avocat n'avait jamais pu échanger avec lui et, d'autre part, en ne motivant pas le refus du report d'audience.

18) Le 22 avril 2022, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

19) Le 25 avril 2022, M. A______ a persisté dans les conclusions de son recours.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 10 al. 1 LaLEtr).

2) Selon l'art. 10 al. 2 1ère phr. LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 19 avril 2022 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

3) Le recourant fait valoir tant une constatation inexacte des faits ayant conduit à son absence à l’audience du TAPI qu'une violation de son droit d'être entendu en lien avec le refus non motivé de report d'audience par le TAPI, ce qui ne lui avait pas permis d'être valablement représenté par son conseil — lequel n'avait pas pu le rencontrer —, ni s'exprimer et participer à l'administration des preuves essentielles avant le prononcé d'une décision touchant sa situation juridique.

a. L'art. 9 al. 2 LaLEtr prévoit que le TAPI statue dans les 96 heures au plus qui suivent sa saisine sur les requêtes de prolongation de l'interdiction de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée par l'office cantonal de la population et des migrations, sur les demandes de levée d'interdiction déposées par l'étranger et sur les requêtes du contrôle, a posteriori, de la légalité de la rétention.

b. Le droit d'être entendu est une garantie de nature formelle dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l'autorité de recours n'est pas possible, l'annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2 ; 133 III 235 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_825/2012 du 17 avril 2013 consid. 3.1). Ce moyen doit par conséquent être examiné en premier lieu (ATF 137 I 195 consid. 2.2). Tel qu'il est garanti par l'art. 29 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_157/2018 du 28 mai 2018 consid. 3.1 et les références citées).

Le droit d'être entendu implique également pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision (ATF 143 III 65 consid. 5.2 ; 142 II 154 consid. 4.2 ; 141 V 557 consid. 3.2.1). Il suffit que l'autorité mentionne, même brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 III 65 consid. 5.2 et les références citées).

c. Une décision entreprise pour violation du droit d'être entendu n'est pas nulle mais annulable (ATF 136 V 117 ; 133 III 235 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3). La réparation en instance de recours d'une violation du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure et peut ainsi contrôler librement l'état de fait et les considérations juridiques de la décision attaquée (ATF 145 I 167 consid. 4.4; 142 II 218 consid. 2.8.1; 142 II 218 consid. 2.8.1; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, p. 526 s. n. 1554 s. ; Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, ch. 2.2.7.4 p. 322 et 2.3.3.1 p. 362). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu'elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/395/2020 du 23 avril 2020 consid. 5b).

d. En matière de mesures de contrainte, la chambre administrative dispose d'un plein pouvoir d'examen, identique à celui de la juridiction de première instance et de l'autorité dont la décision est querellée, de sorte qu'un éventuel vice de procédure peut être réparé devant elle (ATA/1108/2019 du 27 juin 2019; ATA/1289/2015 du 3 décembre 2015; art. 61 LPA, 9 al. 1 in fine et 10 al. 2 et 3 LaLEtr).

e. En l'espèce, en recevant une requête de prolongation de la mesure d'assignation territoriale le vendredi 1er avril 2022, à 10h32, le TAPI avait l'obligation de statuer dans les 96 heures suivant sa saisine, soit avant le mardi 5 avril 2022, à la même heure. S'il n'a pas indiqué dans son courrier électronique de réponse à la demande de report d'audience du conseil du recourant du 4 avril 2022 à 11h43 les raisons de son maintien, celles-ci peuvent néanmoins être inférées du considérant 3 du jugement querellé, étant relevé au demeurant qu'elles découlent des dispositions légales applicables.

La convocation à l'audience du 4 avril 2022 a été envoyée par courrier électronique du vendredi 1er avril 2022 tant au conseil d'office que le TAPI lui avait désigné préalablement le même jour, que par courrier A+ directement à l'intéressé sur le lieu de séjour dans lequel il est censé loger, le pli ayant été directement déposé dans sa chambre le jour-même par un collaborateur du foyer B______.

Le recourant a donc été valablement atteint.

En communiquant également audit conseil toutes les informations en sa possession aux fins de lui permettre de contacter son mandant, le TAPI a accompli toutes les démarches qui pouvaient être exigées de lui pour respecter le droit d'être entendu de l'intéressé.

Ledit conseil avait d'ailleurs pris soin de communiquer à son mandant — sur le lieu sur lequel il était censé séjourner — ses coordonnées, près de trois jours avant l'audience, en sorte que ce dernier pouvait prendre contact, s'entretenir et correspondre librement et sans témoin, avec lui, conformément à l'art. 12 LaLEtr.

Dans ces circonstances, la convocation et le maintien de l'audience au lundi 4 avril 2022 à 14h00 ne sont pas critiquables, le jugement ayant pour le surplus été rendu et notifié le même jour.

Le recourant a ainsi eu l’occasion de s’exprimer à plusieurs reprises, que ce soit devant le TAPI ou devant la chambre administrative, par le biais de ses écritures et pouvait produire toutes les pièces utiles et exprimer son point de vue. Alors que plus de quinze jours se sont écoulés depuis l'audience et le jugement querellé, il ne fait valoir aucun argument – hormis la violation de son droit d’être entendu et la constatation inexacte des faits relatifs à sa convocation à l’audience du TAPI –, que la chambre administrative aurait pourtant pu examiner avec le même pouvoir d'examen que le TAPI.

Au vu de ce qui précède, le droit d'être entendu du recourant n'a pas été violé. Pour le surplus, une éventuelle violation de ce droit a valablement été réparée devant la chambre de céans, qui jouit du même pouvoir d’examen que le TAPI et devant laquelle le recourant ne soutient d’ailleurs pas ne pas avoir pu s’exprimer sur l’ensemble des faits et faire valoir ses droits.

4) a. Au terme de l'art. 74 al. 1 LEI, l'autorité cantonale compétente peut enjoindre à un étranger de ne pas quitter le territoire qui lui est assigné notamment lorsque l'étranger est frappé d'une décision de renvoi ou d'expulsion entrée en force et que des éléments concrets font redouter qu'il ne quittera pas la Suisse dans le délai prescrit ou qu'il n'a pas respecté le délai qui lui était imparti pour quitter le territoire (let. b). L’assignation à un territoire ou l’interdiction de pénétrer un territoire peut également être prononcée lorsque l’étranger n’est pas titulaire d’une autorisation de courte durée, d’une autorisation de séjour ou d’une autorisation d’établissement et trouble ou menace la sécurité et l’ordre publics; cette mesure vise notamment à lutter contre le trafic illégal de stupéfiants (let. a).

L'art. 6 al. 3 LaLEtr prévoit que l'étranger peut être contraint à ne pas quitter un territoire assigné, aux conditions prévues à l'art. 74 LEI, notamment à la suite d'une condamnation pour vol, brigandage, dommage à la propriété ou pour une infraction à la LStup.

b. L'assignation d'un lieu de résidence ou l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée fondée sur l'art. 74 al. 1 let. b LEI vise à permettre le contrôle du lieu de séjour de l'intéressé et à s'assurer de sa disponibilité éventuelle pour la préparation et l'exécution de son renvoi de Suisse par les autorités (arrêt 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.1), mais aussi, en tant que mesure de contrainte poursuivant les mêmes buts que la détention administrative, à inciter la personne à se conformer à son obligation de quitter la Suisse (ATF 144 II 16 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_828/2017 du 14 juin 2018 consid. 4.1; CHATTON/MERZ, in Code annoté de droit des migrations, vol. II: Loi sur les étrangers [LEtr], 2017 n° 22 ad art. 74 LEtr).

Si le législateur a expressément fait référence aux infractions en lien avec le trafic de stupéfiants (cf. art. 74 al. 1 let. a LEI), cela n'exclut toutefois pas d'autres troubles ou menaces à la sécurité et l'ordre publics (ATF 142 II 1 consid. 2.2 et les références), telle par exemple la violation des dispositions de police des étrangers (arrêts du Tribunal fédéral 2C_123/2021 du 5 mars 2021 consid. 3.1 ; 2C_884/2021 du 5 août 2021 consid. 3.1.).

c. La mesure doit en outre respecter le principe de la proportionnalité. Elle doit être apte à atteindre le but visé (ATF 144 II 16 consid. 2.2 ; 142 II 1 consid. 2.3), ce qui implique notamment qu'une mesure fondée sur l'art. 74 al. 1 let. b LEI ne peut être prononcée que si un départ de Suisse est effectivement possible, car elle ne peut atteindre son but que dans ce cas (ATF 144 II 16 consid. 2.3). Il suffit qu'un départ volontaire soit possible (ATF 144 II 16 consid. 4.6 et consid. 4.8). La mesure doit aussi ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre le but poursuivi et il doit exister un rapport raisonnable entre ce but et le moyen choisi (ATF 144 II 16 consid. 2.2 ; 142 II 1 consid. 2.3).

La mesure d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée prévue à l'art. 74 LEI peut s'appliquer à l'entier du territoire d'un canton (arrêts du Tribunal fédéral 2A.253/2006 du 12 mai 2006 ; 2C_231/2007 du 13 novembre 2007), même si la doctrine relève que le prononcé d'une telle mesure peut paraître problématique au regard du but assigné à celle-ci (Tarkan GÖKSU, op. cit., p. 725 n. 7). La portée de l'art. 6 al. 3 LaLEtr, qui se réfère à cette disposition et en reprend les termes, ne peut être interprétée de manière plus restrictive. C'est en réalité lors de l'examen du respect par la mesure du principe de la proportionnalité que la question de l'étendue de la zone géographique à laquelle elle s'applique doit être examinée.

Le périmètre d'interdiction doit être déterminé de manière à ce que les contacts sociaux et l'accomplissement d'affaires urgentes puissent rester possibles (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3 ; 2A.514/2006 du 23 janvier 2007 consid. 3.3.1).

5) En l’espèce, l’assignation au territoire de la commune de Vernier vise à permettre le contrôle du lieu de séjour du recourant et à s'assurer de sa disponibilité pour la préparation et l'exécution de son renvoi de Suisse par les autorités, conformément à la jurisprudence susmentionnée. Elle est en conséquence nécessaire.

Elle est également apte à pouvoir contrôler le lieu de séjour de l'intéressé et à s'assurer de sa disponibilité éventuelle pour la préparation et l'exécution de son renvoi.

Sous l'angle de la proportionnalité au sens étroit, il apparaît que l'intéressé est, depuis 2008, sous le coup de décisions de renvoi et d’expulsion entrées en force et qu'il séjourne toujours en Suisse de manière illégale et ne se soumet pas aux injonctions des autorités.

Par son comportement, notamment ses disparitions, il s’oppose toujours à son renvoi et son manque de coopération pose un frein à l’exécution des décisions de renvoi et d’expulsion.

Par ailleurs, au vu des infractions commises, la protection de l’ordre et de la sécurité publics justifie pleinement que la liberté de mouvements du recourant soit restreinte.

En outre, la commune de Vernier, sur le territoire de laquelle le recourant a été assigné à résidence, dispose de parcs communaux, d'installations sportives, de diverses infrastructures sociales, de centres commerciaux et s'étend sur 7,68 km2. L'intéressé, qui jouit d'une liberté de mouvement totale sur le territoire en question, peut ainsi pourvoir à ses besoins de base, profiter de ces infrastructures et y entretenir des relations sociales.

Au vu de ce qui précède, il n'apparaît pas qu'une autre mesure, moins incisive, tel que le seul contrôle hebdomadaire, ou même plus fréquent, à l'OCPM permettrait d'atteindre les buts visés par la mesure. Pour le surplus, la mesure ne fixe aucune limite aux visites que le recourant peut recevoir et aux relations qu'il peut nouer à l'intérieur du périmètre qui lui a été assigné ou par d'autres moyens de communication.

Enfin, en application de l'art. 7 al. 4 let. b LaLEtr, le TAPI a, à juste titre, réduit la prolongation requise à six mois. Le jugement querellé sera, par conséquent, confirmé et le recours rejeté.

6) Vu la nature de la cause, aucun émolument ne sera perçu et vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 avril 2022 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 4 avril 2022 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Léonard Micheli-Jeannet, avocat du recourant, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d'État aux migrations, pour information.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, Mmes Lauber et Michon Rieben, juges.

 

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. Marinheiro

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :