Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2738/2013

ATA/438/2014 du 17.06.2014 ( AMENAG ) , REJETE

Descripteurs : PLAN D'AFFECTATION CANTONAL ; CHEMIN PÉDESTRE ; ZONE DE CENTRE ; PROPRIÉTÉ ; POUVOIR D'APPRÉCIATION
Normes : LaLAT.35.al5; LCI.106; LPMNS.35.al2; LPMNS.38.al1; LPMNS.38.al2
Parties : DUCRET Jean-Luc / CONSEIL D'ETAT
Résumé : En prévoyant des zones non constructibles pour respecter le caractère original du village, un plan de site ne viole pas les dispositions légales de la LPMNS. La limitation de la zone constructible est justifiée par un intérêt public et respecte le principe de la proportionnalité.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2738/2013-AMENAG ATA/438/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 juin 2014

 

dans la cause

 

Monsieur Jean-Luc DUCRET
représenté par Me Maxime Chollet, avocat

contre

CONSEIL D'ÉTAT



EN FAIT

1) Monsieur Jean-Luc DUCRET est propriétaire ou propriétaire en indivision des parcelles nos 1’233, 1’375, 2’250, 2’254, 2’255 et 2’256 du cadastre de la commune de Laconnex (ci-après: la commune), situées en zone 4B protégée. Il habite la maison édifiée sur la parcelle n° 2’254, à l’adresse chemin des Reblets 8, un chemin privé situé sur la parcelle n° 2’250.

2) Par délibération du Conseil municipal du 20 avril 2009, la commune de Laconnex a décidé d'ouvrir un crédit de CHF 150'000.- en vue d'élaborer « un nouveau règlement de construction de la zone 4B protégée de Laconnex et de son plan directeur annexé ». La démarche était motivée par « l'importante nécessité pour les autorités communales de garder la maîtrise totale de l'aménagement et du développement de la commune ».

3) Le département des constructions et des technologies de l'information, devenu depuis lors le département de l'aménagement, du logement et de l'énergie (ci-après : le département), a approuvé, par décision du 29 juillet 2009, la délibération.

4) Suite à cette délibération et une étude d'un bureau d'urbanisme, la commune a élaboré trois projets : un projet de loi de modification des limites de zone, un projet de plan de site et son règlement annexé et un projet de plan directeur des chemins pour piétons.

Dans le plan de site, le chemin des Rebelets faisait partie du cheminement piétonnier et une zone de jardin non-constructible était créée sur la parcelle n2'255.

5) Le 23 août 2010, la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS) a rendu un préavis sur le projet de plan de site. Elle demandait des compléments.

Elle saluait le travail important à l'origine du projet. L'agglomération de Laconnex avait des qualités patrimoniales importantes qu'il fallait préserver. Le territoire de la commune avait gardé sa « substance ancienne » et les caractéristiques du tissu villageois historique étaient préservées.

La CMNS était favorable à la distinction faite entre les divers sous-secteurs inclus dans le périmètre du plan de site, même si elle souhaitait une meilleure prise en compte de ces différences. Elle saluait la volonté de ne pas étendre la zone à bâtir mais de densifier la zone existante. Elle émettait des réserves sur les indices d'utilisation du sol et d'autres options choisies dans le plan de site et son règlement.

6) Le 13 décembre 2010, le conseil municipal de la commune a voté une résolution donnant mandat au maire de transmettre cette dernière au Conseil d’Etat (ci-après : CE), afin qu'il engage les procédures de modifications de zones, d'adoption du plan de site et de son règlement, et d'un plan directeur des chemins pour piétons.

7) Le 11 mars 2011, le maire de la commune a sollicité le CE afin qu'il ouvre les procédures susmentionnées de façon coordonnée, celles-ci étant liées.

8) Le 27 juillet 2011, le CE a confirmé qu'il avait pris connaissance de la résolution du 13 décembre 2010. Il allait ouvrir les procédures y relatives.

9) Le projet de plan de site no 29'827-524 (ci-après : plan de site), de même que le plan de modifications de zone no 29'871-524 (ci-après : plan de modifications de zone) et le plan directeur des chemins pour piétons (ci-après : le plan directeur), ont été soumis, séparément, à l'enquête publique du 14 février au 15 mars 2012.

10) Le 15 mars 2012, M. DUCRET a fait part de ses observations. Il s'opposait à la transformation du chemin des Reblets en chemin piétonnier. Il refusait qu'une « zone verte » soit fixée sur sa parcelle no 2’255. Il développait des arguments repris dans son recours détaillé par la suite.

11) Le 23 avril 2012, le maire de la commune a répondu aux observations.

Le tracé du chemin piétonnier était conservé. La solution retenue évitait de passer par d'importantes parcelles privées construites, ce qui était plus difficilement réalisable. La « zone verte » était une aire de jardin. L'aire, modifiée à la demande de M. DUCRET, restait sa propriété. Les droits à bâtir de la parcelle étaient maintenus.

12) Le 14 mai 2012, le Conseil municipal a préavisé favorablement le projet de plan de site, sous réserve de deux modifications mineures : le déplacement du chemin pour piétons entre les bâtiments sis sur la parcelle communale no 2’435 ; la modification (extension) de l'aire constructible et de l'aire de jardin sur la parcelle no 2’256.

13) Le département a inclus dans le projet de plan de site les modifications souhaitées par la commune. Il a aussi effectué des ajustements aux art. 5 et 6 du règlement.

14) Du 2 novembre 2012 au 2 décembre 2012, il a ouvert la procédure d'opposition pour le projet de plan de site.

15) Le 16 novembre 2012, le Grand Conseil a adopté par une loi le plan de modification des limites de zone (création de deux zones 4B protégées et de deux zones de verdure).

16) Le 2 décembre 2012, M. DUCRET s'est opposé au projet de plan de site.

Ayant des droits de propriété sur la parcelle no 2’250, il s'opposait à l'affectation en chemin public pour piétons du chemin des Reblets. Un tel chemin devait être créé à l'intérieur d'une agglomération, ce qui n'était pas le cas en l'espèce. Les quinze véhicules des parcelles avoisinantes l’utilisaient, ce qui le rendait dangereux pour des piétons. Le chemin, s'il s'avérait nécessaire, devait se faire en site propre dans la zone agricole.

L'aire de jardin non-bâtie sur les parcelles nos 2’255 et 2’256 ne se justifiait pas. Le plan directeur de 1973 mentionnait un hangar, désormais détruit, sur la parcelle n° 2’256. Le plan de site supprimait un droit de construire.

17) Par arrêté du 30 janvier 2013, le CE a approuvé le plan directeur des chemins pour piétons de la commune, adopté le 14 mai 2012 par le Conseil municipal.

18) Le 24 juillet 2013, le CE a approuvé par arrêté le plan de site et son règlement. Il a rejeté, par un autre arrêté distinct, l'opposition de M. DUCRET.

Le plan de site visait à préserver les caractéristiques du village de Laconnex. Il désignait pour le périmètre du centre du village ancien, des aires de jardin non-bâties en dehors desquelles des constructions nouvelles pourront être édifiées. Cette disposition respectait l'organisation villageoise « cour-bâti-jardin ».

La loi permettait au CE d'établir des cheminements piétonniers ouverts au public. Il avait utilisé cette faculté en rendant accessible un chemin privé. Le cheminement créé dans le village de Laconnex répondait à un intérêt public de perméabilité des quartiers. La solution était proportionnée aux buts du plan de site.

La remise en cause du plan directeur des chemins piétonniers n'était pas possible. Ce plan directeur était un plan d'intentions qui était contraignant uniquement pour les autorités. En tout état de cause, la loi n'excluait pas un tracé de chemin piétonnier en dehors d'une agglomération.

Le CE pouvait édicter des plans de site parfois plus contraignants que le régime ordinaire de protection de la loi. L'aire d'implantation de nouvelles constructions sur les parcelles nos 2’255 et 2’256 limitée par une aire de jardin non-bâtie s'inscrivait dans l'objectif du plan de site de respecter le caractère particulier du village de Laconnex « cour-bâti-jardin ».

Il n'existait pas de droit à la « restitution » des droits à bâtir d'une ancienne construction.

19) Le 26 août 2013, M. DUCRET a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre l'arrêté d'approbation du plan de site et l'arrêté qui a rejeté son opposition, concluant à leur annulation et remettant en cause le cheminement pour piétons situé sur le chemin des Reblets et l'aire de jardin non-bâtie sur les parcelles nos 2’254, 2’255, 2’256 et 1’375.

La nécessité de décloisonner le quartier desservi par le cheminement pour piétons n'était pas remis en cause. Cependant, un tracé moins dangereux et moins dommageable pour lui était possible. Il pourrait être fait le long des voies de circulation déjà existantes. Il pourrait passer par les parcelles nos 2’312, 2’313 et 2’249 ce qui permettrait de créer un vrai chemin pédestre situé en zone agricole. La solution retenue dans le plan de site donnerait lieu à des expropriations et à des mesures de ralentissement du trafic.

Le plan directeur n'empêchait pas les autorités communales de préférer des solutions légèrement différentes dans le plan de site. Le plan directeur n'avait pas été publié et n'avait pas donné lieu à une notification personnelle. Il n'était donc pas entré en force.

L'aire de jardin non-bâtie sur ces parcelles n'était pas nécessaire pour respecter les objectifs du plan de site. La parcelle no 2’254 était en dehors du périmètre « village ancien » et devait être exclue de la mesure. La loi protégeait déjà suffisamment le village de Laconnex sans nécessité de mesures plus strictes. Le règlement du plan de site protégeait la zone arborisée même en l'absence de zone jardin non-bâtie. La typologie des lieux rendait inutile cette dernière zone car une autre solution d'aménagement était difficilement imaginable. L'aire pourrait être réduite à la zone arborisée uniquement, solution moins dommageable pour lui.

20) Le 15 novembre 2013, le CE, par l'intermédiaire du département, a conclu au rejet du recours.

A titre liminaire, la chambre administrative ne pouvait pas revoir l'opportunité des choix effectués pour le plan de site. Son pouvoir d'examen était limité à l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation.

Le village de Laconnex, « localité typique », pouvait faire l'objet de mesures de protections. La nécessité de protéger les bâtiments selon des mesures appropriés au type de bâtiment faisait du plan site l'outil adéquat pour le protéger.

Le tracé du cheminement par le chemin des Reblets était un parcours direct et cohérent entre deux réseaux de cheminements permettant de décloisonner un quartier. Il existait un intérêt public à choisir cette option directe. Une autre solution ne serait pas proportionnée car elle nécessiterait l'aménagement d'une nouvelle liaison empiétant sur d'importantes parcelles privées et sur une surface d'assolement. M. DUCRET pourrait continuer à utiliser le chemin des Reblets, chemin privé, très peu fréquenté et sans danger. La solution retenue ne s'écartait pas du plan directeur pour des raisons objectives. Le grief ne reposait que sur une question d'opportunité, nullement sur un abus ou un excès du pouvoir d'appréciation.

Le plan directeur n'était contraignant que pour les autorités sans possibilité de recours par les particuliers. La publication dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) n'avait donc pas une finalité procédurale. C'était plutôt l'approbation par le CE qui avait un effet constitutif. L’absence de publication du plan directeur ne violait aucun droit constitutionnel de M. DUCRET.

Un plan de site établissait des règles de protection qui s'écartaient, sur des bases objectives, du régime juridique ordinaire. L'objectif du plan de site était de garantir la configuration cour-bâti-jardin, notamment par des dégagements, des cordons boisés, des murs et des anciens jardins et vergers, tout en permettant une utilisation rationnelle du sol. Cet objectif répondait à un intérêt public. Dans cette optique, la commune avait décidé de désigner des aires de jardin non-bâties dans les deux types de secteurs, « village ancien » et « secteurs d'aménagement ». Dès lors, les mesures de protections du règlement pour la zone arborisée ne suffisaient pas. L'incorporation du seul cordon boisé dans la zone non-bâtie allait à l'encontre du but du plan de site. Les mesures de protection ad hoc garantissaient la protection alors que la typologie pouvait varier. Il n'existait pas de mesures moins incisives à même d'atteindre la protection recherchée. Un léger empiètement était possible sur la zone jardin non-bâtie.

21) Le 3 février 2014, un transport sur place a eu lieu en présence de M. DUCRET et de son conseil, d'une représentante du service des monuments et des sites et d'une représentante du département.

M. DUCRET a montré la situation prévue par le plan, sur le chemin des Reblets, et celle qu'il estimait préférable le long des parcelles nos 2’312 et 2’313, en zone 4B, puis de la parcelle no 2’249 en zone agricole. Il a fait remarquer que la zone d'assolement ne jouxtait pas directement le chemin des Reblets et qu'un parking se situait à l'extrémité de ce chemin. Le chemin piétonnier le long de la rue Maison-Forte était en site propre. Selon M. DUCRET, un accident avait eu lieu récemment sur le chemin des Reblets.

Le département a indiqué que les questions de sécurité avaient été clairement étudiées. Aucune voiture n'a circulé sur le chemin des Reblets pendant le transport sur place.

La zone de construction et la zone de jardin non-bâtie ont été identifiées sur les parcelles de M. DUCRET. L'emprise concernée constituait une liaison entre une structure de type « ancien village » et une structure de type « cinquième zone », un secteur de villas. La zone de construction était en continuité du tissu du village et le plan de site permettait de préserver la notion de « cour arrière » du village, selon le département.

22) Le 20 février 2014, M. DUCRET a émis des commentaires sur le procès-verbal du transport sur place.

23) Le 24 février 2014, le département, au nom du CE, a fait de même.

24) Le 14 avril 2014, le juge délégué a admis certaines remarques, qui ont été reprises dans la description du transport sur place ci-dessus.

25) Le même jour, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) a. Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 40 al. 9 de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 - LPMNS - L 4 05 ; art. 35 al. 1 et 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 - LaLAT - L 1 30 ; art. 131 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ -E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10)

b. En tant que propriétaire d'immeubles compris dans le périmètre du plan de site n° 29'827-524, M. DUCRET a qualité pour recourir. Il a préalablement utilisé la voie de l'opposition (art. 35 al. 4 LaLAT). Son recours est donc recevable.

2) Le recourant conclut à l’annulation, d'une part, de l'arrêté du CE rejetant son opposition au plan de site 29'559A-133 et, d’autre part, de celui approuvant ledit plan de site.

3) Le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation et pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. a et b LPA et 35 al. 5 LaLAT). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/566/2008 du 4 novembre 2008 consid. 3).

4) Les plans d'affectation du sol soulèvent essentiellement des questions d'opportunité alors que l'exercice du pouvoir d'appréciation intervient en principe dans le cadre de la délivrance de l'autorisation de construire. C'est alors à ce stade que l'autorité devra déterminer si le projet répond aux prescriptions particulières du plan d'affectation du sol qui régit le secteur en cause (ATA/566/2008 précité).

S'agissant plus particulièrement de l'opportunité, il découle de l'art. 33 al. 3 let. b de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700) que les plans d'affectation doivent pouvoir être soumis, sur recours, à une autorité jouissant d'un libre pouvoir d'appréciation. Le chambre administrative n'est cependant pas habilitée à examiner l'opportunité des mesures d'aménagement dont elle a à connaître sur recours (art. 61 al. 2 LPA et 35 LaLAT ; ATA/566/2008 précité ; Jean-Charles PAULI, L'élargissement des compétences du Tribunal administratif en matière d'aménagement du territoire et ses premières conséquences sur la conduite des procédures à Genève, RDAF 2000, vol. I, p. 526 ; Thierry TANQUEREL, Le contentieux de l'aménagement du territoire, in 3ème journée du droit de la propriété, 2000, p. 10).

5) L'art. 106 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), applicable dans la zone concernée, prévoit des mesures protectrices pour les villages protégés.

6) a. La LPMNS a notamment comme buts la conservation des monuments de l'histoire, de l'art ou de l'architecture et des antiquités immobilières ou mobilières situés ou trouvés dans le canton (art. 1 let. a LPMNS) et la préservation de l'aspect caractéristique du paysage et des localités, des immeubles et des sites dignes d'intérêt, ainsi que des beautés naturelles (art. 1 let. b LPMNS). Dans ce cadre, la loi divise la matière en deux grandes parties : la conservation des monuments et des antiquités, d'une part, et la protection de la nature et des sites, d'autre part (MGC 1974, IV, p. 3245 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1P.44/2004 du 12 octobre 2004).

b. Les monuments et antiquités sont traités au chapitre II de la loi (art. 4 à 25 LPMNS) qui énonce en premier lieu le principe de la « protection générale » de monuments, d'antiquités, d'immeubles et de sites dignes d'intérêt (art. 4 LPMNS) et qui prévoit en outre des instruments pour la protection concrète de certains objets, à savoir l'inscription à l'inventaire (art. 7 ss LPMNS) et le classement par un arrêté du CE (art. 10 ss LPMNS).

c. La nature et les sites sont, quant à eux, traités au chapitre V (art. 35 à 41 LPMNS). Sont protégés les sites et paysages, espèces végétales et minéraux qui présentent un intérêt biologique, scientifique, historique, esthétique ou éducatif (art. 35 al. 1 LPMNS). Constituent notamment des sites, les paysages caractéristiques, tels que les rives, les coteaux et les points de vue (art. 35 al. 2 let. a LPMNS) ainsi que les ensembles bâtis qui méritent d'être protégés pour eux-mêmes ou en raison de leur situation privilégiée (art. 35 al. 2 let. b LPMNS).

d. Le CE peut édicter les dispositions nécessaires à l'aménagement ou à la conservation d'un site protégé par l'approbation d'un plan de site assorti, le cas échéant, d'un règlement (art. 38 al. 1 LPMNS). Ce plan et ce règlement déterminent notamment les mesures propres à assurer la sauvegarde ou l'amélioration des lieux tels que maintien des bâtiments existants, alignement aux abords des lisières de bois et forêts ou de cours d'eau, angles de vue, arborisation ; les conditions relatives aux constructions, installations et exploitations de toute nature (implantation, gabarit, volume, aspect, destination) ; les cheminements ouverts au public ainsi que les voies d'accès à un site ou à un point de vue ; les réserves naturelles (art. 38 al. 2 LPMNS). Un tel plan, qualifié de plan d’affectation spécial, déploie des effets contraignants pour les particuliers (art. 21 al. 1 LAT ; Arrêt du Tribunal fédéral 1P.801/1999 du 16 mars 2000 ; Thierry TANQUEREL, La participation de la population à l'aménagement du territoire, 1988, p. 260). Dès lors si ce plan comprend des restrictions du droit de propriété garanti par l'art. 26 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), celles-ci, pour être admises, doivent reposer sur une base légale, être justifié par un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 1 à 3 Cst. ; ATF 135 I 176 et les arrêts cités).

7) Le plan de site litigieux a pour but de protéger le caractère du village de Laconnex, dans le respect de l'existant et de son environnement, et de permettre son évolution (art. 1 du règlement du plan de site - ci-après : règlement), ce qui est en accord avec les objectifs de l'art. 17 al. 1 let. c LAT. Le plan de site prévoit notamment des bâtiments (art. 4 à 6 règlement), des aires de jardin non-bâties (art. 7 règlement), des cours ouvertes sur la rue (art. 8 règlement) et des chemins pour piétons (art. 10 règlement). L'art. 14 al. 1 du règlement protège l'arborisation existante.

8) Le recourant conteste l'aire de jardin non-bâtie prévue sur les parcelles nos 2’254, 2’255, 2’256 et 1’375, qui violerait la garantie de propriété (art. 26 Cst.).

La volonté de la commune de Laconnex de conserver la configuration cour-bâti-jardin dans le village ancien, mais, aussi, l'objectif de préservation des caractéristiques de l'ensemble du périmètre du plan de site avec des dégagements, des cordons boisés ou encore des anciens jardins fondent un intérêt public à prévoir des règles plus strictes que la législation ordinaire pour le village de Laconnex.

Cependant, l’art. 14 al. 1 du règlement, s’il permet de protéger la végétation, n'est pas suffisant pour maintenir les caractéristiques générales du village de Laconnex. Il ne permet pas d'atteindre l'objectif premier du plan de site. En cela, l'incorporation du seul cordon boisé situé sur les parcelles du recourant dans la zone non-bâtie demeure insuffisante à atteindre le but recherché. Si la typologie des lieux rend, en tout état de cause, difficile la construction sur la zone de jardin non-bâtie, elle ne l’interdit pas et des mesures de protections spéciales sont justifiées. Finalement, si un éventuel projet de construction devait être empêché, l'intérêt public à la préservation du caractère typique du village de Laconnex justifie cette restriction. Comme relevé par le CE, le recourant peut demander également un léger empiètement sur la zone jardin non-bâtie (art. 16 al. 3 règlement). Pour ces raisons, le grief sera écarté.

9) Le recourant remet en cause le chemin pour piétons accessible au public prévu sur le chemin des Reblets.

Les cheminements pour piétons peuvent être prévus par un plan de site (art. 38 al. 2 let. c LPMNS).

Le chemin pour piétons prévu dans le plan de site permet d'assurer la perméabilité du village et l'accès aux différents quartiers. La partie du tracé litigieuse permet de raccorder directement deux réseaux de cheminements piétonniers. En cela, il remplit donc un intérêt public.

Le tracé du chemin est à même de répondre à cet objectif de perméabilité. L'alternative proposée par le recourant empiète sur deux parcelles privées situées en zone 4B et sur une parcelle située en zone agricole. De ce fait, elle a un impact tout aussi important, voire plus, sur le droit de propriété que le tracé sur le chemin des Reblets. Les aménagements devant être réalisés afin de créer ce nouveau chemin nécessiteraient des travaux et des investissements non négligeables pour la commune. Pour ce qui est de la sécurité sur le chemin des Reblets, la circulation sur un chemin privé emprunté régulièrement par une quinzaine de voitures ne représente pas un danger important pour les piétons. Il est envisageable de demander aux véhicules de rouler au pas sur un tel chemin. Ainsi, le tracé du cheminement choisi par la commune est adapté au but recherché. Il n'existe pas de mesures manifestement moins incisives permettant d'atteindre cet objectif. Le CE n'a donc pas abusé de son pouvoir d'appréciation, étant rappelé que la chambre de céans ne peut pas revoir l'opportunité des choix effectués dans le cadre du plan de site.

Ce grief sera écarté.

10) Le recourant met en avant que le plan directeur du cheminement pour piétons n'a pas été publié et donc n'est pas entré en force.

L’approbation d’un plan directeur par le CE fait l’objet d’une publication dans la FAO (art. 10 de la loi sur l'application de la loi fédérale sur les chemins pour piétons et les chemins de randonnée pédestre du 4 décembre 1998 - LaLCPR - L 1 60). Les plans directeurs fixant le réseau des chemins pour piétons ou de randonnée pédestre ont force obligatoire pour les autorités (art. 11 al. 1 LaLCPR).

11) En l'espèce, le plan directeur n'a pas été publié dans la FAO. Il a par contre été approuvé par le CE. Néanmoins, la question de savoir s’il est entré en force ou pas peut rester ouverte. Le plan directeur n'est, en effet, pas opposable aux particuliers donc à M. DUCRET. Ce dernier a pu faire valoir ses droits en contestant le tracé du cheminement prévu dans le plan de site. D'ailleurs, l'art. 38 al. 2 let. c LPMNS permet au CE de prévoir des cheminements pour piétons dans un plan de site sans qu'il soit nécessaire de passer par un plan directeur des cheminements pour piétons. Ainsi, l’absence de publication dans la FAO du plan directeur ne remet pas en cause le tracé du cheminement pour piétons. Ce grief est donc non fondé.

12) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du recourant. Aucune indemnité ne sera allouée au CE (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 26 août 2013 par Monsieur Jean-Luc DUCRET contre les deux arrêtés du Conseil d'Etat du 24 juillet 2013 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur Jean-Luc DUCRET un émolument de CHF 1'500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF-RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Maxime Chollet, avocat du recourant, au Conseil d’Etat, ainsi qu’à l’office fédéral du développement territorial ARE.

Siégeants : M. Thélin, président, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen et M. Pagan, juges, M. Jordan, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :