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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3133/2013

ATA/416/2016 du 24.05.2016 sur JTAPI/1005/2015 ( AMENAG ) , REJETE

Descripteurs : TRAVAUX DE CONSTRUCTION ; CONSTRUCTION ET INSTALLATION ; CONSTRUCTION SOUTERRAINE ; CONTRÔLE DES TRAVAUX ; DIRECTION DES TRAVAUX ; MANDAT ; PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ; PROTECTION DES EAUX ; PERTURBATEUR ; APPRÉCIATION DES PREUVES ; CONSTATATION DES FAITS
Normes : Cst.9 ; Cst.29.al2 ; LPE.1.al1 ; LPE.2 ; LPE.59 ; LEaux.1.al1 ; Leaux.3a ; LEaux.54 ; LEaux-GE.122 ; LPG.1.leta ; norme SIA 431
Résumé : Confirmation par la chambre administrative d'un arrêt du TAPI imputant à la recourante une violation qualifiée de ses devoirs de diligence et de surveillance. En sa qualité de directeur des travaux, elle assumait en particulier la gestion des eaux du chantier à l'origine de la pollution.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3133/2013-AMENAG ATA/416/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 mai 2016

 

dans la cause

 

A______
représentée par Me Dominique Levy, avocat

contre

B______
représentée par Me Christian D'Orlando, avocat

et

DÉPARTEMENT DE L'ENVIRONNEMENT, DES TRANSPORTS ET DE L'AGRICULTURE - DGEAU

et

C______, appelée en cause
représentée par Me Alain Maunoir, avocat

 


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 26 août 2015 (JTAPI/1005/2015)


EN FAIT

1) A______ est inscrite au registre commerce (ci-après : RC) genevois. Son but consiste notamment en la coordination et direction de travaux, la gestion de chantiers et l'économie de la construction. Monsieur D______ en est le directeur avec signature individuelle.

B______ est également inscrite au RC genevois. Son but consiste en particulier en l'exploitation d'un bureau d'architectes et des prestations en matière d'urbanisme, de construction et d'architecture en Suisse et à l'étranger. Monsieur E______ en est le directeur avec signature individuelle.

C______ est inscrite au RC vaudois. Son but consiste en l'exploitation d'un bureau d'ingénieurs, de géologues et de spécialistes de l'environnement.

2) F______ est inscrite au RC genevois. Son but consiste notamment en la prise, l'administration et la gestion de participation dans toutes sociétés, particulièrement dans le domaine immobilier ou l'exploitation de biens immobiliers. Dans le cadre d'une promotion immobilière, elle a mandaté B______ pour la réalisation architecturale d'immeubles situés au G______ (ci-après : le chantier).

3) Par contrat du 16 juillet 2010, B______ a mandaté A______ pour la planification générale et le contrôle des délais, la direction des travaux et suivi du chantier, le contrôle des factures, la mise en service, la direction des travaux de garantie et le contrôle des factures finales.

4) Le 28 juillet 2010, A______ a édité un « État des lieux du projet au 28 juillet 2010 ».

5) Le 27 août 2010, C______ a édité un « manuel pour la protection de l'environnement sur le chantier » (ci-après : le manuel).

6) Un inspecteur de la police des eaux (ci-après : PE) a établi, à une date qui ne figure pas sur le document, un rapport d'opérations portant sur le déversement d'eaux alcalines dans la canalisation des eaux pluviales du G______ s'écoulant dans le système d'assainissement public des eaux aboutissant à la rivière H______.

Le 7 novembre 2011, le service d'incendie et de secours de la Ville de Genève avait prévenu la PE d'une pollution de l'eau du H______ à proximité du
I______. Arrivé sur place, l'auteur du rapport avait constaté la présence de résidus floconneux blanchâtres dans la « gouille » réceptrice des eaux provenant de l'exutoire des eaux pluviales. Aucune mortalité de poissons n'était constatée. Les analyses rapides d'un prélèvement d'eau avaient donné les résultats suivants : pH = 9,7 ; conductivité = 339 µS/cm ; température = 14,8 ; oxygène dissous = 9,04 mg/l.

La pollution était due à une interaction entre, d'une part, les eaux alcalines provenant du lessivage des fondations des immeubles de la promotion immobilière G______, d'autre part les ouvrages de travaux spéciaux effectués lors des diverses phases de travaux de construction des fondations des immeubles et enfin les eaux de la nappe phréatique du secteur (ci-après : les eaux de la nappe), fortement chargées en carbonate de calcium. L'enquête de la PE avait déterminé avec certitude que les multiples déversements d'eaux blanchâtres et l'apparition des précipités floconneux dans le cours d'eau étaient dus à l'absence de contrôles de la qualité des eaux produites et évacuées par les systèmes d'assainissement des eaux des immeubles de la promotion immobilière aux collecteurs publics des eaux pluviales G______.

7) Suite à cette pollution, plusieurs séances ou réunions de chantier ont rassemblé les différents acteurs, dont la PE. Elles ont eu lieu les 28 novembre 2011, 5 et 19 décembre 2011, puis le 18 janvier 2012. Il est ressorti notamment de ces réunions qu'il a été décidé d'installer une « pétufle », ou obturateur, au droit du regard n° 302, lequel était connecté au réseau de drainage souterrain des bâtiments. En vue d'un contrôle de l'étanchéité du réseau, lequel a eu lieu le 23 ou le 24 février 2012, A______ a retiré cette « pétufle ».

8) Une nouvelle pollution des eaux du H______ par des résidus floconneux blanchâtres dans la « gouille » réceptrice des eaux provenant de l'exutoire des eaux pluviales a été constatée par la PE le 29 février 2012. Ces résidus provenaient avec certitude de nouveau du réseau de collecteurs des eaux pluviales du G______.

L'absence de toute installation de traitement et/ou de neutralisation des eaux de drainage du site avait été constatée. « Seul l'agrégat de traitement des eaux de chantier des immeubles (benne) demeurait à l'arrêt en dépôt sur le bord du chemin ». Aucune canalisation n'était raccordée à cette installation. L'installation de traitement avait été mise hors service en infraction avec l'ordre de la PE d'être avisée avant tout démontage.

9) Le 4 juillet 2012, J______, spécialisée dans les géostructures et la géotechnique, a rédigé à l'attention de B______ un rapport portant sur les pollutions.

Les parois verticales des enceintes de fouilles des différents immeubles avaient été réalisées à l'aide de colonnes sécantes de jet grouting (ci-après : le jetting ou la méthode de jetting), censées empêcher l'eau de la nappe de pénétrer dans les terrassements en phase de construction. Ces colonnes de béton de sol étaient réalisées en injectant à haute pression du coulis de ciment dans le terrain. Or, il s'était avéré après coup que ces colonnes n'étaient pas totalement jointives à leur base et que l'eau de la nappe pouvait pénétrer dans les différentes enceintes de chantier même après une reprise rapide partielle des travaux d'injection.

10) Par décision du 28 août 2013, le service de l'écologie de l'eau (ci-après : DGEau), dépendant de la direction générale de l'eau et du département de l'intérieur, de la mobilité et de l'environnement, devenu depuis le département de l'environnement, des transports et de l'agriculture (ci-après : le département), a :

I. - infligé à A______ une amende administrative de CHF 2'000.- ;

II. - mis à la charge de A______ les frais d'intervention de la PE du 29 février 2012, d'un montant de CHF 690.- ;

III. - imposé à A______ d'honorer toutes les factures des « dépens » découlant de ses manquements du 24 février 2012 et de la pollution du H______ dénoncée à la PE le 29 février 2012 et constatée le même jour ;

IV. - mis à la charge de B______ les frais d'intervention de la PE d'un montant de CHF 9'940.- relatifs à toutes les opérations de la PE effectuées lors du constat de la 1ère pollution dès le 7 novembre 2011 ;

V. - mis à la charge de B______ tous les frais d'analyses des eaux réalisées par le laboratoire de la protection des eaux et de l'environnement d'un montant de CHF 1'525.-, le phénomène de floculation constaté étant consécutif au choix du système de fondation et de drainage des immeubles conçus par B______;

VI. - imposé à B______ d'honorer toutes les factures des « dépens » occasionnés par les opérations de la PE, suite à la pollution constatée le
7 novembre 2011.

a. La première pollution était due, d'une part, à la conception des fondations décidée par B______, réalisée avec un réseau de drainages des infrastructures des immeubles raccordés aux canalisations des eaux pluviales, nonobstant la situation particulière de ce site où le génie civil des sous-sols était fréquemment noyé par le niveau et l'écoulement naturel des eaux de la nappe phréatique superficielle du secteur. D'autre part, cette pollution était due à l'absence de contrôle par A______ de la qualité du rejet des eaux des drainages et des eaux pluviales ainsi que des eaux usées provenant des bâtiments AB, CD, E et FGH.

b. La seconde pollution était uniquement due à la mise hors service, par
A______, des installations de traitement des rejets d'eaux de chantier sans en avoir requis l'autorisation auprès de la PE et contrairement aux instructions données lors de la séance de chantier du 18 janvier 2012. A______ était au bénéfice d'un mandat de sous-traitance de la part de B______ pour la direction des travaux et le suivi du chantier dont elle devait assumer la surveillance.

11) Le 27 septembre 2013, A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant, préalablement, à l'audition de divers témoins, puis, au fond, à son annulation et à la constatation qu'elle n'avait aucune responsabilité dans les pollutions.

L'autorité avait constaté les faits de manière inexacte et incomplète. S'agissant de la première pollution, les prestations relatives aux déchets et à la protection de l'environnement et des eaux n'étaient pas comprises dans le mandat du 16 juillet 2010. B______ en avait conservé la responsabilité. Elle n'était dès lors pas tenue de contrôler la qualité du rejet des eaux de chantier. S'agissant de la seconde pollution, elle reconnaissait avoir retiré la pétufle du regard n° 302, mais seulement après avoir reçu les autorisations nécessaires.

L'autorité avait par ailleurs violé le principe de l'interdiction de l'arbitraire en lui faisant supporter la responsabilité d'un mandat qui ne lui avait pas été confié.

Ce recours a été enregistré sous le n° A/3133/2013.

12) Le 30 septembre 2013, B______ a également recouru contre la décision du
28 août 2013 auprès du TAPI. Elle a principalement conclu à l'annulation de la partie du dispositif la concernant.

Ce recours a été enregistré sous la cause n° A/3138/2013.

13) Par décision du 21 octobre 2013, le TAPI a ordonné la jonction des causes nos A/3133/2013 et A/3138/2013 sous le n° A/3133/2013.

14) Le 11 novembre 2013, le département a conclu aux rejets des recours.

15) Par décision du 25 mars 2014, après en avoir informé les parties et après que C______ s'y soit opposée, le TAPI a ordonné l'appel en cause de cette dernière.

16) C______ s'est déterminée sur le fond du litige le 8 mai 2014.

17) Le TAPI a procédé à une instruction approfondie des recours durant laquelle les parties ont eu plusieurs occasions de s'exprimer et de préciser leurs arguments. Il a tenu des audiences de comparution des parties et d'enquêtes les
19 décembre 2013 et 16 mai 2014, 19 mars 2015. Le 30 octobre 2014, après avoir sollicité des parties qu'elles proposent de nouveaux actes d'instruction, il a prononcé une ordonnance préparatoire invitant les parties à fournir des précisions et documents supplémentaires. À l'issue de l'audience du 19 mars 2015, le TAPI a invité les parties à lui transmettre leurs demandes et observations concernant la poursuite de l'instruction. Le 13 avril 2015, A______ a produit une liste de témoins supplémentaires sur laquelle figurait notamment le nom d'un représentant de K______, laquelle avait exécuté les travaux de forage.

Le 9 juin 2015, le TAPI a octroyé aux parties un délai au 24 juin 2015 pour déposer leurs conclusions finales. Elles se sont exprimées dans ce délai. Pour sa part, A______ a ajouté que les causes de la pollution provenaient majoritairement de la méthode de jetting, respectivement de l'absence ou des défauts d'étanchéité de ce système et de son organisation.

18) Par jugement du 26 août 2015, le TAPI a mis C______ hors de cause. Il a par ailleurs partiellement admis les recours et :

- réformé la décision du 28 août 2013 en ses chiffres II, IV et V, en ce sens que les frais d'intervention de la PE du 29 février 2012, d'un montant de
CHF 690.-, seraient pris en charge à hauteur de 80 % par A______ et de 20 % par BEA SA, et que les frais d'intervention de la PE d'un montant de CHF 9'940.- relatifs à toutes les opérations de la PE effectuées lors du constat de la première pollution dès le 7 novembre 2011, de même que tous les frais d'analyses des eaux réalisées par la laboratoire de la protection des zones de l'environnement à hauteur de CHF 1'525.- seraient pris en charge à hauteur de 60 % par A______ et de 40 % par B______;

- réformé la décision du 28 août 2013 en ses chiffres III et VI, et dit que les autres frais pris en charge par A______ et B______ en rapport avec les pollutions des 7 novembre 2011 et 28 février 2012, ou factures adressées à elles en rapport avec ces pollutions et encore impayées, ne seraient pas pris en charge par l'État de Genève ;

- confirmé la décision pour le surplus.

a. S'agissant de la première pollution du 7 novembre 2011, elle trouvait son origine dans une succession d'événements : les eaux de la nappe s'étaient infiltrées par les parties non jointives de ladite enceinte, puis étaient entrées en contact avec les terrassements en cours de réalisation, entraînant au passage un lessivage du coulis de ciment utilisé lors du jetting. La mise en service des drains avait brutalement remis en suspension les matériaux qui les colmataient, y compris des résidus de second oeuvre qui n'auraient pas dû s'y trouver. Les dépôts blanchâtres, essentiellement formés de carbonate de calcium, s'étaient retrouvés dans les tuyaux et avaient été évacués dans le réseau d'eaux claires, puis de là dans le H______. Aucune pollution n'avait eu lieu avant le 7 novembre 2011 alors que les matières polluantes se trouvaient déjà au niveau des drains. Qu'il s'agisse de résidus de carbonate de calcium ou de tout autre produit polluant, il incombait au responsable de la gestion des eaux du chantier de veiller à ce que ces dernières soient dépolluées avant d'être déversées dans le réseau public.

A______, en sa qualité de direction des travaux, devait, selon les usages, assumer la gestion des eaux de chantier. Les éléments de fait du dossier démontraient qu'elle avait assumé concrètement cette gestion.

La première pollution résultait d'une insuffisance des mesures prises afin de s'assurer que la mise en service des canalisations situées sous les immeubles n'emmène pas de manière incontrôlée des eaux contaminées par les travaux de bétonnage des enceintes de fouille et des terrassements, ou des résidus des eaux. Au lieu de faire l'objet d'une surveillance constante et d'analyses régulières, ainsi que des mesures de décantation, de neutralisation puis de transport en station d'épuration prescrites par les usages professionnels, ou éventuellement de rejet dans le réseau d'eaux usées avec l'accord de la PE, elles ont été dirigées vers le réseau d'eaux claires, et de là vers le H______.

La responsabilité première de ces insuffisances incombait à A______, dont la tâche consistait au jour le jour, en tant que direction des travaux, à veiller à ce que toutes les eaux s'écoulant du chantier soient traitées conformément aux usages. Aucun élément du dossier ne permettait de retenir une cause purement fortuite de la première pollution.

B______ portait également une part de responsabilité dans cette première pollution.

b. À propos de la seconde pollution, il convenait d'insister sur le fait que sa cause ne consistait pas de manière immédiate dans le retrait de la « pétufle » qui obstruait le regard n° 302. Le contrôle de l'étanchéité avait eu lieu le 23 ou le
24 février 2012, or la pollution s'était produite quelques jours plus tard, soit entre le 28 et le 29 février 2012. Ôter la « pétufle » le jour du contrôle puis la replacer immédiatement après n'aurait pas permis cette seconde pollution. La cause provenait du fait que A______ avait supprimé définitivement la « pétufle » ainsi que les installations de traitement des eaux.

Dans cette seconde pollution, B______ avait aussi engagé une part de sa responsabilité.

19) Par acte déposé le 30 septembre 2015, A______ a recouru contre le jugement précité auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Elle a repris ses griefs et arguments déjà soulevés devant le TAPI et conclu, « sous suite de frais et dépens », préalablement à l'audition d'un représentant de K______, et au fond, à l'annulation dudit jugement et de la décision du 28 août 2013, et :

- au constat de son absence de responsabilité dans la pollution du H______ le 7 novembre 2011 ;

- à la mise à la charge de B______ des frais d'intervention de la PE d'un montant de CHF 9'940.- relatifs au constat de la pollution du 7 novembre 2011 ;

- à la mise à sa charge à hauteur de 40 % et à la charge de B______ à hauteur de 60 %, des frais d'intervention de la PE le 29 février 2012 d'un montant de CHF 690.- ;

- à la mise à la charge de B______ de tous les frais d'analyse des eaux d'un montant de CHF 1'525.-.

a. Le TAPI avait constaté les faits de manière incomplète et inexacte.

Le TAPI avait omis d'instruire et de constater les faits relatifs au choix de la méthode utilisée, aux fins de la conception de l'enceinte de terrassement des fondations des immeubles, à savoir la méthode de jetting sans mise en place d'un système d'étanchéité pour éviter la dispersion de particules de béton dans les sols. Le TAPI aurait dû approfondir cette question pour pouvoir statuer de manière éclairée sur la responsabilité de chacune des parties.

Le jetting avait été choisi et organisé sans qu'elle fût consultée ni n'eût reçu des informations. S'agissant du choix de cette méthode, elle avait conclu auprès du TAPI à l'audition de témoins, notamment d'un représentant de K______. Or, dans le jugement entrepris, le TAPI avait argué que ces auditions ne se justifiaient pas dès lors que la responsabilité, sinon l'origine des pollutions, ne devait pas être recherchée dans l'utilisation du jetting. Pourtant, le représentant d'une entreprise de terrassement, de génie civil et de démolition avait déclaré devant le TAPI le 19 mars 2015, que pour lui le principal problème et la raison de la pollution venaient du procédé utilisé pour la création des enceintes par jetting. Il ressortait par ailleurs d'un rapport de J______ que, s'agissant des pollutions successives, les parois verticales des enceintes de fouilles avaient été réalisées à l'aide de colonnes sécantes de jetting censées empêcher l'eau de la nappe de pénétrer dans les terrassements. Il s'était avéré après coup que ces colonnes n'étaient pas totalement jointives et que l'eau pouvait pénétrer dans les différentes enceintes du chantier, même après la reprise partielle des travaux d'injection.

Le choix du système de forage avait ainsi joué un rôle essentiel dans la pollution des eaux du H______, question que le TAPI aurait dû approfondir.

b. Le TAPI avait violé le principe de l'interdiction de l'arbitraire.

S'agissant de la pollution du 7 novembre 2011, et contrairement à ce que prétendait le TAPI, l'instruction du dossier avait clairement démontré que le mandat relatif à la protection de l'environnement et à la gestion des eaux avait été conservé par B______, sous la responsabilité de cette dernière, sans délégation ni honoraires à sa faveur. L'état de fait du dossier démontrait que la gestion des eaux du chantier ne lui incombait pas : cela ressortait du document de l'« État des lieux du projet le 28 juillet 2010 » qu'elle avait rédigé, du manuel, des faits tels qu'établis par le TAPI lui-même et des auditions de certains témoins. Il ressortait par ailleurs du dossier que B______ avait été l'interlocutrice principale et directe de la PE et d'autres acteurs.

En outre, il ressortait clairement du dossier que la cause première de la pollution des eaux du H______ le 7 novembre 2011 était le choix de la méthode de jetting, sans mise en place d'un système d'étanchéité pour éviter la dispersion de particules de béton dans les sols.

Les mêmes griefs pouvaient être soulevés s'agissant de la pollution du
29 février 2012.

Le fait qu'elle avait ôté, le 24 février 2012, la pétufle obstruant le réseau de drainage situé au regard n° 302, sur demande de C______ relayée sur le chantier à
M. D______, ne saurait être considéré comme la cause directe et unique de ladite pollution. En effet, si B______ avait à l'origine choisi une méthode adaptée, aucune des pollutions n'aurait été causée. M. D______ avait de bonne foi ôté la « pétufle » sur requête de l'ingénieur-conseil de C______. L'inspecteur de la PE, comme il l'avait confirmé lors de son audition devant le TAPI le 16 mai 2014, avait donné son accord en vue de l'enlèvement de la pétufle, laquelle avait été finalement enlevée après confirmation du mandataire spécialisé choisi par B______, à savoir L______. Cela étant, elle admettait une part de responsabilité du fait qu'elle avait mis hors service les installations de traitement des eaux sans avoir obtenu l'accord expresse de la PE.

20) Le 2 octobre 2015, le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

21) Le 28 octobre 2015, le département a conclu au rejet du recours. Il n'entendait pas contester le jugement du 26 août 2015.

a. S'agissant de la pollution du 7 novembre 2011, dans sa décision du 28 août 2013, il avait considéré que B______ devait supporter la responsabilité exclusive. Il ne contestait toutefois pas la position du TAPI de répartir la responsabilité et donc les frais à raison de 40 % pour B______ et de 60 % pour A______. Cette répartition répondait aux critères de pollueurs-payeurs prévus par la législation fédérale d'une part et s'expliquait du fait des éléments apparus dans le cadre des nombreuses auditions de témoins devant le TAPI. La surveillance du chantier avait été sous-traitée à A______, laquelle avait failli à son devoir de surveillance et violé son devoir de diligence.

b. S'agissant de la pollution du 29 février 2012, il ressortait de l'instruction du TAPI que A______ avait fait mettre hors service les installations de traitement des rejets d'eaux de chantier sans autorisation de la PE. En outre, après le contrôle d'étanchéité des collecteurs par C____, A______ ne s'était pas assurée de la remise en place des systèmes de traitement des eaux de chantier et d'obturation des collecteurs publics provisoirement installés pour éviter tout déversement d'eaux blanchâtres. Des eaux alcalines provenant des bâtiments E et FGH s'étaient à nouveau déversées dans le milieu naturel. Dès lors qu'elle connaissait les risques de pollution inhérents à ce chantier et en tant que responsable du suivi du chantier, A______ avait failli à son devoir de diligence.

22) Le 3 novembre 2015, B______ a conclu, « sous suite de dépens » au rejet du recours.

Le choix de la méthode de jetting était conforme aux règles de l'art de construire et un procédé couramment utilisé lors de travaux d'exécution des enceintes de fouille pour l'implantation de futurs immeubles. Elle était sans rapport de causalité directe avec la pollution constatée. La pollution du
7 novembre 2011 n'était pas liée au choix de cette méthode, mais plutôt à un défaut de contrôle de la qualité des eaux de drainage par A______. Que le choix du jetting ait pu favoriser la création d'eau à forte teneur alcaline par lessivage des parois de l'enceinte ou non, il incombait dans les deux hypothèses à la direction des travaux de contrôler la qualité des eaux de drainage avant de les déverser dans les collecteurs publics.

La démonstration faite par le TAPI ne prêtait pas le flanc à la critique, tant le raisonnement découlait simplement de la nature du mandat confié par B______ à A______, des pièces produites, des déclarations des témoins et des règles de la profession. L'entité qui assumait la direction des travaux assumait nécessairement la gestion des eaux de chantier.

S'agissant de la pollution du 29 février 2012, B______ faisait sien le raisonnement du TAPI.

23) Ce même 3 novembre 2015, C______ a conclu, « sous suite de dépens », au rejet du recours, au constat qu'elle devait être mise hors de cause et à ce qu'aucun des frais consécutifs aux pollutions ou aux procédures de première et seconde instances ne soient mis à sa charge.

Le TAPI l'avait mise hors de cause dans son jugement. Si, dans son recours, A______ concluait à l'annulation de ce jugement, il n'avait pas exposé que sa mise hors de cause devrait être annulée. On pouvait dès lors supposer qu'elle n'était pas contestée.

24) Le 4 décembre 2015, A______ a persisté dans ses conclusions, insistant sur la nécessité d'entendre le représentant de K______ SA et sur le fait que la cause directe des pollutions résidait dans le choix de la méthode de jetting.

Reprenant ses précédentes explications, elle contestait avoir été au bénéfice d'un mandat de sous-traitance de B______ pour la direction des travaux et le suivi du chantier pour toute la durée des travaux. Le département avait d'ailleurs
lui-même considéré dans sa décision que B______, en sa qualité de mandataire professionnellement qualifié, devait supporter la responsabilité exclusive de la première pollution.

Si elle avait une part de responsabilité dans la seconde pollution, cela n'excluait pas la responsabilité de B______.

Enfin, elle contestait l'amende administrative qui lui avait été infligée.

25) Par courrier du 3 mai 2016, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

26) Pour le reste, les arguments des parties, ainsi que les éléments de fait, lesquels ont été exposés dans le détail par le TAPI dans son jugement, seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit ci-dessous.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La recourante sollicite l'audition d'un représentant de K______ afin de, selon elle, pallier la constatation incomplète et inexacte des faits effectuée par le TAPI. K______ avait exécuté les travaux de forage et elle devait être entendue concernant le choix de la méthode de jetting, respectivement concernant les plans d'ingénieurs établis, y compris concernant le problème spécifique de l'étanchéité et des défauts d'étanchéité du système mis en place.

a. Tel que garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), qui n'a pas de portée différente dans ce contexte, le droit d'être entendu comprend, notamment, le droit pour l'intéressé de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion (ATA/157/2016 du 23 février 2016 consid. 3a et les nombreux arrêts cités).

b. Outre que, contrairement à ce que soutient la recourante, le TAPI n'a pas procédé à une constatation incomplète ou inexacte des faits pertinents
(infra consid. 3), toutes les explications utiles relatives à la méthode du jetting, à ses défauts, aux risques qu'elle comporte ou encore aux problèmes rencontrés pendant le chantier figurent au dossier. S'il n'est pas contesté, s'agissant en particulier de la première pollution, qu'elle trouve son origine dans une succession d'événements, à savoir notamment l'infiltration des eaux de nappe par les parties non jointives de l'enceinte de fouille réalisée par jetting, puis le contact de ces eaux avec les terrassements en cours de réalisation, entraînant au passage un lessivage du coulis de ciment utilisé lors du jetting, les éventuelles explications complémentaires que pourrait apporter ce témoin ne sont pas de nature à modifier l'opinion de la chambre de céans concernant l'origine des pollutions, la responsabilité de la recourante dans celles-ci ou encore le défaut de surveillance qui lui incombait seront développés ci-après.

c. La chambre de céans dispose par ailleurs d'un dossier complet, comprenant notamment les nombreux actes d'instruction ordonnés par le TAPI. La recourante a, à de multiples reprises, eu l'occasion de faire valoir son point de vue, en particulier s'agissant de la méthode de jetting. Il ne sera ainsi pas donné suite à sa demande d'audition de témoin.

3) La recourante fait tout d'abord grief au TAPI d'avoir procédé à une constatation incomplète et inexacte des faits. Elle lui reproche de ne pas avoir approfondi la problématique du choix de la méthode de jetting sans mise en place d'un système d'étanchéité pour éviter la dispersion de particules de béton dans les sols et de ses conséquences sur la gestion des eaux du chantier.

a. Il ressort du jugement du 26 août 2015 que le TAPI a traité de manière précise la question du jetting. Dans la partie en fait dudit jugement, il a en effet détaillé le rapport rendu par J______, lequel décrit cette méthode et son lien avec les pollutions (ch. 33), et correctement présenté la façon dont la DGEau avait tenu compte de la conception des fondations décidée par B______(ch. 34). Le TAPI a par ailleurs exposé les audiences d'interrogatoire des parties et des témoins de manière complète et fait état des réponses et commentaires des personnes entendues précisément sur la question du jetting, l'importance de cette question n'ayant manifestement pas échappé à son juge délégué (ch. 39 et 48). Il a aussi repris les arguments des parties à propos de cette méthode, notamment ceux développés par la recourante (ch. 51 et 55). Dans la partie en droit de son jugement, le TAPI a examiné la question du jetting (consid. 3 et 4b), pour en tirer la conséquence que la responsabilité, sinon l'origine des pollutions ne devait pas être recherchée dans le procédé utilisé pour la création de l'enceinte de fouille, ni même dans les défauts dont cette enceinte avait souffert, mais qu'il convenait plutôt d'examiner qui avait la responsabilité de la gestion des eaux de chantier.

b. Ainsi, et contrairement à ce que soutient la recourante, les faits pertinents ont été correctement établis et constatés et ce grief sera en conséquence écarté. Reste à examiner la conformité au droit du jugement du TAPI.

4) La recourante fait grief au TAPI d'avoir violé le principe de l'interdiction de l'arbitraire dans l'application des art. 2 et 59 de la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) et des art. 3a et 54 de la loi fédérale sur la protection des eaux du 24 janvier 1991 (LEaux - RS 814.20).

La recourante se plaint en réalité d'une mauvaise application des dispositions de droit fédéral précitées.

5) La LPE a pour but de protéger les hommes, les animaux et les plantes, leurs biocénoses et leurs biotopes contre les atteintes nuisibles ou incommodantes, et de conserver durablement les ressources naturelles, en particulier la diversité biologique et la fertilité du sol (art. 1 al. 1). À teneur de l'art. 2 LPE, auquel se réfère la recourante, celui qui est à l'origine d'une mesure prescrite par cette loi en supporte les frais. Quant à l'art 59 LPE, il prévoit que les frais provoqués par des mesures que les autorités prennent pour empêcher une atteinte imminente, ainsi que pour en déterminer l'existence et y remédier, sont mis à la charge de celui qui en est la cause.

La LEaux a pour but de protéger les eaux contre toute atteinte nuisible
(art. 1 al. 1). Elle s'applique aux eaux superficielles et souterraines (art. 2). Selon l'art. 3 LEaux, chacun doit s'employer à empêcher toute atteinte nuisible aux eaux en y mettant la diligence qu'exigent les circonstances. Selon l'art. 3a LEaux évoqué par la recourante, celui qui est à l'origine d'une mesure prescrite par cette loi en supporte les frais. Pour sa part, l'art. 54 LEaux prévoit que les coûts résultant des mesures prises par l'autorité pour prévenir un danger imminent pour les eaux, pour établir un constat et pour réparer les dommages sont à la charge de celui qui a provoqué ces interventions.

6) Ni la LPE ni la LEaux ne définissent la personne à l'origine de l'assainissement. La jurisprudence fédérale a largement recouru à la notion de perturbateur par situation ou par comportement. Doit être considérée comme une perturbatrice la personne qui crée un dommage ou un danger en raison de son propre comportement ou de celui d'un tiers placé sous sa responsabilité (perturbateur par comportement), mais aussi la personne qui dispose de la maîtrise effective ou juridique de la chose ayant provoqué la situation contraire à l'ordre public (perturbateur par situation) (ATA/1333/2015 du 15 décembre 2015
consid. 3f et les arrêts cités ; ATA/451/2011 du 26 juillet 2011 consid. 5a).

En cas de pluralité de perturbateurs, la répartition des frais est ordonnée en tenant compte de toutes les circonstances objectives et subjectives, par une application analogique des principes généraux énoncés à l'art. 51 de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220).

La causalité naturelle ne suffit pas à attribuer la qualité de perturbateur et donc l'obligation de payer les frais qui découlent de l'assainissement. Dans le cadre des art. 59 LPE et 54 LEaux, la jurisprudence a posé l'exigence de l'immédiateté (ATA/451/2011 précité consid. 5c).

L'existence d'un lien de causalité est une question de fait qui doit être tranchée en appliquant la règle du degré de vraisemblance prépondérante ; celle-là s'applique dans les cas où une preuve matérielle directe et absolue ne peut être rapportée en raison de la nature de la chose ou de l'écoulement du temps, notamment. Cette règle signifie que si le juge ne peut se fonder sur une simple possibilité, il peut néanmoins considérer comme établie une causalité correspondant à une probabilité suffisante. Cette causalité naturelle n'est en revanche pas donnée lorsque d'autres circonstances que celles invoquées apparaissent prépondérantes ou font sérieusement douter du caractère déterminant de la cause invoquée (ATF 119 Ib 334 consid. 3c p. 342 ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.250/2005 du 14 décembre 2006 et les références citées).

Si plusieurs intervenants sont responsables en application des principes susmentionnés, une clef de répartition doit être fixée.

Une même décision doit donc être rendue concernant toutes les parties. De la part de responsabilité de l'un dépend celle de l'autre (ATA/451/2011 précité
consid. 6).

7) S'agissant de la pollution du 7 novembre 2011, la recourante soutient tout d'abord que le raisonnement et le jugement du TAPI contredisent de manière évidente l'état de fait. L'instruction du dossier aurait, selon elle, clairement démontré que B______ avait conservé le mandat relatif à la protection de l'environnement et à la gestion des eaux, sans aucune délégation à elle-même.

a. La recourante relève tout d'abord que le contrat de mandat du 16 juillet 2010 consistait en la planification générale et le contrôle des délais, la direction des travaux et le suivi de chantier, le contrôle des factures, les mises en service, la direction des travaux de garantie et le contrôle des factures finales. Elle en tire pour conséquence que les prestations relatives aux déchets et à la protection des eaux n'étaient pas comprises dans ce mandat.

b. Elle s'appuie ensuite sur le document intitulé « État des lieux du projet au 28 juillet 2010 ». Il y est mentionné que d'importants travaux des nouveaux collecteurs municipaux étaient prévus de février à septembre 2011 et qu'ils seraient gérés par C______, laquelle devait également réaliser un suivi environnemental des chantiers du secteur.

c. Elle fait par ailleurs référence au manuel, d'où il ressort que la gestion des eaux, la protection des sols et la gestion des déchets relèvent de BEA SA, un de ses employés étant la personne de contact pour chacun de ces domaines.

d. La recourante relève ensuite que lorsque son directeur,
M. D______, était intervenu sur le chantier en relation avec la gestion des eaux, il n'était pas intervenu au nom de A______, mais pour B______. Pour preuve, une adresse électronique au nom de M. D______ avait été créée chez B______, adresse à laquelle il avait reçu de nombreux courriels entre août 2010 et mars 2012.

e. Les auditions des témoins devant le TAPI confirmaient que B______ était chargée de la gestion des eaux du chantier. Un inspecteur de la protection de l'eau avait déclaré le 16 mai 2014 que « l'entité responsable à [ses] yeux était B______ sous la signature de M. D______, se présentant comme direction des travaux ». Pour ce témoin, M. D______« était pour [lui] un représentant de B______». L'administrateur-président d'une société mandatée par B______ aux fins d'une étude des bassins de rétention des eaux pluviales avait déclaré, lors de l'audience du 19 mars 2015, se souvenir « d'y avoir vu aussi
M. D______. En fait c'était lui qui assurait la direction des travaux et dès lors c'était " le grand chef " ».

Par ailleurs, lors des réunions de chantier, M. D______ n'était pas apparu comme un représentant de A______, mais de B______. S'agissant de la gestion des eaux, les autorités avaient par ailleurs à plusieurs reprises communiqué directement avec B______ et particulièrement avec son directeur.

8) a. S'agissant tout d'abord du contrat du mandat du 16 juillet 2010, si ce document indique clairement que la recourante devait assurer la direction des travaux et qu'il renvoie aux normes SIA en son chiffre 6 (tâches des différents intervenants), il ne dit en revanche rien s'agissant de la responsabilité de la gestion des eaux de chantier.

b. Pour ce qui concerne l'« État des lieux du projet au 28 juillet 2010 », la référence faite aux tâches dévolues à C______ ne renseigne pas sur la responsabilité de la gestion des eaux du chantier, ce document étant muet sur ce point.

c. À propos du manuel, la recourante souligne avec raison qu'il désignait
B______ comme devant assumer la gestion des eaux, la protection des sols et la gestion des déchets. Elle ne relève toutefois pas que le TAPI a, dans son jugement litigieux, déjà répondu à son argument en mettant en évidence que, si le manuel désignait bien B______ comme assumant la gestion des eaux, il désignait B______ comme devant également assumer la direction des travaux, tâche dont il n'est pourtant pas contesté qu'elle relevait de la recourante. Si on ne comprend pas pourquoi ce manuel, daté du 27 août 2010 et donc postérieur au mandat du
16 juillet 2010, désignait B______ comme devant assumer l'une et l'autre de ces tâches, le TAPI y a vu, à juste titre, un indice supplémentaire permettant d'affirmer que ces deux tâches étaient liées.

Dans son recours devant la chambre de céans, la recourante n'a d'ailleurs pas contredit le TAPI puisqu'elle a expliqué, s'agissant du manuel, qu'il avait été conçu en tant que guide de mise en oeuvre dont le but était de présenter une vue d'ensemble des mesures environnementales à appliquer par les entreprises chargées de l'exécution et « par les intervenants en charge de la direction des travaux ». Ce faisant, elle a démontré elle-même le lien existant entre la direction des travaux, dont elle ne nie pas avoir eu la charge, et les mesures environnementales, en particulier la gestion des eaux.

La recourante relève enfin que, si elle avait été mandatée pour la gestion des eaux, le manuel en aurait fait mention. Ce faisant, elle n'explique toutefois toujours pas pourquoi seule la direction des travaux et non la gestion des eaux lui aurait effectivement été transférée alors que l'une et l'autre de ces tâches relevaient, selon le manuel, de B______.

d. La recourante prétend ensuite que son directeur serait intervenu non pour son compte, mais pour celui de B______. Pour preuves, son adresse électronique auprès de cette entreprise et le fait qu'il avait été reconnu par plusieurs personnes comme intervenant pour le compte de B______. La recourante n'indique toutefois pas à quel titre son directeur serait intervenu pour le compte de B_____, cette dernière expliquant de manière convaincante dans sa réponse du 3 novembre 2015 devant la chambre de céans que l'adresse électronique en question avait été créée à la demande du maître d'ouvrage, pour lui permettre de n'avoir qu'un seul interlocuteur tant pour la direction architecturale que pour la direction des travaux.

9) Les arguments de la recourante examinés ci-dessus, d'ailleurs largement repris de ceux qu'elle avait déjà développés devant le TAPI, ne répondent en réalité pas aux constats et conclusions qui permettent au TAPI de fonder son jugement litigieux. Pour démontrer la responsabilité de la recourante dans la gestion des eaux du chantier, le TAPI s'est appuyé sur les éléments suivants :

a. En premier lieu, le TAPI s'est référé aux usages, en l'espèce à la norme SIA 431, laquelle prévoit, entre autres, que les responsables de la direction des travaux ont pour tâches le contrôle du bien-fondé des bases et des hypothèses admises dans le plan d'évacuation des eaux ou encore le contrôle et la mise en oeuvre du traitement et du déversement, respectivement de l'évacuation correcte des eaux (ch. 6 3). Cette référence est explicite et, dès lors qu'elle assumait la direction des travaux, la recourante ne peut simplement prétendre, comme elle le fait dans son recours devant la chambre de céans, qu'elle ne serait pas « visée » par la norme SIA 431. Elle ne démontre en particulier pas qu'elle aurait transféré une partie de la direction des travaux, par exemple la gestion des eaux, à un tiers.

b. Le TAPI s'est ensuite appuyé sur les faits de la cause pour démontrer que la recourante avait concrètement assumé la gestion des eaux du chantier. Il a ainsi montré que, quand bien même son directeur avait une adresse électronique auprès de B______, il était intervenu à de nombreuses reprises dans des questions relevant de la gestion des eaux du chantier. Ainsi, et la recourante ne le conteste pas, M. D______ et un inspecteur de la PE ont échangé des courriels portant sur le traitement, l'évacuation et le contrôle de la qualité des eaux de chantier les 14 octobre et 1er novembre 2010. Par la suite, les 30 novembre et
12 décembre 2011, le directeur de la recourante a reçu, certes à son adresse auprès de B______, des rapports d'analyse des eaux de chantier. Il est également établi, sans que la recourante ne le conteste, que son directeur a participé à des réunions relatives à la première pollution les 5 décembre 2011 et 18 janvier 2012. Par ailleurs, plusieurs témoignages sont venus confirmer son rôle dans la gestion des eaux du chantier, notamment celui de l'inspecteur de la PE pour lequel, jusqu'à la seconde pollution, M. D______ était son interlocuteur principal concernant les eaux de chantier.

c. Enfin, devant la chambre de céans, la recourante n'a toujours pas été en mesure d'apporter la preuve, suite à la demande formulée par le juge délégué du TAPI dans son ordonnance préparatoire du 30 octobre 2014, que de l'automne 2010 au 29 février 2012, son directeur ou elle-même seraient intervenus pour indiquer à la PE, voire à B______, qu'ils n'étaient pas chargés ou n'entendaient pas se charger de la gestion des eaux du chantier.

d. Au vu de ce qui précède, force est de constater que la recourante a échoué à démontrer que la gestion des eaux du chantier ne lui incombait pas.

10) S'agissant toujours de la première pollution du 7 novembre 2011, la recourante revient sur la question de la méthode de jetting, laquelle aurait joué un rôle dans la pollution.

À la lecture de ses écritures, il est toutefois difficile de comprendre quel rôle précis elle entend attribuer à la méthode de jetting dans la pollution. Dans son écriture au TAPI du 4 mai 2015, elle a en effet soutenu que les causes de la pollution provenaient « majoritairement », mais non exclusivement, du procédé de jetting. Dans son recours du 30 septembre 2015, elle a cette fois exposé qu'il était « patent que le choix du système de forage utilisé a joué un rôle essentiel dans la pollution des eaux du H______ » (p. 6 du recours). Or, le terme essentiel n'a pas pour synonyme le terme unique. Plus loin, elle a indiqué que ladite méthode était « la cause première » de la pollution du 7 novembre 2011 (p. 20 du recours), avant d'affirmer que la méthode en question était « la cause première/unique » de cette première pollution. Elle a finalement été moins catégorique, puisqu'elle a estimé ensuite que le jetting était « la cause directe » de la pollution (p. 24 du recours). Il découle ainsi de ses propres écritures, que la recourante ne semble elle-même pas convaincue par le fait que la méthode de jetting, telle qu'elle a été utilisée sur le chantier, ait été la seule et unique cause de la première pollution.

Quelles que puissent être les hésitations de la recourante, dans son jugement le TAPI a retenu que la pollution trouvait son origine dans une succession d'événements. D'ailleurs, il n'a pas imputé à la seule recourante la responsabilité de la pollution du 7 novembre 2011, B______ devant prendre à sa charge 40 % des frais. Il a toutefois été démontré, sans que la recourante parvienne à prouver le contraire, qu'elle assumait la direction des travaux et que, partant, elle assumait la gestion des eaux du chantier comme cela découlait des usages et des éléments de fait du dossier. À ce titre, toujours comme l'a retenu le TAPI, elle doit assumer sa part de responsabilité dans la première pollution qui a résulté notamment d'une insuffisance de surveillance et d'analyses régulières de sa part, sa tâche consistant, en tant que direction des travaux, à veiller à ce que toutes les eaux s'écoulant du chantier soient traitées conformément à la norme SIA 431 précitée (en particulier le ch. 2 3, traitant de la nécessité d'élaborer un plan d'évacuation des eaux, ou le ch. 5 2, traitant de l'évacuation des eaux de chantier et de la nécessité d'épurer les eaux alcalines).

11) S'agissant de la seconde pollution du 29 février 2012, la recourante reprend tout d'abord son argumentation s'agissant de l'influence de la méthode de jetting. Il a déjà été répondu à ces arguments ci-dessus.

a. Pour le reste, elle considère que le fait que M. D______ ait ôté la « pétufle » obstruant le réseau de drainage situé au regard n° 302 le 24 février 2012 ne pouvait être considéré comme la cause directe et unique de ladite pollution. Selon elle, il avait agi de bonne foi, sur requête formulée par un ingénieur-conseil de C______, afin de permettre à l'entreprise de génie civil d'effectuer des travaux. Un inspecteur de la PE et une entreprise spécialisée avaient en outre donné leur accord.

b. La recourante reprend les arguments qu'elle avait déjà développés devant le TAPI. Elle oublie que ce dernier a, dans son jugement, insisté sur le fait que la cause de la seconde pollution ne consistait pas de manière immédiate dans le fait d'avoir ôté la « pétufle » qui obstruait le regard n° 302, la pollution ayant eu lieu quelques jours plus tard. Si la « pétufle » avait été remise en place immédiatement après le contrôle, la seconde pollution n'aurait pas eu lieu. La cause de cette seconde pollution résidait en réalité dans le fait que la recourante avait considéré pouvoir retirer définitivement cette « pétufle » ainsi que les installations de traitement des eaux. Devant la chambre de céans, la recourante n'a pas contesté le jugement du TAPI sur ce point. Elle n'indique ni ne démontre avoir reçu l'autorisation de retirer définitivement la « pétufle » et les installations de traitement des eaux. Au contraire, elle reconnaît, dans son recours du 30 septembre 2015, sa part de responsabilité dans cette seconde pollution pour avoir « mis hors service les installations de traitement des eaux ».

c. Devant la chambre de céans, la recourante ne conteste aucun des éléments de fait, fondés sur des documents et pièces qui ont été versés à la procédure et qui ont permis au TAPI de fonder sa position s'agissant de cette seconde pollution. Ainsi, elle ne conteste pas que dans un courriel du 5 mars 2012 adressé à B______, son directeur, M. D______, a donné lui-même des instructions pour la mise hors service des installations de traitement des eaux. Confronté à ce courriel lors de l'audience du 16 mai 2014, le précité avait déclaré ne pas se souvenir avoir donné ces instructions et avait précisé qu'il n'avait sûrement pas pris seul de telles décisions. La recourante ne conteste pas que, comme l'a retenu le TAPI, elle n'a jamais été en mesure de démontrer l'implication d'autres personnes dans ces décisions.

d. La recourante n'apporte aucun élément qui permettrait de contredire le TAPI lorsque ce dernier démontre que la consigne consistant à obtenir l'accord exprès de la PE avant toute mise hors service de ces installations avait été donnée et répétée lors des différents rendez-vous de chantier qui ont eu lieu suite à la première pollution, consigne qui ressort des procès-verbaux des réunions versés à la procédure.

12) En retenant que la recourante avait fautivement violé les art. 2 et 59 LPE, et les art. 3a et 54 LEaux, le TAPI n'a ainsi pas fait preuve d'arbitraire. Cette conclusion s'impose d'autant que le TAPI n'a pas fait porter l'entier des responsabilités à la seule recourante, mais qu'il a reconnu, dans une moindre mesure, les erreurs commises par B______, laquelle devra supporter les frais d'intervention de la PE à hauteur de 40 % pour la première pollution et à hauteur de 20 % pour la seconde. Ce grief sera ainsi écarté.

13) La recourante conteste enfin l'amende administrative de CHF 2'000.- qui lui a été infligée.

a. Selon l'art. 122 de la loi sur les eaux du 5 juillet 1961 (LEaux-GE - L 2 05), est passible d'une amende administrative de CHF 100.- à CHF 60'000.- tout contrevenant à cette loi, aux règlements et arrêtés édictés en vertu de cette loi ou aux ordres donnés par l'autorité compétente (al. 1 let. a à c). Il est tenu compte, dans la fixation de l'amende, du degré de gravité de l'infraction (al. 3).

b. Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C'est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/163/2014 du 18 mars 2014 ; ATA/61/2014 du 4 février 2014 ; ATA/74/2013 du 6 février 2013 ; Pierre MOOR, Droit administratif : les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, Berne 2002, ch. 1.4.5.5, p. 139 ss).

En vertu de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif, sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal (comme notamment les art. 34 ss, 42 ss, 56 ss, 74 ss, 106 al. 2 et 3 et 107 CP ; ATA/163/2014 précité ; ATA/61/2014 précité ; ATA/74/2013 précité ; ATA/71/2012 du 31 janvier 2012 ; Pierre MOOR, op. cit., p. 141).

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d'une simple négligence (Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 6ème éd., 2006, p. 252 n. 1179). Selon la jurisprudence constante, l'administration doit faire preuve de sévérité afin d'assurer le respect de la loi et jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour infliger une amende (ATA/163/2014 précité et les arrêts cités). La juridiction de céans ne la censure qu'en cas d'excès (ATA/160/2009 du 31 mars 2009). Enfin, l'amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. ; ATA/163/2014 précité et les arrêts cités).

c. Dans le cas d'espèce, et comme cela a été examiné précédemment, la recourante s'est comportée fautivement et elle a contrevenu à la législation sur la protection des eaux. L'amende est ainsi fondée dans son principe.

d. Dans sa décision du 28 août 2013, l'autorité a imputé à la recourante une violation qualifiée de son devoir de diligence et fixé en conséquence le montant de l'amende à CHF 2'000.-. Le TAPI a pour sa part estimé que l'autorité avait fait preuve de mansuétude à l'égard de la recourante. Compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce, en particulier de l'importance des pollutions causées par les manquements de la recourante, l'autorité n'a pas fait un mauvais usage de son pouvoir d'appréciation et a respecté le principe de la proportionnalité, le montant retenu se situant dans le bas de la fourchette prévue par l'art. 122 LEaux-GE. Enfin, la recourante n'indique pas que cette amende mettrait en danger son activité ou son existence.

14) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

15) S'agissant de C______, elle demeure hors de cause, le recours de A______, qui n'avait pas explicitement contesté cette conclusion du TAPI, étant quoi qu'il en soit rejeté.

16) Un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée à B______ et une autre de CHF 1'000.- à l'appelée en cause, à la charge de la recourante (art. 87 al. 2 LPA), les deux ayant pris des conclusions en ce sens.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 septembre 2015 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 26 août 2015 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de A______ un émolument de CHF 2'000.- ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à B______, à la charge de A______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à C______, à la charge de A______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Dominique Levy, avocat de la recourante, à Me Christian D'Orlando, avocat de B______, à Me Alain Maunoir, avocat de C______, au département de l'environnement, des transports et de l'agriculture, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'à l'office fédéral de l'environnement OFEV.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :