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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3829/2007

ATA/385/2008 du 29.07.2008 ( DCTI ) , REJETE

Descripteurs : ; ZONE AGRICOLE ; PERMIS DE CONSTRUIRE ; EXCEPTION(DÉROGATION) ; PRINCIPE DE LA BONNE FOI ; AUTORITÉ ADMINISTRATIVE
Normes : OAT.41 ; OAT.42.al3.leta ; OAT.42.al3.letb ; LAT.24c ; Cst-CH.9
Parties : BRAUN Mathieu et Mathieu père et fils, BRAUN Mathieu / COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE DE CONSTRUCTIONS, DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION
Résumé : Refus d'octroyer une autorisation de construire en zone agricole visant à la réunion d'un chalet de type week-end et d'une remise confirmé. Les bâtiments ayant été construits après le 1er juillet 1972, les articles 24c LAT et 42 OAT ne sont pas applicables. De plus, ils ont été transformés sans autorisation, avant le dépôt de la requête en autorisation de construire en 2003. Le fait que le département ait demandé à plusieurs reprises aux recourants d'effectuer des modifications de leur projet ne constitue pas une promesse de délivrer l'autorisation de construire.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3829/2007-DCTI ATA/385/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 29 juillet 2008

 

dans la cause

 

Messieurs Mathieu (père) et Mathieu (fils) BRAUN
représentés par Me Julien Blanc, avocat

contre

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE DE CONSTRUCTIONS

et

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION


 


EN FAIT

1. Monsieur Mathieu Braun, père, est propriétaire des parcelles nos 3074 et 3185, feuille 40 de la commune de Bardonnex, à l'adresse chemin d'Humilly 54, toutes deux en zone agricole. Sur la seconde, d'une surface de 670 m2, deux bâtiments sont édifiés :

- un chalet de week-end (immeuble n° 788) qui a fait l'objet d'une autorisation de construire le 12 novembre 1976 (DD 66'797). Un permis d'occuper a été délivré le 11 septembre 1978. Selon les plans visés "ne varietur" déposés au département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : le DCTI ou le département) le chalet a une surface de 21 m2 (3 mètres de large par 7 mètres de long).

- une remise (bâtiment n° 815) pour des petites machines agricoles et des outils de jardin qui a une surface de 19,50 m2 (3 mètres de large par 6,50 mètres de longueur). Cette construction, autorisée par le département le 16 août 1979, devait initialement prendre place sur la parcelle voisine n° 3074, mais elle a été déplacée sur la parcelle n°3185 en vertu d’une autorisation du 7 décembre 1979. Le 13 mars 1981, le département a constaté que les travaux avaient été exécutés conformément à l'autorisation délivrée.

2. Monsieur Mathieu Braun, fils, (ci-après : le requérant) a déposé une requête en autorisation de construire. Le 12 juin 2003, le DCTI a refusé d'enregistrer le dossier car le projet apparaissait d'emblée ne pas pouvoir être autorisable. Le requérant a soumis un nouveau projet au DCTI qui a fait l'objet d'un refus identique le 9 décembre 2005, et pour les mêmes motifs : "l'agrandissement de la surface brute de plancher utile dépasse 30% ; l'agrandissement cumulé des surfaces brutes de plancher utile et des surfaces annexes dépasse également 30% ainsi que les 100 m2 maximum admissibles".

Après discussions avec un collaborateur du DCTI, M. Braun a déposé le 24 juin 2006 une demande d'autorisation définitive de construire, qui a été enregistrée le 3 août 2006 sous le n° DD 100'734, aux fins de réaménager et réunir les deux bâtiments précités.

3. Le 15 août 2006, le département a prié le requérant de modifier le projet pour respecter l'augmentation maximale de surface brute de plancher de 30% prévue par l'article 42 alinéa 3 lettres a et b de l'ordonnance fédérale sur l’aménagement du territoire du 28 juin 2000 (OAT - RS 700.1). De plus, l'intéressé devait "fournir la preuve de l'affectation d'habitabilité par l'autorisation de construire de l'époque".

4. Le mandataire du requérant a modifié dans le sens demandé le projet " pour le réaménagement de deux chalets". Il a transmis le permis d'occuper précité, délivré le 11 septembre 1978. Celui-ci ne concernait que la maison de week-end sise sur la parcelle n° 3185 et comportait les conditions suivantes :"demeure réservé l'examen, par les autorités compétentes de toute demande d'autorisation qu'implique, en particulier, à teneur de la législation fédérale et cantonale, l'exploitation ou l'utilisation, conformément à leur destination, des constructions ou installations présentement autorisées".

5. Les préavis recueillis dans le cadre de l'instruction de la requête ont tous été favorables, parfois sous réserve ou condition, à l'exception de celui - défavorable - de la direction de l'aménagement du territoire (ci-après : la DAT), émis le 7 novembre 2006. Pour cette dernière, la transformation projetée assimilerait une habitation temporaire en habitation permanente, ce qui ne pouvait être autorisé. Enfin, l'une des deux constructions était une remise et non un chalet.

Par ailleurs, la Société d'Art Public a fait part le 18 septembre 2006 de son opposition au projet pour les mêmes raisons.

6. De septembre à décembre 2006, plusieurs réunions ont eu lieu entre des fonctionnaires du DCTI, le requérant et son mandataire pour examiner le projet. Un fonctionnaire du DCTI aurait soulevé pour la première fois le problème que posait la destination du bâtiment. Le 7 décembre 2006 a eu lieu un transport sur place au cours duquel une collaboratrice du DCTI aurait admis que le sous-sol n'avait pas pu échapper au fonctionnaire ayant signé le permis d'habiter en 1978. Il n'existe dans le dossier aucune pièce relative à cet acte d'instruction.

7. Par décision du 6 février 2007, le DCTI a refusé l'autorisation sollicitée en faisant sien le préavis de la DAT.

Le projet consistait d'une part, en un changement complet d'affectation d'un week-end, soit une habitation temporaire, et d'une dépendance en habitation principale et d'autre part, en leur transformation et leur réunion. Or, le requérant n'exerçait pas la profession d'agriculteur et la construction projetée n'était pas destinée à une activité agricole. Dans ces conditions, aucune autorisation ordinaire ne pouvait être délivrée. De plus, une autorisation dérogatoire en application de l'article 24 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700) n'était pas possible non plus, la construction n'étant pas imposée par sa destination. Enfin, le projet ne consistait pas en un changement d'affectation ne nécessitant pas de travaux de transformation, de sorte qu'il ne pouvait pas davantage être autorisé en application de l'article 24a LAT.

Le DCTI relevait en outre que les constructions précitées avaient été agrandies, à une date inconnue, notamment par l'adjonction d'un sous-sol, et la surface du week-end avait passé de 21 m2 à 28,3 m2. Les limites imposées par l'article 42 OAT étaient ainsi déjà dépassées.

8. Le 9 mars 2007, Messieurs Braun, père et fils (ci-après : les recourants), ont recouru contre cette décision auprès de la commission cantonale de recours en matière de constructions (ci-après : la commission).

9. Celle-ci a rejeté le recours par décision du 7 septembre 2007.

Le DCTI avait refusé à juste titre de délivrer une autorisation de construire ordinaire selon les articles 16a et 24 LAT.

Le chalet de week-end avait été transformé par la réunion de deux bâtiments, l'agrandissement d'un sous-sol, la création d'une fosse et d'un escalier extérieur pour aménager un bâtiment destiné à l'habitation permanente alors que le bâtiment se trouvait en zone agricole et que les recourants n'étaient pas agriculteurs.

L'article 24c LAT réservait certes la garantie de la situation acquise mais uniquement pour les constructions hors zone à bâtir, érigées ou transformées de manière conforme au droit matériel en vigueur au ler juillet 1972, date de l'entrée en vigueur de la loi fédérale du 8 octobre 1971 sur la protection des eaux contre la pollution, qui avait introduit le principe de la séparation du territoire bâti et non bâti (ATF 129 II 396 c. 4.2.1 p. 398).

En l'espèce, la construction initiale datait de 1976, selon les plans figurant au dossier (66'797-2).

Du fait des agrandissements réalisés et détaillés ci-dessus, le DCTI avait à juste titre considéré que le projet ne pourrait pas être autorisé vu l'article 42 OAT, applicable aux constructions et installations pour lesquelles l'article 24c LAT était applicable. Les recourants ne pouvaient pas prétendre à l'octroi d'un bonus de 30 % pour un agrandissement éventuel.

La bonne foi de l'administration ne pouvait pas être mise en doute. Une demande de renseignements était sans portée juridique (art. 5 al. 4 LCI). Par ailleurs, le dossier démontrait les difficultés qu'avait rencontrées le DCTI à obtenir des renseignements de la part de MM. Bauer.

10. Par acte déposé le 12 octobre 2007, MM. Braun ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif en concluant à son annulation, à la délivrance de l'autorisation de transformer selon la demande déposée le 11 août 2006 (DD 100'734-4), cas échéant à ce que cette autorisation soit assortie d'une interdiction de changement d'affectation du pavillon.

La demande d'autorisation de transformer la bâtisse répondait au souci de maintenir en l'état des constructions datant de plus de trente ans, en profitant de l'occasion pour rafraîchir la ligne architecturale.

Ils n'avaient jamais eu l'intention de s'établir de façon durable dans la maisonnette, ni de faire du pavillon leur demeure principale. La commission avait fait preuve d'arbitraire en tenant cette intention pour avérée.

Les plans de l'époque, auxquels se référait le DCTI, mentionnaient une surface de plancher de 21 m2 pour le pavillon. Cependant, une cave, non prévue par ces plans, avait été creusée en même temps que les fondations de la maisonnette et le permis d'habiter avait été établi le 11 septembre 1978, après la visite d'un inspecteur.

Le cadastre faisait d'ailleurs état d'une surface de 29 m2 pour le pavillon et de 21 m2 pour la remise.

Les recourants indiquaient que "personne ne conteste au demeurant que les plans d'autorisation diffèrent de l'état du bâtiment validé en 1978 par le permis d'habiter".

Le DCTI s'était fondé sur une constatation inexacte des faits pour prendre sa décision. Il n'y avait pas eu "création d'un sous-sol" après 1976 et la collaboratrice du DCTI, présente lors du transport sur place effectué le 7 décembre 2006, avait admis que cet élément n'avait pu échapper à l'inspecteur ayant délivré le permis d'habiter en 1978.

Le DCTI avait, considéré à tort que les conditions des articles 24c LAT et 42 OAT n'étaient pas remplies. Or, l'agrandissement de la construction était de 29%, soit de 8,7 m2 (sic) celle-ci ayant une surface de 29 m2 selon la feuille de calcul Excel qu'ils avaient remplie avec l'assistance d'un fonctionnaire du DCTI.

Le DCTI avait, par son attitude et au gré des rencontres successives entre les recourants et ses collaborateurs, généré une certitude quant à la délivrance de l'autorisation de transformer les constructions si les multiples exigences formulées étaient remplies. Les recourants avaient engagé des montants importants, notamment en frais d'architecte, aux fins de remanier le projet initial selon les exigences du département. Le refus de l'autorisation de construire revenait à empêcher tout autre projet de rénovation, même léger, des constructions existantes.

11. Le DCTI a répondu le 8 novembre 2007 et conclu au rejet du recours.

Les recourants avaient indiqué à plusieurs reprises au département que le bâtiment considéré était une habitation et qu'une autorisation en ce sens avait été délivrée. Le projet déposé indiquait également qu'ils souhaitaient transformer des habitations. L'installation envisagée d'une buanderie et d'un chauffage et le projet de relier les deux bâtiments suffisaient à démontrer que les recourants avaient bien l'intention de rendre ceux-ci habitables en permanence. Il était apparu que l'autorisation d’habiter délivrée portait sur un week-end, soit une habitation temporaire, mais pas sur la remise. Même en l'absence de changement d'affectation, aucune autorisation ordinaire ne pourrait être accordée, car les recourants n'étaient pas agriculteurs et le bâtiment projeté n'était pas destiné à une exploitation agricole.

Le week-end était plus grand que celui autorisé selon les plans visés "ne varietur" du 12 novembre 1976. Il avait été agrandi sans autorisation par un sous-sol de 28,3 m2 et une surface supplémentaire de 7,3 m2 au rez-de-chaussée. Il importait peu de connaître la date de ces agrandissements, mais ceux-ci devaient être pris en compte dans le calcul des agrandissements admissibles au sens de l'article 42 alinéa 3 OAT. Ainsi, les possibilités offertes par cet article étaient épuisées, que l'on tienne compte ou non de la remise.

Le département contestait avoir donné l'assurance que l'autorisation de construire serait accordée si le projet était modifié selon les indications données. Il avait demandé à plusieurs reprises aux recourants de produire l'état autorisé des constructions litigieuses. Ceux-ci n'avaient jamais honoré cette demande. A l'automne 2006, le DCTI avait pour la première fois soulevé la question relative aux différences de métrage en comparant les plans se trouvant dans ses archives et ceux de l'état actuel. Le comportement des recourants était à l'origine de cette nouvelle objection du département.

12. Il ressortait des plans contenus dans le dossier du DCTI, dessinés le 7 juin 2006 par l'architecte des recourants, que les fenêtres étaient au nombre de sept pour le week-end et de cinq pour la remise, alors qu'elles étaient au nombre de deux pour le week-end et d'une pour la remise sur les plans visés ne varietur datés de 1976 pour le week-end et de 1978 pour la remise. Les portes du week-end étaient au nombre de deux en juin 2006 alors qu'elles étaient au nombre de trois, une par côté, sur les plans de 1976. Enfin, le chalet de week-end avait passé d'une longueur 7 mètres à 9,27 mètres actuellement et la remise de 6,50 mètres à 6,90 mètres.

13. Une audience de comparution personnelle des parties a eu lieu le 18 janvier 2008, mais seul M. Braun fils s’est présenté.

a. Le chalet de week-end et la remise avaient été autorisés alors qu’il était enfant puisqu'il était né en 1968. Son père lui avait certifié qu'il n'y avait jamais eu de travaux subséquents, c'est-à-dire que ces bâtiments n'avaient pas été agrandis. Ceux-ci n’étaient ni chauffés, ni utilisables d'où la requête pour les rénover afin que lui-même et ses parents puissent en profiter. Ils ne voulaient pas y habiter de manière permanente, contrairement aux allégués du DCTI.

b. Le DCTI a maintenu que l'article 24c LAT ne s'appliquait pas car le bâtiment en cause avait été érigé après 1972. Le 1er juillet 1972 était la date d'entrée en vigueur de la loi sur la protection des eaux contre la pollution, et c'était ce moment qui était déterminant au regard de l'article 41 alinéa 2 OAT. Les autres exceptions prévues par les articles 24a, b et d LAT n'étaient pas applicables. Monsieur Braun fils avait toujours indiqué qu'il entendait transformer les bâtiments en une habitation. Il n'avait jamais prouvé par pièces que les bâtiments actuels avaient été autorisés en tant que tels. Par conséquent, le changement d'affection était apparu récemment. Enfin, le projet assimilerait le week-end à une habitation permanente. Conformément au préavis négatif de la DAT, ce changement de destination n'était pas autorisable.

Sur quoi, d'entente entre les parties la cause a été suspendue dans l'attente du dépôt d'une demande autorisation de construire relative à un nouveau projet.

14. Sans nouvelle des recourants, le tribunal de céans a demandé le 21 mai 2008 aux parties si une demande d'autorisation de construire avait été déposée.

a. Le département a répondu par la négative le 28 mai 2008.

b. Le 6 juin 2008, les recourants ont confirmé qu'aucune nouvelle demande d'autorisation de construire n'avait été déposée. Ils ont joint à leur réponse un courrier du département du 22 janvier 2008 dans lequel celui-ci acceptait, sous réserve de l'examen de la demande d'autorisation de construire, une rénovation des deux bâtiments sans modifier leur surface, leur destination ainsi que leur aspect général. Lors d'une réunion avec le département, ce dernier n’avait pas voulu reconnaître que les surfaces cadastrées existantes pouvaient être utilisées dans le cadre d'une rénovation. Cette position rendait extrêmement difficile l'élaboration, par le bureau d'architecte, d'un projet autorisable.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. a. La zone agricole est régie par les articles 16 et 16a LAT, ainsi que par les articles 20 et suivants LaLAT. Ces dispositions définissent notamment les constructions qui sont conformes à la zone, soit qu'elles sont nécessaires à l'exploitation agricole, soit qu'elles servent au développement d'une activité conforme.

b. Une autorisation de construire ne peut être délivrée que si la construction est conforme à la zone (art. 22 al. 2 lit. a LAT).

c. Une autorisation dérogatoire pour une construction hors zone à bâtir peut toutefois être accordée aux conditions prévues par les articles 24 à 24d LAT, complétés par les articles 27, 27a à d LaLAT.

En l'espèce, la construction litigieuse est un chalet de type "week-end" en bois, raccordé aux eaux usées, comportant des fenêtres et destiné à une habitation temporaire. Son utilisation a pour but de passer des moments de détente dans une zone non-construite et légèrement boisée. Partant, le bâtiment ne peut être considéré comme une construction conforme à la zone agricole (ATA/912/2004 du 23 novembre 2004 ; RJJ 1993 330-338).

3. Il convient dès lors d’examiner si la transformation envisagée peut être autorisée à titre dérogatoire au sens de l’article 24c LAT.

a. Les règles légales relatives aux « exceptions prévues hors de la zone à bâtir » ont été modifiées par la novelle du 20 mars 1998, entrée en vigueur le 1er janvier 2000 (nouveaux articles 24 à 24d LAT et 39 à 43 OAT). A cet égard, le nouveau droit fait clairement la distinction entre les nouvelles constructions et les transformations.

L’article 24c LAT prévoit que, hors zone à bâtir, les constructions et installations qui peuvent être utilisées conformément à leur destination, mais qui ne sont plus conformes à l’affectation de la zone bénéficient en principe de la garantie de la situation acquise (al. 1). L’autorité compétente peut autoriser la rénovation de telles constructions et installations, leur transformation partielle, leur agrandissement mesuré ou leur reconstruction, pour autant que les bâtiments aient été érigés ou transformés légalement. Dans tous les cas, les exigences majeures de l’aménagement du territoire doivent être satisfaites (al. 2).

Aux termes de l’article 41 OAT, l’article 24c LAT est applicable aux constructions et installations qui ont été érigées ou transformées conformément au droit matériel en vigueur à l’époque, mais qui sont devenues contraires à l’affectation de la zone à la suite d’une modification de la législation ou des plans d’aménagement.

Selon l’article 42 OAT, les constructions et installations pour lesquelles l’art. 24c LAT est applicable peuvent faire l’objet de modifications si l’identité de la construction ou de l’installation et de ses abords est respectée pour l’essentiel. Sont admises les améliorations de nature esthétique (al. 1). Le moment déterminant pour l’appréciation du respect de l’identité est l’état de la construction ou de l’installation au moment de la modification de la législation ou des plans d’aménagement (al. 2). La question de savoir si l’identité de la construction ou de l’installation est respectée pour l’essentiel est à examiner en fonction de l’ensemble des circonstances. Ne peut en tout cas être rebâtie que la construction ou l’installation qui pouvait être utilisée conformément à sa destination au moment de sa destruction ou de sa démolition et dont l’utilisation répond toujours à un besoin. Si des raisons objectives l’exigent, l’implantation de la construction ou de l’installation de remplacement peut légèrement différer de celle de la construction ou de l’installation antérieure (al. 4).

b. L’article 24c LAT ne vise que les bâtiments qui ont été construits légalement avant le 1er juillet 1972, date d’entrée en vigueur de la loi fédérale sur la protection des eaux contre la pollution du 8 octobre 1971 (Leaux – RS 814.20) qui a introduit pour la première fois une séparation stricte des territoires constructibles de ceux qui ne le sont pas (ATF 129 II 396 consid. 4.2.1. p. 398). Cette date du 1er juillet 1972 sert de référence, même si depuis lors la Leaux a été abrogée par la loi fédérale sur la protection des eaux du 24 janvier 1991 (RS 814.20) entrée en vigueur le 1er novembre 1992.

Il en va de même des bâtiments construits ultérieurement, mais affectés après cette date à une zone de non-bâtir, en raison notamment de l’adoption d’un plan d’affectation conforme à la LAT. N’entrent toutefois pas dans le champ d’application de l’article 24c LAT les constructions et installations qui servaient à un usage agricole au moment de la modification du droit, car on ne peut pas considérer qu’elles soient devenues contraires à l’affectation de la zone au sens de la loi ou de l’ordonnance (F. MEYER STAUFFER, La zone agricole, in Journées suisses du droit de la construction 2001, p. 52).

4. Le chalet de week-end a été construit en 1976 et la remise en 1978.

Les recourants admettent eux-mêmes que le sous-sol du week-end a été créé en 1976, au mépris des plans déposés alors pour l'obtention de l'autorisation de construire. L'entrée en vigueur de la LAT le 1er janvier 1980 a modifié la qualification de la parcelle en zone agricole, soit en zone non-constructible. D'autres transformations ont été effectuées sur les deux bâtiments sans autorisation de construire, à une date indéterminée : la hauteur des constructions a été modifiée, leurs surfaces ont été augmentées, les portes et fenêtres des bâtiments actuels ne sont plus aux mêmes emplacements que sur les plans visés "ne varietur" de 1976 pour le week-end et de 1978 pour la remise. Ces transformations sont illégales et l'octroi d'un permis d'habiter en 1978 ne "guérit" pas ce vice.

En conséquence, ces constructions étant postérieures au ler juillet 1972 d'une part, et les modifications effectuées n'ayant pas été autorisées, d'autre part, l'article 24c LAT n'est pas applicable.

Il est dès lors inutile d'examiner les conditions d'application de l'article 42 OAT et la question relative au changement d'affectation peut demeurer ouverte.

5. Enfin, les recourants se prévalent du principe de la bonne foi, le département leur ayant donné, par ses demandes successives de modifications du projet, l'assurance que le projet serait autorisé.

Découlant directement de l’article 9 Cst. et valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi - qui s'applique aussi bien à l'administré qu'à l'autorité - protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités (ATF 126 II 377 consid. 3a p. 387 et les arrêts cités ; ATF 124 II 265 consid 4a p. 269-270). Selon la jurisprudence établie sur la base de l’article 4 aCst., applicable au regard de l’article 9 Cst., les assurances ou les renseignements erronés donnés par les autorités confèrent des droits aux justiciables lorsque les cinq conditions cumulatives suivantes sont remplies. Tout d’abord, une promesse concrète doit avoir été faite à l’égard d’une personne déterminée. L’autorité doit avoir agi dans le cadre et dans les limites de sa compétence. Il faut que la personne concernée n’ait pas été en mesure de se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement fourni, qu’elle se soit fondée sur celui-ci pour prendre des dispositions qu’elle ne peut ensuite modifier sans subir de préjudice et, enfin, que la loi n’ait pas été modifiée depuis le moment où la promesse a été faite (ATF 121 II 473 consid. 2c p. 479 ; ATF 121 V 65 consid. 2a p. 66 ss. ; ATF 117 Ia 285 consid. 2b et références citées ; ATF 117 Ia 302, consid. 4e publié in JdT 1993 I p. 415 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A.9/1999 du 18 avril 2000, consid. 3a).

En l'espèce, aucune promesse concrète n'a été émise par le DCTI, seule autorité compétente pour délivrer une autorisation de construire. Les recourants ne peuvent pas déduire des modifications requises par le département une quelconque assurance que l'autorisation de construire serait accordée, celui-ci étant tenu de contrôler que le projet dans son ensemble est conforme au droit (ATA/178/2008 du 15 avril 2008). De plus, quand bien même les recourants étaient déjà propriétaires de la parcelle en question avant la délivrance de l'autorisation de construire de 1976, ils n'ont fourni aucune explication sur les transformations importantes que les bâtiments ont subies depuis cette date, alors qu'ils ont eux-mêmes admis qu'ils y avaient des différences entre les plans visés "ne varietur" et les bâtiments actuels.

Le grief de la violation du principe de la bonne foi sera écarté.

6. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement. Aucune indemnité ne leur sera allouée (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 octobre 2007 par Messieurs Mathieu (père) et Mathieu (fils) Braun contre la décision du 7 septembre 2007 de la commission cantonale de recours en matière de constructions ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 2'000 ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Julien Blanc, avocat des recourants ainsi qu'à la commission cantonale de recours en matière de constructions, au département des constructions et des technologies de l'information et à l'office fédéral du développement territorial.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Thélin, Mmes Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :