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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4298/2020

ATA/1359/2021 du 14.12.2021 sur JTAPI/461/2021 ( LDTR ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : DROIT D'ÊTRE ENTENDU;DÉCISION DE RENVOI;MARCHÉ LOCATIF;VENTE D'IMMEUBLE;UNITÉ D'UNE PROPRIÉTÉ PAR ÉTAGES
Normes : Cst.29.al2; LDTR.39.al2; LDTR.39.al4
Résumé : Le département compétent autorise l’aliénation d’un bien immobilier entre autres un appartement si celui-ci n’a jamais été loué ou a fait une fois au moins l’objet d’une autorisation d’aliéner en vertu de la LDTR. En cas de réalisation de l’une des hypothèses légales, le département est tenu de délivrer une autorisation d’aliéner. En revanche, il refuse l’autorisation lorsqu’un motif prépondérant d’intérêt public ou d’intérêt général s’y oppose. Il procède alors à une pesée des intérêts. Pour exercer son pouvoir d’appréciation en connaissance de cause et décider que l’intérêt public de sauvegarder le parc locatif cantonal est moins prépondérant que l'intérêt privé des propriétaires à aliéner leur bien immobilier et des acquéreurs à l’acheter, il doit procéder à une instruction appropriée du dossier. En cas de renvoi de la cause, il est lié par des instructions contraignantes de l’autorité judiciaire.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4298/2020-LDTR ATA/1359/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 décembre 2021

 

dans la cause

 

ASSOCIATION GENEVOISE DES LOCATAIRES
représentée par Me Romolo Molo et Me Maurice Utz, avocats

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OFFICE CANTONAL DU LOGEMENT ET DE LA PLANIFICATION FONCIÈRE

Mme A______ et MM. B______ et C______

représentés par Me Nicolas Wyss, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 mai 2021 (JTAPI/461/2021)



EN FAIT

1) Feu M. D______, décédé le ______ 2010, a eu quatre enfants, Mme A______ et Messieurs B______ et C______
(ci-après : les consorts) et M. E______. M. C______ est le père de Messieurs M. D______, F______ et G______.

Entre 2015 et 2020, les consorts et M. E______ et sa famille ont quitté la Suisse pour l’H______. MM. D______ , F______ et G______ sont restés à Genève.

2) a. Par contrat de vente signé le 29 septembre 2000 devant notaire et enregistré au registre foncier (ci-après : RF) le 2 octobre 2000, feu M. D______ a acheté à I______ SA (ci-après : I______ SA) et à MM. J______, K______, L______ et M______, l’immeuble de cinq étages sis ______, rue N______, sur la parcelle 1______ de la commune de Genève, section O______, située en zone 2, avec notamment la précision, sous « entrée en jouissance », que « l’acquéreur entre immédiatement en possession et jouissance de l’immeuble qui lui est présentement vendu libre de tous bail, biens et personnes, à l’exception de l’arcade de 3,75 mètres sur 5,75 mètres, louée à Mme P______, jusqu’au [30 septembre 2001], en vertu d’un bail dont l’acquéreur déclare avoir reçu une photocopie et qu’il reprend par les présentes en l’acquit et à la décharge des vendeurs ». Le prix d’acquisition était de CHF 893'200.-.

Selon le RF, l’immeuble précité est la propriété des consorts.

b. Le 16 décembre 2016, les consorts sont, dans le cadre de la succession de feu leur père, devenus propriétaires des lots de copropriétés conférant un droit d’usage exclusif portant sur deux appartements nos 4.01 et 5.01, de sept pièces chacun, aux 2ème et 3ème étages de l’immeuble précité. Ces deux appartements font partie des cinq appartements situés dans cet immeuble dont le 1er étage est occupé par des locaux commerciaux au-dessus du rez-de-chaussée, au niveau duquel se trouvent trois arcades, plus deux étages de combles. Les cinq appartements occupent les 2ème au 5ème étages ainsi que le 1er étage des combles (cahier de répartition des locaux, propriété par étages [ci-après : PPE], établi le 11 mars 2002 par des géomètres).

c. D’après le registre de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), MM. D______, F______ et G______ habitent dans l’immeuble précité.

3) Par requêtes du 11 mai 2017, les consorts ont sollicité du département de l’aménagement, du logement et de l’énergie, devenu le département du territoire (ci-après : DT ou département) l’autorisation d’aliéner les appartements susvisés.

La vente était motivée par un besoin de gestion de leur patrimoine privé. L’achat était destiné à une occupation des appartements par les acquéreurs comme résidence principale. Le prix convenu pour le bien immobilier 5.01 était de CHF 3'958'200.-, celui de l’appartement 4.01 de CHF 4'360'000.-.

4) Par arrêtés du 11 juillet 2017 (VA 2______ et 3______), publiés dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour, le département, par l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF), a autorisé l’aliénation, par les consorts, de l’appartement n° 4.01 au profit de Mme et M. Q______, et de l’appartement n° 5.01 au profit de M. R______.

5) Par acte du 25 juillet 2017, l’Association genevoise des locataires (ci-après : ASLOCA) a déposé un recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre les autorisations de vente précitées, concluant, préalablement, à ce qu’il soit constaté qu’il n’existait aucun motif d’autorisation d’aliéner les lots 5.01 et 4.01, et, principalement, à l’annulation des arrêtés du département du 11 juillet 2017 et au refus de toute autorisation d’aliénation concernant cet immeuble. Subsidiairement, les arrêtés devaient être annulés et la cause renvoyée au département pour instruction dans le sens des considérants.

6) Par jugement du 13 mars 2018, le TAPI a rejeté le recours.

Certes, les appartements en cause entraient, en raison du nombre de pièces, dans les catégories de logement où sévissait la pénurie. Toutefois, selon une attestation établie par un notaire, ils n’avaient jamais été loués, ni offerts en location et avaient toujours été occupés par les consorts et/ou des membres de leur famille.

7) Par acte expédié le 30 avril 2018, l’ASLOCA a formé recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant notamment à son annulation.

L’immeuble en cause avait, en 1986 et jusqu’à une date indéterminée de l’acquisition de la propriété commune par I______ SA et MM. J______, K______, L______ et M______, été en mains d’une unique propriétaire, Mme S______.

8) Par arrêt du 7 mai 2019 (ATA/870/2019), la chambre administrative a admis partiellement le recours, annulé le jugement du TAPI du 13 mars 2018 et les arrêtés du 11 juillet 2017 (VA 2______ et 3______) et renvoyé la cause au DT afin qu’il procède à une instruction puis rende une nouvelle décision, au sens des considérants.

Les appartements en cause entraient, en raison du nombre de pièces, dans les catégories de logements où sévissait la pénurie et leur vente était, sous cet angle, soumise à autorisation. D’après un examen du RF, les consorts
étaient propriétaires non seulement des deux appartements concernés, mais aussi de l'entier de l'immeuble sis sur la parcelle 1______. À teneur de la législation cantonale, tout appartement destiné à la location ou offert en location devait conserver son affectation locative. Il y avait lieu d'investiguer l'historique complet de l'immeuble et des appartements afin de déterminer si les appartements en cause avaient été une fois loués et/ou fait l'objet d'une autorisation d'aliéner qui les aurait retirés du marché locatif.

9) Le 21 mai 2019, l'ASLOCA a indiqué au département qu’en sa qualité de partie, elle souhaitait participer à l'instruction de la cause et se voir notifier toute décision qui serait rendue.

10) Par arrêt du 14 octobre 2019 (1C_340/2019), le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours interjeté par les consorts contre l'arrêt précité de la chambre administrative.

L’arrêt de la chambre administrative ne mettait pas un terme à la procédure et s'analysait comme une décision de renvoi revêtant un caractère incident. La décision à rendre par le département dépendrait du résultat des investigations auxquelles il devait procéder visant à déterminer si les appartements en cause avaient ou non été loués avant leur acquisition par le père des consorts et/ou avaient fait une fois au moins l’objet d’une autorisation d’aliéner au sens de la législation cantonale qui les aurait retirés du marché.

11) Par courrier du 8 mai 2020, les consorts ont invité le département à rendre de nouvelles décisions et lui ont envoyé des documents faisant état du caractère luxueux des appartements concernés.

Depuis l’acquisition des appartements, aucun n’avait été offert en location. L’emplacement de l’immeuble était prestigieux et son caractère luxueux avait été attesté par un huissier judiciaire dans un constat établi en mai 2018. Le loyer mensuel des appartements était supérieur à ceux du marché.

12) Par arrêtés du 24 août 2020 nos VA 2______bis et VA 3______bis annulant et remplaçant ses arrêtés nos VA 2______ et VA 3______ du 17 juillet 2017, publiés dans la FAO du même jour, le département a autorisé l'aliénation des deux lots de PPE no 4.01 et no 5.01 respectivement à Mme et M. Q______ et à M. R______.

L'immeuble dans lequel étaient compris les appartements concernés était soumis au régime de la PPE depuis octobre 2003. Les consorts les avaient acquis par voie de succession en décembre 2016 et souhaitaient désormais les revendre. Feu M. D______ avait quant à lui acquis l'entier de l'immeuble en octobre 2000. À cette époque, tous les appartements composant l'immeuble étaient libres de tout occupant. À compter de cette date, ils avaient été destinés à l'usage personnel de feu M. D______ et de sa famille. Ils n’avaient plus été loués ou offerts en location. Les appartements concernés étaient désormais libres de tout occupant et étaient destinés à l’habitation personnelle des acquéreurs. L'emplacement de l'immeuble en cause était notoirement prestigieux et le caractère luxueux des appartements concernés avait été attesté par le constat d'un huissier judiciaire en mai 2018. Le prix de vente total avait été fixé à CHF 4'360’000.- pour le lot n° 4.01 et à CHF 3'958'200.- pour le lot n° 5.01. Dans le cadre de la pesée d'intérêts à laquelle il devait procéder et en application du principe de proportionnalité, ces éléments précités, notamment dans la mesure où les appartements en cause étaient sortis du marché locatif depuis vingt ans et n'entraient pas dans une catégorie de logements répondant aux besoins prépondérants de la population, les intérêts privés des consorts à les aliéner étaient prépondérants.

13) Le 6 octobre 2020, le TAPI a délivré aux consorts des attestations de non recours contre les arrêtés du 24 août 2020.

14) Par courriels du 14 décembre 2020, l’ASLOCA a requis du département de lui notifier les décisions du 24 août 2020 et les actes d’instruction intervenus depuis l’ATA/870/2019 précité.

15) Par courriel du 14 décembre 2020 également, le département a indiqué à l’ASLOCA que ses décisions avaient été rendues sur la base de l’ATA/870/2019 et des documents fournis dans le cadre de la procédure précitée, sans préjudice des documents produits par les consorts le 8 mai 2020.

16) Par acte expédié le 18 décembre 2020, l’ASLOCA a recouru auprès du TAPI contre les décisions du 24 août 2020 en concluant à leur annulation. Elle a également le même jour requis dans un acte séparé des mesures provisionnelles urgentes visant à faire interdiction au RF et au notaire concerné, sous la menace de l’art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), respectivement de procéder à tout acte ou inscription visant à exécuter les autorisations d’aliéner nos VA 2______ et VA 3______ et de participer à tout acte visant leur instrumentation.

Elle avait eu connaissance des autorisations d'aliéner le 14 décembre 2020, en consultant le site internet « SAD-Consultation ». Dès lors, déposé dans le délai de trente jours suivant la connaissance de celles-ci, le recours était recevable. Le département avait violé son droit d'être entendue et de participation à l'administration des preuves. Il ne s'était par ailleurs pas conformé aux instructions des autorités judiciaires lui intimant de procéder à des mesures d'instruction précises. Il avait accordé deux autorisations d'aliéner par substitution de motif, sans aucune mesure d'instruction permettant de déterminer si cette substitution était licite.

Selon, le département, un motif prépondérant d'intérêt privé commandait d'octroyer les autorisations contestées. De plus, les consorts n'avaient jamais loué les appartements en question et ceux-ci étaient « luxueux ». Pourtant, le caractère luxueux ne pouvait pas retirer un logement du marché locatif. Par ailleurs, rien, sauf leur intérêt privé économique d'individualiser ces logements, n'empêchait les consorts de vendre leur immeuble en bloc.

17) Par décision sur mesures provisionnelles urgentes du 21 décembre 2020, le TAPI a, sous la menace des peines prévues à l'art. 292 CP, fait interdiction au RF de procéder à tout acte ou inscription visant à exécuter les autorisations d'aliéner nos VA 2______bis et VA 3______bis et au notaire concerné de participer à tout acte visant l'instrumentation des autorisations d'aliéner précitées et de procéder à tout acte ou inscription tendant à leur exécution.

18) Par acte du 28 décembre 2020, les consorts ont recouru auprès de la chambre administrative à l’encontre de la décision précitée, en concluant à son annulation.

19) Par décision sur mesures provisionnelles du 18 janvier 2021, contre lesquelles les consorts ont recouru le 25 janvier 2021 auprès de la chambre administrative, le TAPI a maintenu l’interdiction du 21 décembre 2020.

20) Par jugement du 11 mai 2021, le TAPI a rejeté le recours de l’ASLOCA du 18 décembre 2020.

Le département pouvait accorder de nouvelles autorisations par substitution de motifs dans la mesure où il disposait d’une marge d’appréciation lorsqu’aucun des motifs d’autorisation expressément prévus par la législation cantonale n’était réalisé. Il devait rechercher si l’intérêt public l’emportait sur l’intérêt privé du propriétaire à aliéner son appartement. Il n’avait dès lors pas à instruire si les conditions d’une aliénation d’un appartement qui n’avait jamais été loué étaient remplies. En revanche, il devait procéder à une pesée des intérêts en présence, afin de déterminer si l'autorisation pouvait tout de même être délivrée.

Les intérêts privés des consorts à la vente de leurs deux appartements et l'intérêt public à la protection du parc locatif genevois s’opposaient. De nationalité saoudienne, les intéressés avaient acquis les deux appartements concernés par voie de succession. Ils y avaient vécu avec leur famille depuis 2000, jusqu’à leur départ de Suisse le 30 novembre 2015 respectivement les 15 novembre et 22 décembre 2016. Ils devaient ainsi, par principe, régler leurs affaires en Suisse, dans la mesure où ils n'y conservaient plus d'attache particulière. Leur intérêt privé à la vente de leurs appartements était présumé l’emporter sur l’intérêt public.

De plus, lors de l’acquisition de l’immeuble par feu M. D______ , en octobre 2000, tous les appartements composant l'immeuble étaient libres de tout occupant et avaient été destinés à l'usage personnel de celui-ci et de sa famille. Ils étaient ainsi sortis du parc locatif et l’étaient encore au moment du dépôt de la requête du 11 mai 2017 et même après.

Les acquéreurs souhaitaient acheter les appartements en cause pour y constituer leurs propres logements et non à des fins d'investissement. Le prix de vente arrêté dans le cadre d’une transaction, librement fixé par les parties, ne pouvait pas influencer la pesée des intérêts. Aucun élément ne permettait de supposer une opération à but spéculatif de la part des consorts, qui avaient habité les appartements concernés durant plus de quinze ans.

Interdire la vente et contraindre les consorts à rester propriétaires de ces deux logements à Genève était disproportionné et portait une atteinte démesurée à la garantie de la propriété.

Par ailleurs, une vente en bloc ne s’imposait pas dans la mesure où les appartements concernés étaient individualisés. En outre, selon le registre informatisé Calvin de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : calvin), d’autres membres de la famille de feu M. D______ , M. E______, qui y avait vécu avec sa famille jusqu’au 24 août 2020, et MM. D______ , F______ et G______ , fils de M. C______ vivaient toujours dans l’immeuble au jour du dépôt de la requête en aliénation.

21) Par acte expédié le 7 juin 2021, l’ASLOCA a recouru auprès de la chambre administrative contre le jugement précité en concluant à son annulation et à celle des autorisations d’aliéner nos VA 2______bis et VA 3______bis. Subsidiairement, elle a conclu au renvoi du dossier au DT pour instruction.

Le TAPI, au lieu d’imposer une vente de tout l’immeuble, ou une vente en bloc des appartements concernés, avait retenu une vente à la découpe. Il avait porté une atteinte grave à l’intérêt public de sauvegarder le parc locatif cantonal en période de pénurie. Les consorts n’avaient aucun droit à une autorisation d’aliéner. En outre, le département avait ignoré l’injonction de la chambre administrative d’instruire le dossier. Il n’avait pas instruit l’historique complet des appartements. On ignorait si les consorts étaient propriétaires d’autres appartements dans l’immeuble concerné. Un état de fait lacunaire ne pouvait pas permettre au DT d’exercer son pouvoir discrétionnaire. Le caractère luxueux des appartements était contesté, leur sortie du marché locatif également. Le législateur n’avait opéré aucune distinction entre les catégories de logements basée sur leur dimension ou leur caractère luxueux. Le seul critère retenu était celui de la pénurie de logements dans la catégorie concernée. En autorisant une vente à la découpe, le département allait à l’encontre des objectifs du législateur en période de pénurie. Une vente de l’immeuble en bloc ne lésait pas, en inscrivant un droit d’habitation en faveur des enfants des vendeurs, les intérêts privés des consorts, leur profit serait en revanche moindre. L’intérêt public à maintenir l’immeuble dans le parc locatif était prépondérant. La vente autorisée servait l’intérêt des consorts à maximiser leur profit.

En 1969, l’immeuble qui était alors la propriété de feu
Mme S______ était loué par MM. T______, pasteur, U______, V_____, W_____, X______ et Y______, Z______ et le journal « AA______ ».

22) Par décision du 22 juin 2021 (ATA/650/2021), la chambre administrative a déclaré sans objet les recours des 4 et 25 janvier 2021 dirigés respectivement contre les mesures provisionnelles urgentes et provisionnelles décidées par le TAPI.

23) Le 7 juillet 2021, le département a conclu au rejet du recours en renvoyant à ses décisions d’autorisation d’aliéner et au jugement du TAPI.

24) Le 12 juillet 2021, les consorts ont également conclu au rejet du recours, à la confirmation des décisions du département et du jugement du TAPI.

L’immeuble avait été acquis libre de tout bail d’habitation en octobre 2000. Il disposait de cinq appartements bénéficiant de caractéristiques spécifiques par leur emplacement et leur typicité. Les appartements en cause ne répondaient pas aux besoins essentiels de la population en raison de leurs caractéristiques typiques. Ils avaient été exclusivement occupés par les membres de la famille du propriétaire défunt. Ils étaient sortis du marché locatif depuis plus de vingt ans. Les consorts avaient été inscrits comme copropriétaires de l’immeuble par dévolution successorale le 16 décembre 2016. Une partie de la famille avait définitivement quitté la Suisse entre 2015 et 2020, à l’exception de trois enfants majeurs de l’un des copropriétaires.

25) Dans sa réplique, l’ASLOCA a indiqué que M. C______ était propriétaire d’une habitation spacieuse au quai AB______ ______, les époux Q______ propriétaires d’un appartement sis au quai AC______ ______ et d’un autre sis à la rue AD______ ______-______, et M. R______ propriétaire d’une habitation sise au chemin AE______ ______ à AF______, d’un appartement sis à place AG______ ______ à AH______, d’un appartement sis au chemin AI______ à AJ______, d’un appartement sis à la rue AK______ ______ à AL______ et d’un appartement sis à AM______ ______ à AN______.

La situation financière des consorts n’était pas connue. M. C______ était propriétaire d’un bien immobilier de valeur, sa situation financière était ainsi présumée aisée. Aucune nécessité économique ne justifiait de vendre les appartements concernés. Les caractéristiques mises en valeur par les consorts étaient celles usuelles caractérisant des immeubles construits à la même époque. L’ameublement réalisé par la famille propriétaire depuis 2000 était sans pertinence pour apprécier le caractère luxueux de l’immeuble. D’importantes nuisances dues au trafic routier ne permettaient en outre pas de retenir un confort extraordinaire des appartements concernés. Selon le Conseil d’État, tous les appartements d’une à sept pièces qui en raison de leur loyer ou de leur type étaient classées dans la catégorie de logement où sévissait la pénurie. L’absence d’une instruction complémentaire n’avait pas permis de connaître la valeur des loyers avant 2000 et s’ils étaient inférieurs à la valeur limite de deux fois et demie le plafond de la fourchette prévue par la législation cantonale.

26) Après la transmission de la réplique de l’ASLOCA, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

En outre, de jurisprudence constante, l’ASLOCA jouit de la qualité pour recourir au sens de l’art. 45 al. 5 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20 ; ATA/870/2019 du 7 mai 2019 consid. 1 ; ATA/31/2017 du 17 janvier 2017 consid. 1).

Le recours est dès lors recevable.

2) La recourante reproche au TAPI d’avoir confirmé des décisions du département alors que celui-ci avait statué sur un état de fait lacunaire et ignoré l’injonction de la chambre administrative d’instruire le dossier. Elle lui reproche implicitement la confirmation des décisions qui violeraient son droit d’être entendue.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b ; 127 III 576 consid. 2c). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3).

b. Les considérants de droit par lesquels une autorité motive le renvoi d'une affaire à l'autorité inférieure lient cette dernière (ATF 113 V 159 consid. 1c). Le principe est applicable même en l'absence de texte et vaut aussi dans la procédure administrative en général (ATF 117 V 237 consid. 2 ; 94 I 388 consid. 2 ; André GRISEL, Traité de droit administratif, p. 869). L'autorité précédente est tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l'arrêt de renvoi ; elle est liée par ce qui a déjà été tranché, ainsi que par les constatations de fait qui n'ont pas été critiquées (ATF 131 III 91 consid. 5.2 ; 104 IV 276 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_989/2020 du 16 novembre 2020 consid. 1.1.1). Des faits nouveaux ne peuvent être pris en considération que sur les points ayant fait l'objet du renvoi, lesquels ne peuvent être ni étendus, ni fondés sur une base juridique nouvelle (ATF 135 III 334 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_519/2013 du 3 septembre 2013 consid. 2.1). Ce principe, qui découle de la hiérarchie des juridictions et l’unité de la procédure, s'applique en cas de renvoi prononcé sur appel ou sur recours (ATF 140 III 466 consid. 4.2.1 s. et les références citées). Les instructions contraignantes contenues dans une décision de renvoi n’étant pas exécutoires en tant que telles, il appartient à la partie recourante d’engager une procédure pour déni de justice formel si l’autorité inférieure ne prend pas de nouvelles mesures, malgré la décision de renvoi (arrêt du Tribunal administratif fédéral du 1er novembre 2021 consid. 4.4 et les références citées).

c. En l’espèce, dans son arrêt (ATA/870/2019), la chambre administrative a renvoyé la cause au département en l’instruisant d'investiguer l'historique complet de l'immeuble concerné et de ses appartements afin de déterminer si ceux en cause avaient été une fois loués et/ou fait l'objet d'une autorisation d'aliéner qui les aurait retirés du marché locatif. Le TAPI a confirmé les décisions du 24 août 2020 du département qui ont accordé aux consorts intimés de nouvelles autorisations d’aliéner par substitution de motifs. Pour lui, le département pouvait procéder à une pesée des intérêts dans la mesure où aucun des motifs d’autorisation expressément prévus par l’art. 39 al. 4 LDTR n’était réalisé. Le DT devait rechercher si l’intérêt public de préserver le parc locatif l’emportait sur l’intérêt privé des propriétaires à aliéner leurs appartements. Celui-ci n’avait dès lors pas à instruire si les conditions de l’art. 39 al. 4 LDTR étaient remplies.

De son côté, dans un courriel du 14 décembre 2020, le département dit avoir tenu compte dans ses décisions du 24 août 2020 de l’ATA/870/2019, des documents figurant déjà dans le dossier et de ceux produits par les consorts le 8 mai 2020.

Avant d’autoriser l’aliénation des deux appartements concernés en se fondant sur une pesée des intérêts en présence au sens de l’art. 39 al. 2 LDTR, le département devait examiner d’abord si les conditions de la sortie des appartements du parc locatif cantonal étaient réalisées ou non. Or, les éléments se trouvant déjà dans le dossier avaient été jugés insuffisants par la chambre administrative pour répondre à cette question. De plus, le courrier du 8 mai 2020 des consorts intimés n’apportait pas d’éléments nouveaux pertinents permettant au département de rendre ses décisions. En revanche, les consorts intimés insistaient sur l’emplacement prestigieux et le caractère luxueux de l’immeuble. Certes, dans ce même courrier, ils avaient affirmé que depuis leur acquisition, les appartements concernés n’ont pas été offerts en location et que leur loyer mensuel était supérieur à ceux du marché. Toutefois, ces allégations ne répondaient pas à la demande d’investigation de l’historique complet formulée dans l’ATA/870/2019.

Dès lors que les investigations à mener au sens du renvoi de la chambre administrative s’inscrivaient dans le cadre de l’application de l’art. 39 al. 4 LDTR, le département ne pouvait pas procéder à une subrogation de motifs sans instruire les éléments pour lesquels la cause avait été renvoyée et donner à la recourante la possibilité de se déterminer sur le résultat de ses investigations. Il ne pouvait ainsi pas décider en se fondant sur une base juridique nouvelle, en l’occurrence l’art. 39 al. 2 LDTR, en raison du caractère contraignant de l’arrêt de renvoi.

En s’appuyant sur des éléments disponibles qui étaient déjà connus lorsque la chambre administrative a rendu son précédent arrêt et qui n’étaient pas pertinents pour se prononcer en connaissance de cause, le département a violé le principe de la force contraignante des considérants de l’arrêt de renvoi et le droit d’être entendue de la recourante. Le jugement du TAPI qui a confirmé la substitution de motifs opérée par le DT n’est dans ces circonstances pas conforme au droit.

Le grief de la recourante est dès lors fondé.

Le droit d’être entendu étant une garantie de nature formelle et les instructions contraignantes de l’arrêt de renvoi un principe général de procédure, leur violation entraîne l’annulation du jugement du TAPI et des décisions contestées du département.

Partant, la cause doit être renvoyée au département pour nouvelle décision après avoir mené des investigations exigées dans l’ATA/870/2019.

3) Au demeurant, sur le fond, le dossier devrait aussi être renvoyé au département pour les motifs qui suivent.

La recourante reproche au TAPI et au département d’avoir autorisé l’aliénation des deux appartements considérés et de ne pas avoir privilégié leur vente en bloc. Les décisions contestées favoriseraient une « vente à la découpe » en autorisant d’aliéner séparément les appartements en cause et à des acquéreurs différents.

a. L’aliénation, sous quelque forme que ce soit (notamment cession de droits de copropriété d’étages ou de parties d’étages, d’actions, de parts sociales), d’un appartement à usage d’habitation, jusqu’alors offert en location, est soumise à autorisation dans la mesure où l’appartement entre, à raison de son loyer ou de son type, dans une catégorie de logements où sévit la pénurie (art. 39 al. 1 LDTR). Le département refuse l’autorisation lorsqu’un motif prépondérant d’intérêt public ou d’intérêt général s’y oppose. L’intérêt public et l’intérêt général résident dans le maintien, en période de pénurie de logements, de l’affectation locative des appartements loués (al. 2). Afin de prévenir le changement d’affectation progressif d’un immeuble locatif, le désir d’un locataire, occupant effectivement son logement depuis 3 ans au moins, d’acquérir ledit logement n’est présumé l’emporter sur l’intérêt public que si 60 % des locataires en place acceptent formellement cette acquisition; dans ce cas cependant, les locataires restants devront obtenir la garantie de ne pas être contraints d’acheter leur appartement ou de partir (al. 3). Aux termes de l’art. 39 al. 4 LDTR intitulé « motifs d’autorisation », le département autorise l’aliénation d’un appartement si celui-ci a été dès sa construction soumis au régime de la PPE ou à une forme de propriété analogue, sous réserve du régime applicable à l’aliénation d’appartements destinés à la vente régi par l’art. 8A de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35 ; let. a) ; était, le 30 mars 1985, soumis au régime de la PPE ou à une forme de propriété analogue et qu’il avait déjà été cédé de manière individualisée (let. b) ; n’a jamais été loué (let. c) ; a fait une fois au moins l’objet d’une autorisation d’aliéner en vertu de la LDTR (let. d). En cas de réalisation de l’une des hypothèses de l’art. 39 al. 4 LDTR, le DT est tenu de délivrer l’autorisation d’aliéner. Il n’y a donc, le cas échéant, pas de place pour une pesée des intérêts au sens de l’art. 39 al. 2 LDTR.

b. Dans le cas d’appartements en PPE, la vente en bloc de ces derniers doit être préférée à la vente par unités séparées, ce procédé-là ne mettant en principe pas en péril les buts de la LDTR. Toutefois, même dans ce cadre, la vente en bloc de petits lots d’appartements augmente la probabilité d’une vente ultérieure de logements individualisés aux locataires en place et, partant, le risque d’atteinte au parc immobilier locatif protégé par la LDTR. Il y a donc lieu de privilégier une approche stricte de la protection conférée par cette loi pour éviter une telle atteinte par des « ventes à la découpe ». Ainsi, même en cas de vente en bloc, l’aliénateur doit justifier d’un intérêt privé particulier (arrêt du Tribunal fédéral 1C_137/2011 du 14 juillet 2011 consid. 3.3).

c. Une vente individualisée des appartements ne représente pas une nécessité pour une personne qui désire avant tout tirer un profit maximum de la réalisation forcée d'un immeuble. Cet intérêt, purement économique, doit céder le pas face à l'intérêt public évident que représente le maintien du parc locatif. La LDTR s'applique lorsqu'un appartement est individualisé, puis vendu, mais ne saurait empêcher la vente en bloc de plusieurs appartements à un même acquéreur, car, dans ce cas, le risque de voir ces appartements sortir du marché locatif est pratiquement nul (arrêt du Tribunal fédéral 1P.2/1999 du 19 avril 1999 consid. 2f, rés. in SJ 1999 II 287).

4) En l’espèce, les deux appartements en cause ont été acquis par feu M. D______ lorsque celui-ci a acheté l’entier de l’immeuble en comptant cinq appartements, en septembre 2000 et en est devenu l’unique propriétaire à des fins d’usage familial. L'immeuble est soumis au régime de la PPE depuis octobre 2003. Les intimés en sont devenus propriétaires en 2016 par dévolution successorale. Ils ont occupé les appartements en cause durant plus de quinze ans jusqu’à leur départ respectif de Suisse les 30 novembre 2015, 15 novembre et 22 décembre 2016 ainsi que le 24 août 2020, date des décisions contestées. Le 11 mai 2017, ils ont sollicité du DT l’autorisation de les aliéner.

Les intérêts qui s'opposent dans le cadre du présent litige sont, d'une part, les intérêts privés des consorts intimés à la vente des appartements et l’intérêt des acheteurs à acquérir ceux-ci, et d'autre part, l'intérêt public à la protection du parc locatif genevois.

a. Pour le TAPI, les consorts intimés en raison de leur départ définitif de Suisse, devaient, par principe, régler leurs affaires dans ce pays, dans la mesure où ils n'y conservaient plus d'attache particulière. Leur intérêt privé à la vente de leurs appartements était présumé l’emporter sur l’intérêt public. Les premiers juges ont ainsi confirmé la pesée des intérêts effectuée par le département sur la base de l’art. 39 al. 2 LDTR.

D’après les éléments qui ressortent du dossier, les consorts intimés sont propriétaires des lots PPE 4.01 et 5.01 depuis 2016. Ni le TAPI, ni le département n’ont investigué l’historique et les conditions du régime de la PPE. Aucun élément ne ressort du dossier à ce sujet. Par ailleurs, selon le RF, les consorts intimés sont propriétaires de tout l’immeuble considéré. Les conditions de l’acquisition de celui-ci par dévolution successorale ne sont pas non plus connues. On ignore notamment si M. E______ dont le départ définitif de Suisse est invoqué dans le cadre des intérêts privés prépondérants des consorts intimés, est propriétaire d’un lot de PPE ou s’il est aussi copropriétaire de tout l’immeuble. On ignore en outre les motifs qui ont poussé les consorts intimés à décider d’aliéner les deux appartements en cause et non l’intégralité de l’immeuble. En outre, d’après les documents produits par la recourante, l’un des consorts intimés est propriétaire d’un bien immobilier dans le canton. De plus, trois enfants d’un des consorts intimés occupent toujours une partie de l’immeuble. Ces faits, qui n’ont pas été clarifiés par le département, relativisent l’intérêt privé invoqué par les consorts intimés d’avoir quitté définitivement le canton de Genève et affaiblissent sa portée. Par ailleurs, le fait que les acquéreurs possèdent d’autres biens sur le territoire cantonal nuance aussi leurs déclarations de vouloir habiter personnellement les deux appartements en cause.

Ainsi, faute d’une instruction appropriée du dossier, le département ne pouvait pas exercer son pouvoir d’appréciation en connaissance de cause et décider que l’intérêt public de sauvegarder le parc locatif cantonal était moins prépondérant que l'intérêt privé des intimés à aliéner les appartements en cause et des acquéreurs à les acheter. Il ne disposait pas d’un dossier lui permettant de soutenir à satisfaction de droit que la vente des appartements en cause ne relevait pas uniquement des seuls intérêts économiques des vendeurs pour tirer un profit maximum de l’aliénation et de la pure convenance personnelle ou de motifs d’investissement des acheteurs par rapport à l’intérêt public à la protection du parc locatif genevois. Ainsi, les éléments permettant l’application de l’art. 39 al. 2 LDTR étaient insuffisants.

b. Selon la teneur des décisions attaquées, dans le cadre de la pesée d'intérêts, le département a pris en considération le fait que les appartements en cause étaient sortis du marché locatif depuis vingt ans et n'entraient pas dans une catégorie de logements répondant aux besoins prépondérants de la population, les intérêts privés des consorts intimés à les aliéner étant estimés ainsi prépondérants. Pour être retiré du marché locatif, un bien immobilier en particulier un appartement doit n’avoir jamais été loué ni fait l'objet d'une autorisation d'aliéner au sens de l’art. 39 al. 4 let. c et d LDTR. En cas de réalisation de l’une de ces hypothèses, le département est tenu de délivrer l’autorisation d’aliéner. Dans cette hypothèse, il n’a pas à procéder à une pesée des intérêts au sens de l’art. 39 al. 2 LDTR, puisque le requérant a droit à une autorisation d’aliéner. Or, sans une instruction sur l’historique complet de l’immeuble et d’autres éléments ayant motivé le renvoi de la cause au département par la chambre administrative dans son arrêt précité, celui-ci n’était pas en possession des éléments nécessaires pour trancher le litige.

Ainsi en l’état du dossier, le TAPI et le département ne disposaient pas d’éléments suffisants leur permettant de se prononcer en connaissance de cause sur l’application de l’art. 39 al. 2 LDTR ou de l’art. 39 al. 4 LDTR.

Le jugement du TAPI qui confirme les décisions contestées du département n’est ainsi pas conforme à la LDTR.

Le grief de la recourante est fondé.

Les considérants qui précèdent conduisent à l’admission partielle du recours. Le jugement du TAPI et les décisions contestées du département doivent être annulés. La cause sera renvoyée au département pour de nouvelles décisions après avoir mené des investigations exigées dans l’ATA/870/2019.

5) Vu cette issue, un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge solidaire des consorts (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 2'000.- sera allouée à la recourante à la charge solidaire des consorts (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 juin 2021 par l’Association genevoise des locataires contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 mai 2021 ;

au fond :

l’admet partiellement ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 mai 2021 et les décisions du 24 août 2020 (VA 2______bis et 3______bis) du département du territoire - office cantonal du logement et de la planification foncière ;

renvoie la cause au département du territoire - office cantonal du logement et de la planification foncière afin qu’il procède à une instruction puis rende une nouvelle décision, au sens des considérants ;

met un émolument de CHF 1’500.- à la charge solidaire de Mme A______ et Messieurs B______ et C______  ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 2'000.- à l’Association genevoise des locataires, à la charge solidaire de Mme A______ et Messieurs B______ et C______  ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romolo Molo et Me Maurice Utz, avocats de la recourante, à Me Nicolas Wyss, avocat de Mme A______ et Messieurs B______ et C______ , au département du territoire - office cantonal du logement et de la planification foncière ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Krauskopf, Lauber et McGregor, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :