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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3543/2017

ATA/1313/2017 du 21.09.2017 ( EXPLOI ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3543/2017-EXPLOI ATA/1313/2017

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 21 septembre 2017

sur mesures provisionnelles

 

dans la cause

 

A______ SA
et
B______ SA

représentées par Me Urs Saal, avocat

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR



Vu le recours interjeté le 30 août 2017 auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) par les sociétés A______ SA à C______ et B______ SA à D______ contre les décisions, déclarées exécutoires nonobstant recours, du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN) du 31 juillet 2017 sommant A______ SA de cesser immédiatement l’exploitation des établissements B______ sis rue du F______ et Boulevard G______ à Genève, d’une part et, d’autre part, sommant B______ SA de cesser immédiatement l’exploitation de l’établissement B______ sis rue du H______à Genève, à défaut de quoi les scellés seraient apposés, au motif que ces trois établissements étaient exploités sans autorisation préalable ;

vu la requête en restitution d’effet suspensif dont est assorti le recours ;

vu les observations sur effet suspensif du PCTN ;

vu les pièces du dossier ;

attendu qu’il en résulte que les sociétés recourantes sont propriétaires et exploitantes des établissements pour lesquels elles ont reçu notification des décisions querellées ;

que leur administrateur unique a déposé au printemps 2017 une demande d’autorisation d’exploitation pour chacun des établissements en cause ;

que, par courrier A+ du 18 mai 2017, le PCTN a retourné à l’administratrice les trois demandes, ne pouvant en l’état entrer en matière sur celles-ci car elles étaient incomplètes, les pièces manquantes ou lacunaires étant énumérées ;

que les trois établissements en cause n’ont plus d’exploitants autorisés depuis l’entrée en force des décisions – non contestées – du PCTN du 2 novembre 2016 retirant les autorisations d’exploiter des précédents exploitants ;

que ce nonobstant, et de manière non contestée, les sociétés recourantes ont continué à exploiter les établissements en cause ;

que le 11 juillet 2017, le PCTN a informé les sociétés recourantes de son intention de leur adresser une sommation de fermeture des établissements en cause et les a invitées à exercer leur droit d’être entendues ;

qu’elles n’ont pas donné suite à cette invite ;

que leur recours conclut à l’annulation des décisions du 31 juillet 2017 ainsi que du courrier du 18 mai 2017, qualifié de décision et demande en outre à ce qu’il soit ordonné au PCTN d’entrer en matière sur les requêtes d’autorisation d’exploiter déposées par l’administratrice, les sociétés recourantes devant être autorisées à exploiter les établissements en cause jusqu’à droit jugé au fond ;

que selon les recourantes, la « décision » du 18 mai 2017 constituait un déni de justice et, faute d’indication des voies de recours, ne pouvait servir de fondement aux décisions du 31 juillet 2017. L’administratrice remplissait les conditions légales pour la délivrance des autorisations sollicitées et les demandes déposées ne visaient qu’à poursuivre l’exploitation des établissements sous l’empire de la nouvelle législation ;

qu’à l’appui de la requête de restitution de l’effet suspensif, les sociétés recourantes mettent en avant leur intérêt à poursuivre l’exploitation des établissements en cause, notamment eu égard à leurs employés ;

que le PCTN s’est opposé à la restitution de l’effet suspensif, l’intérêt public à ne pas permettre la poursuite de l’exploitation d’établissements publics dépourvus d’autorisation d’exploitation l’emportant sur l’intérêt privé des sociétés recourantes ;

considérant en droit que :

1. Aux termes de l’art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; toutefois, lorsqu’aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3).

À teneur de l’art. 21 LPA, l’autorité peut d’office ou sur requête ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés (al. 1) ; ces mesures sont ordonnées par le président s’il s’agit d’une autorité collégiale ou d’une juridiction administrative (al. 2).

2. En l’espèce, le courrier du 18 mai 2017 et les décisions du 31 juillet 2017 ne tendent pas à renouveler des autorisations existantes sous l’ancienne législation puisque les exploitants antérieurement autorisés se sont vus retirer leurs autorisations en novembre 2016, sans contestation. L’administratrice des sociétés recourantes ne disposait quant à elle pas d’autorisation d’exploitation délivrée sous l’ancienne législation. Seules sont donc envisageables des mesures provisionnelles.

3. Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) – ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/955/2016 du 9 novembre 2016 consid. 4 ; ATA/1244/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2 ; ATA/1110/2015 du 16 octobre 2015 consid. 3).

Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités). Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HÄNER, op. cit., p. 265).

À cet égard, on relèvera que les sociétés recourantes n’ont recouru que le 30 août 2017, soit près d’un mois après l’ordre de fermeture de leurs établissements et qu’elles se bornent à alléguer qu’elles ont un intérêt privé prépondérant à poursuivre leur commerce, notamment eu égard à leurs employés. Si l’on peut admettre prima facie et sans autre démonstration que les fermetures ordonnées aient des effets sur le chiffre d’affaires des sociétés recourantes, encore faut-il que le risque de dommage difficile à réparer soit rendu vraisemblable, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, faute du moindre justificatif. Leur capacité financière est inconnue de même que le montant et l’exigibilité des obligations auxquelles elles doivent faire face.

À cet intérêt privé non évaluable s’oppose l’intérêt public important à ce que l’obligation – non contestée par les sociétés recourantes – d’être au bénéfice d’une autorisation d’exploiter chacun des établissements concernés, conformément aux art. 8 et ss de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement du 19 mars 2015 (LRDBHD - I 2 22), soit respectée, d’un part, et, d’autre part, à ce qu’il soit mis fin à l’exploitation d’établissements ne satisfaisant pas aux conditions légales. Cet intérêt public est prépondérant in casu.

Enfin, eu égard aux circonstances du cas d’espèce, faire droit à la demande de mesures provisionnelles reviendrait à accorder aux recourantes une partie de leurs conclusions au fond avant que de l’examiner, ce qui n’est pas possible.

4. La question de la recevabilité du recours souffrira de demeurer ouverte à ce stade.

5. Au vu de ce qui précède, la demande de mesures provisionnelles sera rejetée.

6. Le sort des frais de la procédure est réservé jusqu’à droit jugé au fond.

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la demande de mesures provisionnelles ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Urs Saal, avocat des recourantes, ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

 

 


La présidente :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :