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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/247/2023

ATA/1237/2023 du 14.11.2023 sur JTAPI/525/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/247/2023-PE ATA/1237/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 novembre 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Pierre OCHSNER, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 10 mai 2023 (JTAPI/525/2023)


EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : le requérant), né le ______ 1973, est ressortissant du Kosovo.

b. Le 10 janvier 2003, il a épousé B______ au Kosovo. Le couple a eu deux enfants nés le ______ 1996 et le ______ 2002.

Son épouse et ses enfants vivent au Kosovo.

c. Il est arrivé en Suisse, selon ses dires, en 2007.

d. Par ordonnance pénale du 10 décembre 2013, l’intéressé a été condamné par le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne à 60 jours-amende, le jour-amende étant fixé à CHF 30.- avec sursis pendant deux ans et à une amende CHF 300.- pour entrée illégale, séjour illégal et activité lucrative sans autorisation.

e. Les 5 août 2019, 1er février 2021, 29 mars 2022 et 2 décembre 2022, le requérant a sollicité un visa de retour pour rendre visite à son épouse.

B. a. Le 7 mai 2018, le requérant a déposé auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) une demande de régularisation de ses conditions de séjour, indiquant séjourner sur le territoire Suisse depuis l'année 2007.

À l'appui de sa demande, il a notamment fourni des contrats de travail, des fiches de salaire ainsi que des quittances de transfert d'argent.

b. Le 14 janvier 2020, l’OCPM a préavisé favorablement le dossier du requérant au secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM), pour approbation.

c. Le 17 novembre 2020, le SEM a retourné le dossier du requérant à l’OCPM, pour examen complémentaire. Il ressortait notamment de son examen préliminaire que les preuves de séjour étaient insuffisantes pour les années 2010, 2013 et en contradiction avec les déclarations de l’intéressé lors de son audition par les services de police du 31 octobre 2013. Ce dernier avait en outre bénéficié d'une carte sanitaire émise par les autorités italiennes.

d. Le 11 décembre 2020, l’office cantonal des assurances sociales (OCAS) a transmis à l’OCPM l’extrait du compte individuel AVS du requérant.

Il ressort de ce dernier que l’intéressé a cotisé en 2013 (10 mois), 2014 (6 mois), 2016 (12 mois), 2017 (8 mois), 2018 (12 mois) et 2019 (12 mois).

e. Par courriel du 21 janvier 2021, en réponse à une demande de renseignements de l’OCPM, le requérant a expliqué avoir déposé une demande d'asile courant 2002 en Italie, laquelle avait été refusée, et avoir obtenu une carte sanitaire valable dix ans. Il n’avait pas bénéficié de titre de séjour. Il a également indiqué s’être définitivement installé à Genève en 2009.

f. Par courriel du 8 septembre 2021, l’OCPM a invité le requérant a lui fournir tout document attestant de sa situation administrative en Italie depuis 2009.

g. Faisant suite à la réponse du 27 septembre 2021 du requérant l’informant être dans l'impossibilité d’obtenir un quelconque document des autorités italiennes sans aller sur place, l’OCPM lui a indiqué qu'il pouvait se rendre auprès du consulat d'Italie à Genève afin d'obtenir le document sollicité. Il l’invitait par ailleurs à lui fournir des explications quant à sa demande d'autorisation de séjour déposée en Italie au courant de l'année 2009.

h. Par courrier du 18 juillet 2022, l’OCPM a fait part au requérant de son intention de refus d'octroi d'une autorisation de séjour et de renvoi de Suisse. Un délai lui était imparti pour faire valoir son droit d’être entendu.

i. Le requérant n’a pas donné suite à ce courrier.

j. Par décision du 6 décembre 2022, l’OPCM a refusé de soumettre le dossier du requérant au SEM avec un préavis positif et a prononcé son renvoi de Suisse, un délai au 6 février 2023 lui étant imparti pour ce faire.

Il ressortait de ses déclarations dans le cadre de son audition par les services de police lausannois du 31 octobre 2013, qu’il était revenu en Suisse dans le courant de l'année 2008 après le rejet de sa demande d'asile, y effectuant des courts séjours, car sa femme et ses enfants étaient restés au Kosovo. Les quelques transferts d'argent effectués entre les années 2010 à 2012 ne sauraient justifier à eux seuls un séjour continu sur le territoire, lequel s'apparentait plutôt à du travail saisonnier. Sa situation ne répondait ainsi pas aux critères de l’« opération Papyrus » ni aux critères relatifs à un cas individuel d'extrême gravité au sens des art. 30 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 31 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), notamment un séjour prouvé et continu de dix ans minimum à Genève pour une personne célibataire et sans enfants scolarisés. Il n’avait pour le surplus pas démontré une intégration socioculturelle particulièrement remarquable.

Il n’avait de plus pas fourni d’attestation des autorités italiennes ni d’explications quant à sa demande d’autorisation de séjour déposée en Italie courant 2009 et avait affirmé n'avoir jamais bénéficié d’une autorisation de séjour dans ce pays. Or, selon les informations obtenues par le SEM auprès des autorités italiennes, il avait bénéficié d'un permis de séjour pour requérant d'asile sur leur territoire échu en 2003, puis d’un permis de séjour pour travail valable entre 2009 et 2015, dont la demande de renouvellement, déposée à l’échéance, aurait été rejetée. Ainsi, il avait non seulement tenté de l’induire en erreur mais ces informations confirmaient l’exercice d’un travail saisonnier tout du moins en 2010 et 2012.

Il n’avait enfin pas démontré une très longue durée de séjour en Suisse ni aucun élément permettant de déroger à cette exigence, ni qu'une réintégration dans son pays d'origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle indépendamment des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires ou scolaires) affectant l'ensemble de la population restée sur place. Il n’avait pas créé avec la Suisse des attaches à ce point profondes et durables qu’il ne puisse plus envisager un retour dans son pays d'origine et que sa réintégration sociale et professionnelle serait fortement compromise. Il en maitrisait la langue et la culture, notamment pour y avoir vécu la majeure partie de sa vie d’adulte, son enfance et son adolescence. Son épouse et ses enfants vivaient en outre au Kosovo.

C. a. Par acte du 23 janvier 2023, le requérant a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision.

Ses deux enfants lesquels avec son épouse au Kosovo. Vivant en Suisse depuis 2007, il y était parfaitement intégré, maitrisait le français et n’avait jamais bénéficié de l'aide sociale. Sa seule condamnation, par ordonnance pénale du 10 décembre 2013, était en lien avec son statut. Son emploi actuel lui rapportait entre CHF 4500.- et 5000.- par mois qu’il utilisait notamment pour rembourser ses dettes en lien avec la perte de son emploi suite à la faillite de l’un de ses employeurs. Bien qu’une partie de sa famille soit au Kosovo, son centre de vie était en Suisse.

Dans ces conditions, son renvoi était inexigible et disproportionné.

Il a joint un chargé de pièces, dont des cartes d'employé C______ (du 23 septembre 2009) et D______ (non datée), des contrats de travail (2014 et 2016), des attestations LPP et assurance AVS (2014, 2015 et 2016), des factures de chantier de 2011 de E______ portant la mention « copie A______ » et fiches de salaires 2013 (pour les mois de février à juin), 2014 (pour une activité de 15 jours en juin), 2016-2018, des lettres de recommandation et des attestations diverses indiquant notamment connaître le requérant depuis 2007, des documents en lien avec la faillite d’F______ SA, son contrat de travail auprès de la société G______, un extrait du registre des poursuites du 11 août 2022 faisant état de poursuites et d’actes de défaut de biens, des attestations de l’Hospice général, de l’IFAGE (niveau A2 en français), l’ordonnance pénale du 10 décembre 2013 ainsi que des documents relatifs à son épouse et ses enfants.

b. Par jugement du 10 mai 2023, le TAPI a rejeté le recours.

Les déclarations du recourant étaient contradictoires s’agissant de son séjour durable en Suisse. Après avoir dans un premier temps indiqué y séjourner depuis 2007, il avait précisé s’y être durablement installé en 2009. Les pièces qu’il avait fournies pour attester de son séjour avant 2013 étaient de catégorie B et particulièrement vagues, notamment sur les dates et périodes concernées. C’était en particulier le cas des factures de chantiers de E______ datées de 2011. L’on ne pouvait ainsi en déduire que le recourant travaillait et séjournait en Suisse à l’année et non de manière saisonnière durant toute la période utile. Le requérant avait au demeurant bénéficié d’un titre de séjour pour travail italien entre 2009 et 2015. Il ne remplissait dès lors pas la condition de dix ans de séjour continu en Suisse au jour du dépôt de sa demande de régularisation, de sorte qu’il ne pouvait se prévaloir de l’« opération Papyrus ».

Sous l'angle du cas de rigueur, s’il indiquait être arrivé en Suisse en 2007 et avoir séjourné seize ans sur le territoire, son séjour en Suisse n’avait pas été continu. Il n'avait jamais bénéficié d'un quelconque titre de séjour, de sorte que la durée de son séjour devait être relativisée. Quand bien même il était arrivé en Suisse en 2007, soit à l’âge de 34 ans, il avait vécu la majeure partie de son existence dans son pays d'origine, où il avait fondé sa famille qui y vivait toujours.

D. a. Par acte du 12 juin 2023, le requérant a formé recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour. À titre préalable, il a sollicité une audience de comparution personnelle et l’apport de son dossier.

Il vivait en Suisse depuis 2007 et était parfaitement intégré. Il maîtrisait le français et ne bénéficiait pas de l’aide sociale. Il avait certes quelques dettes, mais celles-ci étaient dues à la faillite de son ancien employeur.

b. Par réponse du 13 juillet 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Le 3 août 2023, le recourant a indiqué n’avoir pas d’observations.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recourant sollicite préalablement son audition.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l’espèce, le recourant a eu l’occasion de s’exprimer, de faire valoir ses arguments et de produire toute pièce utile à plusieurs reprises devant l’OCPM, le TAPI puis la chambre de céans. Il n’expose pas quels éléments supplémentaires utiles à la solution du litige, qu’il n’aurait pu produire par écrit, son audition serait susceptible d’apporter. Il ne sera ainsi pas donné suite à sa demande d’audition.

3.             Le litige porte sur la conformité au droit du refus de l'autorité intimée de préaviser favorablement le dossier du recourant auprès du SEM pour l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité.

3.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la LEI et de l'OASA. Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, la demande déposée par le recourant pour la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité dans le cadre de l’« opération Papyrus » a été déposée le 7 mai 2018, soit avant le 1er janvier 2019, de sorte que son examen est régi par l'ancien droit.

3.2 La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Kosovo.

L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (Directives du SEM, domaine des étrangers, 2013, état au 1er septembre 2023, ch. 5.6.10 [ci-après : directives LEI]).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-7330/2010 du 19 mars 2012 consid. 5.3 ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. II, loi sur les étrangers, 2017, p. 269). Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance ne sont pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

3.3 L’« opération Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter), avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

L’« opération Papyrus » n'emporte aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

L’« opération Papyrus » s’est terminée le 31 décembre 2018.

3.4 Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI). L'autorité compétente dispose d'un très large pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'examen des conditions de l'art. 31 al. 1 OASA.

3.5 En l’espèce, s’agissant d’abord des conditions de l’« opération Papyrus, le recourant fait valoir qu’il réside à Genève depuis 2007. Il n’a toutefois produit aucune pièce permettant d’attester d’un séjour en Suisse avant 2009. Ainsi, à défaut de pièces justificatives, il n’est pas possible de retenir qu’au moment de sa demande de régularisation en 2018, le recourant remplissait la condition du séjour minimum de dix ans. C’est partant à bon droit que le TAPI a retenu que les conditions de l’« opération Papyrus » n’étaient pas réunies.

Quant aux conditions permettant de retenir un cas de rigueur, elles ne sont pas non plus réalisées. Comme l’a retenu le TAPI, les pièces au dossier, en particulier l’extrait de son compte individuel AVS, permettent de démontrer un séjour en Suisse, tout au plus, depuis 2013. La durée du séjour doit toutefois être fortement relativisée, l’intégralité de celui-ci s’étant déroulée dans l’illégalité, ou au bénéfice d’une simple tolérance des autorités.

Le recourant ne peut se prévaloir d’une intégration sociale remarquable. Il n’a certes pas recouru à l’aide sociale et justifie d’un niveau A2 de langue française. Cela étant, son épouse et ses deux enfants ne vivent pas en Suisse, de sorte que ses liens affectifs et familiaux ne s’y trouvent pas. Il ne fait pas non plus valoir qu’il s’investirait d’une quelconque manière dans la vie associative, sportive ou culturelle à Genève, ni qu’il y aurait noué des liens amicaux d’une intensité telle qu’il ne pourrait les poursuivre par le biais de moyens de télécommunication modernes une fois de retour au Kosovo. En outre, il a été condamné pour infractions à la LEI.

Sur le plan professionnel, le recourant a exercé différentes activités dans le domaine du bâtiment. Il indique avoir accumulé des dettes et actes de défaut de biens en raison de salaires impayés de son dernier employeur, lequel est tombé en faillite. L’intéressé a certes récemment trouvé un emploi à plein temps en tant que manœuvre auprès de la société G______ Sàrl, lequel devrait lui permettre de rembourser ses dettes. Cela étant, l'indépendance économique est un aspect qui est en principe attendu de tout étranger désireux de s'établir durablement en Suisse et ne constitue donc pas un élément extraordinaire en faveur du recourant. Par ailleurs, ses activités, dans le domaine du bâtiment, ne sont pas constitutives d'une ascension professionnelle remarquable et ne l'ont pas conduit à acquérir des connaissances professionnelles spécifiques à la Suisse qu'il ne pourrait mettre à profit dans un autre pays, en particulier son pays d'origine. L'activité professionnelle exercée par l'intéressé en Suisse ne lui permet donc pas de se prévaloir d'une intégration professionnelle exceptionnelle au sens de la jurisprudence précitée.

Pour le reste, le recourant indique avoir quitté le Kosovo alors qu’il était âgé de 34 ans. Il y a donc passé son enfance, son adolescence et une bonne partie de sa vie d’adulte. Il connaît donc les us et coutumes de son pays, en parle la langue et y a fondé une famille. Il a, par ailleurs, conservé des liens avec sa femme et ses deux fils qui y résident toujours, au vu des demandes de visa qu’il a formulées encore récemment. Il n'est ainsi pas concevable que son pays d'origine lui soit devenu à ce point étranger qu'il ne serait plus en mesure, après une période de réadaptation, d'y retrouver ses repères.

C’est partant à juste titre que tant l’autorité intimée, qui a correctement appliqué le droit et n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation, que le TAPI, ont retenu que les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur n’étaient pas remplies.

4.             Reste à examiner si le renvoi prononcé par l’OCPM était fondé.

4.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

4.2 En l'espèce, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour au recourant, l'intimé devait prononcer son renvoi. Le recourant n’invoque aucun élément permettant de retenir que son renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé ; de tels éléments ne ressortent pas non plus du dossier.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui ne peut se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 juin 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 10 mai 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre OCHSNER, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Valérie LAUBER, présidente, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN,
Eleanor McGREGOR, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. LAUBER

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.