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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1828/2021

ATA/983/2021 du 24.09.2021 ( EXPLOI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1828/2021-EXPLOI ATA/983/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 septembre 2021

1ère section

 

dans la cause

 

A______
représentée par Me Deberti, avocat

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR



EN FAIT

1) La société A______, (ci-après : A______) est une société à responsabilité limitée ayant son siège à Genève. Les associés gérants en sont Messieurs B______ et C______, la présidente gérante étant Madame D______. A______ exploite un établissement rue E______, à Genève, à l'enseigne « F______ ».

Selon autorisation du 13 juillet 2020, Mme D______ est autorisée à exploiter cet établissement de catégorie café restaurant.

2) Selon un rapport établi le 11 juillet 2020, des agents du poste de police de Rive ont effectué un contrôle au bar « F______ » le 19 juin 2020 à 01h30 suite à des doléances pour du bruit excessif reçues à la Centrale d'engagement, de coordination et d'alarme (CECAL) deux heures plus tôt. À leur arrivée sur place, les policiers avaient constaté que du monde se trouvait dans l'établissement, en train de consommer au bar et à table. À la vue de leur véhicule de patrouille, le répondant, Monsieur G______, s'était empressé d'évacuer ses clients dans la cour arrière de l'immeuble.

Il était précisé que durant cette période de pandémie de Covid-19, tous les établissements publics devaient être fermés à minuit.

La porte de l'établissement avait été fermée à clé et M. G______ était venu l'ouvrir aux policiers. Questionné sur l'ouverture tardive de l'établissement, il avait tout d'abord déclaré qu'il était uniquement en présence de son employé pour effectuer un nettoyage des lieux. Il s'était ensuite ravisé lorsque les policiers lui avaient dit l'avoir vu cacher ses clients lesquels étaient au nombre de dix. M. G______ avait ensuite tenté de leur faire croire que ces personnes étaient des employés, puis de la famille, puis finalement des amis et « clients » qui consommaient gratuitement. Les policiers avaient encore constaté que l'établissement sentait fortement la cigarette.

Les policiers ont retenu dans leur rapport que cet établissement générait de graves nuisances pour le voisinage et mobilisait lourdement les services de police. En effet, durant la période du 23 mai au 10 juillet 2020, ce n'étaient pas moins de vingt-et-une interventions qui avaient été requises par les citoyens pour des nuisances sonores. Les horaires de fermeture n'avaient pas été respectés à plusieurs reprises. Le remplaçant de l'exploitant n'avait ni les compétences, ni l'instruction requises en matière de devoirs relatifs à la fonction qui lui avait été confiée. Cet établissement ne disposait d'aucune autorisation d'exploitation.

Les infractions administratives mentionnées dans le rapport de police étaient l'exploitation de l'établissement « de manière à engendrer » des inconvénients graves pour le voisinage (art. 24 al. 2 de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement du 19 mars 2015 - LRDBHD - I 2 22 et art. 44 al. 3 du règlement d'exécution de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l'hébergement et le divertissement du 28 octobre 2015 - RRDBHD - I 2 22.01) ; fermeture tardive ou ouverture prématurée d'un café-restaurant ou d'un bar (art. 6 al. 1 let. a - 25 - 70 al. 5 et 6 LRDBHD), en cas d'absence de l'établissement, n'a pas désigné un remplaçant compétent et instruit de ses devoirs, qui assume la responsabilité de l'exploitation (art. 22 al. 3 LRDBHD et art. 40 al. 6 à 8 RRDBHD), et défaut d'autorisation d'exploiter (art. 8 - 65 LRDBHD et art. 18 – 60 RRDBHD).

3) Le 14 septembre 2020, le service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN) a transmis ce rapport de police à A______. Dans la mesure où les faits y constatés étaient constitutifs d'infractions aux art. 8 al. 1, 24 al. 2, 22 al. 3 et 34 LRDBHD, cum 47 RRDBHD s'agissant de cette dernière infraction, ainsi qu'à l'art. 6 al. 2 de la loi sur l'interdiction de fumer dans les lieux publics du 22 janvier 2009 (LIF - K 1 18), une amende et/ou une mesure administrative était envisagée. A______ avait la possibilité de formuler ses éventuelles observations par écrit et devait adresser une copie de son dernier avis de taxation fiscale pour établir sa situation financière.

4) Par courrier du 28 septembre 2020, M. B______, en sa qualité d'associé gérant et de conseil de A______, a indiqué que le contenu du rapport de police du 11 juillet 2020, concernant des faits remontant à presque un mois plus tôt, était en grande partie contesté. L'établissement « F______ » n'était pas ouvert le 19 juin 2020 à 01h30, en témoignait le fait que la porte était fermée à clé. Les personnes présentes étaient tous des proches ou amis proches du gérant remplaçant qui s'étaient réunis dans le cadre d'un événement privé. Le rapport ne faisait pas état d'un constat de bruit excessif au sein de l'établissement. Il existait aux alentours quelques voisins, dont un en particulier, qui faisaient abusivement appel aux forces de l'ordre, prétendument pour des nuisances sonores ou tout autre prétexte. Le nombre d'interventions élevé ne signifiait pas que l'une ou l'autre d'entre était justifiée.

M. G______ disposait de toutes les connaissances et instructions utiles en sa qualité de remplaçant de l'exploitante. Il était d'ailleurs d'ores et déjà inscrit au mois de décembre 2020 à l'examen en vue de l'obtention de la patente. Aucune personne n'avait été autorisée à fumer au sein de l’établissement. L'odeur de cigarette provenait probablement de la terrasse extérieure arrière, réservée aux fumeurs durant cet événement privé, précisément pour ne pas déranger le voisinage sur la voie publique. Le constat ne faisait pas état de personnes fumant à l'intérieur de l'établissement au moment de l'intervention des agents.

A______ s'efforçait quotidiennement de respecter de manière scrupuleuse les dispositions légales liées à l'exploitation d'un établissement public. Elle contestait toute violation de la LRDBHD en lien avec les faits dénoncés au PCTN le 11 juillet 2020. Constituée en début d'année 2020, elle n'avait encore jamais été taxée. Sa situation financière était très précaire puisqu'elle subissait de plein fouet les conséquences de la crise sanitaire mondiale.

5) Par courrier du 18 mars 2021, le PCTN a donné la possibilité à A______ de produire jusqu'au au 1er avril suivant toutes les pièces démontrant sa situation financière actuelle, faute de quoi celle-ci ne serait pas prise en compte dans la fixation du montant de l'amende.

6) Par décision du 22 avril 2021, considérant les faits relevés par la police dans son rapport du 11 juillet 2020 établis, le PCTN a infligé une amende de CHF 1'300.- à A______, conformément à l'art. 65 LRBDHD.

Les propos tenus par cette société dans ses observations du 14 septembre 2021 n'emportaient pas conviction au vu des déclarations contradictoires du répondant sur place et du fait que ce dernier avait caché les clients à la vue du véhicule de police. Par ailleurs, aucun élément, y compris l'écoulement du temps, ne permettait en l'espèce de remettre en cause les constatations de la police, lesquelles apparaissaient cohérentes et détaillées. Par conséquent, le PCTN persistait à lui reprocher d'avoir commis une infraction à l'art. 8 LRDBHD et une autre à l'art. 34 LRDBHD cum 47 al. 4 RRDBHD.

L'établissement n'était pas, le 19 juin 2020 à 01h30, au bénéfice d'une autorisation d'exploiter. Le contrôle de police avait été entravé : la porte de l'établissement était verrouillée et le répondant sur place avait évacué ses clients dans la cour arrière à la vue du véhicule de police.

Dans la mesure où A______ n'avait fait parvenir aucune pièce démontrant sa situation financière dans le délai imparti, il n'en était pas tenu compte dans la fixation du montant de l'amende.

7) A______ a formé recours contre cette décision par acte expédié le 25 mai 2021 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à son annulation.

Aucune vente n'était intervenue dans le cadre de la fête privée organisée par M. G______ avant l'ouverture du bar « F______ ». La porte de l'établissement était restée verrouillée durant toute la soirée pour éviter que du public ne puisse entrer. La police avait constaté cela, de même que l'absence de toute nuisance sonore. M. G______ était immédiatement venu ouvrir la porte aux policiers et leur avait expliqué le caractère privé de l'évènement.

La violation des dispositions de la LRDBHD était fermement contestée. On peinait à comprendre comment il était possible de reprocher à A______ d'avoir exploité un établissement, ouvert au public, sans autorisation préalable tout en stigmatisant le fait que la porte d'entrée en ait été verrouillée lors de l'arrivée de la police, ce que cette dernière avait constaté, alors précisément que ledit établissement n'était ni exploité, ni ouvert au public. Il n'y avait donc eu aucune entrave d'accès aux locaux. La dénonciation des autorités de police ne faisait d'ailleurs pas état d'une infraction aux art. 34 LRDBHD cum 47 al. 4 RRDBHD. Rien ne permettait sérieusement de considérer que ces dispositions, de même que l'art. 8 al. 1 LRDBHD, auraient été violées le 19 juin 2020.

8) Le PCTN a conclu le 28 juin 2021 au rejet du recours.

La police avait constaté une fois devant la porte de l'établissement que celle-ci était verrouillée et non pas que tel avait été le cas toute la soirée et encore moins qu'on ne l'ouvrait pas pour laisser entrer des clients. M. G______ n'avait daigné ouvrir cette porte qu'après s'être empressé de cacher ses clients dans la cour arrière de l'immeuble, ce qui était constitutif d'une entrave au contrôle de police. Son affirmation selon laquelle il s'agissait d'une soirée privée n'était pas crédible au vu de ses déclarations contradictoires et du fait qu'il avait caché ses clients à la vue du véhicule de police. Une exploitation de l'établissement avant la délivrance de l'autorisation à compter du 13 juillet 2020 était corroborée par les vingt-et-une autres interventions de la police entre le 23 mai et le 10 juillet 2020 en raison de nuisances sonores déplorées par des citoyens. Quand bien même il se serait agi dans la nuit du 18 au 19 juin 2020 d'une soirée privée réservée à des clients, celle-ci ne serait pas soumise à la LRDBHD que pour autant qu'elle fût organisée à titre non professionnel et non onéreux.

Enfin, le PCTN avait renoncé à retenir des infractions en relation avec des nuisances sonores et le fait que l'intérieur de l'établissement ait senti la fumée, estimant qu'elles n'étaient pas suffisamment établies.

9) Par réplique du 29 juillet 2021, A______ a exposé que la police avait arbitrairement qualifié de « clients » les personnes se trouvant dans l'établissement, sans avoir constaté qu'elles devaient payer leurs consommations et/ou pouvaient librement accéder à l'établissement. Conformément au plan des lieux produit, il n'existait aucun accès à une cour intérieure par lequel les clients se trouvant dans le bar pouvaient sortir. Il n'était au demeurant pas déterminant pour la cause, en particulier en raison des infractions reprochées, de connaître précisément les raisons qui avaient conduit les personnes se trouvant dans le bar à se rendre dans la cuisine à la vue de la patrouille de police. Enfin, la police dans son rapport ne se plaignait nullement d'avoir été entravée pour accéder à l'établissement et ne retenait d'ailleurs aucune infraction aux art. 34 LRDBHD cum 47 al. 4 RRDBHD.

10) La juge déléguée a demandé le 19 août 2021 à A______ de se positionner sur l'information découlant de son site https://F______.ch selon laquelle l'établissement était ouvert dès le 3 juin 2020, et de fournir tous éléments, photos des murs de la cuisine notamment, sur l'existence de toute autre issue dans l'établissement que sa porte d'entrée.

11) A______ a répondu le 27 août 2021 que la date d'ouverture du 3 juin 2020 mentionnée sur la capture d'écran du site Internet était celle initialement prévue. Dans l'attente de recevoir l'autorisation d'exploiter et de finaliser les travaux d'aménagement qui avaient pris du retard en raison du Covid-19, seuls quelques événements exclusivement privés avaient été organisés entre cette date et les faits concernés par la cause. Elle confirmait qu'il n'existait aucune entrée, sortie ou issue autre que la porte d'entrée principale. La porte donnant à l'époque sur l'immeuble avait été condamnée par la construction d'une armoire. La cuisine comportait une porte-fenêtre donnant accès à un petit balcon situé dans une cour intérieure. Ce balcon était entièrement clôturé, à plus de 5 m de hauteur, et était inaccessible depuis la cour. Aucun usager de l'immeuble n'avait accès à cette cour.

A______ a produit une photo non datée, d'une pièce, encore en travaux, dont la porte fenêtre récente, qui ne descend pas jusqu'au sol mais s'arrête à hauteur d'un radiateur, donne sur ce qui semble être un balcon, sur lequel aurait été entassé du matériel de construction, muni d'une barrière rouge, apparemment provisoire, en bois. En face et sur le côté gauche de la fenêtre apparaissent des murs. On voit uniquement le sommet du mur de gauche.

12) Le PCTN a, le 7 septembre 2021, à nouveau, compte tenu des circonstances déjà développées, contesté le caractère privé de la soirée litigieuse. Il a rappelé les circonstances d'intervention des agents de police lesquels pouvaient, si nécessaire, être entendus.

13) Les parties ont été informées, le 8 septembre 2021, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile, compte tenu du dernier jour du délai tombant sur un dimanche et le lundi 24 mai 2021 étant férié (Pentecôte), devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) À teneur de l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée dans le cas d'espèce (ATA/1308/2018 du 5 décembre 2018 consid. 2).

L'autorité commet un abus de son pouvoir d'appréciation tout en respectant les conditions et les limites légales, si elle ne se fonde pas sur des motifs sérieux et objectifs, se laisse guider par des éléments non pertinents ou étrangers au but des règles ou viole des principes généraux tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, les principes de la bonne foi et de la proportionnalité (ATA/32/2020 du 14 janvier 2020 consid. 2b et l'arrêt cité).

3) La recourante conteste le bienfondé de l'amende de CHF 1'300.-, soutenant que son établissement n'était pas ouvert au public au moment du passage de la police dans la soirée du 18 au 19 juin 2020 et que la police n'aurait nullement été entravée dans son contrôle.

4) a. La LRDBHD règle les conditions d'exploitation des entreprises vouées à la restauration et/ou au débit de boissons à consommer sur place, à l'hébergement, ou encore au divertissement public (art. 1 al. 1 LRDBHD).

b. L'art. 8 LRDBHD soumet l'exploitation de toute entreprise vouée à la restauration et au débit de boissons à l'obtention préalable d'une autorisation d'exploiter (al. 1), qui doit être requise lors de chaque changement d'exploitant ou de propriétaire de l'entreprise ou de modification des conditions de l'autorisation antérieure (al. 2 ; art. 18 al. 1 let. a RRDBHD).

c. Selon l'art. 34 LRDBHD, l’exploitant doit en tout temps laisser libre accès à toutes les parties et dépendances de l’entreprise aux fonctionnaires chargés d’appliquer la LRDBHD (al. 1). Il lui est interdit d'empêcher ou d'éviter d’une quelconque façon le contrôle de l’autorité (al. 2).

L'art. 47 al. 1 RRDBHD précise que l’exploitant doit accorder, en tout temps, aux autorités de contrôle visées à son art. 46 le libre accès à tous les locaux de l’établissement et tenir à leur disposition les documents mentionnés à l’art. 45 al. 9 à 11 (registre des autorisations en vigueur).

L'al. 4 de cette même disposition règlementaire prévoit que tout fait de nature à entraver le contrôle des autorités est passible des sanctions et mesures prévues aux articles 63 et 65 LRDBHD. Constituent notamment des entraves : a) le fait de s’opposer au contrôle ou de le rendre impossible de toute autre manière ; c) le refus de fournir les renseignements ou documents requis, ainsi que la transmission de renseignements ou documents inexacts, ou de nature à induire en erreur ; d) tout procédé manifestement dilatoire.

L’exploitant répond du comportement adopté par les travailleurs ou auxiliaires (art. 22 al. 4 LRDBHD ; art. 47 al. 2 RRDBHD).

5) De jurisprudence constante, la chambre de céans accorde généralement une pleine valeur probante aux constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés, sauf si des éléments du dossier permettent de s'en écarter (ATA/67/2021 du 19 janvier 2021 consid. 2b ; ATA/502/2018 du 22 mai 2018 et les références citées).

6) En l'espèce, la recourante ne conteste pas n'avoir été au bénéfice d'une autorisation d'exploiter l'établissement « F______ » qu'à compter du 13 juillet 2020. Elle soutient que ledit établissement n'était pas ouvert au public au moment du contrôle de police environ un mois plus tôt.

Elle ne saurait être suivie sur ce point. Nombre d'éléments indiquent en effet au contraire que dans la soirée du 18 au 19 juin 2020, il l'était effectivement, conformément à ce qu'a constaté la police intervenue sur place à 01h30, dont il n'y pas de raison de remettre en cause le constat. À cet égard, quand bien même le rapport aurait été signé par la police et transmis au PCTN pour suite à donner trois semaines après le contrôle, la recourante ne met en évidence aucun élément permettant de douter qu'il ne contiendrait pas fidèlement ce que les agents ont constaté durant la soirée en question.

La police a noté depuis l'extérieur du café-restaurant la présence de plusieurs personnes à table et au bar. Elle a vu ces personnes quitter la salle pour se rendre dans la cour à l'arrière de l'immeuble. Sur ce point, la recourante a donné des explications pour le moins contradictoires dans ses écritures, en soutenant dans son recours que les « invités » étaient allés fumer sur la terrasse privée à l'arrière de l'établissement, pour ne pas déranger le voisinage en le faisant sur la voie publique, pour ensuite soutenir qu'il n'y avait aucune cour intérieure et que tous les « invités » s'étaient précipités dans la cuisine à la vue de la patrouille de police. Il ressort des documents et explications sollicités auprès de la recourante par la chambre de céans que la cuisine, apparaissant comme partie privée sur le plan fourni, est équipée selon une photo non datée, d'une porte-fenêtre donnant sur l'arrière de l'immeuble, apparemment un balcon muni d'une barrière provisoire rouge. La porte-fenêtre n'est pas de plain-pied, mais à quelques dizaines de centimètres du sol, soit au-delà d'un petit radiateur. À teneur de cette photo et des explications mêmes de la recourante dans ses écritures, rien n'empêchait apparemment dix personnes de s'y rendre et de s'y tenir, qu'il s'agisse d'une terrasse ou d'un balcon, donnant manifestement dans une cour intérieure à teneur de la photo produite et des murs y apparaissant. Dans ces circonstances, les explications fournies pour remettre en cause les assertions des agents de police sur ce point sont dénuées de toute crédibilité. La recourante reconnaît au demeurant que les « invités » ont fui à la cuisine, une partie privée de l'établissement, à la vue de la police, ce qui est déjà un premier élément laissant à penser qu'il s'agissait de clients et non d'invités.

S'y ajoutent les déclarations contradictoires de M. G______, qui remplaçait l'exploitante, aux dires de la recourante. Celle-ci ne conteste pas spécifiquement que celui-là aurait successivement dit aux agents de police qu'il effectuait un nettoyage des lieux avec un seul employé, puis que les dix personnes s'étant cachées étaient des employés, de la famille et enfin des amis et des « clients » consommant gratuitement.

Un autre élément encore corrobore la réalité de l'ouverture de l'établissement au public durant la soirée litigieuse, consistant en pas moins de vingt et une interventions de la police entre le 23 mai et le 10 juillet 2020, pour des nuisances causées au voisinage, interventions que la recourante ne remet nullement en cause, se bornant à critiquer le peu de tolérance du voisinage. Elle ne prétend à juste titre pas que ces interventions seraient liées à autant de fêtes privées, non onéreuses, ouvertes à des proches exclusivement, qu'elle aurait organisées pour célébrer son ouverture prochaine, au demeurant à compter de plus d'un mois et demi avant la date autorisée du 13 juillet 2020.

Enfin, à teneur du site internet de la recourante, le café-restaurant « F______ » était ouvert dès le 3 juin 2020. Là encore, cette publicité ne visait certainement pas uniquement les proches de l'exploitante, respectivement de son remplaçant.

Il est ainsi établi, et le PCTN était fondé à le retenir, que l'établissement était ouvert au public dans la nuit du 18 au 19 juin 2020 en violation de l'art. 8 LRDBHD.

Dans ces circonstances, vu la présence de dix clients dans le café-restaurant à 01h30 du matin, peu importe de savoir à quel moment M. G______ en aurait verrouillé la porte. La porte était en tout état ouverte pour laisser entrer ces personnes, la recourante ne soutenant pas qu'elles seraient entrées par la cuisine.

S'agissant d'une entrave au contrôle que la police était en droit de faire, le fait d'avoir cherché à soustraire les personnes présentes audit contrôle, quand bien même elles auraient été de simples invités, constitue déjà une telle entrave. Peu importe dans ces circonstances de savoir à quel moment M. G______ a déverrouillé la porte de l'établissement pour permettre l'entrée des agents de police.

À nouveau, c'est à juste titre que le PCTN a retenu une infraction à l'art. 34 LRDBHD et 47 RRDBH.

Enfin, les motifs et infractions visés par la police dans ses rapports ne lient nullement l'autorité qui rend sa décision sur la base des faits qu'elle considère comme établis, ce qu'elle a exclu en l'espèce pour une violation de la LIF notamment.

7) La recourante ne conteste pas l'amende au-delà de son principe.

a. Aux termes de l'art. 65 LRDBHD intitulé « amendes administratives », en cas d'infraction à ladite loi et à ses dispositions d'exécution, ainsi qu'aux conditions des autorisations, le département peut notamment infliger une amende administrative de CHF 300.- à CHF 60'000.- (al. 1).

b. L'autorité qui prononce une amende administrative ayant le caractère d'une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0 ; principes applicables à la fixation de la peine ; par renvoi de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 - LPG - E 4 05 ; ATA/1158/2019 du 19 juillet 2019 consid. 5b et les références citées). Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d'une simple négligence.

Par ailleurs, l'amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101). Il y a lieu de tenir compte de la culpabilité de l'auteur et de prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/1158/2019 précité consid. 5b).

Le PCTN jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour fixer le montant de l'amende. La juridiction de céans ne le censure qu'en cas d'excès ou d'abus (ATA/1158/2019 précité consid. 5b ; ATA/331/2018 du 10 avril 2018 consid. 8b et les références citées).

c. L'amende de CHF 1'300.-, qui se situe dans le bas de la fourchette, sanctionne deux comportements distincts que sont l'ouverture au public d'un café-restaurant sans autorisation d'exploiter en vigueur et l'entrave au contrôle de la police. Rien n'obligeait la recourante à agir de la sorte. Il ressort du dossier que l'autorité intimée a tenu compte de la culpabilité de la recourante, mais pas de sa situation financière, dans la mesure où elle n'avait au moment de la décision attaquée, nonobstant l'invitation expresse à le faire, fourni aucun document en lien avec son activité. Au surplus, il sera relevé que la recourante n'a nullement pris conscience de sa culpabilité puisqu'elle persiste à contester l'amende litigieuse en soutenant une version des faits allant à l'encontre des éléments au dossier.

Au vu de ce qui précède, il n'apparaît pas que l'autorité intimée ait abusé de son large pouvoir d'appréciation, que la chambre de céans ne revoit que sous l'angle restreint de son éventuel abus ou excès, en fixant l'amende à CHF 1'300.-, de sorte que sa quotité est fondée et doit être confirmée.

Dans ces circonstances, le recours, entièrement mal fondé, sera rejeté.

8) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 800.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 25 mai 2021 par A______ contre la décision du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir du 22 avril 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 800.- à la charge de A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Deberti, avocat de la recourante, ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Tombesi, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

La greffière :

 

 

C. Meyer

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :