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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/738/2020

ATA/958/2020 du 29.09.2020 ( NAT ) , REJETE

Descripteurs : NATURALISATION;RÉVOCATION(EN GÉNÉRAL);SUSPENSION DE LA PROCÉDURE;DROIT TRANSITOIRE;MARIAGE DE NATIONALITÉ
Normes : LPA.62.al1.leta; LPA.17.al1; Cst.29.al2; LPA.14.al1; LPA.61; LN.50; LN.36.al2; aLN.41.al1bis; LN.13.al3; aLN.12; LN.15.al1; aLN.15a.al1; LN.9.al1; LN.11; aLN.14; aLN.15; LNat.1.letb; aLNat.1.letb; LNat.11; aLNat.11.al2; LN.36.al1; aLN.41.al1; LNat.35; aLNat.35; aLNat.25.al3
Résumé : Recours contre un arrêté du Conseil d'État annulant un précédent arrêté de naturalisation genevoise à un ressortissant camerounais. Alors que le recourant se trouvait dans une situation de renvoi imminent, il a annoncé son futur mariage, lequel s'est avéré fictif au vu de la dénonciation de sa conjointe. Le recourant échoue à renverser les indices sérieux du mariage fictif. Que cela soit sous l'angle de l'ancien droit ou du nouveau droit, la prescription pour ouvrir une procédure d'annulation de la naturalisation n'est pas acquise. Le fait que le recourant soit devenu apatride ne fait pas obstacle à l'annulation de la naturalisation. Recours rejeté, en tant qu'il est recevable.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/738/2020-NAT ATA/958/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 septembre 2020

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Noudemali Romuald Zannou, avocat

contre

CONSEIL D'ÉTAT



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______1976, est ressortissant du Cameroun.

2) Le 7 novembre 2003, M. A______ est arrivé en Suisse pour y suivre des études dans les cantons de Genève et de Vaud et a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour à cette fin, laquelle a été régulièrement renouvelée jusqu'au 30 avril 2012.

3) Par décision du 26 juin 2014, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a refusé la demande de renouvellement d'autorisation de séjour de M. A______ et lui a imparti un délai pour quitter la Suisse.

L'intéressé avait obtenu son bachelor en psychologie et un master of advanced studies en gestion des ressources humaines et des carrières. Le but de son séjour pour études en Suisse était atteint. En outre, il n'était plus immatriculé auprès d'une école reconnue en Suisse.

4) Par décision du 17 mars 2015, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération formulée le 23 juillet 2014 par M. A______ et lui a imparti un délai au 17 avril 2015 pour quitter la Suisse.

5) Le 29 février 2016, M. A______ a épousé à B______ Madame C______, née le______, de nationalité congolaise, titulaire d'un permis B.

6) Selon les données figurant au registre cantonal de la population, tenu par l'OCPM, M. A______ a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour pour regroupement familial le 3 mai 2016.

7) Le 7 novembre 2016, Mme C______ a écrit à l'OCPM, service des étrangers, pour dénoncer son mariage avec M. A______, affirmant qu'il était fictif.

Courant mai 2015, M. A______, un ami, lui avait expliqué qu'il était sur le point d'être expulsé de Suisse après que ses tentatives pour faire prolonger son permis de séjour avaient échoué. Il lui avait proposé de contracter un mariage fictif avec lui pendant une année en contrepartie de CHF 9'000.-.

Le même mois, M. A______ avait adressé à l'OCPM un courrier annonçant leur prochain mariage. Pendant la procédure de mariage et durant trois mois, ils avaient simulé une communauté de vie pour le cas d'un éventuel contrôle de l'OCPM. Début juillet 2015, Mme C______ avait quitté le domicile de M. A______ pour vivre avec son compagnon.

Le mariage avait été célébré le 29 février 2016 à la mairie de la commune d'B______ et cinq connaissances camerounaises de M. A______ étaient présentes. Ce dernier leur avait menti sur le but du mariage.

Le 1er avril 2016, elle avait appris qu'elle était enceinte de son compagnon. Ne souhaitant pas que M. A______ soit le père juridique de son enfant, elle lui avait proposé de divorcer, ce qu'il avait refusé, promettant d'introduire une action en désaveu de paternité à la naissance de l'enfant. En plus des CHF 9'000.- convenus, il lui avait dès lors proposé CHF 1'700.- par mois. Après négociations, ils avaient convenu d'un divorce en février 2017.

M. A______ était toutefois revenu sur sa promesse concernant l'action en désaveu. Il venait de lui proposer de la reporter en 2018 afin d'utiliser cette paternité pour sa demande de naturalisation, ou de l'introduire à la date prévue mais en prolongeant le mariage d'une autre année.

Ne pouvant accepter de mettre en jeu l'avenir de son enfant, Mme C______ avait décidé de tout avouer et était prête à assumer les conséquences de son acte délictueux. Elle était prête à produire tous les éléments matériels qui démontraient les faits contenus dans sa dénonciation.

Mme C______ a envoyé une copie de son courrier au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) ainsi qu'au Procureur général de la République et Canton de Genève.

8) Le ______2016, Mme C______ a donné naissance à D______ à Genève.

9) Le 24 novembre 2016, le service juridique de l'OCPM a transmis au Ministère public une copie de la dénonciation de Mme C______ du 7 novembre 2016.

10) Le 16 décembre 2016, M. A______ a déposé une demande de naturalisation suisse et genevoise auprès du service suisse - secteurs des naturalisations (ci-après : secteur naturalisations) de l'OCPM.

Sur le formulaire officiel, sous la rubrique « Conjoint(e) », il a indiqué le nom de Mme C______ ainsi que les données personnelles la concernant. Il n'a nullement fait mention d'un éventuel enfant.

Il a joint à sa demande notamment un extrait vierge de son casier judiciaire destiné à des particuliers, des attestations de réussite du test de validation des connaissances en histoire, géographie et institutions suisses et genevoises, d'absence de poursuite et d'acte de défaut de biens, de l'acquittement de l'intégralité de ses impôts, ainsi que ses diplômes obtenus en Suisse.

11) Par courriel du 19 décembre 2016, le secteur naturalisations a relevé que M. A______ avait récemment eu un enfant et il souhaitait savoir s'il souhaitait l'inclure dans sa demande.

12) Par retour de courriel du même jour, M. A______ lui a répondu qu'il ne souhaitait pas l'inclure dans sa démarche, ajoutant que « ce sera[ait] pour plus tard ».

13) Le 26 janvier 2017, l'OCPM a établi un rapport d'enquête concernant M. A______, préavisant favorablement sa demande de naturalisation.

14) Le 22 mars 2017, le SEM a délivré une autorisation fédérale de naturalisation concernant M. A______.

15) Le 11 avril 2017, la commune d'B______ a émis un préavis favorable à la naturalisation genevoise de M. A______.

16) Par arrêté du 17 mai 2017, le Conseil d'État a accordé la citoyenneté genevoise pour la commune d'B______ à M. A______.

17) a. Par ordonnance pénale du 29 juin 2017, dans le cadre de la procédure P/20967/2016, le Ministère public a reconnu Mme C______ coupable d'infraction à la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), renommée depuis le 1er janvier 2019 loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), et l'a condamnée à une peine pécuniaire de cinquante jours-amende à CHF 30.- le jour avec sursis, le délai d'épreuve étant fixé à trois ans, et à une amende de CHF 300.-.

Mme C______ avait éludé les prescriptions sur le séjour et l'admission des étrangers en contractant un mariage fictif avec M. A______ pour se procurer un enrichissement illégitime et dans le but que ce dernier obtienne une autorisation de séjour (permis B).

b. Par ordonnance pénale du même jour, le Ministère public a reconnu M. A______ coupable d'infraction à la législation sur les étrangers, et l'a condamné à une peine pécuniaire de cinquante jours-amende à CHF 70.- le jour avec sursis, le délai d'épreuve étant fixé à trois ans, et à une amende de CHF 700.-.

18) Le 28 novembre 2017, M. A______ a prêté serment.

19) Par jugement du 17 janvier 2018, des suites de l'opposition de M. A______ contre l'ordonnance pénale du 29 juin 2017, le Tribunal de police l'a reconnu coupable de comportement frauduleux à l'égard des autorités et condamné à une peine pécuniaire de trente jours-amende à CHF 30.- le jour avec sursis, le délai d'épreuve étant fixé à trois ans. Ce jugement est exécutoire et définitif.

20) Par jugement du 10 septembre 2018 (JTPI/13525/2018), le Tribunal de première instance a dit que D______, née le ______2016, n'était pas la fille de M. A______ et a ordonné la rectification des registres de l'état civil en ce sens.

21) Par arrêté du 15 janvier 2020, le Conseil d'État a annulé l'arrêté du 17 mai 2017 et de ce fait, a refusé la naturalisation genevoise de M. A______.

Le 22 février 2018, le service étrangers de l'OCPM avait porté à la connaissance du secteur naturalisations la condamnation pénale de M. A______.

M. A______ avait conclu un mariage de complaisance afin d'obtenir un titre de séjour en Suisse. Or, taire la conclusion d'un mariage de complaisance en vue d'obtenir un titre de séjour constituait une dissimulation de faits essentiels dans le cadre d'une procédure de naturalisation pouvant conduire à son annulation.

En outre, la dissimulation du mariage de complaisance avait une incidence sur la durée de séjour comptabilisée, puisque celle-ci devait être réduite des dix mois dont M. A______ se prévalait au titre du regroupement familial. Il ne remplissait par conséquent pas les conditions du séjour minimum. Le Conseil d'État pouvait, pour ce motif également, annuler la naturalisation.

22) Par acte du 28 février 2018 (recte : 2020), M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre l'arrêté précité, concluant, préalablement, à la suspension de la procédure jusqu'à ce qu'il reçoive un préavis positif dans sa demande de réintégration dans sa citoyenneté camerounaise en cas de perte de la nationalité suisse. Principalement, l'arrêté attaqué devait être annulé sous suite de frais et dépens.

Le mariage conclu avec Mme C______ était un mariage d'amour avec pour projet de former une famille. Aucune contre-prestation en argent n'était intervenue. Les sommes versées par M. A______ à Mme C______ entraient dans le cadre de l'entretien de la famille.

Mme C______ avait entretenu une relation extra-conjugale durant le mariage et elle avait dit à M. A______ qu'il n'était pas le père biologique de D______, ce qui l'avait laissé sans voix. N'étant pas certain de cela, M. A______ n'avait pas accepté de déposer une action en désaveu. En réaction, Mme C______ avait multiplié les actions pour décrédibiliser le mariage.

En obtenant la naturalisation suisse et genevoise, M. A______ avait été automatiquement déchu de sa nationalité camerounaise. Le retrait de la naturalisation suisse le placerait dans une situation d'apatridie.

La naturalisation ne pouvait pas être annulée dans la mesure où le délai de prescription de deux ans était déjà acquis depuis le 17 mai 2019. En effet, l'administration genevoise et le Conseil d'État devaient être au courant des faits abordés dans le courrier de Mme C______ du 7 novembre 2016 au plus tard le 17 mai 2017, date du premier arrêté du Conseil d'État accordant la citoyenneté genevoise à M. A______.

À l'appui de son recours, M. A______ a notamment produit une attestation écrite de Monsieur E______ du 25 février 2020 dont il sera fait état dans la partie en droit, dans sa mesure utile.

23) Le 27 mai 2020, le Conseil d'État, soit pour lui le département de la sécurité, de l'emploi et de la santé, a conclu au rejet du recours.

M. A______ n'avait pas apporté la preuve de la réalité de son mariage avec Mme C______. Au moment de son mariage, sa situation administrative était précaire. En outre, dans sa demande de naturalisation suisse et genevoise, il n'avait pas inclus son épouse et l'enfant de celle-ci. Le courrier de Mme C______ du 7 novembre 2016 était circonstancié. Tant cette dernière que M. A______ avaient été condamnés pénalement pour ce mariage de complaisance. M. A______ avait ainsi frauduleusement obtenu la nationalité suisse et genevoise. L'éventualité de se trouver apatride n'était pas propre à empêcher l'annulation de sa naturalisation, si bien que l'issue de la procédure de réintégration dans sa citoyenneté camerounaise n'avait aucune incidence sur le sort de la procédure.

Le délai de deux ans pour annuler la naturalisation avait commencé à courir dès l'entrée en vigueur du nouveau droit, soit le 4 avril 2018. Dès lors, ce délai arrivait à échéance le 4 avril 2020. Le 15 janvier 2020, date de l'arrêté annulant la naturalisation de M. A______, la prescription n'était pas atteinte.

En outre, la dénonciation de Mme C______ du 7 novembre 2016 avait été adressée au service des étrangers de l'OCPM et non pas au secteur naturalisations. Or, la procédure de naturalisation et celle en droit des étrangers étaient distinctes. Ni le droit cantonal ni le droit fédéral ne prévoyaient de communication spontanée d'informations entre autorités qui n'accomplissaient pas les mêmes tâches.

24) Le 7 août 2020, M. A______ a répliqué.

Si le mariage avait été de complaisance, M. A______ et Mme C______ auraient divorcé. Il le lui avait proposé, toutefois celle-ci ne lui avait jamais répondu. Cela jetait de sérieux doutes sur la dénonciation du 6 novembre 2016.

Au moment du dépôt de sa requête de naturalisation, Mme C______ ne remplissait pas les conditions de résidence en Suisse pour y être incluse. D______n'avait pas été incluse car Mme C______ avait annoncé à M. A______ qu'il n'était pas son père.

Dans le cadre de l'enquête ayant conduit au rapport du 26 janvier 2017, le Conseil d'État aurait pu se rendre compte qu'une procédure pénale avait été ouverte contre lui. Il n'y avait dès lors pas de dissimulation de faits essentiels.

Le rapport d'enquête ayant été rendu le 26 janvier 2017, la prescription était acquise au 26 janvier 2019.

La procédure de naturalisation et celle qui prévalait en droit des étrangers étaient connexes. Un enquêteur diligent aurait pu obtenir les faits dont il était accusé de dissimulation auprès de l'OCPM. Le permis B de M. A______ n'avait jamais été révoqué par l'OCPM jusqu'au prononcé de l'arrêté du 17 mai 2017 lui accordant la nationalité. C'était donc sur la base d'un permis de séjour valable que la nationalité lui avait été accordée.

Selon le dispositif du jugement civil de droit local du 23 juin 2020 émis par le Tribunal de première instance de F______, et produit en annexe de sa réplique, M. A______ avait perdu sa nationalité camerounaise sans possibilité de la réintégrer.

Une annulation de sa naturalisation basée sur des faits que l'autorité aurait pu connaître, si elle avait appliqué correctement le droit, serait disproportionnée compte tenu des conséquences qu'aurait une telle décision sur le recourant et la société.

25) Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1) Interjeté devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

2) a. Aux termes de l'art. 62 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), le délai de recours est de trente jours s'il s'agit d'une décision finale ou d'une décision en matière de compétence (al. 1 let. a) ; le délai court dès le lendemain de la notification de la décision (al. 3 1ère phr., art. 17 al. 1 LPA).

b. En l'occurrence, dans son mémoire, le recourant soutient que l'arrêté du Conseil d'État a été rédigé le 28 janvier 2020 et lui a été communiqué le lendemain par courrier A +.

Or, l'arrêté en question porte la date du 15 janvier 2020, soit celle mentionnée par le recourant sur la page de garde de son acte de recours de même que sur la procuration signée en faveur de son conseil.

N'ayant pas produit l'enveloppe contenant l'arrêté attaqué ni le numéro de suivi de l'envoi ou encore une lettre qui aurait accompagné l'arrêté, il existe un doute quant à la date de notification de l'acte querellé, partant quant au respect du délai de recours.

Toutefois et dans la mesure où selon la jurisprudence, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l'envoi (ATF 136 V 295 consid. 5.9 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_250/2018 du 26 octobre 2018 consid. 5.2 ; ATA/461/2018 du 8 mai 2018 consid. 9), dont la bonne foi est présumée (arrêt du Tribunal fédéral 1C_634/2015 du 26 avril 2016 consid. 2.1), que l'intimé s'est rapporté à justice s'agissant de la recevabilité du recours, et compte tenu du sort du litige, la question du respect de délai de recours souffrira de rester indécise.

3) Le recourant a sollicité son audition devant la chambre administrative.

a. Le droit d'être entendu, garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 41 LPA, comprend notamment le droit pour la personne concernée de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision et de participer à l'administration des preuves (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2). Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 136 I 229 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_917/2018 du 29 janvier 2019 consid. 5.1). Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1), ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1).

b. En l'espèce et par rapport aux questions juridiques à résoudre, la chambre de céans dispose d'un dossier complet, lequel comprend notamment les écritures des parties et les pièces produites à leur appui. Celles-ci sont pertinentes et suffisantes pour résoudre le litige.

Il ne sera dès lors pas fait droit à la requête d'instruction sollicitée par le recourant.

4) Le recourant demande la suspension de la procédure jusqu'à droit connu sur sa demande de réintégration dans sa citoyenneté camerounaise en cas de perte de la nationalité suisse.

a. En vertu de l'art. 14 al. 1 LPA, lorsque le sort d'une procédure administrative dépend de la solution d'une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d'une autre autorité et faisant l'objet d'une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu'à droit connu sur ces questions.

b. En l'occurrence, à l'appui de sa réplique du 7 août 2020, le recourant a produit un jugement civil de droit local du 23 juin 2020 émis par le Tribunal de première instance de F______, lequel retient que le recourant a perdu sa nationalité camerounaise sans possibilité de la réintégrer.

Au vu de ce jugement qui statue sur la question motivant la demande de suspension, celle-ci est de facto devenue sans objet.

L'impact de ce jugement sur la situation administrative du recourant dans le cadre de la présente procédure sera traité ci-dessous.

5) L'objet du litige consiste à déterminer si l'intimé était fondé à annuler la naturalisation suisse et genevoise du recourant et à refuser sa naturalisation genevoise.

6) Aux termes de l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n'ont toutefois pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

7) a. Le 1er janvier 2018, est entrée en vigueur la loi du 20 juin 2014 sur la nationalité suisse (LN - RS 141.0) qui a remplacé la loi fédérale sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse du 29 septembre 1952 (ci-après : aLN ; RO 1952 1115). Les détails de cette nouvelle réglementation sont fixés dans l'ordonnance du 17 juin 2016 sur la nationalité suisse (ordonnance sur la nationalité, OLN - RS 141.01), dont l'entrée en vigueur a été fixée au 1er janvier 2018 également.

En vertu de la réglementation transitoire prévue par l'art. 50 LN, qui consacre le principe de la non-rétroactivité et correspond à la disposition de l'art. 57 aLN (la teneur de cette ancienne disposition ayant été formellement modifiée dans le sens où il s'agit désormais d'une disposition dite « transitoire » [cf. Message concernant la révision totale de la loi fédérale sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse du 4 mars 2011, FF 2011 2639, ad art. 50 du projet de loi p. 2678]), l'acquisition et la perte de la nationalité suisse sont régies par le droit en vigueur au moment où le fait déterminant s'est produit (al. 1). En outre, les demandes déposées avant l'entrée en vigueur de cette nouvelle loi sont traitées conformément aux dispositions de l'ancien droit jusqu'à ce qu'une décision soit rendue sur la requête (al. 2).

b. En l'occurrence, les faits pertinents pour l'annulation de la naturalisation ordinaire se sont produits en partie avant l'entrée en vigueur du nouveau droit (soit le dépôt de la demande de naturalisation ordinaire, la dénonciation de Mme C______, la condamnation pénale de celle-ci, l'octroi de la naturalisation), et en partie après cet événement (la condamnation pénale définitive du recourant, l'ouverture de la procédure en annulation de la naturalisation et l'ensemble des actes y relatifs, étant relevé que c'est en date du 22 février 2018 que le service étrangers de l'OCPM a porté à la connaissance du secteur naturalisations les faits ayant motivé l'annulation de la naturalisation ordinaire). Il se pose donc la question de savoir quel est le droit applicable in casu.

c. Dans sa jurisprudence, le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF) a retenu que c'était l'ouverture de la procédure d'annulation de la naturalisation facilitée qui était l'événement principal au sens de l'art. 50 LN, sans toutefois entrer plus dans les détails (ATAF F-91/2019 du 6 décembre 2019 consid. 3 confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_24/2020 du 24 juillet 2020). Il serait également concevable, par exemple, de retenir la date de l'octroi de la naturalisation comme « fait déterminant » au sens de l'art. 50 LN, ou la date de la décision formelle de l'autorité retirant la nationalité au recourant (ATAF F-2870/2018 du 15 avril 2020 consid. 3.4 pour le cas d'une naturalisation facilitée).

Tous ces « faits » sont certes pertinents à la chronologie générale de l'affaire qui est l'objet de la présente cause, mais pour être « déterminant », le fait particulier doit être décisif et propre à signaler au recourant qu'un changement de son statut juridique est envisagé, c'est-à-dire qu'une procédure pouvant mener à la modification de sa position juridique a été ouverte. Dans le cadre d'une procédure en annulation de la naturalisation, c'est donc la date de la notification au recourant de l'ouverture d'une procédure d'annulation de la naturalisation à son encontre qui est déterminante. En outre, pour des raisons de sécurité et de prévisibilité du droit, lorsqu'une telle procédure est initiée, il est essentiel, pour le justiciable comme pour les autorités compétentes, que soient fixées et connues dès ce moment les règles applicables, matérielles comme procédurales, ainsi que le périmètre d'action de l'État à l'égard des administrés (ATAF F-2870/2018 précité consid. 3.4).

L'ouverture de la procédure d'annulation informe en effet clairement la personne concernée que son statut juridique risque d'être modifié. Elle permet d'interrompre le délai de prescription de deux ans au sens de l'art. 36 al. 2 LN (respectivement art. 41 al. 1bis aLN), ce qui plaide en faveur de cette solution (ATAF F-4810/2019 du 24 juin 2020 consid. 3 ; ATAF F-3524/2019 du 30 avril 2020 consid. 3).

Cette question peut toutefois rester ouverte en l'espèce, dès lors que l'éventuelle application de l'aLN ou de la loi sur la nationalité genevoise du 13 mars 1992 (LNat - A 4 05) dans son ancienne teneur ne conduirait de toute façon pas à une issue différence, puisque les conditions relatives à l'annulation de la naturalisation ordinaire du recourant sont réalisées que cela soit sous l'angle de l'ancien droit ou sous l'angle du nouveau.

8) a. En matière de naturalisation (ordinaire) des étrangers par les cantons, la Confédération édicte des dispositions minimales et octroie l'autorisation de naturalisation (art. 38 al. 2 Cst.). Elle dispose d'une compétence concurrente à celle des cantons, mais limitée aux principes. Une réinterprétation de cette disposition constitutionnelle implique que la compétence dont dispose la Confédération lui permet de fixer des principes et, ainsi, de prévoir dans la loi des conditions dites « maximales », que les cantons sont tenus de respecter et qu'ils ne peuvent outrepasser. Tel est notamment le cas des règles sur la procédure cantonale de naturalisation (art. 15 à 17 LN, respectivement art. 15a à 15c aLN), sur les voies de recours (art. 46 LN, respectivement art. 50 aLN) et sur les émoluments de naturalisation (art. 35 LN, respectivement art. 38 aLN).

Les dispositions de la LN et de l'aLN contenant des conditions formelles et matérielles minimales en matière de naturalisation ordinaire, les cantons peuvent définir des exigences concrètes en matière de résidence et d'aptitude supplémentaires, en respectant toutefois le droit supérieur, pour autant qu'ils n'entravent pas l'application du droit fédéral, par exemple en posant des exigences élevées au point de compliquer inutilement la naturalisation ou de la rendre tout simplement impossible (ATF 139 I 169 consid. 6.3 ; 138 I 305 consid. 1.4.3 ; 138 I 242 consid. 5.3).

b. Si les conditions formelles et matérielles sont remplies, le SEM accorde l'autorisation fédérale de naturalisation et la transmet à l'autorité cantonale, qui rend la décision de naturalisation (art. 13 al. 3 LN, respectivement art. 12 aLN). Le droit cantonal régit la procédure aux échelons cantonal et communal (art. 15 al. 1 LN, respectivement art. 15a al. 1 aLN).

c. Au niveau fédéral, les conditions de la naturalisation sont énoncées aux art. 9 à 12 LN.

Aux termes de l'art. 9 al. 1 LN, la Confédération octroie l'autorisation de naturalisation uniquement si, lors du dépôt de la demande, le requérant est titulaire d'une autorisation d'établissement (let. a) et s'il apporte la preuve qu'il a séjourné en Suisse pendant dix ans en tout, dont trois sur les cinq ans ayant précédé le dépôt de la demande (let. b). Selon l'art. 11 LN, l'autorisation fédérale de naturalisation est octroyée si le requérant démontre que son intégration est réussie (let. a cum art. 12 LN qui détaille les critères d'intégration), qu'il s'est familiarisé avec les conditions de vie en Suisse (let. b) et qu'il ne met pas en danger la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse (let. c).

Dans l'ancien droit (art. 14 aLN), le requérant devait s'être intégré dans la communauté suisse (let. a), s'être accoutumé au mode de vie et aux usages suisses (let. b), se conformer à l'ordre juridique suisse (let. c) et ne pas compromettre la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse (let. d). Selon l'art. 15 aLN, l'étranger ne pouvait demander l'autorisation que s'il avait résidé en Suisse pendant douze ans, dont trois au cours des cinq années qui précèdaient la requête (let. a).

d. À Genève, le candidat à la naturalisation doit remplir les conditions fixées par le droit fédéral et cantonal (art. 1 let. b LNat, respectivement art. 1 let. b aLNat).

Selon l'art. 11 LNat, l'étranger qui remplit les conditions du droit fédéral peut demander la nationalité genevoise s'il a résidé deux ans dans le canton d'une manière effective, dont les douze mois précédant l'introduction de sa demande (al. 1 qui n'a pas été modifié). Il peut présenter une demande de naturalisation s'il est titulaire d'une autorisation d'établissement (al. 2). Il doit en outre résider effectivement en Suisse et être au bénéfice de l'autorisation d'établissement en cours de validité pendant toute la durée de la procédure (al. 3). Sous l'ancien droit, n'importe quel titre de séjour était suffisant (art. 11 al. 2 aLNat).

9) a. Selon l'art. 36 LN, applicable également à la procédure ordinaire (al. 3), le SEM peut annuler la naturalisation ou la réintégration obtenue par des déclarations mensongères ou par la dissimulation de faits essentiels (al. 1, respectivement art. 41 al. 1 aLN). La naturalisation ou la réintégration peut être annulée dans un délai de deux ans après que le SEM a eu connaissance de l'état de fait juridiquement pertinent, mais au plus tard huit ans après l'octroi de la nationalité suisse. Un nouveau délai de prescription de deux ans commence à courir après tout acte d'instruction signalé à la personne naturalisée ou réintégrée. Les délais de prescription sont suspendus pendant la procédure de recours (al. 2, respectivement art. 41 al. 1bis aLN).

Conformément à l'art. 35 LNat, qui est entré en vigueur le 4 avril 2018, le Conseil d'État peut annuler la naturalisation genevoise ou la réintégration dans la nationalité genevoise obtenue par des déclarations mensongères ou par la dissimulation de faits essentiels (al. 1). La naturalisation ou la réintégration peut être annulée dans un délai de deux ans après que le Conseil d'État a eu connaissance de l'état de fait juridiquement pertinent, mais au plus tard huit ans après l'octroi de la nationalité genevoise. Un nouveau délai de prescription de deux ans commence à courir après tout acte d'instruction signalé à la personne naturalisée ou réintégrée. Les délais de prescription sont suspendus pendant la procédure de recours (al. 2). L'ancienne teneur de l'art. 35 aLNat prévoyait que le Conseil d'État pouvait, dans les cinq ans à partir de la date d'acquisition de la nationalité genevoise, annuler la naturalisation ou la réintégration accordée en vertu de la présente loi, si elle avait été obtenue par des déclarations mensongères ou par la dissimulation de faits essentiels.

Le citoyen genevois qui fait l'objet d'une procédure d'annulation ou de retrait de la nationalité genevoise doit en être informé par le Conseil d'État et être invité à faire valoir ses moyens. Les membres de la famille également concernés par cette procédure sont avisés individuellement (art. 36 al. 1 LNat qui n'a pas été modifié).

b. Les termes utilisés à l'art. 35 al. 1 LNat ou 35 aLNat étant les mêmes que ceux contenus à l'art. 36 al. 1 LN ou l'art. 41 al. 1 aLN, la jurisprudence concernant cette disposition peut trouver application, ce d'autant que la LNat a été adoptée suite aux modifications dont la loi fédérale a fait l'objet en 1990, entrées en vigueur le 1er janvier 1992 (RO 1991 1034 ; FF 1987 III 285 ; MGC 1991/V 4374, p. 4396 s. ; ATA/87/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4c).

La jurisprudence considère ainsi que l'obtention frauduleuse de la naturalisation implique un comportement déloyal et trompeur, de sorte qu'il ne suffit pas que la naturalisation ait été accordée alors que l'une ou l'autre de ses conditions n'étaient pas réalisées (ATF 140 II 65 consid. 2.2 ; 135 II 161 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_20/2014 du 13 mai 2014 consid. 2.1.1). S'il n'est pas nécessaire que le comportement ait été constitutif d'une escroquerie au sens du droit pénal, il est néanmoins exigé que l'intéressé ait donné sciemment de fausses informations à l'autorité ou qu'il l'ait délibérément laissée dans l'erreur sur des faits qu'il savait essentiels, ou qu'il ait laissé faussement croire à l'autorité qu'il se trouvait dans la situation de communauté conjugale prévue par la loi, violant ainsi le devoir d'information auquel il est appelé à se conformer (ATF 135 II 161 consid. 2 ; arrêt du TAF C-2412/2009 du 19 novembre 2012 consid. 4.1).

La nature potestative des art. 36 al. 1 LN (respectivement art. 41 al. 1 aLN) et 35 al. 1 LNat (respectivement art. 35 aLNat) confère une certaine liberté d'appréciation à l'autorité compétente, qui doit toutefois s'abstenir de tout abus dans l'exercice de celle-ci. Ainsi, commet un abus de son pouvoir d'appréciation l'autorité qui se fonde sur des critères inappropriés, ne tient pas compte de circonstances pertinentes ou rend une décision arbitraire, contraire au but de la loi ou au principe de la proportionnalité (ATF 129 III 400 consid. 3.1 ; 128 II 97 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_20/2014 précité consid. 2.1.1 ; ATA/87/2020 précité consid. 4b).

c. Il y a mariage fictif ou de complaisance lorsque celui-ci est contracté dans le seul but d'éluder les dispositions de la loi fédérale sur les étrangers, en ce sens que les époux (voire seulement l'un d'eux) n'ont jamais eu la volonté de former une véritable communauté conjugale ; l'intention réelle des époux est un élément intime qui, par la nature des choses, ne peut guère être établie par une preuve directe, mais seulement grâce à un faisceau d'indices (ATF 127 II 49 consid. 4a et 5a ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_176/2019 du 31 juillet 2019 consid. 8.2). L'autorité se fonde en principe sur un faisceau d'indices autonomes, aucun des critères n'étant souvent à lui seul déterminant pour juger du caractère fictif du mariage (arrêts du Tribunal fédéral 2C_900/2017 du 7 mai 2018 consid. 8.2 ; 2C_1055/2015 du 16 juin 2016 consid. 2.2).

De tels indices peuvent résulter d'événements extérieurs tels un renvoi de Suisse imminent de l'étranger parce que son autorisation de séjour n'est pas prolongée ou que sa demande d'asile a été rejetée, la courte durée de la relation avant le mariage, l'absence de vie commune, une différence d'âge importante, des difficultés de communication, des connaissances lacunaires au sujet de l'époux et de sa famille ou le versement d'une indemnité (ATF 122 II 289 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_22/2019 du 26 mai 2020 consid. 4.1 ; 2C_112/2019 du 26 février 2020 consid. 4.1). Une relation extra-conjugale et un enfant né hors mariage sont également des indices qui plaident de manière forte pour un mariage de complaisance (arrêt du Tribunal fédéral 2C_900/2017 précité consid. 8.4 ; ATA/777/2020 du 18 août 2020 consid. 6b).

En présence d'indices sérieux d'un mariage fictif, il appartient à l'intéressé de démontrer, par une argumentation circonstanciée, l'existence d'une relation conjugale réellement vécue et voulue (arrêts du Tribunal fédéral 2C_900/2017 précité consid. 8.2 ; 2C_1060/2015 du 1er septembre 2016 consid. 5.2 ; 2C_177/2013 du 6 juin 2013 consid. 3.4 ; ATA/777/2020 précité consid. 6c).

d. En l'espèce et à la suite du refus de l'OCPM de reconsidérer la décision de refus de renouvellement de son permis de séjour, le recourant devait quitter la Suisse au 17 avril 2015.

Alors qu'il se trouvait dans une situation de renvoi imminent de Suisse, il a expliqué sa situation administrative précaire à Mme C______ courant mai 2015, selon le courrier de cette dernière adressé au service étrangers de l'OCPM le 7 novembre 2016.

Les termes de ce courrier sont clairs et sans équivoque. Le recourant, un ami, lui avait proposé de se marier avec elle contre rémunération. Après avoir obtenu son accord, il avait fait parvenir un courrier à l'OCPM annonçant ce prochain mariage. Durant la procédure de préparation du mariage, ils avaient simulé une communauté de vie, entre mai et juillet 2015. Elle était enceinte d'une enfant dont le père était son compagnon.

Ainsi, en l'espèce, force est de constater que quatre des critères fondant des indices d'un mariage fictif sont réunis selon les informations contenues dans cette dénonciation que Mme C______ n'avait aucun intérêt à adresser à l'autorité compétente si ce n'est celui de la découverte de la vérité dans la mesure où elle portait l'enfant de son compagnon. Elle n'a au demeurant pas craint de s'exposer elle-même à une sanction pénale qu'elle n'a pas remise en cause. Ces critères sont celui d'un renvoi imminent, de l'absence de relation intime préexistante au mariage, du versement d'une indemnité en contrepartie et de la naissance d'un enfant né hors mariage, élément qui est prouvé par le jugement civil ayant désavoué la paternité du recourant.

Dans ces conditions, il appartenait au recourant de démontrer une relation conjugale voulue et vécue, ce en quoi il a échoué. Au contraire, l'existence d'une telle relation est clairement contredite par la condamnation pénale dont il fait définitivement l'objet.

Dans ces circonstances, l'attestation de M. E______, abbé, ne suffit pas à prouver l'existence d'une réelle relation conjugale entre le recourant et Mme C______. En effet, il en ressort que le recourant avait présenté celle-ci à M. E______ en 2011, comme une « copine ». M. E______ avait été affecté à la cure de G______ en septembre 2013 et n'était revenu à Genève qu'en février 2016 pour assister à leur mariage. Ainsi, compte tenu de ces relations sporadiques, M. E______ n'a pas été le témoin d'une communauté de vie conjugale. En outre, dans la mesure où il ressort de la dénonciation du 7 novembre 2016 que le jour du mariage le recourant a menti à ses cinq connaissances camerounaises sur le véritable but du mariage, l'éventuelle force probante de cette attestation est réduite à néant.

Le fait qu'aucun divorce ne soit intervenu entre le recourant et Mme C______ ne constitue pas un indice de la sincérité du mariage. Mme C______ a en effet obtenu par jugement du Tribunal de première instance du 10 septembre 2018 qu'il soit dit que le recourant n'était pas le père de sa fille, d'où la rectification des registres de l'état civil en ce sens, ce qui était le fondement de sa dénonciation à l'OCPM. Peu importe qu'elle n'ait introduit aucune action en annulation du mariage ou une requête de divorce.

En définitive, le recourant a échoué à démontrer la réalité d'une relation de couple avec Mme C______ ainsi que le refus de cette dernière de divorcer pour la raison qu'elle tiendrait à leur mariage et, partant, à renverser les indices sérieux d'un mariage fictif.

Ainsi, il doit être retenu qu'en proposant un mariage contre rémunération, en annonçant à l'OCPM son prochain mariage et en simulant une communauté de vie avec Mme C______, le recourant a clairement adopté un comportement déloyal et trompeur. Il a en effet donné sciemment de fausses informations à l'OCPM, violant ainsi le devoir d'information auquel il était appelé à se conformer.

S'il est vrai que le rapport d'enquête rendu le 26 janvier 2017 n'est pas exempt de reproche, en ce sens qu'il n'y est par exemple pas fait mention d'une affaire pénale pendante alors que les 7 et 24 novembre 2016, Mme C______, respectivement l'OCPM, ont dénoncé au Ministère public le comportement frauduleux du recourant à l'égard des autorités, cela est en définitive sans effet eu égard à la question de la prescription de l'annulation de la naturalisation.

En effet, comme vu ci-dessus, l'ouverture de la procédure d'annulation permet d'interrompre le délai de prescription de l'art. 35 al. 2 LNat. Or, il ressort de l'arrêté querellé que c'est en date du 22 février 2018 que le service étrangers de l'OCPM a porté les faits concernant le recourant à la connaissance du secteur naturalisations. Dès lors et en tout état de cause, ce n'est qu'à ce moment-là que le Conseil d'État, soit l'autorité compétente, a pu ouvrir une procédure d'annulation de la naturalisation. Il en découle que le Conseil d'État, en annulant la naturalisation genevoise du recourant, par arrêté du 15 janvier 2020, a agi dans le délai de deux ans prévu par l'art. 35 al. 2 LNat. Il a également agi dans le délai de cinq ans prévu par l'art. 35a LNat, pour autant que cet article soit applicable, puisque le recourant a prêté serment le 28 novembre 2017 (art. 25 al. 3 let. a LNat).

Enfin et comme le relève le Tribunal fédéral dans un cas d'annulation de la naturalisation facilitée concernant également un ressortissant camerounais (arrêt du Tribunal fédéral 1C_247/2019 du 18 octobre 2019 consid. 4), le risque que le recourant devienne apatride, vraisemblablement réalisé en l'espèce au vu du jugement civil de droit local du 23 juin 2020 émis par le Tribunal de première instance de F______, ne fait pas obstacle à l'annulation de la naturalisation. Si celle-ci a été obtenue frauduleusement, ce qui est le cas en l'occurrence, l'intéressé doit en effet supporter les conséquences qui résultent d'une perte de la nationalité suisse. Admettre qu'il en aille autrement reviendrait à conférer aux apatrides potentiels une protection absolue contre une éventuelle annulation de la naturalisation facilitée, ce qui contreviendrait au principe de l'égalité de traitement (ATF 140 II 65 consid. 4.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_98/2019 du 3 mai 2019 consid. 4 ; 1C_214/2015 du 6 novembre 2015 consid. 2.2.4).

Au vu de ces éléments pris dans leur ensemble, le Conseil d'État n'a pas excédé ni abusé de son pouvoir d'appréciation en annulant son arrêté du 17 mai 2017 et en refusant d'octroyer la naturalisation genevoise au recourant, lequel n'en remplit pas les conditions formelles et matérielles.

En tous points mal fondé, le recours sera par conséquent rejeté, en tant qu'il est recevable.

10) La procédure de recours étant gratuite pour les décisions en matière de naturalisation (art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, en tant qu'il est recevable, le recours interjeté le 28 février 2020 par Monsieur A______ contre l'arrêté du Conseil d'État du 15 janvier 2020 ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Noudemali Romuald Zannou, avocat du recourant, au Conseil d'État ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mmes Payot Zen-Ruffinen et Lauber, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Poinsot

 

 

le président siégeant :

 

 

M. Mascotto

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :