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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1245/2009

ATA/682/2014 du 26.08.2014 sur JTAPI/746/2013 ( ICC ) , REJETE

Recours TF déposé le 06.10.2014, rendu le 17.03.2016, REJETE, 2C_910/2014, 2C_911/2014
Descripteurs : REMISE CONVENTIONNELLE DE DETTE ; CRÉANCE ; REMISE D'IMPÔT ; FORTUNE PRIVÉE ET COMMERCIALE(DROIT FISCAL) ; FORTUNE ; IMPÔT SUR LE REVENU ; IMPOSITION SELON LA CAPACITÉ ÉCONOMIQUE ; RÉDUCTION(EN GÉNÉRAL) ; VALEUR RÉSIDUELLE
Normes : LPFisc.7.al2; LIFD.16.al1; LIFD.16.al3; LIFD.18.al2; LIFD.24; Cst.127.al2; LIPP-IV.1; LIPP-IV.10
Résumé : La remise de la dette de la banque a réduit le passif de la cliente privée d'une somme de CHF 1'000'000.-, sans diminution correspondante de ses actifs. Dès lors, c'est à juste titre que l'AFC-GE a repris dans le bénéfice imposable de la recourante l'abandon de créance consenti par la banque et l'a taxé comme revenu. La solution de la recourante, selon laquelle puisque l'abandon de la créance n'a pas conduit à une augmentation de sa fortune privée nette, dès lors, il y aurait lieu de procéder à son imposition non pas sur la valeur "nominale" de la remise, mais sur une valeur inférieure estimée à l'aune de sa solvabilité, ne saurait être retenue. En effet, la banque peut bénéficier auprès de l'AFC-GE d'une déduction pour la totalité du montant de la remise, partant, la logique commande que ce soit la totalité de cette valeur qui soit appréhendée auprès du bénéficiaire aussi.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1245/2009-ICC ATA/682/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 août 2014

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Frédéric Vuilleumier, avocat

contre

AMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
19 juin 2013 (JTAPI/746/2013)


EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 1948, est domiciliée à Genève.

2) Durant son mariage avec Monsieur A______, elle a acheté avec ce dernier, en copropriété par moitié, le capital-actions de la B______ SA en 1986. Cette société immobilière était propriétaire d'une villa à Veyrier que les époux A______ ont occupé à titre de logement principal avec leurs trois enfants.

3) Pour financer cette acquisition, le couple a contracté deux emprunts auprès de la banque C______, pour un total de CHF 3'600'000.-. En 1993 un nouveau prêt hypothécaire de CHF 3'000'000.- lui a été accordé.

4) Les époux A______ n'ont pas pu faire face à leurs engagements, de sorte qu'en 1996 la banque a dénoncé le prêt au remboursement, puis a engagé des poursuites.

5) Suite à des restructurations, les créances de la banque C______ ont été reprises par la banque D______ (ci-après : la banque).

6) Le ______ 1999, M. A______ est décédé.

7) En date du 13 septembre 2001, Mme A______ a obtenu un arrangement avec ses créanciers dans le cadre des procédures de poursuites par le biais de la signature d'une convention.

Aux termes de celle-ci, Mme A______ reconnaissait devoir à D______ un montant total de CHF 5'353'718.55. Elle s'engageait aux cotés de la
B______ SA à vendre l'immeuble pour un prix de CHF 3'300'000.-. Le produit de la vente devait être versé à la banque qui procéderait, à ce moment-là, à un premier abandon de créances à hauteur de CHF 1'000'000.-. Le solde de la dette faisait l'objet d'un deuxième abandon partiel dans les vingt-quatre mois, laissant un solde de CHF 500'000.- qui était remboursable selon les moyens de Mme A______, mais qui était définitivement abandonné trois ans après le second.

8) Au décès de M. A______, le couple avait d'importants soldes d’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) et d’impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) impayés pour les années 1993 à 1998.

9) Par courrier du 3 juillet 2002, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a accordé à Mme A______ une remise de CHF 47'673.10 sur l'ICC et une remise de CHF 15'284.90 sur l'IFD pour l'année 1998.

10) Le 8 août 2003, l’AFC-GE a notifié à Mme A______ les bordereaux de taxation IFD et ICC 2001.

11) Le 5 septembre 2003, Mme A______ a formé réclamation contre les bordereaux d’impôt précités, car l'intégralité des intérêts hypothécaires n'en avait pas été déduite. Elle y a également joint une copie de la convention conclue avec la banque.

12) Le 26 mai 2004, l’AFC-GE a informé Mme A______ qu’elle entendait rectifier, en sa défaveur, la taxation 2001, en prenant en considération l'abandon de créances de CHF 1’000’000.- comme revenu.

13) Par courrier du 15 septembre 2004, Mme A______ a fait part de son désaccord à l'AFC-GE. Une décision taxant le montant de l'abandon de créance outrepasserait largement sa capacité contributive et la placerait dans un état désastreux dans le cadre de l'assainissement de sa situation financière.

14) L’AFC-GE a suspendu la procédure, considérant l'abandon de créance comme une donation, qui devait être traitée sous l’angle des droits d’enregistrement.

Le 10 décembre 2008, elle a notifié un bordereau de droits d’enregistrement de CHF 359'876.890 calculé sur une donation mobilière de CHF 640'000.-. Une amende pour dépôt tardif de CHF 17'136.- y était également comprise.

15) Le 9 janvier 2009, Mme A______ a formé une réclamation contre ce bordereau.

16) Par décision du 9 janvier 2009, l’AFC-GE a persisté, celle-ci a maintenu sa taxation.

17) Par acte du 5 mars 2009, enregistré sous la cause n° A/1245/2009,
Mme A______ a recouru auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : CCRA), dont les compétences ont été reprises le 1er janvier 2011 par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI), contre cette décision, concluant à son annulation ainsi qu'à l'annulation du bordereau d'enregistrement du 10 décembre 2008.

Aux termes de la jurisprudence, les personnes morales qui poursuivaient des buts commerciaux ne faisaient pas de donation ou n'en recevaient pas. Le but de la banque était de retirer de l'abandon un double avantage : celui de régler le litige et celui consistant à assainir son bilan, sans avoir à mobiliser les fonds propre en contrepartie de l'acquisition, par voie d'exécution forcée, d'un bien immobilier.

Par ailleurs, le droit d'enregistrement était prescrit dans la mesure où plus de cinq ans s'étaient écoulés entre la connaissance effective du contenu de la convention par l'AFC-GE en août 2003 et l'émission du bordereau de droit d'enregistrement en décembre 2008.

L'AFC-GE avait fait preuve d'une attitude contradictoire. Elle avait accordé deux remises d'impôt pour l'année 1998 puisqu'elle avait compris et adhéré à la nécessité d'assainir la situation financière de Mme A______ alors que plusieurs années plus tard, pour le même complexe de faits, elle recherchait à faire supporter à celle-ci un montant très important.

18) Le 1er septembre 2009, Mme A______ a écrit à la direction de la division des personnes physiques de l'AFC-GE en vue de trouver une solution transactionnelle.

Elle sollicitait la perception de l'impôt sur le revenu plutôt que l'impôt sur les donations. Seule la valeur effective de la créance abandonnée devait être considérée comme un revenu.

19) Par décision du 1er octobre 2009, la CCRA a suspendu la procédure de recours contre la taxation de droits de donation.

20) Par courriel du 30 novembre 2010, l’AFC-GE a fait savoir à
Mme A______ qu’elle renonçait à imposer l’abandon de créance par le biais de droits d’enregistrement et que l'intégralité de celui-ci serait imposé au titre de revenu pour l'année 2001.

21) Le 17 décembre 2010, l’AFC-GE a rejeté la réclamation que
Mme A______ avait formée le 5 septembre 2003. Elle a maintenu la taxation du 8 août 2003 s'agissant des intérêts hypothécaires et lui a notifié deux bordereaux rectificatifs ICC et IFD 2001, calculés sur un revenu imposable intégrant l’abandon de créance de CHF 1'000'000.-.

Le droit fiscal positif était fondé, en matière d'imposition du revenu, sur la théorie de l'accroissement du patrimoine, c'est-à-dire sur une conception extensive du revenu imposable. Un revenu était ainsi réalisé lorsqu'un contribuable était libéré d'une dette.

Partant, elle arrêtait l'ICC 2001 à CHF 372'548.15 sur la base d'un revenu imposable de CHF 1'231'368.- et d'une fortune nulle, et l'IFD 2001 à CHF 141'599.50 sur la base d'un revenu imposable de CHF 1'231'300.-.

22) Par pli du même jour, l'AFC-GE a notifié à Mme A______ des bordereaux d'impôts pour l'année 2006 qui tenaient compte de l'intégralité d'un abandon de créance ultérieure d'un montant de CHF 500'000.- au titre du revenu.

23) Par acte du 19 janvier 2011, enregistré sous la cause n° A/323/2011,
Mme A______ a recouru auprès du TAPI contre la décision de l'AFC-GE du
17 décembre 2010 relative aux bordereaux rectificatifs ICC et IFD 2001, concluant, « avec suite des frais et dépens », à son annulation.

Elle ne contestait pas le principe général de l'imposition au titre du revenu d'un abandon de créance, mais avait fait valoir, d'une part, que cet abandon de créance ne pouvait être soumis à la fois aux droits de donation et à l'impôt sur le revenu et d'autre part, que cet abandon de créance ne constituait pas un accroissement de la fortune nette, et, donc, pas un revenu, puisque sa fortune était toujours négative après l'abandon de créance.

En outre, la valeur nominale de la créance privée abandonnée avait été soumise à l'impôt sans qu'ait été examinée la valeur réelle de cette créance et si Mme A______ disposait en raison de cet abandon, de moyens financiers supérieurs à ceux qu'elle avait avant l'abandon. Il en résultait que l'AFC-GE avait violé le principe de la capacité contributive.

24) Dans sa réponse du 10 août 2010, l'AFC-GE a conclu au rejet de recours.

Elle admettait que l'abandon de créance ne pouvait pas être imposé une seconde fois au titre de la donation et s'engageait de ce fait à annuler le bordereau de droits d'enregistrements du 10 décembre 2008, dans le cas où les bordereaux rectificatifs ICC et IFD 2001 du 17 décembre 2010 seraient confirmés par le TAPI, de sorte qu'il n'y aurait pas de double imposition. Pour le surplus, l'intégralité de l'abandon de créance devait être considérée comme un revenu imposable aux termes de la théorie de l'accroissement de la fortune nette.

25) Par jugement du 5 décembre 2011, le TAPI a ordonné la jonction des causes n° A/1245/2009 et n° A/323/2011, sous la cause n° A/1245/2009 et a admis partiellement le recours de Mme A______, annulant le bordereau de droits d’enregistrement du 10 décembre 2008 pour éviter la double imposition et confirmant les bordereaux rectificatifs ICC et IFD 2001 du 17 décembre 2010.

Quand bien même la fortune de Mme A______ était toujours négative à l'issue de l'abandon de créance, celui-ci n'avait certes pas entraîné une augmentation de l'actif, mais une diminution du passif, qui devait également être considérée comme un revenu, dès lors qu'elle provenait d'une remise de dette.

Mme A______ s'était limitée à invoquer la violation du principe de la capacité contributive sans avoir fourni d'élément qui permettait de déterminer la valeur résiduelle de la créance abandonnée, alors que le fardeau de la preuve lui incombait, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de s'écarter de la valeur nominale de l'abandon de créance retenu par l'AFC-GE. L'imposition était conforme aux dispositions légales applicables, et était identique à celle de tout autre contribuable dans une situation similaire, ne violant pas le principe de la capacité contributive.

26) Suivant les indications relatives à la composition du TAPI figurant à la fin du dispositif du jugement, lors de la délibération, avaient siégé Monsieur Yves JOLIAT, président, Messieurs F______ et Stéphane TANNER, juges assesseurs.

27) Par acte du 13 janvier 2012, Mme A______ a interjeté recours contre le jugement du TAPI précité auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant, « avec suite de frais et dépens », à son annulation.

L’abandon de créance ne pouvait être considéré comme ayant conduit à une augmentation de sa fortune nette. Dès lors, le montant de cet abandon de créance ne pouvait être considéré comme un revenu qu'elle avait réalisé. En prenant en considération la valeur nominale d'une créance privée abandonnée sans qu'elle ait examiné la valeur réelle de cette créance pour le bénéficiaire de l'abandon,
l'AFC-GE avait violé le principe de la capacité contributive.

En outre, l'AFC-GE avait également fait preuve d'une attitude contradictoire. Elle lui avait accordé deux remises d'impôt pour l'année 1998, alors que, dans le même contexte d'assainissement, trois ans plus tard, elle avait imposé les abandons de créances octroyés par D______.

28) Le 7 février 2012, le TAPI a transmis son dossier, sans formuler d’observation.

29) Le 29 février 2012, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Le revenu imposable pouvait prendre la forme d'un abandon de créance, en ce sens que la diminution du passif du contribuable pouvait également constituer un revenu si elle provenait d'une remise de dette.

30) Le 11 février 2013, la présidente du Conseil supérieur de la magistrature (ci-après : CSM) a écrit à la chambre administrative.

M. F______, juge assesseur auprès du TAPI siégeant dans les affaires fiscales, s’avérait être domicilié dans le canton de Vaud depuis le mois de septembre 2010, de sorte que depuis lors il ne remplissait plus les conditions d’éligibilité dans le canton de Genève.

31) Par arrêt du 5 mars 2013 (ATA/133/2013), la chambre administrative a admis partiellement le recours de Mme A______, annulé le jugement du TAPI du 5 décembre 2011 et renvoyé la cause à ce dernier pour nouveau jugement, celui-ci devant être délibéré dans une composition régulière, M. F______, n'exerçant pas des droits politiques à Genève.

32) Par jugement du 19 juin 2013, le TAPI, statuant dans une nouvelle composition, a ordonné la jonction des causes n° A/1245/2009 et n° A/323/2011, sous la cause n° A/1245/2009 et a annulé le bordereau de droits d’enregistrement du 10 décembre 2008 pour éviter la double imposition et confirmé les bordereaux rectificatifs ICC et IFD 2001 du 17 décembre 2010.

Ce jugement comportait une motivation identique à celui du 5 décembre 2011.

33) Par acte du 16 juillet 2013, Mme A______ a interjeté recours contre ce jugement auprès de la chambre administrative en reprenant les conclusions et arguments développés dans son recours du 13 janvier 2012.

34) Le 29 juillet 2013, le TAPI a transmis son dossier, sans formuler d’observation.

35) Le 12 août 2013, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

36) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 7 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc -
D 3 17 ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la question de savoir si l'intégralité de l'abandon de créance de CHF 1'000'000.- convenu le 13 septembre 2001 entre la recourante et D______ doit ou non être considéré comme un revenu imposable IFD ainsi qu'ICC pour l'année fiscale 2001.

Impôt fédéral direct

3) a. L'art. 16 al. 1 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11) pose le principe selon lequel sont imposables tous les revenus du contribuable, qu'ils soient uniques ou périodiques. La loi met en évidence le principe de l'imposition du revenu global net (ATF 125 II 113
consid. 4a p. 119 s). Sont exonérés d'impôt, selon l'art. 16 al. 3 LIFD, les bénéfices en capital réalisés lors de l'aliénation d'éléments de la fortune privée. Les principaux revenus imposables sont décrits plus en détail aux art. 17 à 23 LIFD. L'art. 18 al. 1 LIFD prévoit que tous les revenus provenant de l'exploitation d'une entreprise commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou sylvicole, de l'exercice d'une profession libérale ou de toute autre activité lucrative indépendante sont imposables. Font partie des revenus provenant de l'activité lucrative indépendante, selon l'art. 18 al. 2 LIFD, tous les bénéfices en capital provenant de l'aliénation, de la réalisation ou de la réévaluation comptable d'éléments de la fortune commerciale.

b. Tout revenu que la loi n'exclut pas expressément de son champ d'application est considéré comme faisant partie du revenu imposable. Celui-ci comprend l'ensemble des revenus du contribuable, quelle qu'en soit leur nature ou leur forme; l'impôt frappe le revenu global (ATA/110/2009 du 3 mars 2009 ; ATA/503/2009 du 6 octobre 2009).

c. Si la notion de revenu n'est pas définie précisément par la loi, la jurisprudence et la doctrine suisses retiennent en principe comme déterminante la théorie de l'accroissement net du patrimoine (ATF 125 II 113 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_766/2010 du 29 juillet 2011 consid. 2.1 ; ATA/714/2012 du 30 octobre 2012 consid. 6b). Selon celle-ci, le revenu acquis par un contribuable se compose de tout accroissement de son patrimoine constaté au cours de la période fiscale considérée, ce qui peut provenir tant d'une augmentation des actifs que d'une diminution des passifs.

d. Selon la jurisprudence, l'abandon d'une créance bancaire en faveur d'un client débiteur est fiscalement considéré comme un revenu pour ce dernier et non comme un don, exonéré en vertu de l'art. 24 let. a LIFD (arrêts du Tribunal fédéral 2C_224/2008 du 1er avril 2009 consid. 2.2 ; 2C_120/2008 du 13 août 2008 consid. 2.2). Dans la mesure où la dette est commerciale, la remise sera traitée en tant que revenu provenant d'une activité lucrative indépendante au sens de l'art. 18 LIFD (arrêt du Tribunal fédéral 2C_120/2008 du 13 août 2008 consid. 2.2 et les références citées, notamment ATF 133 V 105 consid. 3.1 et 3.2 non publiés). Si la dette remise est privée, il s'agit, selon la théorie de l'accroissement de la fortune nette, d'un revenu imposable en vertu de la clause générale de l'art. 16 al. 1 LIFD (arrêt du Tribunal fédéral 2C_120/2008 précité consid. 2.2).

Ce faisant, le Tribunal fédéral n'a pas considéré qu'une telle pratique serait contraire au principe de l'imposition selon la capacité contributive énoncé à
l'art. 127 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) ; il résulte du reste d'autres arrêts qu'il considère le principe de l'imposition du revenu global net comme découlant de celui de l'imposition selon la capacité contributive (ATF 133 I 206 consid. 8.2).

Déterminer si l'on a affaire à une dette privée ou commerciale suppose d'examiner si celle-ci se rapporte à la fortune privée ou commerciale du contribuable. Cet examen doit se faire sur la base d'une appréciation de l'ensemble des circonstances. La comptabilisation de l'élément doit en particulier être considéré comme un indice de son caractère commercial (ATF 133 II 420
consid. 3.2 p. 422 ; 125 II 113 consid. 3c p. 118 et les arrêts cités). Cependant, un actif (ou passif) nécessairement commercial fait partie du patrimoine commercial même s'il ne figure pas dans la comptabilité (arrêts du Tribunal fédéral 2C_29/2008 du 28 mai 2008 consid. 5.2 ; 2A.76/1991 du 10 juillet 1992, publié in StE 1993 B 23.2 no 13). A l'inverse, une dette qui n'a aucun lien avec une activité indépendante doit être considérée comme privée (cf. ATF 133 V 105 consid. 3.2 non publié), même si elle figure dans les comptes de l'indépendant.

4) L'art. 24 LIFD précise les revenus exonérés. L'abandon de créance n'y figure pas.

5) En l'espèce, la recourante a signé une reconnaissance de dette le 13 septembre 2001 en faveur de D______ pour un montant de
CHF 5'353'718.55. En vertu de cette reconnaissance, elle s'engageait à vendre sa villa, qui constituait son logement familial à un prix de CHF 3'300'000.- et à verser le solde de cette vente à la banque qui procéderait à un premier abandon de créances à hauteur de CHF 1'000'000.- en 2001.

S'agissant d'une banque qui a renoncé à une créance ferme à l'encontre d'un client privé, selon la théorie de l'accroissement de la fortune nette, le revenu privé est imposable selon la clause générale de l'art. 16 al. 1 LIFD.

Cette remise de dette a réduit le passif de la recourante d'une somme de CHF 1'000'000.-, sans diminution correspondante de ses actifs. Cependant, cette réduction n'a pas généré de gain en capital de la fortune privée, qui bénéficierait de l'exonération en vertu de l'art. 16 al. 3 LIFD.

Dès lors, c'est à juste titre que l’AFC-GE a repris dans le bénéfice imposable de la recourante l’abandon de créance consenti par la banque et l’a taxé comme revenu.

6) La recourante estime que l’abandon de créance d'un montant de
CHF 1'000'000.- n'a pas conduit à une augmentation de sa fortune nette. Dès lors, il y aurait lieu de procéder à son imposition non pas sur la valeur « nominale » de la remise, mais sur une valeur inférieure estimée à l'aune de sa solvabilité.

Cependant, une telle solution ne saurait être retenue. Par la remise de dette, Mme A______ a effectivement été libérée d'une dette ferme vis-à-vis de D______, obligation d'un montant nominal de CHF 1'000'000.-. C'est ce montant qui doit être retenu lorsqu'il s'agit d'appréhender fiscalement les variations de revenus affectant la recourante.

Cette solution est également en harmonie avec le traitement fiscal de la créance auprès du créancier. En effet, la banque peut bénéficier auprès de
l'AFC-GE d'une déduction pour la totalité du montant de la remise. Dès lors, la logique commande que ce soit la totalité de cette valeur qui soit appréhendée auprès du bénéficiaire.

C'est, donc à bon droit que le TAPI a considéré qu'il n'y avait pas lieu de s'écarter de la valeur nominale de l'abandon de créance retenue par l'AFC-GE.

7) L'argumentation de la recourante, selon laquelle l'AFC-GE aurait fait preuve d'une attitude contradictoire, ne saurait être suivie.

En 1998, l'AFC-GE a accordé à la recourante qui se trouvait dans une situation économique très difficile, une faveur, consistant en la remise d'une partie de sa créance d'impôt à son encontre. Cet abandon exceptionnel de la part de l'AFC-GE ne signifiait en aucun cas que Mme A______ aurait bénéficié pendant une période plus ou moins longue d'un traitement privilégié en matière d'imposition consistant, entre autres, à l'exonération fiscale de l'abandon de créance octroyé par la banque.

Infondé, ce grief aussi doit être rejeté.

Impôt cantonal et communal

8) a. Le 1er janvier 2001, est entrée en vigueur la loi genevoise sur l’imposition des personnes physiques divisée en cinq parties. Le présent litige concernant la période fiscale 2001, cette loi lui est applicable, en particulier la loi sur l'imposition des personnes physiques sur le revenu du 22 septembre 2000
(LIPP-IV - D 3 14) concernant la définition de l'impôt sur le revenu.

b. En l'espèce, l'art. 1 LIPP-IV est de portée identique à celle l'art. 16 al. 1 LIFD et l'art. 24 LIFD est de teneur identique à celle l'art. 10 LIPP-IV s'agissant de l'exonération.

Les règles légales et principes jurisprudentiels applicables en matière d'ICC sont semblables à ceux prévalant en matière d'IFD. Les considérations émises ci-dessus pour l'IFD 2001 sont donc, mutatis mutandis, applicables à l'ICC 2001.

9) Mal fondé, le recours sera rejeté.

10) Un émolument de CHF 750.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de la procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 juillet 2013 par Madame A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 juin 2013 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 750.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Frédéric Vuilleumier, avocat de la recourante, au Tribunal administratif de première instance, à l'administration fiscale cantonale, ainsi qu'à l'administration fédérale des contributions.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :