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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1922/2016

ATA/1194/2017 du 22.08.2017 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1922/2016-FPUBL ATA/1194/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 août 2017

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Christian Dandrès, avocat

contre

HÔPITAUX UNIVERSITAIRES DE GENÈVE
représentés par Me Pierre Martin-Achard, avocat



EN FAIT

1) Par contrat du 1er septembre 1997, Monsieur A______ a été engagé par les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) en qualité de préposé de centrale d'appels d'urgences sanitaires, autrement appelée Centrale Urgences Santé 144 (ci-après : la centrale), au taux de 100 %, avec effet au 1er octobre 1997.

2) Par lettre du 7 juillet 1999, un supérieur hiérarchique de M. A______, qui avait contrôlé les enregistrements des conversations téléphoniques et radios de la centrale à la demande des autorités, lui a fait part de ce que l'audition de plusieurs séquences révélait une très mauvaise qualité des échanges. Il était parfaitement inadmissible de constater la légèreté de certains propos échangés entre les professionnels, le manque de précision, de rapidité et de concision lors du questionnement de l'appelant. Ce niveau de prestations n'était pas en rapport avec la mission d'une centrale d'appels sanitaires urgents. À dater de ce jour une qualité irréprochable des échanges était attendue de l'intéressé, conformément aux instructions qu'il avait reçues. De tels constats seraient par ailleurs à l'avenir sanctionnés.

3) Par arrêté du 21 septembre 2000, le bureau du conseil d'administration des HUG a nommé M. A______ fonctionnaire dès le 1er octobre 2000.

4) Par courrier du 24 mai 2002, M. A______ a été informé que la direction médicale et administrative de la centrale était désormais confiée à un médecin.

5) À teneur du compte rendu d'un entretien d'évaluation et de développement des compétences du 8 novembre 2006, selon l'employeur, M. A______ était un élément important dans le service et y apportait ses compétences et sa riche expérience. Cependant il devait rechercher à renouveler la satisfaction que lui apportait son travail.

6) Selon le procès-verbal de l'entretien du même type du 10 septembre 2013, l'employeur a relevé les très bonnes compétences professionnelles de M. A______, mais estimé que son attitude restait à améliorer. Son niveau en matière de comportement, coopération, communication et information a été jugé insuffisant par les HUG, son humeur et son comportement vis-à-vis de ses collègues ayant des répercussions négatives sur la centrale et devant être améliorées. À cela s'ajoutait notamment une résistance au changement. En outre le 11 juillet 2013, l’intéressé avait quitté son poste suite à un sursaut d'humeur.

Quant à M. A______, il s'est déclaré globalement peu satisfait de sa fonction, ne se sentant pas reconnu dans son travail. Il ne le vivait pas bien.

7) Le 9 juin 2014 a eu lieu un entretien entre, d'une part, M. A______ et, d'autre part, le Docteur B______, médecin responsable de la centrale et Madame C______, responsable opérationnelle de ladite centrale.

Plusieurs plaintes ayant été reçues ces dernières semaines d'appelants et de partenaires concernant M. A______, quatre interventions de sa part avaient été examinées sur la base de la réécoute des appels téléphoniques. De manière générale, il était reproché à M. A______ une attitude négative ces dernières semaines, engendrant une mauvaise ambiance en centrale et avec les partenaires. De plus, il lui était rappelé qu’il était intolérable de porter un jugement sur un requérant – ou appelant – ou de le critiquer. Concernant en particulier une des interventions en cause, le 17 mai 2014, le Dr B______ a annoncé qu'une lettre d'excuses serait adressée à la personne concernée et a averti l'intéressé qu'il ne pouvait pas tolérer son attitude et transmettrait ce dossier au responsable des ressources humaines (ci-après : RH).

8) Par pli du 3 décembre 2015, les HUG ont informé M. A______ qu'au vu du renforcement des effectifs de la centrale, les ressources étaient désormais suffisantes et il n'y avait plus lieu de rémunérer les heures supplémentaires, lesquelles devraient être compensées en temps.

9) À la suite d'une convocation du 14 janvier 2016, M. A______, accompagné d’un représentant syndical, a, le 11 février 2016, fait l'objet d'un entretien de service en raison des faits suivants : le 31 décembre 2015, suite à un appel d'un collègue en service sur ordre du cadre de piquet vers 22h00, M. A______ avait informé celui-ci qu'il ne viendrait pas le 1er janvier 2016 pour remplacer un collègue qui devait prendre son service de 6h45 mais s'était tardivement annoncé malade, ce alors qu'un piquet était planifié pour M. A______ pour le 1er janvier 2016 dès 6h45. La conséquence de ce refus avait été le manque d'un régulateur sanitaire (ci-après : régulateur) pour la journée du 1er janvier 2016 car il n'avait pas été possible de trouver un autre remplaçant.

Le représentant syndical a estimé que la demande faite à M. A______ de prendre le service du 1er janvier 2016 avait été formulée en premier recours et non en dernier recours comme cela aurait dû être le cas. De plus à l'heure de l'appel, vers 22h00 le 31 décembre 2015, l'intéressé n'était pas de piquet. Il aurait été plus indiqué de faire appel au régulateur de piquet à ce moment-ci.

Le Docteur D______, responsable de l’unité pré-hospitalière et de réanimation dans laquelle se trouve la centrale, a rétorqué qu’il n’était pas logique de faire appel au régulateur de piquet pour la nuit alors que la période qui posait problème était le service du 1er janvier 2016 et non celui de la nuit du 31 décembre 2015 au 1er janvier 2016.

D’après Mme C______, cela faisait plusieurs années que le fonctionnement de la centrale prévoyait que l’on fasse appel aux collègues hors piquet en cas d’annonce maladie et que, si aucun d’eux n’était disponible, l’on fasse appel au piquet. Cela n’avait jamais posé de problèmes jusqu’à présent. En outre, si l’annonce survenait après 22h00, on ne dérangeait pas les régulateurs, a fortiori un 31 décembre, et, dans ce cas, on faisait directement appel au régulateur de piquet le lendemain. Les appels faits la veille au soir des jours de piquet l’étaient par courtoisie pour que le régulateur, de piquet le lendemain, dispose de plus de temps pour s’organiser en vue de prendre le service.

Le Dr D______ a invoqué le principe de solidarité, solidarité qu’on attendait de chaque régulateur lors d’une situation de crise, ainsi que le principe de préservation des équipes, parce que, pour maintenir de la motivation, on ne pouvait pas appeler des collègues après 22h00, qui plus est le 31 décembre, pour leur demander de prendre du service le lendemain à 6h45 de manière impromptue, alors qu’ils étaient censés être en congé. Ils ne seraient d’ailleurs peut-être pas en l’état de prendre le service.

À l’issue d’un entretien, l’employeur s’est déterminé de la manière qui suit. Compte tenu de cet entretien, une réflexion à propos d’une réorganisation des plannings allait être lancée, réorganisation qui pouvait faire gagner en sécurité, mais perdre en souplesse et sacrifier du confort de chacun ; cette réflexion permettrait également de clarifier le processus des remplacements d’absences non planifiés. La hiérarchie allait analyser l’attitude de M. A______ lorsqu’il avait interprété la directive sur les piquets et indiqué son refus de venir à son service le 1er janvier 2016. Ce comportement avait montré un manque d’égard face à la fonction de régulateur, un manque de solidarité envers ses collègues, un manque de considération pour la fonction de travail en urgence avec des patients et la volonté de mettre en discussion la directive des piquets le 31 décembre 2015 à 22h00 en provoquant une crise. Pour avoir adopté un tel comportement pendant une période notoirement sensible, M. A______ était passible de se voir infliger un blâme.

10) Le 11 mars 2016, soit dans le délai imparti à M. A______ pour formuler d’éventuelles observations complémentaires, celui-ci a, sous la plume de son représentant syndical, écrit à Monsieur E______, présent lors de l’entretien de service du 11 février 2016 et responsable des ______ du département de médecine communautaire, de premier recours et des urgences, dont fait partie la centrale à tout le moins depuis cette période.

Il s’est opposé à une sanction disciplinaire et a notamment réfuté l’accusation portée à son encontre selon laquelle il n’aurait pas respecté le règlement sur le piquet. Tous les règlements consultés allaient dans son sens. Il avait refusé de venir remplacer un collègue malade parce que remplacer un collègue malade ne faisait pas partie des obligations du service de piquet, étant rappelé qu’aucun autre collègue n’avait été sollicité pour effectuer ce remplacement.

Dans la nuit du 31 décembre 2014, il avait remplacé un collègue malade pour rendre service et être solidaire.

Il se sentait méprisé par sa hiérarchie qui mettait en avant le personnel nouvellement arrivé, faisant des commentaires désagréables au personnel qui apportait son expérience dans l’activité quotidienne. Il se plaignait d’avoir été traité de « vieux » et de « dinosaure » à plusieurs reprises.

L’enregistrement de la conversation du soir du 31 janvier 2015 ne respectait pas les principes de la loi, étant donné qu’elle n’avait pas été utilisée dans le cadre d’un contrôle des prestations pour des raisons de sécurité, mais pour contrôler la conversation entre deux collègues.

Était jointe à cette lettre une pétition de dix-neuf collègues en sa faveur.

11) Par pli du 30 mars 2016, le responsable des RH s’est déterminé sur l’écriture du représentant syndical du 11 mars 2016.

Le service de piquet était notamment institué pour assurer la continuité du service si un régulateur se trouvait dans l’incapacité d’assumer sa tâche. Les circonstances avaient mené à l’appel litigieux de manière conforme aux directives. En outre, le cadre de piquet en poste le 31 décembre 2015 avait volontairement anticipé l’appel, en appelant M. A______ le 31 décembre 2015 à 22h00 afin de lui permettre de prendre ses dispositions. Par ailleurs, il n’appartenait pas au collaborateur de piquet de juger du bien-fondé de la demande de son engagement lors de l’annonce de piquet, cette question pouvant faire l’objet d’une discussion ultérieure.

12) Par décision du 1er avril 2016 déclarée exécutoire nonobstant recours et signée par M. E______ et le Dr D______, se référant aux reproches formulés à l’encontre de M. A______ lors de l’entretien du 11 février 2016, relevant que c’était la seconde fois que celui-ci refusait d’accomplir son service et considérant que son comportement n’était pas en conformité avec le devoir de diligence attendu d’un employé, les HUG ont, en application de l’art. 16 al. 1 let. a de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05), décidé de prononcer un blâme à son encontre.

13) Le 13 avril 2016, par son représentant syndical, M. A______ a formé un recours interne auprès de la direction générale des HUG.

14) Par décision du 10 mai 2016, le directeur général des HUG a confirmé la décision du 1er avril 2016 infligeant un blâme à M. A______.

Le 1er janvier 2016 en refusant de se présenter à son poste de travail durant son service de piquet, M. A______ avait contrevenu à une instruction de son supérieur hiérarchique, conforme aux règles sur le service de piquet, ce qui constituait une faute professionnelle intentionnelle, ce comportement contrevenant de toute évidence à l’art. 22 al. 1 du statut du personnel des HUG (ci-après : le statut).

15) Par acte expédié le 9 juin 2016 au greffe de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), M. A______ a formé recours contre cette décision, demandant que le blâme soit annulé.

Il contestait avoir eu l’obligation de se rendre au travail le 1er janvier 2016. En effet il se trouvait astreint au service de piquet qui avait pour vocation de palier les urgences ponctuelles du service et non pas de service de « pool » de remplacement pour les cas de maladies annoncées à l’avance. Le collègue qui l’avait contacté par téléphone le 31 décembre 2015 à 22h00 n’avait aucune autorité hiérarchique sur lui. Le 1er janvier 2016, pendant qu’il était de piquet, le recourant n’avait pas été appelé par sa hiérarchie pour intervenir en urgence. Dans ce contexte, il n’avait pas manqué à ses obligations de service et les HUG ne pouvaient pas le sanctionner.

Son syndicat avait interpellé la direction générale des HUG à propos de cet évènement qui avait eu une portée pour l’ensemble des collaborateurs, puisque sa hiérarchie, semble-t-il soutenue par la direction générale, entendait modifier la nature de service du piquet lui-même. Le recourant n’avait pas à faire les frais d’une modification unilatérale de la manière dont la hiérarchie interprétait les obligations de la personne de piquet, sans qu’on l’ait au préalable prévenu.

16) Dans leur réponse du 22 juillet 2016, les HUG ont conclu au rejet du recours de M. A______ et à la condamnation de celui-ci en tous les éventuels frais et dépens.

Était notamment produite la directive approuvée le 1er novembre 2007 par le comité de direction des HUG et intitulée « Service de piquet et intervention ». À teneur de son chiffre 1 « définition », le service de piquet astreignait le collaborateur à être atteignable en tout temps et à se déplacer sur le lieu de travail dans un délai fixé par la hiérarchie afin d’effectuer un travail d’urgence ; tout travail et tout service effectué sur le lieu de travail était considéré comme du temps de travail ; le lieu de domicile du collaborateur ne devait pas empêcher la bonne exécution du service de piquet. À teneur du chiffre 2 al. 1 « personnel concerné », le service de piquet pouvait être assuré par l’ensemble du personnel ; néanmoins, il devait être limité aux services qui le nécessitaient en accord avec la direction générale. Pour ce qui est de « l’horaire », le chiffre 3 indiquait que l’horaire du service de piquet pouvait couvrir vingt-quatre heures, horaire de travail contractuel compris ; il était effectué à partir du lieu où se trouvait le collaborateur ; la hiérarchie définissait le moment où le service de piquet débutait ; il avait lieu en dehors des horaires en vigueur dans le service et pouvait commencer à l’issue du temps de travail. Pour ce qui était du « temps d’intervention », selon le chiffre 4 al. 1, les interventions effectuées au cours du service de piquet étaient considérées comme des heures de travail, y compris le temps de déplacement limité toutefois à un maximum de trente-cinq minutes par trajet.

À teneur du document « Procédure – service de piquet [piquet RS] » approuvé le 12 avril 2007 par le responsable opérationnel de la centrale, le principe était qu’un service de piquet était assuré vingt-quatre heures sur vingt-quatre par l’ensemble des régulateurs de la centrale, ce service permettant d’obtenir un régulateur supplémentaire lors d’une situation de crise ; ce service était régi par la directive « Service de piquet et intervention » précitée. L’objectif était que lors d’une demande émanant des régulateurs en service, celui de piquet rejoignait la centrale dans les meilleurs délais et au maximum dans les quarante-cinq minutes. Les critères d’appels étaient les suivants : premièrement, en cas de déclanchement du « plan Osiris », le régulateur de piquet était impérativement contacté pour rejoindre la centrale ; deuxièmement, en cas de situation exceptionnelle hors « Osiris », les régulateurs en service pouvaient être confrontés à des situations d’une exceptionnelle gravité, engendrant un surcroit de travail ; dès lors, ils pouvaient contacter, s’ils le jugeaient nécessaire, le régulateur de piquet ; de même, notamment le responsable opérationnel et le médecin de la centrale étaient habilités à demander le retour du régulateur de piquet en centrale ; troisièmement, dans les situations particulières en centrale, si l’un des régulateurs se trouvait subitement dans l’incapacité d’assumer sa tâche, le piquet était engagé ; dans tous les cas de figure, le responsable opérationnel de la centrale était avisé de la situation dès que cela était possible ; en tous les cas, le régulateur de piquet quittançait immédiatement la réception du message à la centrale. S’agissant du fonctionnement, le régulateur de piquet était toujours identifié en centrale et joignable soit par téléphone professionnel, par le « pager » ou via les téléphones privés.

17) Suite à la demande formulée le 17 août 2016, par le conseil nouvellement constitué de M. A______, une audience de comparution personnelle des parties s’est tenue le 30 août 2016 devant le juge délégué de la chambre administrative.

Selon les déclarations de M. A______, le 31 décembre 2015 à 22h00, un collègue de travail l’avait appelé sur son téléphone privé en lui disant que le lendemain, il y aurait certainement un collègue qui serait malade, et comme l’intéressé était de piquet, ce serait certainement à lui de venir travailler. Celui-ci avait répondu que le piquet n’était pas fait pour cela et qu’il avait déjà remplacé le 31 décembre 2014 un collègue malade sur demande par téléphone du Dr B______ sans qu’il soit de piquet et avait aussi travaillé à Noël 2015 selon son horaire prévu. Le soir du 31 décembre 2015, il ne voyait pas pourquoi il devait également travailler le 1er janvier 2016 ; il avait ajouté à l’intention son collègue que celui-ci devait appeler des collègues qui n’étaient pas de piquet pour effectuer ce remplacement, comme cela se faisait depuis toujours ; cette conversation s’était terminée ainsi. M. A______ n’avait pas été appelé le lendemain. Si on l’avait appelé le lendemain pour lui demander de venir en raison de la maladie du collègue, il serait venu au travail.

La représentante des HUG a contesté que M. A______ fût à disposition de son employeur le 1er janvier 2016 dans le cas de son service de piquet. Celui-ci ayant catégoriquement dit le 31 décembre 2015 au soir qu’il ne viendrait pas le lendemain, il aurait été inutile de le rappeler.

18) Le 4 octobre 2016, M. A______ a déposé des écritures complémentaires, faisant en substance valoir qu’il n’avait pas manqué à ses obligations de service et ne pouvait dès lors pas faire l’objet d’une sanction disciplinaire. Il a en outre déposé une liste de témoins et a produit des pièces.

À teneur d’un courriel adressé le 12 janvier 2016 à M. A______, le Dr B______ indiquait à celui-ci qu’il avait appris son refus de venir le 1er janvier 2016 dans le cadre de son piquet lorsque la demande lui en avait été faite pour remplacer l’absence inopinée de Monsieur F______et qu’il avait décidé de faire remonter officiellement ce comportement à la hiérarchie institutionnelle.

Par courriel du même jour à tous les régulateurs, le Dr B______ rappelait la procédure actuelle, qui était valide depuis 2007 et n’avait pas changé, à savoir qu’en particulier, si l’un des régulateur se trouvait subitement dans l’incapacité d’assumer sa tâche, le piquet était engagé, ce qui signifiait que si l’un des régulateurs était de piquet et qu’une personne était déclarée absente « dans les moins de 24h », il risquait d’être appelé pour assumer ce remplacement inopiné, en attendant qu’une autre solution soit trouvée ; dans les cas extrêmes et exceptionnellement, si aucune autre solution n’était trouvée, il était possible que la personne de piquet doive assumer l’entier de l’horaire de la personne absente, sachant que dans ce cas, ses horaires suivants seraient adaptés pour respecter les directives des piquets institutionnels.

Par courrier du 7 juin 2016, le représentant syndical mentionné plus haut demandait à la directrice des RH des HUG une rencontre paritaire avec la participation des syndicats, au sujet des modalités du service de piquet. Il n’avait jamais été question d’utiliser ce service pour remplacer le personnel malade.

À teneur du planning mensuel concernant M. A______, celui-ci totalisait 151,13 heures supplémentaires au 31 janvier 2016.

19) Dans leurs observations du 28 octobre 2016, les HUG ont contesté les arguments émis le 4 octobre 2016 par le recourant et ont persisté dans leurs conclusions de rejet, sollicitant la production par eux-mêmes de la bande d’appel audio de la centrale relative à la conversation téléphonique du 31 décembre 2015 entre M. A______ et Monsieur G______, le régulateur qui avait appelé celui-là, et a déposé une liste de témoins.

20) Par pli du 10 janvier 2017 faisant suite à une demande du juge délégué, les HUG ont produit en deux exemplaires le CD-ROM comprenant la bande d’appel audio susmentionnée, laquelle a été transmise, par courrier de la chambre administrative du lendemain, au recourant.

De l’écoute de ce CD-ROM ressort la conversation suivante :

« – Salut A______, c’est G______.

–      Salut.

–      Je suis vraiment désolé de te déranger. Il y a F______ qui vient d’appeler. Il risque d’être malade demain. Et a priori tu es de piquet.

–      Ah non, mais je ne viens pas moi. Voilà. Je ne suis pas de piquet pour ça. C’est hors de question.

–      Ouais. Ben après voilà. On a appelé H______ comme c’est lui le cadre, et donc il nous a demandé d’appeler, voilà.

–      J’ai déjà fait le 31 l’année passée pour la même raison. C’est bon.

–      Ouais.

–      Ouais.

–      D’accord OK, il n’y a pas de soucis. Voilà. Passe un bon réveillon à toi.

–      Ouais, [au revoir].

–      [Au revoir]. »

Lors de cette conversation, M. A______ s’exprimait de manière résolue.

21) En date du 21 février 2017 s’est tenue une audience de comparution personnelle et d’audition de témoins devant le juge délégué.

a. Monsieur I______, régulateur à la centrale depuis 2012, a exposé que son horaire était de deux jours puis de deux nuits à son poste de travail au 144 avec chaque fois douze heures d’affilées (quatre fois douze heures) ; ensuite il avait un jour de repos puis trois jours de congé dont le dernier jour était utilisé de temps en temps comme piquet de nuit avant la reprise de son horaire de travail de deux jours puis de deux nuits.

S’il était par exemple à son poste de travail et avait un malaise et se trouvait en incapacité de travail, ses collègues appelleraient le piquet (soit de jour, soit de nuit) ; parallèlement la hiérarchie appellerait les régulateurs qui étaient en congé pour venir remplacer le malade après que le régulateur de piquet aurait fini sa mission provisoire, celui-ci ne restant en principe que trois à cinq heures, juste pour remplacer le malade dans l’urgence immédiate. Pour la suite, c’étaient les régulateurs en congé qui venaient s’ils étaient d’accord. S’il n’y avait pas de remplaçant d’accord de venir, un régulateur manquait au 144.

Normalement le régulateur de piquet avait l’obligation de répondre pendant sa durée de piquet mais pas aux autres moments ; il n’y avait donc pas d’obligation pour la personne de piquet d’accepter à l’avance – alors qu’elle n’était pas de piquet – de venir pendant une période où elle était de piquet. Le témoin s’est référé au document « Procédure – service de piquet [piquet RS] » précité, qui prévoyait trois critères d’appels.

Si la hiérarchie savait à l’avance que quelqu’un était malade, elle avertissait les régulateurs en congé pour le remplacer.

Dans sa tranche horaire de piquet, le régulateur de piquet ne pouvait pas contester la demande de venir.

M. I______ était présent lorsque son collègue avait appelé M. A______. Selon lui il n’y avait pas d’urgence puisqu’on lui demandait de venir huit heures plus tard. Lorsqu’on savait à l’avance qu’il y aurait une absence pour cause de maladie, la hiérarchie devait s’organiser autrement qu’en faisant appel au régulateur de piquet. En l’occurrence celui qui avait été absent le 1er janvier 2016 avait appelé la centrale le 31 décembre 2015 entre 21h00 et 22h00 ; le Docteur H______, chef de clinique au sein de l’unité pré-hospitalière complétée de la centrale et du service mobile d’urgence de réanimation (ci-après : SMUR ; anciennement le cardiomobile) et cadre de garde médical le 31 décembre 2015, avait alors été appelé ; puis, à la demande de celui-ci, les régulateurs présents avaient appelé M. A______ et, à peu près en même temps, envoyé un SMS aux collaborateurs en congé, dont aucun n’avait appelé. Le témoin ne comprenait pas pourquoi on avait appelé M. A______ le soir du 31 décembre 2015, puisqu’il n’était pas de piquet.

b. Selon Madame J______, également régulatrice, il arrivait que les piquets soient mis sur les jours de congé. S’il était prévu qu’un régulateur devant venir dans six ou huit heures à son poste de travail ne pourrait pas le faire, que ce soit pour maladie ou pour une autre cause, un message était envoyé à tous les régulateurs en congé pour voir si l’un d’eux pouvait venir le remplacer. Si aucun d’eux ne répondait, il faudrait voir s’il ne fallait pas faire venir le régulateur de piquet en fonction de l’activité du service. On ne pouvait pas savoir à l’avance s’il faudrait quelqu’un pour remplacer le régulateur absent ; cela dépendait de l’activité du service qui ne pouvait se connaître qu’au moment même. Le régulateur de piquet n’était pas là pour palier aux maladies sur une tranche horaire complète d’un régulateur malade mais à une éventuelle surcharge de service. Cette surcharge ne dépendait pas seulement du nombre de régulateurs présents, mais aussi du nombre d’urgences dans le canton.

Cela se faisait que des régulateurs en service ou la hiérarchie appelaient en avance un régulateur en congé à venir à un moment où il serait de piquet. Selon Mme J______, ce n’était pas conforme aux règles du piquet. En effet le régulateur de piquet n’était pas là pour remplacer quelqu’un sur un horaire complet mais seulement en cas de catastrophe ou événement majeur ou remplacement d’un collègue malade sur le lieu de travail pour une durée de deux à quatre heures. Si aucun régulateur en congé ne se déclarait prêt à venir, le régulateur de piquet partirait après le temps nécessaire, et, s’il y avait à nouveau une surcharge, il reviendrait. Ceci correspondait au règlement du piquet et à ce qu’avaient dit les responsables des RH, à savoir Monsieur E______ et la "titre_____" des RH des HUG, entre la fin 2016 et le début 2017 ; ce n’était pas un changement de pratique, mais le rappel de ce qui devait se faire depuis l’adoption du document « Procédure - service de piquet [piquet RS] ».

Normalement, il y avait trois régulateurs de service en même-temps. S’il n’y avait que deux régulateurs en service – ce qui était rare –, on ne faisait pas forcément appel à la personne de piquet, mais seulement s’il y avait une surcharge d’activité.

Si une personne était de piquet au moment où on l’appelait elle n’avait pas d’autres choix que de venir. Si on l’appelait à l’avance, cet appel n’était pas justifié car on ne pouvait pas connaître la situation à l’avance.

c. Selon ses déclarations, le Dr H______ avait, le 31 décembre 2015 au soir, demandé au régulateur de service d’appeler M. A______, dans le but de lui dire qu’il serait très probablement appelé le lendemain matin pour intervenir immédiatement comme régulateur de piquet. C’était à la suite du téléphone du régulateur qui devait venir le lendemain qui avait appelé la centrale vers 18h30 - 19h00 pour l’avertir qu’il ne serait peut-être pas à son poste le lendemain pour des raisons de santé. À sa demande, les régulateurs présents avaient appelé d’abord des régulateurs en congé susceptibles de venir, soit cinq ou six personnes. Puis en l’absence de réponses positives, ils avaient envoyé des SMS à tous les régulateurs du service. Enfin, en l’absence de réponses positives de leur part, les régulateurs présents avaient appelé M. A______ pour lui dire que probablement il allait venir sur son piquet le lendemain en raison de l’absence probable de son collègue. Selon ce que lui avait rapporté le régulateur qui avait appelé M. A______, ce dernier lui avait annoncé qu’il ne viendrait pas le lendemain et que cela ne servait à rien de le rappeler à ce moment-là.

Le Dr H______ avait alors décidé d’agir en fonction de l’évolution de la charge de travail. Le 1er janvier 2016, vers 5h30, le régulateur devant venir avait confirmé qu’il ne le pourrait pas et qu’il devait se rendre à l’hôpital. Le témoin avait alors décidé de ne pas faire à nouveau appel à d’autres régulateurs et de voir comment la situation évoluerait et aussi comment les deux régulateurs et une répartitrice (capable de faire de la régulation lorsqu’elle en avait le temps) présents supporteraient la charge de travail. S’il y avait eu surcharge, il aurait demandé de contacter par SMS tous les autres régulateurs, y compris M. A______. Il n’avait pas envisagé de faire appeler M. A______ malgré son piquet vu sa réponse de la veille qui le conduisait à considérer que celui-ci n’était pas à sa disposition comme piquet. Le 1er janvier 2016 la situation était dégradée et les régulateurs étaient en mode dégradé, qui entrait en principe dans le cadre des critères d’appel du document « Procédure – service de piquet [piquet RS] », c’est-à-dire absence subite d’un régulateur. Du fait qu’ils n’étaient que deux, les régulateurs présents avaient connu une situation gérable mais exigeante, et subi une pression importante, déjà « dans le rouge » alors qu’il y avait une charge normale ; c’était une chance qu’il n’y avait pas eu une surcharge inattendue, la période de Nouvel An et du 1er janvier étant réputée comme entraînant un cumul de contraintes, avec une charge statistiquement plus importante que d’habitude et une disponibilité moindre des collaborateurs, qui plus était en période de week-end comme ici.

M. A______ avait été appelé le soir du 31 décembre 2015 par courtoisie afin qu’il soit averti d’une éventuelle venue le lendemain ; il s’agissait à ce moment-là d’une situation prévue au titre des critères d’appels par le document « Procédure – service de piquet [piquet RS] ». Dans le moment opérationnel, le régulateur de piquet ne devait pas discuter de sa venue ou non quant au fond ; sinon, ce serait ingérable sur le plan opérationnel. Au plan strictement formel le régulateur de piquet n’était astreint à répondre que dès le début de sa période de piquet. L’intéressé n’avait été appelé que par courtoisie.

d. Mme C______, responsable opérationnelle de la centrale depuis juin 2012, qui était en vacances les 31 décembre et 1er janvier 2016, a exposé que c’était par convenance que le régulateur de service avait appelé M. A______ à l’avance. Cela se faisait usuellement pour avertir la personne intéressée. C’était plus agréable d’être averti la veille que tôt le matin du fait que l’on devait venir au travail au titre de piquet. Dans la plupart des cas, on n’attendait pas de réponse de la personne appelée ; il était en effet évident que celle-ci allait venir.

En l’occurrence, sur la base de ce qu’on lui avait dit et de l’audition de la bande d’enregistrement de la conversation avec M. A______ du 31 décembre 2015, celui-ci avait clairement indiqué qu’il était hors de question qu’il vienne au travail le 1er janvier 2016, ce que Mme C______ avait compris dès avant l’entretien de service du 11 février 2016.

En cas d’absence pour maladie d’un régulateur, on cherchait d’abord une solution de remplacement avec les collaborateurs présents, puis en cas d’échec, avec les régulateurs en congé et, enfin, s’il n’y avait pas de disponibilité, avec le régulateur de piquet. On faisait appel à la personne de piquet dans deux situations, soit celle d’une surcharge de travail et celle d’une absence pour maladie d’un régulateur. Dans ce dernier cas, la personne de piquet pouvait être amenée à être présente au travail durant toute sa période de piquet. Lorsqu’il était peu probable que les régulateurs en congé répondraient, en particulier tard le soir ou la nuit, il arrivait que l’on appelle directement le régulateur de piquet avant de chercher d’autres régulateurs. En l’absence d’urgence, le régulateur de piquet n’était pas appelé durant la nuit. L’idée avait toujours été de n’utiliser les régulateurs de piquet qu’en dernier recours. La pratique n’avait pas changé depuis depuis 2012 ni depuis les faits litigieux.

Il était nécessaire pour faire un travail optimal qu’il y ait trois régulateurs présents la journée pour les appels d’urgence. C’était moins nécessaire entre 0h00 et 6h00 du matin sauf les vendredis et samedis soir. Les dimanches et jours fériés, vu l’absence du gestionnaire du transfert inter-hospitalier, les régulateurs présents s’occupaient aussi au besoin de ces transferts et il était d’autant plus nécessaire qu’il y ait alors trois régulateurs. Cela avait été nécessaire le 1er janvier 2016.

Le régulateur absent le 1er janvier 2016, avait été hospitalisé jusqu’au 3 janvier 2016 à tout le moins. Le 2 janvier 2016, il n’y avait pas eu activation d’un piquet dans la mesure où le gestionnaire des transferts était présent. Le 3 janvier 2016, le piquet avait été activé et la personne de piquet avait fait la journée entière ou était venue ou restée volontairement ; ses heures avaient été majorées à 150 %.

22) Par écriture du 6 mars 2017, M. A______ a sollicité la production par les HUG des enregistrements des appels téléphoniques prétendument effectués par le régulateur de service aux autres collaborateurs du service le 31 décembre 2015 pour le remplacement de M. F______, ainsi que les SMS qui avaient été envoyés, de même que l’enregistrement téléphonique de l’appel passé au régulateur de piquet le 2 janvier 2016, pour le remplacement de M. F______, toujours malade à ce moment-là, enfin l’enregistrement de l’entretien téléphonique de M. G______ ou de M. I______ avec le Dr H______, après l’appel passé sur la ligne privée du domicile du recourant le 31 décembre 2015. Si les mesures susmentionnées étaient ordonnées le recourant renoncerait à l’audition de témoins supplémentaires, notamment des régulateurs présents le 1er janvier 2016.

23) Par pli du 6 mars 2017, les HUG ont requis l’audition à titre de témoin du Dr B______.

24) Le 20 mars 2017, à la demande du juge délégué, les HUG ont produit le relevé de la centrale relatif à l’appel du 31 décembre 2015 enregistré dans le CD-ROM produit le 10 janvier 2017, dont il ressortait que ce contact téléphonique avait eu lieu à 23h12 et duré environ cinquante secondes.

25) Dans leurs conclusions après enquêtes du 10 mai 2017, M. A______ et les HUG ont maintenu leurs positions respectives.

26) Par lettre du 12 mai 2017, la chambre administrative a informé les parties que la cause était gardée à juger.

27) Pour le reste les arguments des parties seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit ci-après.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le droit d'être entendu, garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 41 LPA, comprend, en particulier, le droit pour la personne concernée de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d'avoir accès au dossier, celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos. En tant que droit de participation, le droit d'être entendu englobe donc tous les droits qui doivent être attribués à une partie pour qu'elle puisse faire valoir efficacement son point de vue dans une procédure (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2 et les références citées).

Le droit d’être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_551/2015 du 22 mars 2016 consid. 2.2) ni celui d'obtenir l’audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; ATA/356/2016 du 26 avril 2016).

Le droit de faire administrer des preuves découlant du droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 Cst. n’empêche pas l’autorité de mettre un terme à l’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d’une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude qu’elles ne pourraient l’amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 134 I 140 consid. 5.3).

3) En l’occurrence, la chambre de céans dispose d’un dossier complet et les faits sur lesquels porteraient les mesures d’instruction sollicitées par les parties le 6 mars 2017 ne pourraient pas avoir d’incidence sur l’issue du litige, comme cela ressortira des considérants ci-après.

4) a. Les rapports de service d’un fonctionnaire des HUG sont soumis aux dispositions de la LPAC, du règlement d’application de la LPAC du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01) et du statut.

Les devoirs du personnel des HUG sont énumérés aux art. 20 ss du statut. L'art. 20 prévoit que les membres du personnel sont tenus au respect de l'intérêt de l’établissement et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice. Selon l’art. 21 let. a, ils se doivent, par leur attitude, d'entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés, ainsi que de permettre et de faciliter la collaboration entre ces personnes. À teneur de l’art. 22, ils se doivent de remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence (al. 1) ; ils se doivent de respecter leur horaire de travail (al. 2) ; ils se doivent d'assumer personnellement leur travail et de s'abstenir de toute occupation étrangère au service pendant les heures de travail (al. 3) ; ils se doivent de s'entraider et de se suppléer, notamment lors de maladies ou de congés (al. 4).

b. En vertu de l’art. 16 LPAC, les fonctionnaires et les employés qui enfreignent leurs devoirs de service, soit intentionnellement soit par négligence, peuvent faire l'objet, selon la gravité de la violation, des sanctions suivantes :

a) prononcé par le supérieur hiérarchique, en accord avec sa hiérarchie :

1° le blâme ;

b) prononcées, au sein de l'administration cantonale, par le chef du département ou le chancelier d'État, d'entente avec l'office du personnel de l'État ; au sein des services centraux et des greffes du pouvoir judiciaire, par le secrétaire général du pouvoir judiciaire ; au sein de l'établissement, par le directeur général :

2° la suspension d'augmentation du traitement pendant une durée déterminée,

3° la réduction de traitement à l'intérieur de la classe ;

c) prononcées, à l'encontre d'un fonctionnaire, au sein de l'administration cantonale, par le Conseil d'État ; au sein des services centraux et des greffes du pouvoir judiciaire, par la commission de gestion du pouvoir judiciaire ; au sein de l'établissement par le conseil d'administration :

4° le retour au statut d'employé en période probatoire pour une durée maximale de trois ans,

5° la révocation.

5) a. Le droit disciplinaire se rattache au droit administratif, car la mesure disciplinaire n'a pas en premier lieu pour but d'infliger une peine : elle tend au maintien de l'ordre, à l'exercice correct de l'activité en question et à la préservation de la confiance du public à l'égard des personnes qui l'exercent (ATF 142 II 259 consid. 4.4 ; 108 Ia 230 consid. 2b et 5b = JdT 1984 I 21 ; arrêt du Tribunal fédéral 1D_15/2007 du 13 décembre 2007 consid. 1.1 ; ATA/729/2016 du 30 août 2016 consid. 8a ; ATA/1255/2015 du 24 novembre 2015 consid. 7b ; ATA/632/2014 du 19 août 2014 consid. 14 ; Gabriel BOINAY, Le droit disciplinaire de la fonction publique et dans les professions libérales, particulièrement en Suisse romande, in Revue Jurassienne de Jurisprudence [RJJ] 1998, p. 1ss, spéc. 10 s. n. 10 ss).

Il n’a aucunement trait à la protection des intérêts de celui qui serait lésé par l’acte d’un agent public (Pierre MOOR, Droit administratif, vol. III, 1992, n. 5.3.5.2 p. 241).

b. Les sanctions disciplinaires sont régies par les principes généraux du droit pénal, de sorte qu’elles ne sauraient être prononcées en l’absence de faute du fonctionnaire (Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 7ème éd., 2016, n. 1515 ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, n. 2249 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, Genève 2011, n. 1228).

Alors qu’en droit pénal les éléments constitutifs de la faute doivent être expressément indiqués dans la loi, en droit disciplinaire, les agissements pouvant constituer une faute sont d’une telle diversité qu’il est impossible que la législation en donne un état exhaustif (Ursula MARTI/Roswitha PETRY, La jurisprudence en matière disciplinaire rendue par les juridictions administratives genevoises, RDAF 2007 p. 227 ss, p. 235 ; Peter HÄNNI, Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht I/2 - Personalrecht des Bundes, Bâle 2004, n. 231 ; Gabriel BOINAY, op. cit., p. 27 n. 50).

La notion de faute est admise de manière très large en droit disciplinaire et celle-ci peut être commise consciemment, par négligence ou par inconscience, la négligence n’ayant pas à être prévue dans une disposition expresse pour entraîner la punissabilité de l’auteur (ATA/729/2016 précité consid. 8b ; ATA/808/2015 du 11 août 2015 consid. 5e ; ATA/694/2015 du 30 juin 2015 ; ATA/473/2014 du 24 juin 2014 ; ATA/623/2013 du 24 septembre 2013). La faute disciplinaire peut même être commise par méconnaissance d'une règle. Cette méconnaissance doit cependant être fautive (Gabriel BOINAY, op. cit., p. 29 n. 55, p. 14).

c. Tout agissement, manquement ou omission, dès lors qu'il est incompatible avec le comportement que l'on est en droit d'attendre de celui qui occupe une fonction ou qui exerce une activité soumise au droit disciplinaire peut engendrer une sanction. La loi ne peut pas mentionner toutes les violations possibles des devoirs professionnels ou de fonction. Le législateur est contraint de recourir à des clauses générales susceptibles de saisir tous les agissements et les attitudes qui peuvent constituer des violations de ces devoirs (Gabriel BOINAY, op. cit., p. 28 n. 50). Dans la fonction publique, ces normes de comportement sont contenues non seulement dans les lois, mais encore dans les cahiers des charges, les règlements et circulaires internes, les ordres de service ou même les directives verbales. Bien que nécessairement imprécises, les prescriptions disciplinaires déterminantes doivent être suffisamment claires pour que chacun puisse régler sa conduite sur elles, et puisse être à même de prévoir, à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause, les conséquences de nature à dériver d'un acte déterminé (Gabriel BOINAY, op. cit., p. 28 n. 51).

6) a. En l’espèce, les déclarations des témoins devant le juge délégué et les autres éléments au dossier confirment ce qu’a dit Mme C______, responsable opérationnelle de la centrale, lors de l’entretien de service du 11 février 2016, à savoir que, en cas d’annonce d’une maladie d’un régulateur devant être à son poste de travail, il est en premier lieu fait appel aux collègues hors piquet, soit d’abord ceux qui sont présents, puis en cas d’échec, les régulateurs en congé, et, si aucun d’eux n’est disponible ou ne répond, il est, en second lieu, fait appel au régulateur de piquet. Si l’annonce de maladie du régulateur survient après 22h00, les régulateurs susceptibles de le remplacer ne sont pas appelés, a fortiori un 31 décembre. Dans ce cas, il est fait directement appel au régulateur de piquet le lendemain. On peut en déduire que, dans une telle hypothèse, le régulateur de piquet n’est de facto appelé que durant sa période de piquet. Mme C______ a en outre précisé qu’en l’absence d’urgences, le régulateur de piquet n’est pas appelé durant la nuit.

Découlent en outre de la définition même du service de piquet ainsi que des explications des régulateurs entendus par le juge délégué, à savoir Mme J______ et M. I______, qu’un régulateur n’a pas l’obligation de répondre, à l’avance, favorablement à une demande liée au piquet, lorsqu’il se trouve hors d’une période de piquet. Ceci vaut même si ce collaborateur est appelé en vue d’une proche période durant laquelle il sera de piquet.

En réalité, dans la pratique de la centrale, lorsqu’un régulateur qui n’est pas encore de piquet est appelé à l’avance afin que lui soit annoncée une probable obligation de venue à la centrale lorsqu’il sera en période de piquet, cela se fait par courtoisie ou par convenance dans l’idée qu’il est plus agréable pour ce collaborateur d’en être averti à l’avance.

S’il est vraisemblable que cette manière de faire, justifiée par la courtoisie, est certainement appréciée par certains régulateurs qui y verraient une certaine facilitation de la préparation de leur venue au début de leur période de piquet, elle n’est pas appréciée par d’autres, parmi lesquels le recourant et les deux régulateurs entendus en qualité de témoins par le juge délégué. Il est à cet égard tout à fait légitime pour un régulateur de ne pas souhaiter recevoir une annonce lorsqu’il n’est pas de piquet et de préférer se préparer pour le début de sa période de piquet sans savoir préalablement s’il va devoir se rendre à la centrale.

b. La question de savoir si c’est vers 18h30-19h00, comme l’indique le Dr H______, ou entre 21h00 et 22h00, comme l’indique M. I______, que M. F______, le régulateur qui allait probablement être absent le lendemain pour maladie, a appelé la centrale, de même que la question de savoir si c’est après que les régulateurs présents puis en congé aient été appelés sans réponse positive que le recourant a été contacté, selon les déclarations du Dr H______, ou si cela s’est fait simultanément, comme l’a indiqué M. I______, peuvent demeurer indécises, pour les raisons qui suivent. En tout état de cause, aucun régulateur en congé n’a appelé la centrale en vue du remplacement de M. F______.

c. Si les règles et modalités pratiques susmentionnées avaient été suivies sur tous les points le 31 décembre 2015, le recourant n’aurait en principe pas dû être appelé à 23h12, soit après 22h00, mais seulement le lendemain 1er janvier 2016 à 6h45, au début de sa période de piquet. Celui-ci n’était donc pas tenu de répondre à son collègue qu’il allait venir le matin du 1er janvier 2016.

Sous cet angle, cet appel était problématique.

d. Quoi qu’il en soit, lorsqu’il a reçu, le soir du 31 décembre 2015, l’appel téléphonique de son collègue l’informant du risque d’absence pour maladie du régulateur qui devait être présent le lendemain à la centrale et lui rappelant qu’il semblait être de piquet, le recourant n’a pas répondu qu’il ne prendrait pas note d’un tel appel avant le début de son service de piquet, ni ne s’est plaint de ce qu’il avait été contacté hors de sa période de piquet et/ou trop tard le soir. Il a au contraire fondé son refus d’avance de venir au travail le lendemain, catégorique et sans aucune ouverture pour une autre solution, pour d’autres motifs, à savoir que le service de piquet ne serait pas prévu pour remplacer un collègue malade et qu’il avait déjà été de piquet le 31 décembre de l’année précédente.

Ce faisant, le recourant a clairement fait comprendre à son collègue qu’il était hors de question qu’il vienne à la centrale le lendemain. Ce collègue et le Dr H______ ne pouvaient comprendre cette réponse que comme rendant inutile un appel le lendemain 1er janvier 2016, à tout le moins en vue du remplacement du régulateur malade, après que le recourant avait commencé son service de piquet. Vu son refus catégorique, l’intéressé ne pouvait pas ignorer que sa réponse ne pouvait qu’induire une telle compréhension et devait dès lors savoir qu’il ne serait pas appelé le 1er janvier 2016 pendant sa période de piquet en raison de la réponse qu’il avait fournie.

Partant, l’intéressé a clairement fait savoir à son employeur que, le 1er janvier 2016, il ne se déplacerait en aucun cas sur son lieu de travail, alors qu’il a été clairement établi durant l’instruction que le régulateur de piquet qui est appelé pour intervenir ne peut pas refuser de le faire.

Le recourant n’a ainsi sciemment pas respecté les règles afférentes au service de piquet. S’il avait voulu le faire, il lui aurait suffi, malgré sa réponse négative du soir du 31 décembre 2015, de rappeler, dès le début de son service de piquet, la centrale pour l’informer de ce qu’il était à disposition pour venir en cas de besoin. Or il ne l’a pas fait. Dans ces circonstances, l’intéressé ne saurait se prévaloir de bonne foi du fait qu’il se serait rendu à la centrale s’il avait été appelé pendant sa période de piquet.

e. C’est en vain que le recourant nie que le troisième critère d’appel selon le document « Procédure – service de piquet [piquet RS] » était rempli, au motif de l’absence de caractère soudain de l’incapacité de M. F______d’assumer sa tâche. En effet, d’une part, cette question ne pouvait être appréciée qu’au moment où celui-ci devait prendre son poste, le 1er janvier 2016 à 6h45. D’autre part, le collègue de l’intéressé n’a, le soir du 31 décembre 2015, pas dit à ce dernier qu’il avait d’ores et déjà l’obligation de venir à la centrale le lendemain matin, mais lui en a fait part seulement en tant qu’éventualité. Or le recourant n’aurait en aucun cas été autorisé, en cas d’appel durant sa période de piquet, d’opposer un refus à sa venue, en raison de la prétendue absence d’un critère d’appel. Au demeurant, les conditions d’application du troisième critère d’appel selon le document « Procédure – service de piquet [piquet RS] » étaient réalisées le 1er janvier 2016, puisque M. F______a, le matin de ce jour, confirmé son incapacité de travailler pour cause de maladie et qu’aucun régulateur en congé n’a accepté de remplacer celui-ci.

f. Par ce comportement, le recourant a intentionnellement enfreint ses devoirs de service, en particulier tels que prévus aux art. 20 et 22 al. 1, 2 et 4 du statut.

Ce comportement, blâmable, mérite une sanction disciplinaire.

Le blâme étant la sanction disciplinaire la moins sévère prévue par la loi, la décision querellée est conforme au principe de la proportionnalité. Cette sanction disciplinaire se justifie d’autant plus que le recourant, par son refus catégorique formulé à l’avance, a d’avance accepté le risque que ses collègues qui seraient présents le lendemain 1er janvier 2016 se trouvent dans une situation difficile en raison de son absence, ce qui s’est effectivement passé comme l’a exposé le Dr H______.

7) Vu ce qui précède, la décision querellée étant en tout point conforme au droit, le recours sera rejeté.

Vu l’issue du recours, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 juin 2016 par Monsieur A______ contre la décision des Hôpitaux universitaires de Genève du 10 mai 2016 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 1'500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par
les art. 113 ss LTF, s’il porte sur des décisions en matière de rapports de travail de droit public qui concernent une contestation non pécuniaire qui ne touchent pas la question de l’égalité des sexes ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au
Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian Dandrès, avocat du recourant, ainsi qu’à Me Pierre Martin-Achard, avocat des Hôpitaux universitaires de Genève.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM Thélin, Dumartheray, Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :