Aller au contenu principal

Décisions | Chambre civile

1 resultats
C/13134/2010

ACJC/530/2015 du 08.05.2015 sur JTPI/10333/2014 ( OO ) , CONFIRME

Descripteurs : LIQUIDATION DU RÉGIME MATRIMONIAL; RÉUNION AUX ACQUÊTS; DIVORCE; OBLIGATION D'ENTRETIEN; PERSONNE DIVORCÉE
Normes : CC.125; CC.208.2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/13134/2010 ACJC/530/2015

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 8 MAI 2015

 

Entre

Monsieur A.______, domicilié ______ (GE), appelant d'un jugement rendu par la 6ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 25 août 2014, comparant par Me Julien Liechti, avocat, 29, rue de la Coulouvrenière, case postale 5710, 1211 Genève 11, en l'étude duquel il fait élection de domicile aux fins des présentes,

et

Madame B.______, domiciliée ______ (GE), intimée, comparant par Me Cyril Aellen, avocat, 61, rue du Rhône, 1204 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile aux fins des présentes.


EN FAIT

A. A.______, né le ______ 1961 à ______ (Portugal), et B.______, née ______ le ______ 1958 à ______ (Portugal), tous deux de nationalité portugaise, se sont mariés le 1er septembre 1998 à ______ (Vaud) sans conclure de contrat de mariage.

C.______, né le ______ 1995 à ______(Vaud), est issu de cette union.

D.______, né le ______ 1987, est le fils aîné d'A.______, issu d'une précédente union.

Les parties ont mis un terme à leur vie commune en mars 2008.

B. Le 10 juin 2010, A.______ a formé une requête unilatérale en divorce par devant le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), assortie d'une requête de mesures provisoires.

S'agissant des conclusions encore litigieuses en seconde instance, A.______ s'était opposé au versement d'une contribution d'entretien à son épouse et considérait que leur régime matrimonial était liquidité.

B.______ avait sollicité une contribution mensuelle d'entretien de 3'400 fr., ainsi que le paiement de 309'038 fr. 50 à titre de liquidation du régime matrimonial.

C. Par jugement JTPI/10333/2014 rendu le 25 août 2014 et reçu le 29 août 2014 par A.______, le Tribunal a prononcé le divorce des parties (ch. 1 du dispositif), condamné A.______ à verser mensuellement des contributions d'entretien, de 900 fr. en faveur de Jonathan, jusqu'à ses 25 ans en cas d'études sérieuses et régulières (ch. 2) et en faveur de son épouse, de 1'100 fr. dès le prononcé du jugement (ch. 3), constaté que la liquidation de la copropriété immobilière des parties sise à ______ (Genève, ch. 4), donné acte de leur accord avec la vente de leur copropriété immobilière sise au Portugal, ainsi que du partage du prix de vente à parts égales (ch. 5), condamné A.______ à verser à son épouse 193'316 fr. 95 à titre de liquidation du régime matrimonial (ch. 6), condamné celui-là à verser à celle-ci la somme de 10'000 fr. à titre d'indemnité équitable (ch. 7), déclaré irrecevable les conclusions prises par B.______ en paiement de 136'656 fr. (ch. 8), mis les frais judiciaires arrêtés à 2'000 fr. sur mesures provisionnelles à la charge d'A.______, compensés ceux-ci avec l'avance qu'il avait fournie, et astreint celui-ci à verser 1'000 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 9), condamné A.______ à un émolument complémentaire de 4'000 fr., compensé les dépens (ch. 10) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 11).

D. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour) le 29 septembre 2014, A.______ (ci-après aussi : l'appelant) appelle des ch. 3 et 6 du dispositif de ce jugement, dont il sollicite l'annulation.

Il conclut à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement à verser à B.______ la somme de 13'316 fr. 95 à titre de liquidation du régime matrimonial, avec suite de frais et dépens.

Par réponse du 5 décembre 2014, B.______ (ci-après aussi : l'intimée) conclut au déboutement de l'appelant et à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de dépens.

La cause a été gardée à juger le 11 février 2015, ce dont les parties ont été avisées par courrier du même jour.

E. Les éléments pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A.______, expert-comptable, a exploité en raison individuelle la FIDUCIAIRE A.______ jusqu'au 22 mars 2010, date de sa radiation au Registre du commerce de Genève. Il percevait un revenu mensuel net moyen de 7'300 fr.

Il a ensuite poursuivi son activité professionnelle comme salarié de la FIDUCIAIRE A.______ SA, laquelle est administrée par son fils aîné, et dont il a admis être l'actionnaire, avant de revenir sur sa déclaration.

Sa qualité d'ayant droit économique de cette société a déjà été retenue par la Cour de justice (ACJC/1380/2012), rendu sur mesures provisoires et confirmé par arrêt du Tribunal fédéral (5A_811/2012). En substance, il a été retenu a) que le fils aîné d'A.______ est arrivé du Portugal en Suisse en 2008, à l'âge de 21 ans, sans maîtriser le français et logé aux frais de son père; b) qu'A.______ percevait le solde de son salaire en espèces, remis de la main à la main par son fils, après que ce dernier ait acquitté des factures personnelles de son père; c) que ce dernier a continué à utiliser ses comptes privés pour le trafic de paiement de la société et que d) la raison sociale de celle-ci était composée de l'abréviation de son prénom, suivi de son patronyme.

D.______, entendu par le Tribunal le 18 mars 2012, a affirmé être l'actionnaire unique de la FIDUCIAIRE A.______ SA. Il a admis qu'en sa qualité de comptable, il était professionnellement moins qualifié que son père. La société fiduciaire, qui comprenait onze personnes, avait repris la clientèle de son père.

Les témoins entendus par le Tribunal n'ont pas apportés d'éléments nouveaux. E.______ a expliqué avoir reçu des mandats ponctuels de la part d'D.______ et F.______ a confirmé avoir rencontré celui-là dans les locaux de la fiduciaire.

A.______ a perçu un salaire mensuel net moyen de la FIDUCIAIRE A.______ SA de 6'009 fr. 15 entre juillet et décembre 2010, de 5'678 fr. 15 en 2011, de 5'501 fr. 70 en 2012, de 5'752 fr. 75 en 2013 et de 5'454 fr. 30 en 2014. Il n'a pas perçu de remboursement de frais de représentation, selon l'expert judiciaire G.______.

Selon cet expert, la rémunération mensuelle brute d'un comptable junior est de l'ordre de 6'000 fr. et celle d'une personne plus expérimentée de 45/50 ans de 7'000 fr. à 8'000 fr.

La FIDUCIAIRE A.______ SA a accusé une perte de 2'265 fr. en 2010 et réalisé un bénéfice de 12'234 fr. en 2011, puis une perte de 14'295 fr. en 2012.

Le Tribunal a fixé à 5'984 fr. le revenu mensuel net moyen d'A.______, comprenant son salaire mensuel net moyen perçu entre 2011 et 2013 (5'644 fr. 20), augmenté du bénéfice net de la société (12'234 fr.) réparti sur trois ans (36 mois).

b.a. A.______ a admis faire ménage commun avec son cousin et partager les frais du loyer, d'électricité, d'assurance-ménage, ce qui, selon l'arrêt de la Cour de justice prononcé entre les parties sur mesures provisoires et confirmé par le Tribunal fédéral (ACJC/1380/2012), devait impliquer la réduction de ses charges dans la même mesure, à l'exception de son entretien de base (consid. 4.2).

b.b. Le Tribunal a retenu les charges mensuelles d'A.______ à concurrence de 3'775 fr. 95 comprenant :

- ½ de la base mensuelle d'entretien, compte tenu du fait qu'A.______ a admis vivre avec son cousin et partager les frais du loyer, d'électricité, d'assurance ménage : 850 fr.;

- augmentation de ladite base d'entretien de 20% : 170 fr.;

- ½ du loyer : 1'441 fr. 15;

- assurance maladie : 490 fr. 65;

- frais de transport : 70 fr.;

- impôts : 754 fr. 15.

c. La capacité contributive d'B.______ a été fixée à 2'000 fr. par mois par le Tribunal, compte tenu du quart de rente d'invalidité qu'elle perçoit (274 fr. par mois) et de revenus mensuels nets de l'ordre de 1'800 fr. qu'elle serait en mesure de percevoir en exerçant une activité de maman de jour. En 2012, elle était au bénéfice d'une autorisation pour l'accueil familial de jour pour deux enfants en même temps.

d. Ses charges mensuelles ont été retenues par le Tribunal à concurrence de 3'028 fr., comprenant :

- base mensuelle d'entretien avec soutien, compte tenu du fait qu'elle vit avec son fils : 1'350 fr.;

- 70% du loyer estimé à 2'000 fr. par mois : 1'400 fr.;

- assurance-maladie, après déduction du subside : 272 fr. 50;

- frais de transport : 5 fr. 50.

e. S'agissant de la liquidation du régime matrimonial, le Tribunal a fixé à 388'097 fr. 10, le bénéfice du compte d'acquêts d'A.______, comprenant ses avoirs bancaires et postaux (3'275 fr. 70), les indemnités perçues à la suite de sinistres de véhicules (29'883 fr. 15) et la valeur de la FIDUCIAIRE A.______ SA (360'000 fr.), laquelle correspondait à la moyenne estimée entre 331'000 fr. et 389'000 fr. par l'expert judiciaire G.______, desquels il a déduit les soldes passifs de ses autres comptes bancaires et postaux (5'061 fr. 75).

Le premier juge a fixé à 1'463 fr. 20, le bénéfice du compte d'acquêts d'B.______, correspondant à la valeur de son compte bancaire au jour de la demande en divorce.

EN DROIT

1. L'appel est recevable contre les décisions finales (art. 308 al. 1 let. a CPC) dans les affaires patrimoniales dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions de première instance, est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC). Tel est le cas en l'espèce, compte tenu des montants en jeu dans la liquidation du régime matrimonial et de la contribution d'entretien.

L'appel a été formé dans le délai et selon la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1 et 3, 308 al. 1 let. a et 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

2. La compétence des juridictions genevoises pour connaître du litige, en application du droit suisse, n'est à juste titre pas remise en cause, malgré la nationalité portugaise commune des parties (art. 59, 63 al. 1, 51 let. b LDIP et art. 4 de la Convention de La Haye du 2 octobre 1973 sur la loi applicable aux obligations alimentaires [RS 0.211.213.01]).

3. En application du principe de la force de chose jugée partielle instituée par l'art. 315 al. 1 CPC, la Cour ne peut revoir que les dispositions du jugement entrepris qui sont remises en cause en appel.

Dès lors, les ch. 1, 2, 4, 5, 7, 8 et 11 du dispositif du jugement querellé JTPI/10333/2014 sont entrés en force de chose jugée ; en revanche, les ch. 9 et 10, relatifs aux frais de première instance, pourront encore être revus d'office en cas d'annulation de tout ou partie du jugement entrepris dans le cadre du présent appel (art. 318, al. 3 CPC). "

4. Le Tribunal a inclus la valeur vénale de la FIDUCIAIRE A.______ SA dans les acquêts de l'appelant, ce qu'il conteste en affirmant n'être ni l'actionnaire ni l'ayant droit économique de celle-là. Il soutient que son fils est actionnaire de cette société depuis le 8 septembre 2008, antérieurement selon lui à la séparation des parties, statut dont il soutient que son fils et les témoignages l'ont confirmé. Il ajoute que la raison sociale de la fiduciaire correspond à l'abréviation du prénom de son fils (Helder), suivi du patronyme de celui-ci.

4.1.1 Selon l'art. 197 al. 1 CC, sont des acquêts les biens acquis par un époux à titre onéreux pendant le régime.

Selon la jurisprudence, on ne peut pas s'en tenir sans réserve à l'existence formelle de deux personnes juridiquement distinctes lorsque tout l'actif ou la quasi-totalité de l'actif d'une société anonyme appartient soit directement, soit par personnes interposées, à une même personne, physique ou morale. Nonobstant la dualité de personnes à la forme - il n'existe pas des entités indépendantes, la société étant un simple instrument dans la main de son auteur, qui, économiquement, ne fait qu'un avec elle -, on doit admettre, à certains égards, que, conformément à la réalité économique, il y a identité de personnes et que les rapports de droit liant l'une lient également l'autre, chaque fois que le fait d'invoquer la diversité des sujets constitue un abus de droit ou a pour effet une atteinte manifeste à des intérêts légitimes (art. 2 al. 2 CC; ATF 121 III 319 consid. 5a/aa p. 321; arrêt du Tribunal fédéral 5A_696/2011 du 28 juin 2012 consid. 4.1.2 et 4A_384/2008 du 9 décembre 2008 consid. 4.1).

4.1.2 En l'espèce, c'est avec raison que le Tribunal a inclus la valeur vénale de la fiduciaire dans les acquêts de l'appelant, puisqu'il est resté l'ayant droit économique de celle-ci, ainsi que la Cour l'a retenu dans l'ACJC/1380/2012, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral du 18 février 2013 (cf. ci-dessus E.a.), conclusion qu'aucun élément nouveau n'est venu contredire dans la présente procédure au fond. En particulier, la présence du fils de l'appelant dans les locaux de la fiduciaire et la remise de mandats ponctuels par ce dernier à un tiers ne sont pas suffisants pour remettre en cause sa qualité d'intermédiaire agissant pour le compte de son père.

L'appel n'est pas fondé sur ce point, de sorte que le ch. 6 du dispositif du jugement entrepris sera ainsi confirmé.

4.2 En tout état de cause, même à suivre l'argumentation de l'appelant, on parvient au même résultat en application de l'art. 208 CC :

4.2.1 Selon cette disposition, sont réunis aux acquêts, en valeur, les biens qui en faisaient partie et dont l'époux a disposé par libéralités entre vifs sans le consentement de son conjoint dans les cinq années antérieures à la dissolution du régime, à l'exception des présents d'usage (ch. 1) et les aliénations de biens d'acquêts qu'un époux a faites pendant le régime dans l'intention de compromettre la participation de son conjoint (ch. 2).

L'art. 208 CC a pour but d'empêcher qu'un époux ne rende illusoire l'expectative de son conjoint, en distrayant des acquêts des biens qui auraient contribué à former un bénéfice (arrêt du Tribunal fédéral 5C.111/2002 du 26 août 2002 consid. 2.1.1).

4.2.2 En l'espèce, le transfert allégué des actifs et des passifs de l'entreprise de l'appelant à son fils, en particulier de sa clientèle, cela sans contre-prestation financière, représenterait une libéralité qui devrait être réunie aux acquêts, en application de l'art. 208 ch. 1 CC, celle-ci étant intervenue le 8 septembre 2008 selon l'appelant, soit moins de cinq ans avant la dissolution du régime intervenue le 10 juin 2010.

C'est par conséquent avec raison la valeur de la société fiduciaire a été intégrée dans les acquêts de l'appelant.

5. Le Tribunal a considéré que le mariage avait eu une influence concrète sur la situation financière de l'intimée en raison de sa durée et de la naissance d'un enfant commun. Au vu du déficit mensuel de l'épouse de 1'028 fr., il a fixé à 1'100 fr. par mois la contribution d'entretien due à celle-ci, compte tenu du disponible mensuel de l'appelant (2'208 fr. 05) et de la contribution d'entretien allouée à Jonathan (900 fr.).

5.1 L'appelant soutient que son salaire mensuel net est de 5'454 fr. 30 et s'oppose à la prise en considération d'une part du bénéfice net de la société fiduciaire. Il fixe à 1'200 fr. sa base mensuelle d'entretien au motif que la colocation avec son cousin n'est pas assimilable à une situation de concubinage. Il affirme devoir conserver son disponible pour assumer des frais médicaux supplémentaires – non justifiés par pièces - en raison d'un diabète. Enfin, un revenu hypothétique de 3'166 fr. 80 aurait dû être imputé à l'intimée, lequel correspond à la garde journalière de quatre enfants. Subsidiairement, il soutient que la contribution d'entretien critiquée aurait dû être limitée dans sa durée, au maximum jusqu'à l'âge de sa propre retraite.

L'intimée abonde dans le sens du premier juge.

5.2.1 Une contribution d'entretien est due sur la base de l'art. 125 CC si le mariage a concrètement influencé la situation financière de l'époux créancier («lebensprägend»). Si le mariage a duré au moins dix ans - période à calculer jusqu'à la date de la séparation des parties (ATF 137 III 102 consid. 4.1.2, 132 III 598 consid. 9.2) - il a eu, en règle générale, une influence concrète. La jurisprudence retient également que, indépendamment de sa durée, un mariage influence concrètement la situation des conjoints lorsque ceux-ci ont des enfants communs (ATF 137 III 102 consid. 4.1.2, 135 III 59 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_781/2014 du 13 février 2015 consid. 3.3). Un tel mariage ne donne toutefois pas automatiquement droit à une contribution d'entretien : selon la jurisprudence, le principe de l'autonomie prime le droit à l'entretien, ce qui se déduit directement de l'art. 125 CC; un époux ne peut prétendre à une pension que s'il n'est pas en mesure de pourvoir lui-même à son entretien convenable et si son conjoint dispose d'une capacité contributive (ATF 137 III 102 consid. 4.1.2, 134 III 145 consid. 4). Si tel est le cas, le principe est que le standard de vie choisi d'un commun accord doit être maintenu pour les deux parties dans la mesure où leur situation financière le permet (ATF 132 III 593 consid. 3.2). Il s'agit alors de la limite supérieure de l'entretien convenable auquel l'époux créancier a droit. Quand il n'est pas possible, en raison de l'augmentation des frais qu'entraîne l'existence de deux ménages distincts, de conserver le niveau de vie antérieur, le créancier d'entretien peut prétendre au même train de vie que le débiteur d'entretien (ATF 129 III 7 consid. 3.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_777/2014 du 4 mars 2015 consid. 5.1.3).

Lorsqu'il existe une unité économique entre une société anonyme et un actionnaire unique ou principal, il peut se justifier, dans les procès du droit de famille, de déterminer la capacité contributive du débirentier qui maîtrise économiquement la société en application des règles relatives aux indépendants (arrêt du Tribunal fédéral 5A_392/2014 du 20 août 2014 consid. 2.2 et les références citées). En effet, si, en vue de la procédure, un époux se laisse soudainement employer par la société qu'il maîtrise économiquement, à un salaire largement inférieur à celui qu'il réalisait précédemment, sans que cette diminution ne soit justifiée du point de vue de l'entreprise, il doit être considéré comme s'il avait intentionnellement diminué son revenu (arrêt du Tribunal fédéral 5A_392/2014 du 20 août 2014 consid. 2.2 et les références citées).

La majoration forfaitaire de 20% de la base mensuel d'entretien ne se justifie en principe plus en droit actuel (arrêts du Tribunal fédéral 5A_229/2013 du 29 septembre 2013 consid. 5.2 et 5A_673/2011 du 11 avril 2012 consid. 2.3.1).

5.2.2 En l'espèce, l'appelant ne remet pas en cause l'influence concrète du mariage sur la situation financière de l'intimée ni le déficit mensuel de cette dernière. Contrairement à ce qu'il soutient, il ne peut être exigé d'elle l'accueil supérieur à deux enfants en même temps par jour, au vu de la limitation explicite de leur nombre résultant de l'autorisation délivrée en 2012 par l'autorité compétente.

Le revenu mensuel net de l'appelant était de 7'300 fr. lorsqu'il exerçait à titre d'indépendant. C'est dès lors avec raison que le Tribunal ne s'est pas limité à retenir son salaire mensuel net moyen réduit à 5'644 fr. 20 en qualité d'employé de la société fiduciaire, mais qu'il a ajouté à celui-ci la part du bénéfice de la société fiduciaire qu'il contrôle économiquement, en application de la jurisprudence sus-évoquée, pour aboutir à un revenu total de 5'984 fr. par mois, montant qui se situe au demeurant encore en-deçà de la rémunération usuelle pour un expert-comptable expérimenté, d'au moins 7'000 fr. brut, respectivement 6'000 fr. net, selon l'expert judiciaire.

La base mensuelle d'entretien de l'appelant doit être portée à 1'200 fr., comme l'a déjà décidé la Cour de justice, statuant entre les parties sur mesures provisoires, toutefois sans la majoration de 20% admise par le premier juge, cette majoration n'étant plus conforme à la jurisprudence du Tribunal fédéral rappelée ci-dessus sous ch. 4.2.1.

Ses charges mensuelles arrondies à 3'956 fr. lui laissent ainsi encore un disponible mensuel de 2'028 fr., suffisant pour assumer ses obligations d'entretien envers son ex-épouse et son fils (2'000 fr. au total).

Le principe d'une contribution mensuelle d'entretien telle que fixée par le premier juge de 1'100 fr. est dès lors confirmé. Il convient d'en examiner sa durée.

5.3 L'âge ouvrant le droit à une rente de vieillesse du premier pilier, soit 65 ans pour les hommes, correspond, en règle générale, pour les salariés et les indépendants à la limite temporelle de l'activité professionnelle. Toutefois, dans des circonstances particulières, ainsi selon la profession exercée, l'état de santé général et la situation financière du lésé, il n'est pas exclu qu'une durée d'activité plus longue puisse être admise pour un travailleur de condition indépendante (ATF 136 III 301 consid. 4.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_665/2011 du 2 février 2012 consid. 3.2 publié in SJ 2012 I 423).

En l'espèce, les parties n'ont ni fait état de leurs expectatives de prévoyance respectives ni produit aucune pièce à cet égard. Cela étant au vu de l'âge de l'appelant (54 ans) et de sa capacité de travail à plein temps comme expert-comptable, laquelle est en outre assimilable à une activité exercée à titre d'indépendant non soumis à la limite de l'âge de la retraite, l'appelant étant l'ayant droit de la société fiduciaire au sein de laquelle il travaille, c'est à bon droit que le Tribunal l'a astreint à verser une contribution d'entretien de durée indéterminée à son ex-épouse. Il est encore précisé que si l'appelant devait cesser son activité professionnelle après l'âge de la retraite, il pourra être susceptible de solliciter une modification du montant de cette contribution d'entretien, sous réserve des circonstances prévalant à ce moment-là.

Le ch. 3 du dispositif du jugement entrepris sera dès lors confirmé.

6. Les frais sont mis à la charge de la partie succombante (art. 95 et 106 al. 1 1ère phrase CPC). Lorsqu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause (art. 106 al. 2 CPC). Le Tribunal peut s'écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation, notamment lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC).

En outre, si l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance (art. 318 al. 3 CPC).

6.1 En l'espèce, les frais judiciaires de première instance ont été mis à la charge de l'appelant, ce qu'il n'a pas remis en cause, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'y revenir. La nature du litige commandait en outre de ne pas allouer de dépens (art. 176 al. 3 aLPC et art. 404 al. 1 CPC).

6.2 Les frais judiciaires de l'appel sont fixés à 4'000 fr. et compensés avec l'avance de frais fournie par l'appelant, qui reste acquise à l'Etat (art. 96 CPC et 31 et 35 du Règlement fixant le tarif des frais en matière civile [RTFMC - E 1 05.10], art. 111 al. 1 CPC). Ils seront mis à la charge de l'appelant, qui supporte les frais de son appel.

S'agissant d'un litige qui relève du droit de la famille, chaque partie supportera ses propres dépens (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A.______ contre les chiffres 3 et 6 du dispositif du jugement JTPI/10333/2014 rendu le 25 août 2014 par le Tribunal de première instance dans la cause C/13134/2010-6.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Valérie LAEMMEL-JUILLARD, présidente; Madame Nathalie LANDRY-BARTHE et Monsieur Patrick CHENAUX, juges; Madame Audrey MARASCO, greffière.

 

La présidente :

Valérie LAEMMEL-JUILLARD

 

La greffière :

Audrey MARASCO
















Indication des voies de recours
:

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.