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Décisions | Chambre civile

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C/20529/2018

ACJC/1693/2019 du 14.11.2019 sur DTPI/6488/2019 ( OO ) , CONFIRME

Normes : CPC.98
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/20529/2018 ACJC/1693/2019

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du JEUDI 14 NOVEMBRE 2019

 

Pour :

Monsieur A______, domicilié ______, recourant contre une décision rendue par le Tribunal de première instance de ce canton le 20 mai 2019, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. Par acte expédié le 6 mai 2019 au Tribunal de première instance, A______ a conclu à la condamnation de B______ à lui verser une somme de 2'192'532 fr.

B. Par décision du 20 mai 2019, le Tribunal a imparti à A______ un délai au 24 juin 2019 pour fournir une avance de frais de 50'000 fr., au vu de la valeur litigieuse de 2'192'532 fr.

C. a. Par acte expédié à la Cour de justice le 6 juin 2019, A______ a formé recours contre cette décision. Il a conclu à son annulation, à ce que l'assistance judiciaire lui soit accordée pour la cause C/20529/2018 et à ce que l'avance de frais soit fixée à un montant raisonnable de 5'000 fr. qu'il sera en mesure de payer.

Il a invoqué une violation des principes constitutionnels d'égalité de traitement et d'interdiction de l'arbitraire. La décision attaquée persistait à ignorer les conséquences de sa détention. L'assistance judiciaire lui avait par ailleurs été refusée dans le cadre de la présente procédure alors qu'elle lui avait été précédemment accordée dans une autre procédure.

b. Invité à se déterminer sur le recours, le Tribunal a relevé que le montant réclamé de 50'000 fr. était conforme au tarif fixé dans la LaCC, le RTFMC et les directives internes du Tribunal. A______ ne fournissait pas d'indications précises et de justificatifs concernant sa situation financière. L'assistance judiciaire lui avait été refusée dans la présente cause en raison de l'absence de chances de succès, ce qui justifiait de maintenir une avance de frais conforme au tarif et dans une certaine mesure dissuasive de procédés voués à l'échec. Il persistait dès lors dans sa décision, tout en n'étant pas totalement opposé à une réduction de l'avance de frais.

c. Par décision du 11 septembre 2019, notifiée le 3 octobre 2019, la Cour a confirmé la décision du Tribunal du 17 juin 2019 rejetant la requête d'assistance judiciaire formée par A______ en raison de l'absence de chance de succès de son recours contre la décision d'avance de frais.

EN DROIT

1. Les décisions relatives aux avances de frais peuvent faire l'objet d'un recours (art. 103 CPC).

Le recours a été interjeté selon la forme et dans le délai prescrits (art. 321 al. 1 et 2 CPC), de sorte qu'il sera déclaré recevable, malgré les considérations qui suivent concernant sa motivation.

2.1
2.1.1
Aux termes de l'art. 98 CPC, le tribunal peut exiger du demandeur une avance à concurrence de la totalité des frais judiciaires présumés.

Pour déterminer le montant des frais, il y a lieu de se référer au tarif des frais prévus par le droit cantonal (art. 96 CPC).

Selon l'art. 19 al. 3 LaCC, les émoluments forfaitaires sont calculés en fonction de la valeur litigieuse, s'il y a lieu, de l'ampleur et de la difficulté de la procédure et sont fixés dans un tarif établi par le Conseil d'Etat (art. 19 al. 6 LaCC), soit le règlement fixant le tarif des frais en matière civile du 22 décembre 2010
(RTFMC - E 1 05.10).

La fixation de l'avance de frais doit correspondre en principe à l'entier des frais judiciaires présumables (art. 2 RTFMC), compte tenu notamment des intérêts en jeu, de la complexité de la cause, de l'ampleur de la procédure et de l'importance du travail qu'elle impliquera, par anticipation sur la décision fixant l'émolument forfaitaire arrêté en fin de procédure (art. 5 RTFMC).

L'art. 17 RTFMC prévoit un émolument forfaitaire de décision de 20'000 fr. à 100'000 fr. pour une demande en paiement dont la valeur litigieuse porte sur un montant entre 1'000'001 fr. et 10'000'000 fr.

2.1.2 Faisant partie des contributions causales, les émoluments de justice obéissent au principe de l'équivalence (ATF 133 V 402 consid. 3.1). Ainsi, leur montant doit être en rapport avec la valeur objective de la prestation fournie et rester dans des limites raisonnables. La valeur de la prestation se mesure soit à son utilité pour le contribuable, soit à son coût par rapport à l'ensemble des dépenses de l'activité administrative en cause (ATF 130 III 225 consid. 2.3). L'autorité peut également tenir compte de l'intérêt du débiteur à l'acte officiel et, dans une certaine mesure, de sa situation économique pour fixer les émoluments, en ce sens qu'il n'est pas interdit de compenser les pertes subies dans des affaires mineures par des émoluments élevés dans des affaires importantes (ATF 130 III 225 consid. 2.3). Les émoluments doivent toutefois être établis selon des critères objectifs et s'abstenir de créer des différences qui ne seraient pas justifiées par des motifs pertinents (ATF 139 III 334 consid. 3.2.4). Le taux de l'émolument ne doit pas, en particulier, empêcher ou rendre difficile à l'excès l'accès à la justice (arrêt du Tribunal fédéral 2C_513/2012 du 11 décembre 2012 consid. 3.1).

2.1.3 L'art. 98 CPC est une "Kann-Vorschrift", le Tribunal jouissant en la matière d'un important pouvoir d'appréciation, puisque s'il doit en principe réclamer une avance de frais correspondant à l'entier des frais judiciaires présumables, il peut également réclamer un montant inférieur, voire renoncer à toute avance de frais, étant cependant relevé que le prélèvement d'une avance de frais pleine et entière est la règle et que celle d'une avance moindre, ou la renonciation à percevoir une avance, sont l'exception (ATF 140 III 159 consid. 4.2).

Par conséquent, la Cour examine la cause avec une certaine réserve; ainsi, seul un abus du pouvoir d'appréciation du juge constitue une violation de la loi (ACJC/1547/2018 du 8 novembre 2018; ACJC/278/2014 du 25 février 2014; ACJC/208/2014 du 13 février 2014).

2.2 En l'espèce, le recourant ne conteste pas que le montant de l'avance requise a été fixée conformément au règlement applicable et se trouve dans la fourchette prévue pour une cause dont la valeur litigieuse est de 2'192'532 fr.

L'appelant semble en revanche invoquer que la cause ne présenterait pas de difficulté particulière car les conditions de la responsabilité du défendeur seraient claires, en particulier en ce qui concerne sa faute, qui aurait été constatée par un arrêt du Tribunal fédéral dans la cause 5A_642/2018, consid. 3.2. La décision du Tribunal fédéral invoquée concerne toutefois une affaire de divorce, qui n'a rien à voir avec la présente cause, et ne comporte pas de consid. 3.2. En tout état de cause, il ne peut être affirmé à ce stade, prima facie, que la présente procédure ne présenterait pas de difficulté particulière et que le montant de l'avance requise violerait le principe d'équivalence. Enfin, les mérites, au fond, de la demande du recourant ne sont pas déterminants pour fixer le montant de l'avance de frais.

Les griefs formulés par le recourant relatif au refus de l'assistance judicaire ne sont par ailleurs pas pertinents dans le cadre de la présente procédure de recours et devaient être soulevés, le cas échéant, dans le cadre d'un recours contre la décision de refus d'assistance judicaire, étant relevé que la Chambre civile de la Cour de justice n'est pas compétente, dans le cadre d'un recours contre une décision d'avance de frais, pour revoir la décision de refus d'assistance judiciaire.

Enfin, le recourant invoque la détention qu'il a subie sans expliquer pour quel motif et dans quelle mesure celle-ci devrait influer sur le montant de l'avance de frais qui lui a été réclamée.

Pour le surplus, le Tribunal a persisté dans sa décision, tout en se déclarant pas opposé à une réduction de l'avance de frais. Si une telle réduction était opérée, elle ne pourrait cependant pas conduire à fixer l'avance de frais litigieuse au montant de 5'000 fr., comme le réclame le recourant, inférieur au montant minimum de 20'000 fr. prévu pour une affaire dont la valeur litigieuse se trouve dans la fourchette de 1'000'001 fr. à 10'000'000 fr.

Il sera enfin relevé qu'un délai supplémentaire ne saurait être accordé au recourant pour compléter son recours, passé le délai de recours, qui est un délai légal non prolongeable, et il ne se justifie donc pas de désigner au recourant un avocat pour ce faire, étant rappelé que l'assistance judiciaire dans le cadre de la présente procédure de recours lui a été refusée.

Dans ces circonstances, le recours est infondé et, partant, il sera rejeté.

3. Les frais judicaires de recours, arrêtés à 400 fr., seront mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 106 al. 1 CC) et compensés avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté par A______ contre la décision DTPI/6488/2019 rendue le 20 mai 2019 par le Tribunal de première instance dans la cause C/20529/2018-TX.

Au fond :

Rejette ce recours.

Sur les frais :

Arrête les frais judicaires à 400 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont compensés avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Cédric-Laurent MICHEL et Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.