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Décisions | Chambre civile

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C/27928/2006

ACJC/1385/2007 (3) du 16.11.2007 sur JTPI/6812/2007 ( I ) , MODIFIE

Descripteurs : ; COMPÉTENCE RATIONE MATERIAE ; COMPÉTENCE RATIONE LOCI ; PRÉVOYANCE PROFESSIONNELLE LIÉE
Normes : LPP.73 LPP.82
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/27928/2006 ACJC/1385/2007

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile
statuant par voie de procédure ordinaire

Audience du vendredi 16 NOVEMBRE 2007

 

Entre

Monsieur A.______, domicilié ______ Genève, appelant d'un jugement rendu par la 14ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 10 mai 2007, comparant par Me Philippe Bonnefous, avocat, en l’étude duquel il fait élection de domicile,

et

X. ______ SA, sise ______, B. ______ , canton de B. ______, intimée, comparant par Me David Lachat, avocat, en l’étude duquel elle fait élection de domicile,

 


EN FAIT

A. a) X.______ SA est une société anonyme active dans le domaine des assurances, dont le siège est à B. ______ .

b) Le 20 décembre 1995, Monsieur A.______, décorateur indépendant, né le 24 août 1960, a complété, daté et signé une proposition d’assurance sur la vie, police no 1, auprès de X.______ SA, ainsi que la déclaration relative à son état de santé qui lui était annexée.

La police a été établie le 3 janvier 1996. Elle stipulait que le contrat débutait le 1er janvier 1996 et prenait fin le 1er janvier 2006. Le contrat d'assurance prévoyait le versement d'un capital en cas de décès avant le terme du contrat et, à titre d’assurance complémentaire, l’exonération du paiement des primes en cas d’incapacité de gain par suite de maladie ou d’accident, après un délai d’attente de trois mois.

c) Le 23 septembre 1997, Monsieur A.______ a complété, daté et signé une autre proposition d’assurance sur la vie, police no 2, auprès de X.______ SA, ainsi que la déclaration relative à son état de santé qui lui était annexée.

La police, qui était intitulée "police de prévoyance liée" et précisait, sous la rubrique "genre d’assurance", "PREVOYANCE LIEE", a été établie le 2 octobre 1997. Le contrat débutait le 1er octobre 1997 et prenait fin le 1er octobre 2025. Il prévoyait le versement d'une rente de courte durée d'un montant annuel de 48'000 fr. payable après un délai d'attente d'un mois, au maximum jusqu'à 24 mois, après la survenance d'une incapacité de gain par suite de maladie ou d'accident, mais au plus tard jusqu'au 30 septembre 2025. De plus, en cas d'incapacité de gain par suite de maladie ou d'accident, le preneur d'assurance avait également droit à une rente indexée de 24'000 fr. par an, payable après un délai d'attente de 24 mois, au plus tard jusqu'au 30 septembre 2025. En outre, le contrat stipulait une exonération du paiement de la prime en cas d’incapacité de gain par suite de maladie ou d’accident, après un délai d’attente de 12 mois. Il indiquait, au surplus, qu'il constituait une police de prévoyance liée (pilier 3a) qui servait uniquement et irrévocablement à des fins de prévoyance et dont les particularités étaient décrites dans les Conditions générales d'assurance (CGA). Le montant annuel de la prime était de 3'232 fr. 30, payable par des versements trimestriels de 832 fr. 30.

L'art. 13 CGA prévoyait qu'en cas de litige, seule la compétence des tribunaux du domicile suisse du preneur d'assurance ou de l'ayant droit ainsi que ceux du siège de X.______ SA était reconnue.

d) Monsieur A.______ a été victime d’un accident le 10 mai 1998. Il n’a pas pu reprendre son activité professionnelle par la suite. L’assureur l’a exonéré des primes des deux contrats d’assurance et lui a versé des prestations conformément aux contrats.

e) Par courrier du 14 août 2003, l’assureur a exposé avoir eu connaissance, par l’intermédiaire de l’assureur maladie de Monsieur A.______, de ce que ce dernier avait consulté divers médecins et thérapeutes entre 1988 et 1992, et entre mai et septembre 1998, contrairement à ce qu’il avait déclaré dans les annexes aux propositions d’assurance qu’il avait signées. L’assureur a, partant, fait valoir une réticence de l’assuré conformément à l’art. 6 LCA et déclaré se retirer des contrats. Il a également déclaré ne plus accorder de prestations pour l’incapacité de gain, exposant en outre que les décomptes de rachat des contrats et de restitution des prestations indûment perçues seraient effectués à réception des informations qu’il s’apprêtait à recueillir auprès des médecins et thérapeutes consultés.

Par courrier du 2 octobre 2003, X.______ SA, faisant état des informations qui lui avaient été communiquées, a déclaré confirmer sa réticence du 4 août 2003 et procéder à la résiliation des deux polices d’assurance. Elle a, en outre, invité Monsieur A.______ à lui transmettre une proposition de remboursement pour le montant de 172'102 fr. 90, correspondant à l’ensemble des prestations qu’elle lui avait versées.

f) Par courrier de son conseil du 8 décembre 2003, Monsieur A.______ a contesté la résiliation des contrats. L’assureur a maintenu sa position par courrier du 8 janvier 2004.

g) Par décision du 23 juillet 2004, l'Office cantonal de l'assurance invalidité a mis Monsieur A.______ au bénéfice d'une rente entière AI à partir du 17 juillet 1999.

B. a) Par acte reçu par le greffe du Tribunal de première instance le 21 novembre 2006, Monsieur A.______ a formé une action en paiement à l’encontre de Y. ______ SA [recte: X.______ SA].

Il a demandé à ce que le Tribunal dise que la résiliation des polices no 1 et 2 n’était pas valable et à ce que sa partie adverse soit condamnée à lui verser la rente indexée due selon la police no 2 jusqu’à l’échéance contractuelle du 30 septembre 2025, ainsi que les sommes suivantes avec intérêts à 5% dès la fin de chaque trimestre :

- 20'114 fr. à titre de prestations pour l’année 2003;

- 24'000 fr. à titre de versement de la rente pour l’année 2004, laquelle devait être indexée selon l’art. 23 ch. 2 des conditions générales;

- 24'000 fr. à titre de versement de la rente pour l’année 2005, laquelle devait être indexée selon l’art. 23 ch. 2 des conditions générales;

- 24'000 fr. à titre de versement de la rente pour l’année 2006, laquelle devait être indexée selon l’art. 23 ch. 2 des conditions générales.

Monsieur A.______ a, au surplus, conclu au déboutement de sa partie adverse de toutes autres ou contraires conclusions, avec suite de dépens, comprenant une indemnité à titre de participation aux honoraires d'avocat.

b) Par courrier du 6 décembre 2006 adressé au Tribunal, Monsieur A.______ a renoncé à ses conclusions tendant au versement de la rente indexée due, selon la police no 2, jusqu’à l’échéance contractuelle du 30 septembre 2025.

c) Lors de l’audience d’introduction de la cause, X.______ SA a excipé de l’incompétence ratione materiae et ratione loci du Tribunal pour une partie des prétentions qui lui étaient soumises. Monsieur A.______ a persisté dans ses conclusions.

d) Dans ses conclusions sur incident du 15 février 2007, X.______ SA a sollicité la rectification de sa qualité de partie de " Y. ______ SA " en " X.______ SA ". Elle a conclu à ce que le Tribunal constate son incompétence à raison de la matière et du lieu pour connaître de la demande en tant qu’elle porte sur des prétentions découlant de la police de prévoyance liée no 2, à ce qu’il transmette, en tant que de besoin, le litige au tribunal compétent selon l’art. 73 LPP, soit le Kantonsgericht de B. ______ et à la suspension de l’instruction de la cause relative à la police de prévoyance libre no 1 jusqu’à droit jugé dans la cause transmise au Kantonsgericht de B. ______. Enfin, elle a demandé à ce que Monsieur A.______ soit condamné en tous les dépens d'instance, et à ce qu'il soit débouté de toutes autres conclusions.

Dans ses écritures du 15 mars 2007, Monsieur A.______ s’est opposé à la suspension de l’instruction de la cause et a conclu au déboutement de sa partie adverse de ses conclusions sur exception d’incompétence, avec suite de dépens. Il a persisté dans ses conclusions au fond.

e) Par jugement du 10 mai 2007, notifié le 14 mai suivant et reçu par les parties le lendemain, le Tribunal de première instance a ordonné la rectification de la qualité de la défenderesse de " Y. ______ SA " en " X.______ SA " (ch. 1), s'est déclaré incompétent pour connaître des prétentions de Monsieur A.______ découlant du contrat d’assurance «prévoyance liée», police no 1 [recte : 2] (ch. 2), a compensé les dépens (ch. 3) et a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

C. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice le 11 juin 2007, Monsieur A.______ appelle de ce jugement, et plus précisément du chiffre 2 de son dispositif.

Il relève, tout d'abord, que le jugement comporte une erreur matérielle dans le ch. 2 du dispositif, en ce qu'il indique la police no 1, alors qu'il s'agit de celle no 2, seule litigieuse quant à la compétence du Tribunal.

L'appelant indique ensuite qu'il ne suffit pas de déduire de l'application de l'OPP 3, l'application de la LPP. La seule particularité d'ordre fiscal de ce contrat (police no 2), dont les primes sont déductibles fiscalement, ne saurait à elle seule entraîner l'application de la LPP au litige. Cela signifierait qu'il s'agit d'un contrat de prévoyance soumis à la LPP, alors qu'il s'agit clairement d'un contrat d'assurance soumis à la LCA. Par ailleurs, l'appelant rappelle qu'il est décorateur indépendant non soumis à la Loi sur la Prévoyance obligatoire. Il ajoute que le contrat constitue, en définitive, un contrat d'assurance de sommes typique de l'assurance privée sans rapport avec la prévoyance. En résumé, si le preneur d'assurance a un accident ou une maladie, il reçoit un certain montant fixe pour une période précise. Ce contrat n'est, au surplus, pas lié à un contrat collectif d'assurance maladie ou accident auquel cas il serait considéré comme complémentaire d'une assurance sociale au sens de l'art. 56 V al. 1 let. c LOJ, selon une jurisprudence récente parue sous ATAS/873/2006. Par conséquent, de l'avis de l'appelant, le Tribunal de première instance est compétent quant à la matière pour connaître du litige.

En ce qui concerne la compétence ratione loci, l'appelant indique que, même à supposer que la LPP s'applique à ce litige, le tribunal compétent serait le Tribunal des assurances sociales du Canton de Genève, les parties ayant conclu une clause d'élection de for à l'art. 13 CGA.

Il conclut ainsi à l'annulation du jugement querellé. Cela fait, il demande à ce que le Tribunal de première instance du Canton de Genève soit déclaré compétent ratione materiae et ratione loci pour le litige ayant trait à la police no 2, à ce que la cause lui soit renvoyée pour statuer sur le fond, et à ce que sa partie adverse soit déboutée et condamnée en tous les dépens, comprenant une indemnité à titre de participation aux honoraires d'avocat. Subsidiairement, l'appelant conclut à ce que le Tribunal des assurances sociales du Canton de Genève soit déclaré compétent ratione materiae et ratione loci pour le litige ayant trait à la police no 2, à ce que la cause lui soit renvoyée pour statuer sur le fond, et à ce que sa partie adverse soit déboutée, avec suite de dépens.

X. ______ SA demande à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle se rapporte à la justice quant à la recevabilité de l'appel interjeté par Monsieur A.______. Elle conclut, ensuite, à la correction du chiffre 2 du dispositif du jugement entrepris, dans le sens que le Tribunal de première instance se déclare incompétent pour connaître des prétentions de Monsieur A.______ découlant du contrat d'assurance "prévoyance liée", police no 2 (et non police no 1), au déboutement de sa partie adverse, avec suite de dépens, comprenant une indemnité à titre de participation aux honoraires d'avocat, et à la confirmation du jugement querellé.

Le Procureur général s'en est rapporté à la justice.

L'argumentation juridique des parties sera examinée ci-après dans la mesure utile à la solution du litige.

EN DROIT

1. Interjeté dans la forme et le délai prescrits, l'appel est recevable (art. 291, 296, 300 LPC).

Le jugement du 10 mai 2007 étant relatif à la compétence, le Tribunal de première instance a statué en premier ressort, de sorte que le pouvoir d'examen de la Cour n'est pas limité par l'art. 292 LPC (art. 26 LOJ).

2. L'appelant invoque la compétence ratione materiae et loci du Tribunal de première instance pour connaître du litige concernant sa police d'assurance no 2.

2.1. Aux termes de l'art. 82 al. 1 et 2 LPP, les salariés et les indépendants peuvent également déduire les cotisations affectées exclusivement et irrévocablement à d’autres formes reconnues de prévoyance assimilées à la prévoyance professionnelle. Le Conseil fédéral détermine, avec la collaboration des cantons, quelles formes de prévoyance peuvent être prises en considération et décide dans quelle mesure de telles déductions seront admises pour les cotisations.

En vertu de cet article, le Conseil fédéral a émis une ordonnance le 13 novembre 1985 sur les déductions admises fiscalement pour des cotisations versées à des formes reconnues de prévoyance (OPP 3).

L'art. 1 OPP 3 stipule que :

1. Constituent des formes reconnues de prévoyance au sens de l’art. 82 LPP :

a. le contrat de prévoyance liée conclu avec les établissements d’assurances;

b. la convention de prévoyance liée conclue avec les fondations bancaires.

2. Par contrats de prévoyance liée on entend les contrats spéciaux d’assurance de capital et de rentes sur la vie ou en cas d’invalidité ou de décès, y compris d’éventuelles assurances complémentaires en cas de décès par accident ou d’invalidité, qui

a. sont conclus avec une institution d’assurance soumise à la surveillance des assurances ou avec une institution d’assurance de droit public satisfaisant aux exigences fixées à l’art. 67, al. 1, LPP et

b. sont affectés exclusivement et irrévocablement à la prévoyance.

3. Par conventions de prévoyance liée on entend les contrats spéciaux d’épargne qui sont conclus avec des fondations bancaires et qui sont affectés exclusivement et irrévocablement à la prévoyance. Ces contrats peuvent être complétés par un contrat de prévoyance risque.

4. Les modèles de contrats de prévoyance liée et les modèles de conventions de prévoyance liée sont soumis à l’administration fédérale des contributions. Celle-ci vérifie si la forme et le contenu sont conformes aux dispositions légales et communique ses constatations.

Il a été précisé que le terme de "prévoyance liée" ne désigne ni un produit fixe ni une prestation déterminée, mais toute une série de solutions qui peuvent être choisies et combinées en tenant compte des besoins et des moyens personnels de chacun. Ces solutions peuvent porter sur l'épargne en vue de vieillesse, sur la protection en cas d'incapacité de gain et sur la prévoyance en cas de décès (GUISAN, Le contrat de prévoyance liée conclu avec les établissements d'assurance, in: Prévoyance professionnelle et fiscalité, Travaux de la journée d'étude de la Faculté de droit à l'Université de Lausanne du 9 octobre 1986, Publications CEDIDAC, Lausanne 1987, pp. 66s).

Selon la nouvelle teneur de l'art. 73 al. 1 LPP, entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2005, chaque canton désigne un tribunal qui connaît, en dernière instance cantonale, des contestations opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit. Ce tribunal est également compétent :

a. pour les contestations avec des institutions assurant le maintien de la prévoyance au sens des art. 4, al. 1, et 26, al. 1, LFLP;

b. pour les contestations avec des institutions lorsque ces contestations résultent de l’application de l’art. 82, al. 2;

c. pour les prétentions en matière de responsabilité selon l’art. 52;

d. pour le droit de recours selon l’art. 56a, al. 1.

L'alinéa 3 précise que le for est au siège ou domicile suisse du défendeur ou au lieu de l’exploitation dans laquelle l’assuré a été engagé.

Le but de l'art. 73 LPP, dans sa nouvelle teneur, était de fixer une seule juridiction valable à la fois pour les contentieux en matière de prévoyance professionnelle et de libre passage et pour les formes de prévoyance individuelle du pilier 3a (Message du Conseil fédéral relatif à la première révision LPP, FF 2000 2495, no 2.9.5.1., p. 2540).

A cet égard, il convient également de préciser que le fait qu'un contrat d'assurance soit soumis à la LCA, et donc relève du droit privé, n'empêche pas l'attribution de compétence à une autorité administrative (cf. notamment SJ 2001 I 216 au sujet des assurances complémentaires à l'assurance maladie sociale; ATF 114 V 102 consid. 1b).

2.2. En l'espèce, la police d'assurance no 2 faisant l'objet du présent appel a été conclue pour une durée de 28 années, c'est-à-dire jusqu'à la retraite du preneur d'assurance. Les prestations litigieuses, soit celles relatives à une rente annuelle indexée en cas de perte de gain, peuvent être assimilées à des prestations pour invalidité, dans la mesure où elles ne sont dues qu'après un délai d'attente de 24 mois, qu'elles ne sont pas limitées dans le temps et qu'à terme, elles sont ainsi amenées à couvrir le risque d'une perte de gain durable.

En ce qui concerne la rente de courte durée (maximum 24 mois), on relèvera que le contrat d'assurance de prévoyance liée est soumis au droit privé et que, partant, rien n'empêche l'assureur de prévoir une protection plus étendue que celle résultant du 2ème pilier obligatoire. Il peut donc prévoir des prestations plus larges, comme dans le cas d'espèce, la rente de courte durée étant de toute évidence prévue notamment pour couvrir le délai d'attente de 24 mois suscité.

Par ailleurs, l'appelant admet que la particularité du contrat consiste en la possibilité pour le preneur d'assurance de déduire fiscalement ses primes. Or, à teneur de l’OPP 3, cette possibilité n’est offerte que dans le cadre de contrats de prévoyance liée conclus notamment avec des établissements d’assurance.

Comme l'a justement relevé le premier juge, l'appelant ne se prévaut pas de ce que l’exonération fiscale de ses primes lui a été consentie à tort, faute pour le contrat litigieux de remplir les conditions de cette exonération définies par l’OPP 3.

Compte tenu de ce qui précède, il y a donc lieu d'admettre que le contrat litigieux constitue un contrat de prévoyance liée au sens de l'art. 1 al. 2 OPP 3.

Or, cette forme de prévoyance est soumise à la compétence du tribunal désigné par le canton du siège du défendeur (art. 73 al. 1 let. b et al. 3 LPP; art. 82 LPP).

Contrairement aux affirmations de l'appelant, l'arrêt non publié du Tribunal fédéral B.80/2004 du 25 février 2005 ne fait pas obstacle à cette solution, cette jurisprudence concernant un cas de prévoyance professionnelle collective, et non pas de prévoyance liée.

Au surplus, il convient de relever que, contrairement à ce que soutient l'appelant, même si l'on supposait que le contrat litigieux ne ressortissait pas de la prévoyance au sens de la LPP, mais uniquement d'une assurance perte de gain en cas de maladie ou d'accident, le Tribunal de première instance n'en serait pas pour autant compétent.

En effet, l'art. 56 V al. 1 let. c LOJ prévoit que le Tribunal cantonal des assurances sociales connaît en instance unique des contestations relatives aux assurances complémentaires à l’assurance maladie sociale prévue par la loi fédérale sur l’assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal), et à l’assurance accidents obligatoire prévue par la loi fédérale sur l’assurance accidents du 20 mars 1981 (LAA).

Selon le Tribunal des conflits, le Tribunal cantonal des assurances sociales est ainsi désormais saisi de l’ensemble du contentieux en matière d’assurances complémentaires privées, tant dans le domaine de l’assurance-maladie que dans celui de l’assurance-accidents, que cette assurance complémentaire soit offerte tant par une caisse-maladie que par une institution d'assurance privée autorisée ou non par l'Office fédéral des assurances sociales (ACOM/55/2005; ACOM/42/ 2006).

Par conséquent, si le contrat d'assurance relevait uniquement d'une assurance perte de gain en cas de maladie ou d'accident, il y aurait alors lieu de constater qu'il constituerait une assurance complémentaire aux assurances sociales maladie et accident, dans la mesure où il viendrait compléter les prestations de ces dernières. En vertu de l'art. 56 V al. 1 let. c LOJ, le Tribunal cantonal des assurances sociales serait donc seul compétent (cf. ACJC/1497/2005 et références citées; ATAS/583/2006; ATAS/873/2006 qui traite le cas d'un indépendant non soumis à la LAA). Contrairement à ce que soutient l'appelant, la jurisprudence ne retient pas que cette disposition d'attribution de compétence ne s'appliquerait qu'aux contrats collectifs (ACJC/1497/2005; cf. également ATAS/583/2006).

Enfin, il convient également de constater que l'appelant interprète à tort la jurisprudence ATAS/583/2006 en sa faveur. Cette dernière traitait d'un contrat d'assurance pour des prestations d'assistance et d'assurance frais de guérison en cas de maladie et accident conclu par un étudiant étranger, afin d'être exempté de l'obligation de s'affilier à une caisse maladie autorisée à pratiquer l'assurance maladie obligatoire. Elle ne concernait donc en rien la prévoyance individuelle, contrairement au cas d'espèce, et le contrat d'assurance en question ne pouvait, au demeurant, pas être qualifié d'assurance complémentaire à l'assurance obligatoire des soins, puisqu'il se substituait à celle-ci.

Le Tribunal de première instance s'est donc déclaré, à juste titre, incompétent pour connaître des prétentions de l'appelant découlant du contrat d'assurance "prévoyance liée", police no 2.

3. L'appelant conclut subsidiairement à ce que le Tribunal des assurances sociales du Canton de Genève soit déclaré compétent, en vertu de l'élection de for prévue par l'art. 13 CGA, et, partant, à ce que la cause lui soit renvoyée pour statuer sur le fond.

Aucune disposition de droit de procédure genevoise n'autorise les juges civils à se déterminer sur la compétence d'une autorité administrative, en lieu et place de cette dernière, et à lui renvoyer la cause. L'appelant sera, par conséquent, débouté de ses conclusions subsidiaires.

Par ailleurs, l'incompétence ratione materiae des juridictions civiles ayant été établie, il n'y a pas lieu de se prononcer sur la validité d'une éventuelle élection de for prévue par l'art. 13 CGA.

4. Enfin, comme l'ont justement relevé les parties, le jugement entrepris comporte une erreur matérielle, au sens de l'art. 160 LPC, en page 5 et dans son dispositif, le numéro de police "1" ayant été indiqué, par mégarde, en lieu et place du numéro "2".

Selon l'art. 160 al. 1 LPC, la voie d’interprétation ou de révision n’est employée, ni pour une erreur matérielle dans la rédaction du jugement sur les noms, qualités et conclusions des parties, ni pour une simple erreur de calcul dans le dispositif.

Il y a «erreur matérielle dans la rédaction du jugement sur les noms, qualités et conclusions des parties» lorsque ces mentions ne correspondent pas aux actes de la procédure. Encore faut-il que les divergences entre les mentions indiquées par les parties et celles figurant dans le jugement résultent d’une erreur du juge (BERTOSSA/GAILLARD/GUYET/SCHMIDT, Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, n. 4 ad art. 160 LPC).

Selon l'art. 160 al. 2 LPC, la réparation en est demandée par requête: elle est faite en marge ou au bas de la minute même du jugement.

Si, se méprenant sur la portée de l’art. 160 et sur la nature des voies de recours, un plaideur agit inutilement en interprétation, révision, opposition ou appel, son recours ne sera pas déclaré irrecevable au motif qu’il s’agit en réalité d’un cas d’erreur matérielle et que la réparation devait être requise par la voie non formaliste de l’art. 160. Dans une telle hypothèse, le juge du recours procédera à la réparation de l’erreur matérielle (BERTOSSA/GAILLARD/GUYET/
SCHMIDT, op. cit, n. 3 ad art. 160 LPC).

Il en résulte que le juge saisi d'un recours est compétent pour corriger une erreur matérielle.

Partant, il convient de corriger le numéro de police figurant au chiffre 2 du dispositif du jugement, en le remplaçant par le no 2.

5. L'appelant ayant succombé dans ses conclusions, il se justifie de le condamner aux dépens d'appel, qui comprennent une indemnité de procédure à titre de participation aux honoraires d'avocat de l'intimée (art. 176 al.1, art. 181, 308, 313 LPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par Monsieur A.______ contre le jugement JTPI/6812/2007 rendu le 10 mai 2007 par le Tribunal de première instance dans la cause C/27928/2006-14.

Au fond :

Rectifie le chiffre 2 du dispositif du jugement attaqué, en tant qu'il se réfère à la police no 1, en lieu et place de celle no 2, pour déclarer l'incompétence du Tribunal de première instance quant aux prétentions qui en découlent.

Confirme pour le surplus ce jugement.

Condamne Monsieur A.______ aux dépens d'appel, comprenant une indemnité de procédure de 2'000 fr. valant participation aux honoraires d'avocat de X.______ SA.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Florence KRAUSKOPF, présidente; Monsieur Christian MURBACH, Monsieur Pierre CURTIN, juges; Madame Nathalie DESCHAMPS, greffière.

 

La présidente :

Florence KRAUSKOPF

 

La greffière :

Nathalie DESCHAMPS

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.