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Décisions | Chambre civile

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C/80/2021

ACJC/1383/2022 du 18.10.2022 sur ORTPI/668/2022 ( SDF ) , CONFIRME

Normes : CPC.298.al1; Cst.29.al2; CPC.299
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/80/2021 ACJC/1383/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 18 OCTOBRE 2022

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______[GE], recourante contre une ordonnance ORTPI/668/2022 rendue par la 4ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 9 juin 2022, comparant en personne,

et

1) Monsieur B______, domicilié ______[GE], intimé, comparant par Me Vanessa GREEN, avocate, GREEN Avocats, rue Ferdinand-Hodler 9, 1207 Genève, en l'Étude de laquelle il fait élection de domicile,

2) Les mineurs C______ et D______, domiciliés au Foyer E______, ______, autres intimés, représentés par leur curateur, Me Gilbert DESCHAMPS, avocat, rue Saint-Ours 5, 1205 Genève.

 

 


EN FAIT

A. Par ordonnance ORTPI/668/2022 du 9 juin 2022, le Tribunal de première instance a notamment ordonné que les mineurs C______, né le ______ 2010, et D______, née le ______ 2014, soient représentés par un curateur dans la procédure de divorce pendante entre leurs parents (ch. 1 du dispositif), désigné Me F______ à cette fonction (ch. 2), et fixé l'avance de frais à 5'000 fr., mis à la charge des époux à raison de la moitié chacun (ch. 3).

B. a. Par acte expédié le 20 juin 2022 au greffe de la Cour de justice, A______ forme recours contre cette ordonnance, qu'elle a reçue le 11 du même mois et dont elle sollicite l'annulation. Elle conclut au renvoi de la cause au premier juge pour instruction complémentaire et nouvelle décision mieux motivée et tenant compte de l'avis de son fils C______ – qui a exprimé le souhait de ne plus être représenté par Me F______ – de sorte qu'une autre personne devrait être désignée comme curateur des enfants, la mission dudit curateur devant par ailleurs être mieux définie. Elle a en outre demandé, si mieux n'aime la Cour, qu'il soit procédé à son audition et celle de son fils C______, que l'avance de frais y relative soit mise à la charge de B______, et que ce dernier soit débouté de toutes autres conclusions, avec suite de frais et dépens de première et seconde instances.

La requête préalable de A______ visant à suspendre le caractère exécutoire de l'ordonnance entreprise a été rejetée par décision présidentielle du 18 juillet 2022, le sort des frais étant réservé à la décision au fond.

b. B______ a conclu au rejet du recours, avec suite de frais et dépens, ces derniers devant être fixés à 3'000 fr.

Il a produit diverses pièces nouvelles au cours de la procédure de seconde instance, notamment une ordonnance de non-entrée en matière rendue par le Ministère public le 5 novembre 2021 (cf. infra let. E.b).

c. Les parties ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger, par avis du greffe de la Cour du 11 août 2022.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier:

a. B______ et A______, tous deux ressortissants suisses, se sont mariés le ______ 2010 à K______ (Vaud).

Ils sont les parent de C______, né le ______ 2010, et de D______, née le ______ 2014.

b. Les parties se sont séparées en 2018 et les modalités de leur vie séparée ont été réglées sur mesures protectrices de l'union conjugale.

b.a Dans le cadre de cette procédure, le Tribunal a nommé Me F______ en qualité de curateur de représentation des mineurs, par ordonnance du 22 mars 2021.

Me F______ a rencontré les enfants à plusieurs reprises les 6 et 26 avril ainsi que le 28 mai 2021. Lors du premier entretien, D______ avait déclaré qu'elle passait beaucoup de bons moments avec son père, qu'elle passerait volontiers quatre jours chez son père et quatre à cinq jours chez sa mère en alternance, que sa mère les forçait à lui révéler de ce dont ils parlaient avec leur père et qu'elle devait mentir à sa mère pour qu'elle ne se fâche pas à ce propos. Lors de la dernière entrevue, D______ avait indiqué au curateur de représentation qu'elle souhaitait rester avec sa mère et qu'elle ne souhaitait plus voir son père, car il la critiquait, lui disait des choses désagréables, il lui criait dessus, il avait giflé C______, il lui "mett[ait] la pression" pour qu'elle ne parle pas de "trucs" qu'il lui faisait "sous la douche", pour lesquels il risquait d'aller en prison car c'était "pénal", il préférait son frère, il s'en prenait à elle pour faire du mal à sa mère, il avait "corrompu neuf personnes avec de l'argent", dont des psychologues et il avait menacé de tuer sa mère. C______ avait, quant à lui, demandé au curateur de garder le secret sur le contenu de leur entretien.

Le lendemain de la dernière entrevue, à 20h47, B______ avait adressé un message au curateur de représentation sur son téléphone portable pour lui dire que D______ était en pleurs et souhaitait lui parler. Le curateur avait donc appelé le père à 20h56 pour s'entretenir avec l'enfant, qui lui avait dit qu'elle s'était beaucoup inquiétée, parce que tout ce qu'elle lui avait dit sur son papa était faux, qu'elle avait peur de sa mère qui avait menacé de quitter le pays si elle ne racontait pas tout ce qu'elle voulait et qu'elle souhaitait vivre en alternance chez ses parents, mais qu'elle ne pouvait pas le dire à ses parents, qui lui posaient beaucoup de questions.

Le 22 septembre 2021, le curateur de représentation a revu les enfants, qui ont été amenés par le père. D______ a souhaité garder secret leur échange. C______ l'a autorisé à rapporter qu'il ne souhaitait pas de garde alternée, qu'il préférait le statu quo de l'organisation des droits parentaux, car sa sœur lui avait dit que son père l'avait menacée de l'envoyer dans un orphelinat et que ce dernier insultait sa mère.

Le curateur de représentation - qui a également constaté la virulence des propos échangés par les parents - considérait que les enfants étaient totalement pris dans le conflit parental et un conflit de loyauté, et que leur positionnement devait être apprécié avec prudence. Il s'était entretenu avec la Dresse G______, le Dr H______, le Dr I______, de même qu'avec l'intervenante auprès du SEASP et la directrice de l'école. Les avis des médecins, qui s'étaient prononcés en faveur d'une garde partagée, ne lui avaient pas paru douteux et partiaux. Au vu de la situation et des éléments recueillis, il était nécessaire que les enfants ne soient plus un enjeu. Leur intérêt supérieur commandait l'instauration d'une garde partagée.

La mère a reproché au curateur de représentation des enfants de s'être laissé influencer, de ne pas avoir vu que les enfants étaient mis sous pression par B______ pour qu'ils reviennent sur leurs déclarations, de ne pas avoir pris la peine de prendre connaissance des pièces du dossier et d'avoir un parti pris évident en faveur du père. La mère a en outre fait valoir que le curateur de représentation, qui faisait fi de la volonté clairement exprimée de C______, âgé de 12 ans et capable de discernement, et mettait en avant sa propre interprétation de la situation (au demeurant biaisée par les agissements du père), ne pouvait plus être considéré comme le porte-parole des enfants et une personne de confiance pour eux.

b.b Par jugement du 27 août 2021, confirmé par arrêt ACJC/166/2022 de la Cour du 1er février 2022, le Tribunal a notamment institué une garde alternée sur C______ et D______, dit que le domicile légal des enfants serait chez la mère, maintenu la curatelle d'organisation et de surveillance du droit aux relations personnelles et instauré une curatelle de soins ainsi qu'une curatelle d'assistance éducative en faveur des enfants.

Dans l'arrêt précité, la Cour a notamment retenu, face aux nombreuses critiques formulées par la mère, que le curateur de représentation, dont le rôle ne se résumait pas à rapporter l'avis exprimé par les enfants, avait tenu compte de l'ensemble des éléments dont il disposait pour se déterminer sur la sauvegarde de leurs intérêts (cf. ACJC/166/2022 consid. 4.2 p. 23).

c. Entre-temps, par acte du 4 janvier 2021, B______ a déposé une demande unilatérale en divorce, dans le cadre de laquelle il a notamment conclu au maintien de l'autorité parentale conjointe sur les enfants et de la garde partagée de ceux-ci.

Lors de l'audience du 23 juin 2021, A______ a accepté le principe du divorce mais s'est opposée à la plupart des autres conclusions prises par son époux dans le cadre du divorce.

d.a Initialement, les parties ne se sont pas opposées à ce qu'un curateur de représentation soit nommé pour les enfants dans le cadre de la procédure de divorce.

Lors de l'audience du 23 juin 2021, A______ a toutefois refusé que Me F______ soit nommé en cette qualité. Se référant à nouveau aux faits relatés ci-dessus, elle a déclaré ne pas comprendre comment et pourquoi B______ avait pu s'adresser directement au curateur un samedi soir sur son portable alors que ce dernier avait indiqué aux parties qu'elles ne devaient pas s'adresser directement à lui mais par l'intermédiaire des conseils. Elle-même ne possédait pas le numéro de portable du curateur.

Pour sa part, B______ a déclaré que Me F______ avait pu gagner la confiance des enfants, de sorte qu'il souhaitait qu'il soit nommé comme leur curateur de représentation afin d'assurer un minimum de stabilité à C______ et D______, qui avaient déjà eu affaire à beaucoup d'intervenants différents. Il a expliqué qu'il détenait le numéro de téléphone du curateur avant que celui-ci ait été nommé comme tel. Il lui avait envoyé un message téléphonique un soir car D______ était en pleurs et le suppliait de pouvoir contacter son curateur. Ce dernier avait appelé et il lui avait directement passé l'enfant qui s'était enfermée dans sa chambre pour lui parler. Il n'avait pas évoqué la conversation avec D______ par la suite comme le lui avait demandé le curateur.

d.b Dans le délai qui lui a été imparti par le Tribunal, B______ s'est déterminé par écrit sur la désignation d'un curateur de représentation aux enfants, persistant à requérir que Me F______ soit nommé en cette qualité. Il a fait valoir qu'il serait malvenu de désigner une nouvelle personne dès lors qu'un lien de confiance s'était établi entre Me F______ et les enfants, que ces derniers avaient d'ores et déjà trop été confrontés à de parfaits étrangers (psychologue, éducateur, médecin, etc.) depuis bientôt trois ans et que l'intérêt des enfants à conserver une forme de stabilité devait primer face à la crainte de la mère qui contestait le professionnalisme de toutes les personnes qui n'adhéraient pas à ses conclusions.

d.c A______ a finalement conclu à ce qu'il soit dit qu'en l'état il ne se justifiait pas de nommer un curateur de représentation aux enfants, dès lors qu'une expertise familiale devait être ordonnée et que les enfants seraient entendus dans ce cadre. Ils étaient également suivis par des professionnels de l'enfance qui pourraient fournir au Tribunal un rapport de leur suivi. En tout état, Me F______ ne devait pas être nommé à ce titre, puisque dans le cadre de la procédure sur mesures protectrices de l'union conjugale, il n'avait pas suivi la volonté des enfants. Il avait manifestement souhaité favoriser le père avec lequel il avait des liens.

e. Par ordonnance OTPI/1029/2021 du 23 septembre 2021, le Tribunal, considérant qu'il se justifiait de prendre des mesures de protection en faveur des enfants C______ et D______, a ordonné qu'ils soient représentés par un curateur dans la procédure de divorce opposant leurs parents et a désigné Me F______ en cette qualité.

Par arrêt ACJC/515/2022 du 5 avril 2022, la Cour a annulé l'ordonnance précitée pour défaut de motivation et renvoyé la cause au Tribunal pour nouvelle décision explicitant les raisons pour lesquelles il se justifiait de prendre des mesures de protection en faveur des enfants et le choix du curateur de représentation des enfants, vu les positions opposées des parents sur ce point.

f. A la suite de l'arrêt de renvoi de la Cour, le Tribunal a, par ordonnance du 4 mai 2022, fixé un délai aux époux au 31 mai 2022 pour se déterminer sur le principe de la nomination d'un curateur de représentation pour leurs enfants ainsi que sur la personne de ce curateur.

g.a Par courrier expédié le 30 mai 2022 au Tribunal, le mineur C______, agissant "spontanément" et en personne, a exposé que lui-même et sa sœur refusaient d'aller vivre chez leur père. Ce dernier l'aurait menacé de le frapper, l'avait insulté et avait aussi fait très mal à sa sœur. Leur père était très agressif et méchant et les aurait forcés à mentir. Il avait peur de retourner chez lui. Il a par ailleurs indiqué que leur curateur avait "disparu" et qu'ils n'avaient pas confiance en lui. Avec sa sœur, ils avaient "choisi une avocate de la liste de Genève pour les enfants", soit J______, dont ils sollicitaient la nomination pour les défendre.

Auparavant, soit en octobre 2021, il avait déjà adressé une missive à la magistrate en charge du divorce de ses parents, exposant que son curateur de représentation ne disait pas toute la vérité et qu'il ne lui faisait plus confiance. Il a par ailleurs indiqué que lui-même et sa sœur étaient suffisamment grands pour être entendus directement par la juge, pour dire la vérité.

g.b A______ a demandé – outre son audition et celle de son fils – qu'un curateur autre que Me F______ soit nommé pour représenter ses enfants, car ces derniers avaient perdu toute confiance en lui (au motif qu'il avait rapporté au Tribunal l'inverse de leurs souhaits concernant le mode de garde). Elle proposait la nomination de Me J______, que ses enfants avaient choisie et qui les rassurait. Elle a en outre sollicité que la mission, les tâches et les limites des fonctions du curateur soient précisées dans le dispositif de la décision.

g.c Pour sa part, B______ a rappelé que les parties avaient d'ores et déjà amplement eu l'occasion de se prononcer sur le principe de la nomination d'un curateur de représentation pour leurs enfants ainsi que sur la personne de ce curateur, l'annulation de l'ordonnance du 23 septembre 2021 étant essentiellement due à un défaut de motivation. Dans la mesure où, entre-temps, lui-même avait été privé de tout contact avec ses enfants (cf. infra let. E.b.a), il demeurait essentiel que la personne qui serait désignée ait connu les enfants avant leur aliénation totale par leur mère. La nomination de Me F______ relevait dès lors de l'évidence.

D. Dans l'ordonnance querellée du 9 juin 2022, le Tribunal a retenu que les parties s'accordaient sur la nécessité de désigner un curateur de représentation pour leurs enfants. Une telle mesure de protection était de toute manière nécessaire vu l'extrême conflictualité du litige entre les parents. Concernant la personne du curateur, le premier juge a relevé qu'il était surprenant que la mère et les enfants aient conjointement porté leur choix sur Me J______. Les enfants n'ayant pas la faculté d'effectuer un choix serein, non influencé par l'un ou l'autre des parents, d'autant plus dans une période où ils n'avaient plus accès à leur père, la personne proposée ne pouvait être retenue. Le Tribunal était au contraire d'avis qu'il fallait offrir, pour la procédure de divorce, une forme de stabilité aux enfants en désignant comme curateur de représentation Me F______, lequel avait déjà œuvré à ce titre au cours de la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale. Celui-ci était parvenu à créer un lien avec C______ et D______, était expérimenté et son travail ne souffrait aucune critique, contrairement à ce que tentait de faire accroire A______.

E. Les éléments pertinents suivants résultent par ailleurs du dossier:

a. Le 5 novembre 2021, le Ministère public a rendu une ordonnance de non-entrée en matière en faveur d'B______ à la suite notamment de la plainte pénale déposée par son épouse le 6 juin 2021 pour actes d'ordre sexuel avec des enfants, injures, menaces et calomnie. Concernant les "faits de violence sexuelle" prétendument commis par B______ sur sa fille D______, il a notamment été retenu que les "épisodes de la douche" n'étaient corroborés par aucun élément objectif de preuve. Quoi qu'il en soit, les actes dénoncés, tels qu'ils ressortaient de la procédure, n'étaient pas constitutifs d'une infraction à l'intégrité sexuelle de l'enfant. Objectivement, celle-ci racontait que son père lui demandait de se laver les parties intimes lorsqu'elle prenait la douche. Rien ne permettait de retenir qu'il commettrait un quelconque attouchement sexuel. Le fait que l'enfant puisse être gênée par la présence de son père lors de la douche était une autre question, qui n'avait pas à être traitée par les autorités pénales. Les autres infractions dénoncées n'étaient pas non plus étayées, ni même datées.

b. Par ordonnance ORTPI/1038/2021 rendue le 24 septembre 2021 dans le cadre de la procédure de divorce, le Tribunal avait ordonné l'établissement d'une expertise du groupe familial, aux fins de déterminer les capacités des parents à exercer l'entier des prérogatives liées à l'autorité parentale, la garde et un droit de visite sur leurs enfants D______ et C______.

Le rapport d'expertise psychiatrique du Centre universitaire romand de médecine légale (CURML), daté du 23 juin 2022, est parvenu au Tribunal le 27 juin 2022 et a été versé à la présente procédure de recours par B______.

b.a Il résulte dudit rapport qu'après la reddition de l'arrêt ACJC/166/2022 du 1er février 2022 confirmant l'instauration d'une garde partagée entre les parents, le calendrier de garde mis en place par le Service de protection des mineurs (SPMi) n'a pas été respecté. La mère n'emmenait pas les enfants chez leur père (et les gardait à la maison les lundis et mardis, car ils étaient censés se rendre chez leur père après l'école). Les enfants étaient de plus en plus récalcitrants à passer du temps avec leur père, refusant catégoriquement de le voir depuis avril 2022.

Le SPMi a constaté que la situation s'était de plus en plus crispée, ce qui ne permettait pas aux enfants de créer une relation saine avec leur père. Ce service a également constaté une aggravation du conflit de loyauté vécu par les enfants, mettant ceux-ci dans des tensions peu supportables pour leur jeune âge. L'intervenante du SPMi, qui s'est rendue au domicile de la mère, a décrit les enfants comme "braqués" et dit avoir l'impression que les enfants ne pensaient pas par eux-mêmes. Ils décrivaient leur père comme violent et menaçant, sans vraiment pouvoir donner d'exemples concrets. D______ avait réitéré son discours où elle expliquait que son père lui faisait des choses sous la douche et où ce dernier aurait dit qu'il pourrait expulser sa mère de Suisse ou la tuer. L'attitude des enfants était complètement différente de celle observée précédemment, chez leur père par exemple.

Pour leur part, les experts ont relevé que le tableau présenté par les enfants avait évolué de façon considérable depuis le mois de février 2022. L'ambivalence par rapport aux deux parents et la volonté de passer du temps chez chacun d'eux s'était dissipée pour laisser place à une position affirmée et inébranlable de refus d'aller chez le père. Les enfants avançaient désormais des propos calqués à ceux de la mère tout en affirmant ne pas être influencés par elle. Les enfants restituaient en bloc le discours de leur mère, en usant des mêmes mots et des mêmes phrases, ce qui était évocateur d'une emprise parentale.

b.b Selon les psychiatres qui ont évalué le fonctionnement global de A______, celle-ci souffrait d'un trouble de la personnalité paranoïaque sévère. Elle était sujette à une perception biaisée de la réalité et pouvait créer de nouveaux éléments allant dans le sens de sa création paranoïaque. Tout avis divergeant du sien amenait à des discrédits ou des attaques envers les différents intervenants. Il a été constaté que la mère présentait des capacités parentales inadéquates, qu'elle instrumentalisait les enfants à des fins qui la servaient dans le conflit l'opposant à B______. Il était dès lors urgent d'éloigner les enfants de la relation d'emprise de leur mère (et de son compagnon) et de les protéger au plus vite.

b.c Selon les experts, B______ ne souffre d'aucun trouble de la personnalité et présente des capacités parentales adéquates.

b.d Les experts ont préconisé, dans l'intérêt des enfants, de retirer leur garde à la mère et de la confier au père, C______ devant préalablement être placé dans un foyer pour une période de trois à six mois avant d'envisager un retour progressif chez son père.

c. Par ordonnance de mesures superprovisionnelles ORTPI/825/2022 du 5 juillet 2022, le Tribunal a notamment ordonné le placement en foyer des enfants C______ et D______ pour une durée déterminée, en principe de trois à six mois, avant d'envisager un retour progressif chez leur père, suspendu les relations personnelles entre A______ et les enfants et réservé à B______ un droit de visite sur les enfants qui s'exercerait en collaboration avec le curateur et le lieu de placement, en vue d'une restitution de garde en faveur de ce dernier.

d. Les parents et Me F______ ont été entendus par le Tribunal le 20 juillet 2022. Le curateur de représentation a exposé avoir rendu visite aux enfants à plusieurs reprises. Il a ainsi pu relater comment ces derniers avaient réagi à l'annonce de leur placement en foyer et comment ils vivaient celui-ci. Chacun d'eux s'était exprimé sur sa relation personnelle avec ses parents. Les enfants ont toutefois refusé que le curateur de représentation communique ces éléments au Tribunal, hormis leur souhait de voir leur mère, qui leur manque. En dehors de ce qui précède, les enfants avaient affirmé qu'ils n’avaient aucun message particulier à faire passer lors de l'audience.

A l'issue de celle-ci, Me F______ a notamment conclu, sur mesures provisionnelles, conformément aux recommandations du SPMi, à l'instauration d'un droit de visite médiatisé d'une heure trente par quinzaine en faveur de la mère (à réévaluer en fonction du déroulement), à la confirmation de la reprise du droit de visite du père (à son domicile), ainsi qu'à la confirmation des mesures provisionnelles pour le surplus.

EN DROIT

1. 1.1 La décision querellée, qui doit être qualifiée d'ordonnance d'instruction, est susceptible de recours immédiat stricto sensu, dans un délai de 10 jours (art. 321 al. 2 CPC), pour violation du droit et constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC), pour autant que la recourante soit menacée d'un préjudice difficilement réparable (art. 319 let. b ch. 2 CPC).

En l'occurrence, le recours – interjeté dans le délai utile par la mère des enfants en faveur desquelles une curatelle de représentation a été instaurée – est recevable, puisque l'ordonnance attaquée a pour conséquence de limiter son droit de représenter les enfants, ce qui est susceptible de lui causer un préjudice difficilement réparable (pour les développements sur ce point, cf. ACJC/515/2022 du 5 avril 2022 rendu dans la présente cause, consid. 1.1 - 1.2 auxquels il peut être renvoyé).

1.2 Dans la procédure de recours, la cognition de la Cour est limitée à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits.

2. 2.1 Aux termes de l’art. 326 CPC, les allégations de fait et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours (al. 1), les dispositions spéciales de la loi étant réservées (al. 2).

Dans les causes de droit de la famille concernant des enfants mineurs, les maximes d'office et inquisitoire illimitée s'appliquent (art. 296 CPC). Dans ce genre d'affaires, l'autorité cantonale de recours est en droit d'établir les faits d'office, notamment pour se faire une meilleure idée de la situation actuelle de l'enfant (arrêt du Tribunal fédéral 5A_923/2014 du 27 août 2015 consid. 3 non publié in ATF 141 III 472). L'autorité de seconde instance peut dès lors ordonner d'office l'administration de tous les moyens de preuve propres et nécessaires à établir les faits pertinents pour rendre une décision conforme à l'intérêt de l'enfant (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

Selon une partie de la doctrine, la maxime d'office et la maxime inquisitoire au sens strict doivent s'appliquer devant l'autorité cantonale de recours quelle que soit la voie de recours. En conséquence, l'art. 296 CPC devrait être qualifié de disposition spéciale pour laquelle l'art. 326 al. 2 CPC formule une réserve au principe posé à l'art. 326 al. 1 CPC (Heinzmann, in Newsletter CPC Online du 8 juin 2017 ad art. 326 CPC; Bastons Bulletti, Petit commentaire du CPC, n. 12 ad art. 326 CPC).

2.2 In casu, les faits et moyens de preuve nouveaux invoqués par le père sont pertinents pour appréhender la situation actuelle des mineurs C______ et D______ et prendre une décision conforme à l'intérêt de ceux-ci.

Les allégués et pièces nouvellement introduits devant la Cour sont dès lors recevables.

3. La recourante demande l'audition de son fils C______, au motif que l'avis de l'enfant – qui dispose selon elle de la capacité de discernement nécessaire pour se forger une opinion et pour l'exprimer – n'a pas été pris en compte.

3.1.1 A teneur de l'art. 298 al. 1 CPC, les enfants sont entendus personnellement et de manière appropriée par le tribunal ou un tiers nommé à cet effet, pour autant que leur âge ou d'autres justes motifs ne s'y opposent pas.

Le juge est tenu d'entendre l'enfant, non seulement lorsque celui-ci ou ses parents le requièrent, mais aussi dans tous les cas où aucun juste motif ne s'y oppose (arrêts du Tribunal fédéral 5A_547/2017 du 26 octobre 2017 consid. 3.2.2; 5A_714/2015 du 28 avril 2016 consid. 4.2.2).

En principe l'audition des enfants dans une affaire qui les concerne est en général possible dès l'âge de 6 ans révolus (ATF 131 III 553 consid. 1.2.3).

3.1.2 La maxime inquisitoire n'exclut pas l'appréciation anticipée des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 5A_720/2013 du 4 mars 2014 consid. 4.1).

3.2 En l'espèce, C______ a adressé plusieurs courriers au premier juge, dans lesquels il s'est exprimé au sujet de son actuel représentant ainsi que sur sa volonté de changer de curateur de représentation. Il a cependant d'ores et déjà été relevé à plusieurs reprises que les mineurs sont pris dans un important conflit de loyauté et sont submergés par le conflit parental, de sorte que leurs déterminations doivent être appréciées avec la plus grande prudence. Dès lors qu'il résulte du rapport d'expertise que C______ est instrumentalisé par sa mère pour les besoins de la cause, l'audition sollicitée n'apporterait quoi qu'il en soit pas de nouvel élément pertinent pour la résolution du litige et n'apparaît pas être dans l'intérêt de C______, qui doit, autant que possible, être tenu à l'écart de la procédure judiciaire entre ses parents.

La Cour s'estimant suffisamment renseignée sur la position de C______, il ne sera pas donné une suite favorable à la requête en audition de ce dernier.

4. Invoquant diverses violations de son droit d'être entendue, la recourante fait grief au Tribunal d'avoir statué sans l'auditionner, alors qu'elle avait pris des conclusions en ce sens, et de ne pas avoir suffisamment motivé sa décision sur le choix de la personne du curateur.

4.1
4.1.1
Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., comprend pour le justiciable le droit de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1). Il ne garantit en revanche pas le droit de s'exprimer oralement devant l'autorité appelée à statuer (ATF 130 II 425 consid. 2.1; 125 I 209 consid. 9b).

4.1.2 La jurisprudence a également déduit de l'art. 29 al. 2 Cst. le devoir pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Il n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, apparaissent pertinents (ATF 142 III 433 consid. 4.3.2; 141 IV 249 consid. 1.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_19/2020 du 18 mai 2020 consid. 6). Il n'y a violation du droit d'être entendu que si l'autorité n'a pas satisfait à son devoir minimum d'examiner et de traiter les problèmes pertinents (ATF 135 III 670 consid. 3.3.1; 133 III 235 consid. 5.2 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 5A_609/2012 du 12 septembre 2012 consid. 3.1). L'essentiel est que la décision indique clairement les faits qui sont établis et les déductions juridiques qui sont tirées de l'état de fait déterminant (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 135 II 145 consid. 8.2). En revanche, l'autorité se rend coupable d'un déni de justice formel si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 142 III 433 consid 4.3 et les références citées).

La violation du droit d'être entendu entraîne l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 précité consid. 2.2; 135 I 279 consid. 2.6.1); celle-ci peut toutefois, à titre exceptionnel, être réparée, pour autant qu'elle ne soit pas particulièrement grave et que la partie concernée ait la possibilité de s'exprimer devant une autorité de seconde instance disposant d'un pouvoir de cognition complet en fait et en droit (ATF 137 I 195 précité consid. 2.3.2; 136 V 117 consid. 4.2.2.2; 133 I 201
consid. 2.2).

4.2
4.2.1
En l'occurrence, devant l'autorité de première instance, la recourante a eu l'occasion de s'exprimer une fois oralement et plusieurs fois par écrit, tant sur le principe de nomination d'un curateur de représentation en faveur des enfants que sur la personne de ce curateur. Son droit d'être entendue a ainsi pleinement été respecté, de sorte que son grief sur ce point sera rejeté.

Par ailleurs, il ne sera pas donné suite au chef de conclusion de la recourante tendant à son audition par la Cour, puisqu'elle a déjà eu l'occasion d'exprimer sa position dans son acte de recours, qu'il n'existe pas un droit à être entendu oralement et qu'elle n'expose en outre pas les raisons pour lesquelles son audition pourrait être utile à la solution du litige.

4.2.2 Pour le surplus, le premier juge a exposé les raisons pour lesquelles il s'écartait des conclusions concordantes de la mère et de C______ au sujet du choix du curateur de représentation, ainsi que les motifs pour lesquels il jugeait préférable de maintenir à cette fonction la même personne que durant la procédure de mesures protectrices. Bien que la motivation du Tribunal (résumée au point D de l'état de fait ci-dessus) soit succincte, elle est suffisamment explicite pour que la recourante puisse la comprendre et la contester utilement.

La critique de la recourante est, par conséquent, infondée.

5. La recourante reproche au Tribunal d'avoir désigné Me F______ en qualité de curateur de représentation de ses enfants.

5.1 Selon l'art. 299 al. CPC, le tribunal ordonne si nécessaire la représentation de l'enfant et désigne un curateur expérimenté dans le domaine de l'assistance et en matière juridique.

5.1.1 Les tâches du représentant de l’enfant dans les procédures matrimoniales se limitent pour l’essentiel à des tâches d’information, de communication et d’assistance en rapport avec le procès (ATF 142 III 153 consid. 5.2.4, in JdT 2017 II 202). Par assistance, il faut comprendre des compétences en matière sociale. Le curateur devrait être à même de se faire comprendre par l’enfant, de gagner sa confiance, de lui "traduire" la procédure et ses enjeux, de se positionner par rapport à elle, et de rester indépendant par rapport aux parents. Il devra également posséder des compétences en droit du divorce, en droit de la protection de l’enfant et en procédure (Helle, Commentaire pratique Droit matrimonial: Fond et procédure, 2016, n. 28 ad art. 299 CPC et les références citées).

Le travail du représentant de l’enfant consiste à réunir, examiner et classer du point de vue des intérêts de l’enfant les éléments de procédure concernant la question juridique posée. Il doit se faire une image complète, indépendante des parents, et neutre, de la situation concrète (locale, domestique, scolaire, interaction entre l’enfant et les parents ainsi que les frères et sœurs) et la porter à la connaissance du tribunal. L’information relative à la volonté subjective de l’enfant fait aussi partie de ce qu’il faut connaître pour déterminer le bien de l’enfant (ATF 142 III 153 consid. 5.2.3.1). Le curateur de représentation accompagne l’enfant tout au long du procès, en lui expliquant dans une forme adaptée la procédure et ses effets, en assurant la communication entre l’enfant et les acteurs du procès et en servant d’intermédiaire en rapport avec tous les éléments déterminants pour la mesure à prendre (ATF 142 III 153 consid. 5.2.3.2).

Le tribunal a la faculté, lors de la nomination du curateur pour la procédure et dans le cadre de l’instruction du procès, de piloter l’étendue de ses tâches – précisément aussi compte tenu des incidences au niveau des coûts – soit de décrire lesdites tâches, voire de les limiter (ATF 142 III 153 consid. 5.3.1).

Le Tribunal fédéral considère que le représentant doit assurer le bien-être objectif – et non subjectif – de l’enfant (ATF 142 III 153 consid. 5.2.1, 5.2.2 et 5.2.4, JdT 2017 II 202), ce qui paraît justifié, selon une partie de la doctrine, dans la mesure où l’enfant n’est souvent pas capable de déterminer ce qui est bon pour lui et qu’il peut être influencé par l’un ou l’autre de ses parents (Dietschy-Martenet, Petit commentaire du Code de procédure civile, n. 14 ad art. 299 CPC).

5.1.2 Même s'il n'existe pas de droit de choisir le représentant de l'enfant, les souhaits éventuels - en particulier ceux de l'enfant capable de discernement - doivent être pris en compte dans certaines conditions et une autre personne ne devrait être désignée comme représentant de l'enfant que dans des cas justifiés (Stalder/Van de Graaf, Kurzkommentar Schweizerische Zivilprozessordnung, 2021, n. 13 ad art. 299 CPC). Le tribunal devrait ainsi respecter la préférence exprimée par l’enfant capable de discernement quant au choix du curateur (Helle, Commentaire pratique Droit matrimonial: Fond et procédure, 2016, n. 31 ad art. 299 CPC; Michel/Steck Basler Kommentar Schweizerische Zivilprozessordnung, n. 14 ad art. 299 CPC, lesquels font une analogie avec l’art. 401 CC relatif au choix du curateur). Les parents devraient également être entendus sur la personne du curateur à désigner (Helle, op. cit., n. 31 ad art. 299 CPC).

La capacité de discernement de l'enfant s'apprécie selon un critère relatif (art. 16 et 19 al. 2 CC). Il convient de décider, sur la base des circonstances concrètes et de la maturité de développement de l'enfant, si la capacité de discernement peut lui être reconnue en ce qui concerne la question de sa représentation (Stalder/Van de Graaf, Kurzkommentar Schweizerische Zivilprozessordnung, 2021, n. 8 ad art. 299 CPC).

Le Tribunal fédéral a été amené à se poser la question de la capacité de discernement d’un enfant d’un peu moins de douze ans refusant catégoriquement d’entretenir des relations personnelles avec son père. Selon cette autorité, il n'était ni étonnant ni contradictoire qu'un enfant d'un peu moins de 12 ans soit capable de discernement pour ce qui avait trait à son quotidien, mais qu'il ne disposait en revanche pas de la maturité nécessaire pour prendre des décisions impliquant son affect, lorsqu'il se trouvait dans un désarroi profond, causé par un lourd conflit de loyauté subi depuis des années. Il ressortait de l'expertise que le rejet du père par l'enfant n'était en rien fondé sur les expériences personnelles négatives qu'il aurait vécues lors de l'exercice du droit de visite - au contraire, lorsqu'elles avaient pu avoir lieu, l'enfant avait manifesté du plaisir à voir son père, et ce dernier présentait des capacités parentales adéquates -, mais était le résultat du conflit parental dont il souffrait et qui l'amenait à réagir en fonction de ce que sa mère attendait de lui, au risque de mettre de côté sa propre identité (arrêt du Tribunal fédéral 5A_459/2015 du 13 août 2015 consid. 6.3).

La non-prise en compte des souhaits de la personne concernée doit se fonder sur des raisons objectives (ATF 140 III 1 consid. 4.3.2).

5.2 En l'espèce, il n'est pas contesté qu'il est nécessaire que C______ et D______ soient représentés par un curateur en vue de sauvegarder leurs intérêts dans la procédure de divorce opposant leurs parents, dès lors que la situation familiale est particulièrement complexe et tendue, les enfants étant pris dans un grave conflit de loyauté. Seul le choix de la personne du curateur demeure litigieux.

C______ s'est exprimé à cet égard, indiquant qu'il ne souhaiterait plus être représenté par Me F______. Or, même si C______, âgé de 12 ans, est présumé capable de discernement pour ce qui a trait à son quotidien, il y a lieu de retenir que cette faculté fait défaut pour tout ce qui concerne le litige opposant ses parents, tant il est évident que sa volonté exprimée est influencée par sa mère. Cela est d'ailleurs reflété par le fait que mère et fils ont tous deux conclu à ce que Me J______ soit nommée en qualité de curatrice de représentation, C______ ayant adressé au juge des déterminations "spontanées" à cet égard, à une période où il était privé de tout contact avec son père.

Cela est également confirmé par le rapport d'expertise familiale, dont il résulte que la mère exerce une emprise sur ses enfants, lesquels restituent en bloc le discours de celle-ci. Aussi, le refus de C______ de voir Me F______ et d'être représenté par celui-ci dans le cadre de la procédure de divorce de ses parents doit être mis en perspective avec le fait qu'il a été conditionné par rapport à cette situation et qu'il a agi en fonction de ce que sa mère attend de lui. C______ n'apparaissant pas en mesure de se forger librement une volonté concernant la personne qui sera le mieux à même de le représenter, c'est à juste titre que le premier juge n'a pas accédé à sa demande ("appuyée" par sa mère).

La mère s'est également exprimée en défaveur du maintien de Me F______ aux fonctions de curateur de représentation des enfants. Les reproches formulés par la recourante à l'encontre de celui-ci sont essentiellement les mêmes que ceux qu'elle a déjà invoqués au cours de la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale. Or, l'autorité de céans avait retenu sur ce point que les critiques de la recourante contre l'activité déployée par Me F______ étaient infondées, pour des motifs qui restent applicables (cf. ACJC/166/2022 consid. 4.2).

La recourante se prévaut de quelques nouveaux éléments pour soutenir que Me F______ serait un curateur "désinvesti" et "indifférent aux cris de souffrance de ses enfants", notamment car il n'aurait pas réagi lorsque C______ lui a écrit en mars 2022 pour lui dire qu'il ne souhaitait plus vivre avec son père, tant il avait vécu un enfer auprès de lui. Il n'avait pas non plus rencontré les enfants après que ceux-ci aient refusé de se rendre à l'école de peur que leur père ne les "capture de force". Selon la mère, la passivité du curateur de représentation risquerait d'exposer les enfants à la violence d'un père agressif.

Les reproches de la recourante, qui ne sont étayés par aucun élément objectif, apparaissent cependant infondés et doivent de toute manière être relativisés au regard du trouble sévère de la personnalité paranoïaque dont souffre l'intéressée. Pour le surplus, les éléments récents contredisent la position soutenue par la mère, puisque le curateur de représentation a pu s'entretenir à plusieurs reprises avec les enfants depuis leur placement en foyer, que ceux-ci ont accepté de se confier à lui et qu'il a ensuite pu faire part de la situation et de la volonté des enfants lors de l'audience tenue en juillet 2022.

La désignation d'un curateur de représentation des enfants en procédure a précisément pour but de faire valoir la position des enfants selon leur intérêt, indépendamment de la position adoptée par l'un et l'autre des parents, de manière à éviter l'utilisation de ceux-là dans le cadre du conflit et de contribuer à une meilleure prise en compte de leurs intérêts propres. Aucun manquement dans l'accomplissement de sa mission ne peut être reproché à Me F______, celui-ci ayant, comme précédemment, œuvré en vue de préserver l'intérêt des enfants à protéger. Comme retenu avec raison par le Tribunal, le fait que le précité ait déjà connaissance du dossier et ait, par le passé, créé un lien avec les enfants, permet en outre de leur offrir une forme de stabilité. Cela paraît d'autant plus important que les enfants ont, entre-temps, été placés dans un foyer, de sorte qu'ils ont à nouveau dû être confrontés à de nouveaux intervenants.

Il résulte de ce qui précède que des motifs objectifs plaident en faveur du maintien de Me F______ aux fonctions de curateur de représentation des enfants, les critiques de la recourante étant injustifiées.

A noter que la représentation de l’enfant dans les procédures matrimoniales est une mesure de protection sui generis, qui doit être distinguée des mesures de protection des art. 307 ss CC (cf. Helle, op. cit., n. 4 ad art. 299 CPC), de sorte que les griefs développés par la recourante en lien avec l'art. 308 CC sont dépourvus de pertinence. En particulier, il n'appartient pas au curateur de représentation d'assister les père et mère et de leur donner son appui dans la prise en charge des enfants. Enfin, il ne se justifie pas de préciser ou de limiter les tâches du curateur de représentation, puisque rien n'indique que celui-ci aurait outrepassé celles qui lui sont dévolues.

Par conséquent, le recours, entièrement infondé, sera rejeté.

6. Les frais judiciaires du recours, incluant l'émolument de décision sur effet suspensif, seront arrêtés à 1'000 fr. (art. 104, 105 al. 1 et 106 al. 1 CPC; art. 41 RTFMC), compensés avec l'avance du même montant qui a été versée, laquelle restera acquise à l'Etat de Genève. Compte tenu de l'issue de la procédure de recours, ces frais seront mis à la charge de la recourante (art. 106 al. 2 CPC).

Vu la nature familiale du litige, l'intimé supportera ses propres dépens de recours (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 20 juin 2022 par A______ contre l'ordonnance ORTPI/668/2022 rendue le 9 juin 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/80/2021.

Au fond :

Rejette le recours.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 1'000 fr.

Les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance de frais versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX, Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.