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Décisions | Chambre civile

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C/7348/2016

ACJC/444/2019 du 19.03.2019 sur JTPI/10601/2018 ( OO ) , CONFIRME

Descripteurs : COURTAGE ; VOLONTÉ RÉELLE ; CONDITIONS GÉNÉRALES DU CONTRAT ; HONORAIRES ; LIEN DE CAUSALITÉ
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/7348/2016 ACJC/444/2019

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mardi 19 mars 2019

 

Entre

A______ SA, c/o B______, boulevard ______ Genève, appelante d'un jugement rendu par la 8ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 29 juin 2018, comparant par Me Daniel Tunik, avocat, route de Chêne 30, case postale 615,
1211 Genève 6, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

C______ SA, sise rue ______ Genève, intimée, comparant par Me Blaise Grosjean, avocat, rue de Candolle 24, 1205 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. a. Par jugement JTPI/10601/2018 du 29 juin 2018, notifié aux parties le
12 juillet 2018, le Tribunal de première instance a condamné A______ SA (ci-après: A______ SA) à payer à C______ SA (ci-après: C______ SA) 64'800 fr. plus intérêts à 5% à compter du 31 mars 2016 (ch. 1), prononcé la mainlevée définitive au commandement de payer notifié le 13 octobre 2016 à due concurrence (ch. 2), arrêté les frais judiciaires à 8'700 fr., qu'il a compensés avec les avances fournies et mis à la charge de A______ SA (ch. 3), condamné celle-ci à payer à C______ SA
7'200 fr. au titre de remboursement des frais judiciaires (ch. 4) et 9'223 fr. 50 TTC à titre de dépens (ch. 5) ainsi que débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

b. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice le 12 septembre 2018, A______ SA appelle de ce jugement, dont elle sollicite l'annulation. Sous suite de frais, elle conclut au déboutement de C______ SA de toutes ses conclusions.

c. C______ SA conclut, sous suite de frais, à la confirmation du jugement entrepris. Elle produit un extrait des poursuites ouvertes à l'encontre de A______ SA au 10 octobre 2018.

d. Dans leurs réplique et duplique, les parties persistent dans leurs conclusions.

e. Les parties ont été avisées par plis du 11 janvier 2019 de ce que la cause était gardée à juger.

B. Les faits pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour :

a. C______ SA, dont le siège se trouve à Genève, est active dans la recherche et le recrutement de personnel stable. Son administratrice unique est D______, laquelle exerce cette activité depuis 1988. La société est titulaire d'une autorisation de pratiquer le placement privé depuis 1993.

Selon les conditions générales d'engagement 2015 de C______ SA (ci-après : C______), les honoraires dus à la signature du contrat d'engagement s'élèvent à 20% du revenu annuel brut du candidat placé jusqu'à 129'999 fr. et à 25% du revenu annuel brut égal ou supérieur à 130'000 fr. L'entreprise cliente ne peut recontacter un candidat présenté par C______ SA dans les vingt-quatre mois qui suivent l'envoi du dossier concerné, sans l'accord de C______ SA. Le cas échéant, le bénéficiaire de ce candidat est tenu au paiement des honoraires. Si l'entreprise cliente présente le candidat introduit par C______ SA à un tiers, elle est tenue au paiement des honoraires en cas de finalisation du contrat.

b. A______ SA, dont le siège se trouve à Genève, est active dans le domaine de la haute horlogerie. Elle a été fondée en 2007 par E______ qui l'a quittée en 2011. En 2012, elle est devenue la filiale de F______ SA. A l'époque des faits litigieux, G______ en était l'administratrice avec signature individuelle et H______ l'administrateur avec signature collective à deux.

F______ SA, dont le siège se trouve à Genève, a pour but la prise de participations financières. Son actionnaire unique et administrateur président avec signature individuelle est l'époux de G______.

I______ SA EN LIQUIDATION, dont le siège se trouve à Genève, est la filiale de F______ SA. Elle a pour but de fournir tous supports administratifs et logistiques aux sociétés du groupe. Son administrateur président liquidateur est l'époux de G______.

Le pôle horloger du groupe était à l'époque des faits litigieux composé de quatre entreprises, dont A______ SA.

Au printemps 2015, F______ SA était à la recherche d'opportunités d'achat d'entreprises horlogères. Elle avait un poste de directeur général et un poste de directeur financier du pôle horloger du groupe à pourvoir. Selon
A______ SA, son propre poste de directeur général était occupé par une personne qu'elle ne cherchait pas à remplacer, point que C______ SA a contesté.

c. E______ est actif dans le domaine de l'horlogerie depuis plus de vingt ans et au bénéfice de compétences "orientées production". Il a fait la connaissance de G______ en 2012 lors de l'acquisition de A______ SA par F______ SA. Dès le printemps 2015, alors employé de J______, il a régulièrement rencontré celle-ci. Il s'agissait de discuter de son éventuel retour dans le pôle horloger du groupe, avec pour mission de s'occuper de trois sociétés horlogères sur le plan de la production.

d. G______ et D______ ont noué des relations amicales et professionnelles au cours du printemps 2015.

La première, entendue en qualité de représentante de A______ SA par le Tribunal, a allégué que la seconde s'était présentée à elle comme chasseuse de têtes. Celle-ci, entendue en qualité de représentante de C______ SA par le Tribunal, a allégué avoir informé G______ de ses tarifs résultant de ses conditions générales lors de leur première rencontre, ce que cette dernière a contesté.

Selon C______ SA, G______ a fait part à D______ être à la recherche d'un cadre supérieur pour son groupe, lequel comprenait quatre entreprises, dont A______ SA, le but étant de coordonner les sites de production et d'en développer le chiffre d'affaires.

Selon A______ SA, G______ a fait part à D______ des besoins de F______ SA, à savoir le recrutement d'un directeur général et d'un directeur financier pour le pôle horloger du groupe. Il n'avait pas été question d'un poste de directeur général de A______ SA.

e. En avril 2015, C______ SA et A______ SA ont négocié les termes d'un Confidentiality Agreement portant sur les opportunités de transactions à trouver par la première au bénéfice de la seconde.

Le 29 avril 2015, G______ a adressé à H______, administrateur de A______ SA et conseil du groupe, un courriel qu'elle a fait parvenir en copie à D______ dont la teneur littérale est reproduite ci-après: "Bonjour Maître H______, je voudrais vous présenter Madame D______ avec qui on est en train de signer le contrat de NDA [i.e. le Confidentiality Agreement précité]. La société "C______" de sa part sera en recherche des entreprises à vendre dans la domaine de l'horlogerie suisse: les marques horlogères (avec le produit moins cher que la nôtre) et les usines de la production de composants. Aussi on est intéressé dans la recherche de chef pour notre groupe horlogère qui consiste aujourd'hui de quatre compagnies et qui sera agrandi avec nouvelles acquisitions. Je vous mets en direct contact avec elle pour toutes les documents seront discuté et signé sur la convenance de deux cotés".

Mis à part le Confidentiality Agreement précité signé le même jour par H______, les relations professionnelles des parties n'ont été formalisées par aucun contrat écrit.

f. Par courriel du 1er juin 2015, C______ SA a présenté à A______ SA un candidat (K______) pour un poste de "responsable-coordinateur technique pour [ses] manufactures" en y joignant ses C______, avec la mention suivante bien visible: "PS Egalement, nos conditions générales d'engagement (en cas de signature de contrat de travail avec un de nos candidats)".

Le 10 juin 2015, G______ a sollicité l'opinion de E______ sur ce candidat qu'elle avait rencontré.

Le 16 juin 2015, G______ a fait parvenir par courriel à K______ le cahier des charges du poste, précisant que l'engagement était proposé par la compagnie actionnaire du groupe horloger. Ledit cahier des charges comportait la mention de I______ SA, filiale de F______ SA. D______ et H______ étaient également destinataires de ce message.

g. Par courriel du 14 septembre 2015, C______ SA a présenté à G______ un candidat (L______) pour un poste de "directeur financier et administratif", apte à se charger de la coordination de l'équipe finance et administration des quatre sociétés horlogères du pôle.

Le 16 septembre 2015, G______ a répondu que ce candidat lui avait plu également. Elle a sollicité qu'un rendez-vous soit organisé avec celui-ci, en indiquant ses disponibilités.

Ce candidat a été engagé par I______ SA à compter du
1er octobre 2015 en qualité de directeur administratif et financier du pôle horloger de F______ SA.

Le 29 septembre 2015, D______ a écrit à G______ ce qui suit: "L______ se réjouit de rejoindre votre Groupe et de faire partie de votre team. Je vous remercie pour la confiance témoignée sur cette recherche et reste à votre disposition pour tout projet de développement sur vos activités et vos recherches".

G______ a répondu le 1er octobre 2015 que L______ avait débuté son activité, priant D______ de préparer une facture, afin de lui payer ses services.

Le 1er octobre 2015, C______ SA a adressé à I______ SA une note d'honoraires de 42'525 fr. TTC, accompagnée de ses C______, en lien avec l'engagement de L______.

Aux termes de cette note, les honoraires étaient calculés selon les C______ sur une rémunération annuelle de 150'000 fr. (au prorata sur 2015), à savoir 9'375 fr.,
et de 160'000 fr. (au prorata sur 2016), à savoir 30'000 fr., soit au total
39'375 fr. HT.

M______, employée de C______ SA, entendue en qualité de témoin par le Tribunal, a déclaré être le "bras droit" de D______ depuis 2008. G______ avait tenté de négocier le montant de la note précitée. D______ lui avait indiqué qu'un geste commercial serait éventuellement envisagé pour le second candidat placé.

La note d'honoraires a été réglée par A______ SA le 10 novembre 2015.

G______ a allégué n'avoir jamais reçu les C______ jusqu'à la réception de la facture concernant L______. Le montant de celle-ci lui était apparu trop élevé. En général, le recrutement coûtait 30% du salaire annuel. Cela étant, malgré les tarifs élevés de C______ SA et forte d'une promesse de rabais sur la prochaine facture, elle avait accepté de continuer à travailler avec D______ pour le second poste vacant de directeur général du pôle horloger auprès de F______ SA, dont A______ SA était une filiale, étant précisé "qu'à ce moment-là" elle ne cherchait pas de directeur général pour A______ SA.

h. C______ SA ne disposait d'aucun document écrit décrivant le poste du second cadre supérieur qu'elle a été chargée de recruter pour G______.

Selon M______, la mission était floue. Dans un premier temps, il s'agissait de recruter un responsable de production, puis dans un second temps un responsable "orienté business". Plusieurs candidats avaient été recherchés par D______, notamment K______. Le profil de celui-ci était "orienté production" et le processus de son recrutement était allé loin. Sa candidature avait été abandonnée au profit d'une recherche intense de candidats "orientés business" par le biais de la base de données existante et par l'activation des réseaux d'D______.

i. Par courriel du 21 septembre 2015, C______ SA a communiqué des informations à G______ concernant un candidat (N______) que celle-ci allait rencontrer en ses bureaux la même semaine à neuf heures. Cet entretien était prévu dans la perspective d'un investissement par le rachat de modèles de montres et celle d'un engagement du candidat comme responsable du "business development auprès de [ses] manufactures".

j. C______ SA a également fait parvenir à A______ SA des informations sur un autre candidat (O______), avec lequel elle avait été en contact notamment en septembre 2015 et dont le CV fait apparaître un profil "orienté production".

k. D______ a exposé avoir contacté son neveu et employé de C______ SA avant les faits litigieux, P______, lorsqu'elle avait reçu cette mission. Celui-ci lui avait transmis les coordonnées de Q______, lequel ne figurait pas dans la base de données de C______ SA, était employé par la manufacture R______ SA et à la recherche d'une opportunité professionnelle. Elle avait pris contact avec celui-ci en octobre 2015.

P______, entendu en qualité de témoin par le Tribunal, a indiqué connaître un grand nombre de personnes dans le domaine de l'horlogerie, dont Q______ depuis plus de vingt ans. Lorsqu'il avait croisé celui-ci entre août et octobre 2015, il lui avait semblé qu'il cherchait du travail. Il avait alors pensé le mettre en relation avec D______, qui cherchait un cadre pour développer les aspects commerciaux d'une petite société horlogère. Il avait communiqué aux précités leurs coordonnées respectives.

Q______, entendu en qualité de témoin par le Tribunal le
13 novembre 2017, employé de A______ SA du 7 février 2016 au 30 novembre 2017, a déclaré avoir contacté D______ quelque temps avant de quitter
R______ SA en septembre ou novembre 2015 car il était à la recherche d'une opportunité professionnelle. Les coordonnées de D______ lui avaient été transmises par le neveu de celle-ci.

l. Le 26 octobre 2015, D______ a rencontré Q______ pour la première fois dans ses locaux durant trente minutes à une heure. Elle n'était pas encore en possession de son CV. M______ a exposé qu'un problème était survenu en lien avec l'ouverture du CV du candidat transmis par SMS.

Q______ a déclaré au Tribunal avoir communiqué à C______ SA son CV avant et/ou pendant l'entretien. D______ lui avait proposé un poste chez S______ qu'il avait refusé, puis un poste de cadre supérieur auprès de A______ SA, qu'il avait également refusé, faute de retenir son intérêt, ce dont il avait fait part à D______ à l'issue de l'entretien. Il estimait que A______ SA était une "trop petite marque", précisant qu'il ne connaissait alors pas G______.

Selon D______, Q______ ne lui avait pas fait part de son manque d'intérêt pour le poste auprès de A______ SA. Il lui avait au contraire immédiatement fait parvenir son CV après leur entretien.

m. D______ a allégué avoir soumis cette candidature à G______ "très peu de temps après" cette rencontre. Elle a précisé que le CV de Q______ avait été adressé à celle-ci à deux reprises, dont le
4 novembre 2015. Il avait également été déposé de façon discrète par ses soins à l'occasion d'une visite dans les locaux de A______ SA en lien avec la candidature de N______.

G______ a allégué que D______ ne lui avait pas soumis la candidature de Q______ avant le 4 novembre 2015.

M______ a déclaré devant le Tribunal que le CV de Q______ avait été adressé à A______ SA. Elle ne pouvait préciser si elle-même ou sa collègue, T______, s'en était chargée.

n. Le départ de Q______ de R______ SA a été annoncé dans un communiqué de presse du 3 novembre 2015 à 20 heures.

o. G______ a allégué avoir appris ce départ par les réseaux sociaux le 3 novembre 2015. Elle ne connaissait pas personnellement Q______, mais en avait entendu parler. Elle souhaitait connaître les motifs de son départ de R______ SA.

Elle a déclaré avoir, dans ce but, demandé le 3 novembre 2015 par téléphone à D______ de lui organiser un rendez-vous avec lui. Elle avait fait appel à celle-ci afin qu'elle l'introduise auprès de Q______ pour des raisons culturelles. Elle n'était pas intéressée par la candidature de Q______.

D______ a allégué que G______ ne lui avait pas fait part d'une intention de rencontrer Q______ avant qu'elle-même ne lui soumette la candidature de celui-ci. Elle avait "provoqué" la rencontre qui avait eu lieu entre G______ et Q______. Elle n'avait pas le souvenir d'avoir eu des contacts avec celle-ci et en particulier d'avoir été sollicitée pour organiser ladite rencontre. Elle n'avait échangé que par courriels avec G______. Celle-ci avait dû écrire à C______ SA pour organiser cette rencontre et elle-même avait dû déléguer cette tâche à son assistante qui avait dû communiquer aux intéressés leurs numéros de téléphone respectifs. Elle a admis qu'il y avait eu un "moment de flottement".

M______ a indiqué au Tribunal que G______ avait contacté D______ pour la mandater afin d'organiser une réunion entre Q______ et elle-même.

p. Selon Q______, après leur entretien du 26 octobre 2015, D______ l'avait contacté pour lui demander si elle pouvait transmettre son numéro de téléphone à G______, qui l'appellerait pour fixer un déjeuner. Il avait le souvenir de ne pas avoir été "très chaud", mais ne pas avoir pour habitude de refuser un déjeuner.

Le 4 novembre 2015, à 15 heures 22, G______ a reçu un SMS de D______ l'informant que Q______ se réjouissait de faire sa connaissance lors d'un rendez-vous qui aurait lieu le 6 novembre 2015 à midi, tout en lui transmettant le numéro de téléphone de celui-ci.

Le 4 novembre 2015 à 15 heures 30, D______ a transmis par SMS à Q______ le numéro de téléphone de G______.

Le même jour, à 16 heures 04, Q______ a écrit à D______ pour la remercier "infiniment pour cette introduction", ajoutant qu'il ne manquerait pas de revenir à elle après ce déjeuner.

Le même jour, à 16 heures 11, Q______ a fait parvenir à C______ SA le communiqué de presse du 3 novembre 2015, annonçant qu'il quittait R______ SA.

Le même jour, à 17 heures 08, D______ a demandé à Q______ s'il souhaitait qu'elle transmette ce communiqué à G______.

Puis, à 18 heures 25, C______ SA (T______) a adressé un courriel à G______, dans lequel elle mentionnait lui adresser à nouveau le CV de Q______ en vue de son entrevue avec celui-ci le 6 novembre (il s'agissait d'un CV sur papier à en-tête de C______ SA). Ledit courriel contenait une description du parcours professionnel de Q______ et une coupure de presse annonçant son départ de R______ SA avant fin 2015.

Le lendemain, soit le 5 novembre 2015, à 12 heures 16, G______ a répondu: "Chère D______, Je n'ai pas besoin de CV de
M. Q______ (sic). J'ai quelques questions à discute avec
(sic). On a beaucoup des amies communs, mais j'ai préféré demander toi d'organiser cette rencontre (sic). Je t'embrasse, U______".

q. Selon G______, lors du déjeuner en question, elle avait l'intention non pas d'engager Q______, mais d'obtenir des informations.

Q______ a quant à lui déclaré que ledit déjeuner avait pour but de le convaincre de rejoindre A______ SA en qualité de directeur général, ce qu'il avait refusé.

r. A la fin du mois de novembre 2015, G______ et E______ ont échangé des courriels, dans lesquels ils évoquaient des possibilités de collaboration.

Selon G______, lorsqu'elle avait rencontré E______, tous deux n'avaient pas parlé de Q______. Par la suite, ils avaient listé les problèmes auxquels elle était confrontée. E______ lui avait conseillé de changer une partie de l'équipe et lui avait proposé la candidature de Q______ pour "reprendre A______ SA".

E______, directeur général du pôle horloger du groupe de 2016 à novembre 2017, entendu en qualité de témoin par le Tribunal, a déclaré connaître Q______ depuis 2003 ou 2004. Celui-ci avait des compétences "orientées marketing et commerce", complémentaires aux siennes. Il n'avait pas le souvenir des circonstances du premier contact avec Q______. Lorsque le "projet A______ SA" était devenu concret, il avait été en mesure d'en parler au précité, qu'il savait sur le départ de R______ SA. Il a ajouté ignorer si un précédent contact entre Q______ et G______ avait déjà eu lieu et si une précédente offre avait été faite à celui-ci de rejoindre A______ SA. Il n'avait jamais rencontré D______ ni un représentant de C______ SA.

Q______ a déclaré avoir été contacté par E______ après son entretien avec G______. Le précité lui avait demandé s'il serait intéressé à rejoindre A______ SA s'il prenait lui-même une part active au projet. Q______ a exposé qu'il avait alors pu entrevoir une issue positive aux discussions, vu la complémentarité de leurs compétences, lui-même étant capable de vendre des montres et E______ de les produire.

Le 11 décembre 2015, G______ a informé E______ qu'elle verrait Q______ le 17 décembre. Elle lui faisait part de pistes de réflexion, avec une liste des problèmes internes du groupe et les formes possibles d'organisation et de collaboration.

Q______ a indiqué au Tribunal qu'après plusieurs semaines de discussions, un accord avait pu être trouvé, en décembre 2015.

Selon E______, le fait de rejoindre A______ SA à deux avait été un élément décisif dans l'acceptation du poste par Q______. Ils avaient signé ensemble le même jour leur contrat de travail avec A______ SA, afin d'être certains de rejoindre ensemble la société.

s. En janvier 2016, Q______ a été engagé par A______ SA à compter du
7 février 2016 moyennant une rémunération de 300'000 fr. par an, plus bonus.

t. Q______ a informé D______ de son engagement par A______ SA. Il a déclaré au Tribunal l'avoir fait parce que c'était elle qui lui avait proposé le poste - qu'il avait refusé dans un premier temps, puis accepté - et grâce à elle qu'il était entré en contact avec G______.

P______ a déclaré que lorsqu'il avait croisé Q______ quelque temps plus tard, ce dernier l'avait remercié de l'avoir mis en contact avec D______, ledit contact ayant été efficace puisqu'il avait été engagé.

u. Entre février et avril 2016, un repas a été organisé à la demande de G______ en lien avec l'engagement de Q______ pour remercier D______, repas auquel les trois précités ont participé.

Q______ a déclaré devant le Tribunal que lorsqu'il s'était retrouvé seul avec D______, celle-ci lui avait demandé le montant de son salaire, information qu'il lui avait alors communiquée. Il avait compris qu'un litige existait entre les parties, car D______ lui avait indiqué ne pas vouloir que G______ "s'en sorte" avec un repas.

D______ a allégué se souvenir avoir été invitée à un repas par G______ et Q______ pour fêter l'engagement de ce dernier, suite au limogeage du précédent directeur général de A______ SA intervenu la veille, et la remercier de les avoir mis en contact. Q______ lui avait fait part du fait que E______ le rejoindrait au sein de A______ SA pour le volet industriel, ce qui le mettait plus à l'aise dans ce projet.

v. Le 24 février 2016, C______ SA a adressé à I______ SA une note d'honoraires de 64'800 fr. TTC, accompagnée de ses C______, en lien avec l'engagement de Q______ en qualité de directeur général « business development ». Cette note a également été adressée le 24 mars 2016 à A______ SA.

Les honoraires étaient calculés sur une rémunération annuelle de 300'000 fr., à savoir 75'000 fr. (25%), sous déduction d'une "remise amicale" de 15'000 fr.

Selon M______, le calcul avait été effectué sur la base du salaire indiqué par Q______ et en tenant compte du geste commercial convenu.

w. Par acte du 3 novembre 2016, C______ SA a saisi le Tribunal d'une demande à l'encontre de A______ SA tendant au paiement de 64'800 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 1er février 2016 "à titre d'honoraires dus dès l'embauche du candidat" et de 1'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 5 avril 2016 à titre d'honoraires d'avocat antérieurs à l'ouverture de la procédure ainsi qu'au prononcé de la mainlevée définitive au commandement de payer notifié le 13 octobre 2016.

A______ SA a conclu au déboutement de C______ SA.

EN DROIT

1.             1.1 Selon l'art. 308 CPC, l'appel est recevable contre les décisions finales de première instance (al. 1 let. a) lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (al. 2).

La valeur litigieuse étant, en l'espèce, supérieure à 10'000 fr., la voie de l'appel est ouverte.

L'appel, écrit et motivé, a été introduit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 311 al. 1, 142 al. 1, 143 al. 1 et 145 al. 1 let. b CPC). Il est ainsi recevable.

1.2 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

2. Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

En l'espèce, la pièce nouvelle produite par l'intimée est sans incidence sur l'issue du litige, de sorte que point n'est besoin de statuer sur sa recevabilité.

3.             L'appelante reproche au premier juge d'avoir retenu l'existence d'un contrat de courtage d'indication conclu entre les parties portant sur l'engagement d'un directeur pour A______ SA. Sa thèse consiste à dire que ce contrat avait pour objet les postes de directeur financier du groupe et de directeur du pôle horloger du groupe. Elle admettait tout au plus avoir eu recours à l'intimée, à titre amical, pour être introduite auprès du candidat qu'elle avait repéré elle-même. Il appartenait à l'époque à l'intimée de lui spécifier que ce service qui lui était demandé était rendu à titre onéreux.

3.1.1 A teneur de l'art. 1 CO, le contrat est parfait lorsque les parties ont, réciproquement et d'une manière concordante, manifesté leur volonté (al. 1). Cette manifestation peut être expresse ou tacite (al. 2).

Tant pour déterminer si un contrat a été conclu que pour l'interpréter, le juge doit rechercher la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices (ATF 132 III 268 consid. 2.3.2, 626 consid. 3.1; 131 III 606 consid. 4.1). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 118 II 365 consid. 1; 112 II 337 consid. 4a). L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait
(ATF 118 II 365 consid. 1; arrêts du Tribunal fédéral 4A_508/2016 du
16 juin 2017 consid. 6.2, non publié aux ATF 143 III 348; 4A_98/2016
du 22 août 2016 consid. 5.1; 4A_608/2016 du 30 mai 2017 consid. 2.4). Si sa recherche aboutit à un résultat positif, le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises (arrêt du Tribunal fédéral 4A_155/2017 du
12 octobre 2017 consid. 2.3).

Des conditions générales sont applicables uniquement si les parties ont convenu, expressément ou par actes concluants, de les incorporer à leur contrat (118 II 295 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_548/2013 du 31 mars 2014 consid. 3.3.1).

3.1.2 En vertu de l'art. 412 al. 1 CO, le courtage est un contrat par lequel le courtier est chargé, moyennant un salaire, soit d'indiquer à l'autre partie l'occasion de conclure une convention (courtage d'indication), soit de lui servir d'intermédiaire pour la négociation d'un contrat (courtage de négociation).

La fonction économique du courtage est de faciliter les opérations commerciales par l'intervention du courtier, qui, en raison de son expérience dans un domaine particulier s'entremet entre deux ou plusieurs parties qu'il met en rapport en vue de la conclusion d'une affaire. L'action du courtier indicateur consiste à indiquer un partenaire avec qui le mandant peut conclure un contrat, et celle du courtier négociateur à conduire les négociations avec le tiers pour le compte du mandant. La pratique distingue par ailleurs un troisième type de contrat de courtage, qui n'est pas prévu par la loi; il s'agit du courtage de présentation. L'activité de ce dernier est d'amener un tiers à entrer en relation avec le mandant en vue de négocier un contrat. Les parties sont libres de cumuler les types d'activités qui peuvent être déployées par le courtier. Dans la pratique, les limites entre les trois types de contrat de courtage sont fluctuantes (Rayroux, Commentaire romand, Code des Obligations I, 2ème éd. 2012, n. 3 et 4 ad art. 412 CO).

Aucune forme particulière ne doit être respectée (Rayroux, op. cit., n. 16
ad art. 412 CO). Le contrat peut être passé expressément ou par actes concluants (ATF 131 III 268 consid. 5.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_45/2010 du
25 mars 2010 consid. 2.2).

L'activité du courtier peut n'être qu'occasionnelle, il suffit notamment d'un seul acte d'indication. Quant au caractère onéreux, seul le principe d'une rémunération doit être prévu, que ce soit de manière expresse ou par actes concluants, et peut même l'être après la conclusion du contrat principal (Tercier/Bieri/Carron, Les contrats spéciaux, 5ème éd. 2016, n. 4946, 4948).

3.2.1 En l'espèce, il n'est pas contesté que, comme l'a retenu à juste titre le Tribunal, les parties étaient liées par un contrat de courtage d'indication portant sur la recherche, l'indication et la présentation de candidats visant à pourvoir des postes de cadres supérieurs au sein du pôle horloger du groupe composé de quatre sociétés, dont A______ SA.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, les parties n'avaient pas la réelle et commune intention de limiter l'objet de ce contrat à des postes de cadres supérieurs prédéfinis précisément quant à leur titre, leur cahier des charges et/ou l'entité du groupe à laquelle ils seraient rattachés. D'ailleurs, aucun cahier des charges ni descriptif des postes n'a été transmis à l'intimée. Ces précisions, en tant qu'elles auraient été fixées au préalable et de façon définitive, ne revêtaient pas aux yeux des parties le caractère d'éléments essentiels du contrat.

En effet, d'une part, l'organisation et la structure du groupe étaient, à l'époque des faits litigieux, en phase de réflexion et d'évolution, ce qui découle de plusieurs éléments du dossier, notamment la volonté d'acquérir de nouvelles entités et les discussions en cours entre G______ et E______. L'appelante fait d'ailleurs valoir ne pas avoir été à la recherche d'un directeur pour A______ SA, tout en admettant l'avoir été en définitive. Elle a ensuite proposé ce poste à Q______, comme l'avait d'ailleurs fait précédemment l'intimée, et l'a en outre finalement repourvu.

D'autre part, les entités concernées faisaient partie du même groupe, A______ SA étant en particulier la filiale de F______ SA. Elles étaient détenues par les mêmes ayants droit économiques et dirigées par les mêmes protagonistes.

Il en est résulté, d'ailleurs, un "flou" dans la mission confiée et une modification des profils recherchés ("production" ou "business"). Par ailleurs, l'intimée mentionnait dans ses courriels à l'appelante des postes à pourvoir dans "[ses] manufactures", sans autre précision. Est significatif à cet égard également que le candidat K______ se soit vu communiquer le cahier des charges et le nom de l'employeur non pas au début de la phase de recrutement par l'intimée, mais dans le courant de celle-ci par l'appelante.

Au vu de ces éléments, il convient de retenir que la réelle et commune intention des parties était de conclure un contrat de courtage d'indication et de présentation portant sur la recherche, l'indication et la présentation de cadres supérieurs pour le groupe détenu par F______ SA, sans autre précision, si ce n'est une orientation générale du profil recherché sujette à modifications. L'attribution des candidats présentés à un poste déterminé au sein du groupe pouvait relever d'une décision ultérieure de l'appelante, qui dépendrait de la structure du groupe à ce stade, des réflexions en cours à ce sujet et des négociations intervenues avec le candidat concerné.

Ce contrat conclu entre les parties couvrait donc bien la candidature de Q______ et le poste qui a fait l'objet de son contrat d'engagement, à savoir celui de directeur général de A______ SA.

L'appelante soutient d'ailleurs elle-même avoir le 3 novembre 2015 sollicité l'intimée pour se voir présenter Q______, qu'elle a rencontré afin de tenter de le convaincre d'accepter le poste de directeur général de A______ SA. Ce dernier point doit en effet être retenu, malgré les allégations contraires de l'appelante, sur la base des déclarations du précité et du fait que cet engagement a effectivement eu lieu.

Cette demande, intervenue dans le cadre de l'exécution du contrat, confirme, si besoin est, l'existence de celui-ci dans les termes définis ci-dessus. Il en est de même du fait que l'intimée a également proposé au candidat le poste de directeur général de A______ SA le 26 octobre 2015.

Quoi qu'il en soit, l'issue du litige ne serait pas différente à suivre la thèse de l'appelante, selon laquelle le contrat conclu lors de la rencontre des parties ne visait pas le poste de directeur général de A______ SA. En effet, il conviendrait de retenir que la demande de l'appelante à l'intimée du 3 novembre 2015 tendant à se voir présenter Q______ était en soi constitutive de la manifestation d'une offre de conclure un contrat de courtage de présentation de ce candidat pour le poste précité. Dans la mesure où cette offre a été acceptée par l'intimée, il y aurait lieu d'en déduire qu'un contrat de courtage de présentation ayant cet objet a, à tout le moins, été conclu à ce stade entre les parties.

Partant, le grief de l'intimée consistant à dire que le contrat conclu entre les parties ne visait pas le poste de directeur général de A______ SA est infondé.

3.2.2 Quant au caractère onéreux du contrat, le premier juge a, avec raison, retenu qu'une rémunération de l'intimée avait été convenue par actes concluants et que celle-ci consistait dans le tarif résultant des C______, lesquelles faisaient partie intégrante du contrat.

En effet, dans le cadre de l'exécution du contrat, ces C______ ont été adressées à l'appelante à deux reprises à tout le moins avant la présentation de Q______ à celle-ci par l'intimée. Par ailleurs, elles ont été discutées entre les parties et appliquées lors de la première rémunération due à l'intimée conformément au contrat. Enfin, l'appelante a elle-même déclaré vouloir ensuite continuer à travailler avec l'intimée malgré les tarifs, élevés selon elle, résultant des C______.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, il ne saurait être déduit du seul fait qu'elle a indiqué à l'intimée, après l'avoir reçu, ne pas avoir besoin du CV de Q______ que son intention n'était pas de conclure un contrat à titre onéreux. Il en est de même de son indication selon laquelle elle aurait tout aussi bien pu solliciter les services d'amis communs, puisque ce n'est précisément pas ce qu'elle a fait.

Enfin, suivre la thèse de l'appelante (contrat de courtage de présentation conclu le 3 novembre 2015; cf. consid. 3.2.1 supra) ne changerait rien à cette conclusion, étant relevé que la communication du CV du candidat ne ferait de toute façon pas partie de l'activité à fournir par le courtier dans le cadre d'un tel contrat.

Partant, le grief de l'appelante consistant à dire que l'activité de l'intimée a été fournie à titre gratuit est infondé.

4. L'appelante fait par ailleurs grief au premier juge d'avoir considéré que l'intimée avait désigné la première le candidat Q______, de sorte que la condition du lien de causalité était réalisée. Selon l'appelante, D______ avait bien eu un contact préalable avec celui-ci, mais il était resté sans résultat. Sans que l'intimée ne lui ait au préalable indiqué cette candidature, G______ avait pris, de manière indépendante et par coïncidence, l'initiative de solliciter D______ le 3 novembre 2015 afin que cette dernière facilite un premier contact avec lui. L'appelante soutient en outre que le Tribunal a retenu à tort que l'activité de E______ n'était pas de nature à rompre le lien de causalité. Le nouveau contact pris avec Q______ par G______ était à l'origine, avec l'appui subséquent de E______, de l'engagement du précité. L'activité de l'intimée s'était résumée à la transmission d'un numéro de téléphone et n'avait joué aucun rôle causal dans la conclusion du contrat de travail.

4.1 Selon l'article 413 al. 1 CO, le courtier a droit à son salaire dès que l'indication qu'il a donnée ou la négociation qu'il a conduite aboutit à la conclusion du contrat.

Le courtier est en principe appelé à développer une activité factuelle, consistant à trouver un amateur qui se portera contractant du mandant. Pour prétendre à un salaire, il doit prouver, d'une part, qu'il a agi et, d'autre part, que son intervention a été couronnée de succès. Il faut donc que le contrat que le mandant cherchait à obtenir ait été conclu et qu'il existe un lien de causalité entre l'activité du courtier et la conclusion du contrat (cf. infra consid. 4.2) (arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2017 du 29 novembre 2017 consid. 2.1 et les références citées).

4.2 En ce qui concerne le lien de causalité, il n'est pas nécessaire que la conclusion du contrat principal soit la conséquence immédiate de l'activité fournie. Il suffit que celle-ci ait été une cause même éloignée de la décision du tiers satisfaisant à l'objectif du mandant. La jurisprudence se contente d'un lien psychologique entre les efforts du courtier et la décision du tiers, lien qui peut subsister malgré une rupture des pourparlers. A cet égard, il importe peu qu'un autre (nouveau) courtier ait également été mis en oeuvre. En pareil cas, la condition suspensive de l'art. 413 al. 1 CO n'est défaillante que si l'activité du premier courtier n'a abouti à aucun résultat, que les pourparlers consécutifs à cette activité ont été définitivement rompus et que l'affaire est finalement conclue, avec le contractant que le premier courtier avait présenté, sur des bases toutes nouvelles. L'exigence d'un lien psychologique entre les efforts du courtier et la décision du tiers n'a véritablement de sens que dans le courtage de négociation, puisque, dans le courtage d'indication, le courtier se limite à communiquer au mandant le nom de personnes intéressées à conclure et n'exerce pas d'influence sur la volonté de celles-ci (arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2017 déjà cité
consid. 2.3.1 et les références citées).

En matière de courtage d'indication, il incombe au courtier, s'il entend recevoir une rémunération, d'indiquer à son mandant une occasion de conclure qui lui était inconnue jusque-là. Ainsi, la conclusion du contrat principal est dans un rapport de causalité avec l'activité de courtage si le courtier prouve qu'il a été le premier à désigner, comme s'intéressant à l'affaire, la personne qui a acheté par la suite et que c'est précisément sur la base de cette indication que les parties sont entrées en relation et ont conclu le marché. En cas de rupture des pourparlers (menés par le premier courtier indicateur), puis d'une reprise de ceux-ci (par un nouveau courtier, mais entre les mêmes parties et sur la même affaire) et de la conclusion d'un contrat, il faut alors distinguer: (a) si les parties ont repris contact (et les pourparlers) en raison des relations précédemment tissées (et dont le premier courtier était l'instigateur), le lien de causalité entre l'activité déployée par celui-ci et la conclusion du contrat est maintenu; (b) si la reprise des pourparlers entre les parties trouve son origine dans l'intervention ultérieure et indépendante du nouveau courtier, le lien de causalité entre l'activité déployée par le premier courtier et la conclusion du contrat fait alors défaut. Le temps écoulé entre les derniers efforts du (premier) courtier et la conclusion du contrat principal est en soi un fait dénué de portée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2017 déjà cité consid. 2.3.2 et les références citées).

4.3 En l'espèce, il n'est pas contesté que l'intimée a la première, par le biais de son réseau, repéré et rencontré le candidat Q______ ainsi que proposé à celui-ci un poste de cadre supérieur auprès de A______ SA. Il n'est pas contesté non plus que l'intimée a, le 4 novembre 2015, communiqué à l'appelante et au candidat leurs numéros de téléphone respectifs en vue de leur première rencontre, dès lors qu'ils ne se connaissaient pas, et a transmis à la première les informations utiles sur le second, y compris le CV que celui-ci lui avait fourni, sur papier à en-tête de son entreprise.

Se fondant sur ces éléments, le Tribunal a à juste titre considéré que l'appelante avait démontré avoir été la première à désigner le candidat et que c'était précisément sur cette base que l'appelante et le précité avaient conclu le contrat de travail, de sorte que, le lien de causalité étant réalisé, la rémunération était due.

Faute de le démontrer, l'appelante soutient en vain avoir, le 3 novembre 2015, avant que l'intimée ne lui désigne ce candidat, découvert seule par le biais des réseaux sociaux la disponibilité de celui-ci et l'intérêt qu'il présentait pour le groupe ainsi que sollicité le même jour la précitée afin qu'elle organise une rencontre entre elle-même et Q______.

Cette version des faits, qui n'est pas étayée, ne convainc pas. L'appelante devait savoir le 3 novembre 2015 que l'intimée avait rencontré Q______, puisqu'elle lui a demandé d'organiser une rencontre avec celui-ci. A défaut, elle n'aurait pas manqué, en vue d'éviter de devoir payer les honoraires de l'intimée qu'elle considérait élevés, de solliciter à cette fin les amis qu'elle partageait prétendument avec le précité ou E______, qui connaissait ce dernier et avec lequel elle menait précisément des réflexions sur la structure et les dirigeants du groupe.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, le seul fait que Q______ a refusé l'offre formulée par l'intimée le 26 octobre 2015 ne suffit pas à démontrer que celle-ci n'aurait pas, la première, désigné ce candidat. Elle a très bien pu informer l'appelante qu'à ce stade il n'était pas intéressé, ce qui n'empêchait pas celle-ci de le rencontrer pour tenter de le convaincre, comme elle l'a d'ailleurs fait une seconde fois, avec l'aide de E______, à la suite du second refus de Q______ exprimé le 6 novembre 2015.

Quoi qu'il en soit, l'issue du litige ne serait pas différente si l'on devait retenir la thèse de l'appelante, selon laquelle l'intimée ne lui aurait pas désigné Q______ avant qu'elle-même ne la sollicite le 3 novembre 2015. En effet, comme il a été exposé (cf. consid. 3.2.1 supra), il y aurait lieu de considérer qu'un contrat de courtage de présentation a été conclu à cette date. L'intimée aurait par ailleurs exécuté l'activité à laquelle elle aurait été tenue aux termes de ce contrat, à savoir amener Q______ à entrer en relation avec l'appelante en vue de la négociation du contrat de travail. Celui-ci ayant ensuite été signé, cette intervention aurait été couronnée de succès, de sorte que la condition du lien de causalité serait réalisée.

Par ailleurs, comme l'a retenu avec raison le Tribunal, le fait que Q______ a persisté dans son refus de l'offre le 6 novembre 2015 et qu'il a ensuite été contacté par E______ pour des entretiens complémentaires décisifs ne saurait être considéré comme une rupture définitive des pourparlers suivie d'une négociation sur des bases toutes nouvelles.

En effet, l'appelante a souhaité convaincre Q______ après son refus du
26 octobre 2015, comme elle a persisté à vouloir le convaincre, cette fois avec l'aide décisive de E______, après son refus du 6 novembre 2015. Ces démarches de l'appelante, sans puis avec l'aide de E______, ont constitué la phase continue de négociation ayant suivi l'indication et/ou la présentation faite par l'intimée en exécution du contrat de courtage.

Comme l'a également retenu avec raison le Tribunal, ce lien de causalité entre l'intervention de l'intimée et la conclusion du contrat de travail est confirmé par les actes et déclarations de l'intéressé. Celui-ci a remercié D______ de son intervention et l'a tenue informée du suivi de la négociation ainsi que de son dénouement. Il a également remercié P______ et a fait part à celui-ci ainsi qu'au Tribunal du fait que c'était grâce à l'intimée qu'il avait été engagé. Le repas auquel D______ a été conviée à la demande de G______ pour fêter l'engagement de Q______ confirme également l'absence d'interruption du lien de causalité.

Enfin, les critères du temps consacré et des efforts déployés ne sont pas pertinents dans le cadre d'un contrat de courtage d'indication et de présentation. Il convient néanmoins de relever que même à suivre la thèse de l'appelante, dont il a été déduit un contrat de courtage de présentation à défaut d'indication, l'activité à rémunérer ne se serait pas limitée à la transmission d'un numéro de téléphone. En effet, en présence d'un candidat réputé dans le milieu de la haute horlogerie, d'une petite entreprise horlogère cliente et du défaut d'intérêt a priori porté par le premier à la seconde, l'activité nécessaire au repérage perd de son importance par rapport à celle nécessaire à la mise en relation. L'intimée n'aurait ainsi pas été en mesure de rendre possible la mise en relation litigieuse sans son expérience, sans avoir connu et contacté P______, ni sans avoir rencontré Q______ en ses locaux de façon professionnelle. L'appelante en était d'ailleurs consciente, puisqu'elle a précisément fait appel aux services de l'intimée à cette fin.

Les griefs de l'appelante relatifs au lien de causalité sont par conséquent infondés.

Partant, le jugement entrepris sera confirmé.

5. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 2'600 fr. (art. 2, 17 et 35 RTFMC) et mis à la charge de l'appelante qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils sont entièrement compensés avec son avance de frais, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

L'intimée n'ayant pas produit de note d'honoraires de son conseil, les dépens qui lui sont dus par l'appelante (art. 106 al. 1 CPC) seront fixés à 3'500 fr., TVA et débours compris (art. 84, 85 et 90 RTFMC; art. 23 al. 1, 25 et 26 LaCC), compte tenu notamment des deux écritures rédigées.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 12 septembre 2018 par A______ SA contre le jugement JTPI/10601/2018 rendu le 29 juin 2018 par le Tribunal de première instance dans la cause C/7348/2016-8.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de l'appel à 2'600 fr., les met à la charge de A______ SA et les compense avec l'avance de frais fournie par celle-ci, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ SA au paiement de 3'500 fr. à C______ SA, à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

Le président :

Ivo BUETTI

 

La greffière :

Camille LESTEVEN

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.