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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/12053/2020

AARP/89/2023 du 17.03.2023 sur JTDP/850/2022 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : EXCÈS DE VITESSE
Normes : LCR.90.al2
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/12053/2020 AARP/89/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 10 mars 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, comparant par Me François MEMBREZ, avocat, WAEBER AVOCATS, rue Verdaine 12, case postale 3647, 1211 Genève 3,

appelante,

 

contre le jugement JTDP/850/2022 rendu le 12 juillet 2022 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 12 juillet 2022, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnue coupable de violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 de la loi fédérale sur la circulation routière [LCR] cum art. 26, 27 et 32 LCR, art. 4 et 4a de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière [OCR], art. 22 de l'ordonnance sur la signalisation routière [OSR]) et l'a condamnée à une peine privative de liberté de huit mois, avec sursis et un délai d'épreuve de deux ans, ainsi qu'aux frais de la procédure.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à son acquittement, ainsi qu'à l'octroi d’une indemnité, pour ses frais de défense en première instance et en appel.

b. Selon l'acte d'accusation du 22 mars 2022, il est reproché à A______ d'avoir à Genève, le 20 mai 2020, à 10h04, sur la route de Jussy à la hauteur du no 116, au volant de son véhicule automobile, circulé à la vitesse de 65 km/h (marge de sécurité déduite) au lieu de 30 km/h, commettant ainsi un dépassement de la vitesse autorisée de 35 km/h.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le 20 mai 2020, à 10h04, A______ a circulé sur la route de Jussy à la hauteur du no 116, soit entre le chemin de Chantebise et le giratoire de la route de Mon-Idée, en direction de la rue Peillonnex, à 70 km/h, alors que la vitesse autorisée était limitée à 30 km/h en raison de travaux.

b. À cet endroit, la route de Jussy comporte une voie de circulation par sens de marche et est traversée de part et d'autre par un passage piéton. Dans le sens de circulation adopté par A______, elle comporte, sur la droite, un trottoir bordant des habitations, comprenant des sorties sur la route. Le tronçon en question est rectiligne.

Le jour des faits, la visibilité était bonne et la route sèche.

c. L'excès de vitesse a été constaté au moyen d'un radar, disposant d'un certificat de vérification valable et surveillé par un opérateur certifié.

d. À la police, puis devant le MP et le premier juge, A______ a reconnu avoir commis l'excès de vitesse constaté : elle pensait se trouver dans une zone limitée à 50 km/h, soutenant qu'il n'y avait plus de panneaux limitant la vitesse à 30 km/h dans son sens, contrairement à l'autre sens de marche. Elle reconnaissait que les deux voies de circulation étaient séparées d'une barrière, mais a soutenu que les travaux étaient terminés sur sa voie de circulation. Le fait qu'une autre personne se soit faite amender pour excès de vitesse démontrait que la signalisation était absente ou insuffisamment claire.

f. Selon un arrêté no 200324 du 3 avril 2020 du Département des infrastructures, des mesures d'accompagnement du chantier avaient été prises sur le tronçon en question, pour la période du 30 mars 2020 au 25 mai 2020. La signalisation et les marquages avaient été mis en place, puis entretenus et enlevés selon les instructions et sous la surveillance de l'Office cantonal des transports (OCT).

L'OCT a confirmé dans un courrier du 29 septembre 2021 que le tronçon compris entre le chemin de Chantebise et le giratoire de la route de Mon-Idée, comprenant le no 116 de la route de Jussy, était limité à 30 km/h dans les deux sens. La signalisation du chantier avait été mise en place le 30 mars 2020, avec contrôle hebdomadaire de chantier par l'OCT et vérification systématique de la signalisation par la police routière avant prises de mesures de vitesse. En cas de déficit de signalisation, l'OCT était contacté par la police routière pour y remédier, ce qui n'avait pas été le cas pour ce chantier.

g. Le rapport de renseignements de la police du 22 novembre 2022 relève que le système de mesure n'a pas fait l'objet de réparation depuis le jour de son certificat de vérification du 10 février 2020 jusqu'au jour de contrôle de vitesse en question. Des photographies des panneaux de limitations de vitesse ce jour-là ont été versées à la procédure.

À teneur du procès-verbal des mesures de vitesse, le tronçon était limité à 30 km/h pour les véhicules "venant de la direction de la route de Monniaz" et se dirigeant vers la rue de Peillonnex, et le test de fonctionnement réputé en ordre.

C. a. Après avoir obtenu le rapport de renseignement de la police du 22 novembre 2022 et refusé les réquisitions de preuve de l'appelante tendant à l'audition de B______, chef du secteur 1______ à l'OCT et de C______, dont l'un des clients avait été amendé, selon l’appelante à tort, le jour des faits sur le même tronçon, la CPAR a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Aux termes de son mémoire d'appel, A______ persiste intégralement dans ses conclusions.

Le premier juge avait ignoré ses déclarations, ainsi que le courrier électronique du chef du secteur 1______ à l'OCT du 14 avril 2021, accompagné d'un plan, au terme duquel il indiquait : "pour votre information, sur le plan, la signalisation munie d'une pastille jaune est la signalisation enlevée de cette étape. La limitation de vitesse à 30 km/h n'était donc plus d'actualité".

Par ailleurs, le procès-verbal des mesures de vitesse du 20 mai 2020 entre 8h55 et 10h04, à la hauteur du no 116 de la route de Jussy, mentionnait clairement, sous la signature de l'opérateur certifié, que le tronçon de la route de Jussy qui était à 30 km/h était celui en direction de Monniaz, mais non pas dans le sens inverse, soit en direction de l'avenue Peillonnex, qui était le sien, dès lors qu'une croix avait été apposée pour la direction de Monniaz et non pour celle de Peillonnex.

En outre, sur les photos prises de son véhicule, qui étaient les seules existantes à l'époque, ne figuraient ni travaux ni panneaux, tandis que les photos des panneaux insérées dans le rapport de renseignements avaient été composées pour les besoins de la cause.

Ces éléments démontraient que la limitation de vitesse à 30 km/h n'était plus applicable sur son tronçon au moment des faits. En roulant à 70 km/h au lieu de 50 km/h, elle ne s'était rendue coupable que d'un excès de vitesse de 15 km/h, marge déduite. La CPAR ne s'étant pas réservé la possibilité de la sanctionner sur la base de l'art. 90 al. 1 LCR, elle devait être acquittée. Cela étant, en refusant ses réquisitions de preuve, tant le TP que la CPAR avaient violé son droit d'être entendue.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel, avec suite de frais.

Il n'y avait pas lieu de s'écarter du courrier de l'OCT du 29 septembre 2021, lequel indiquait clairement que la vitesse était limitée à 30 km/h et que l'existence de la signalisation correspondante avait été vérifiée.

d. Le TP s'est intégralement référé à son jugement.

D. A______, de nationalité suisse, est née le ______ 1962. Elle est divorcée, sans enfant, et au bénéfice de rentes de l'assurance invalidité et de l'aide sociale à hauteur de CHF 3'300.- à CHF 3'400.- mensuels. Son loyer s'élève à CHF 979.- par mois et son assurance-maladie est prise en charge par le Service de prestations complémentaires.

Elle n'a pas d'antécédent judiciaire.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Aux termes de l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure de recours se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. L'art. 389 al. 3 CPP règle les preuves complémentaires. Ainsi, la juridiction de recours administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours. Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés. Cette disposition codifie, pour la procédure pénale, la règle jurisprudentielle déduite de l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) en matière d'appréciation anticipée des preuves (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1173/2016 du 7 août 2017 consid. 2.1 ; 6B_71/2016 du 5 avril 2017 consid. 2.1.3). Le magistrat peut ainsi refuser des preuves nouvelles, lorsqu'une administration anticipée de ces preuves démontre qu'elles ne seront pas de nature à modifier le résultat de celles déjà administrées (ATF 136 I 229 consid. 5.3). Ce refus d'instruire ne viole le droit d'être entendu des parties et l'art. 389 al. 3 CPP que si l'appréciation anticipée effectuée est entachée d'arbitraire (ATF 141 I 60 consid. 3.3).

2.2. L'appelante persiste dans ses réquisitions de preuve déjà présentées devant le TP.

L'audition du chef du secteur 1______ de l'OCT n'est cependant pas nécessaire au traitement de l'appel, la CPAR s'estimant suffisamment renseignée par la teneur du rapport de police versé à la procédure ainsi que par celle du courrier de l'OCT du 29 septembre 2021, dont il n'y a pas lieu de s'écarter. Pour les mêmes motifs, l'audition de C______, lequel aurait également été amendé le jour des faits, n'est pas pertinente.

Ces réquisitions seront dès lors rejetées.

3. 3.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 Cst. et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ; 138 V 74 consid. 7).

3.2.1. L'art. 27 al. 1 LCR impose aux usagers de la route de se conformer aux signes et aux marques. Ceux-ci ne sont obligatoires que s'ils sont clairs et que leur portée est aisément reconnaissable (ATF 127 IV 229 consid. 2c.aa ; 106 IV 138 consid. 3).

3.2.2. À teneur de l'art. 16 al. 2 de l'Ordonnance sur la signalisation routière (OSR), le signal "vitesse maximale" doit être observé jusqu'au signal correspondant indiquant la fin de la prescription, mais au plus jusqu'à la fin de la prochaine intersection.

3.3. L'art. 90 LCR constitue la base légale pour réprimer la violation des règles de la circulation routière (ATF 100 IV 71 consid. 1).

3.3.1. L'art. 90 al. 2 LCR sanctionne, au titre de délit, celui qui, par une violation grave d'une règle de la circulation, crée un sérieux danger pour la sécurité d'autrui ou en prend le risque.

3.3.2. Pour déterminer si une violation d'une règle de la circulation doit être qualifiée de grave au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, il faut procéder à une appréciation aussi bien objective que subjective. D'un point de vue objectif, la violation grave d'une règle de circulation au sens de l'art. 90 al. 2 LCR suppose que l'auteur ait mis sérieusement en danger la sécurité du trafic. Il y a création d'un danger sérieux pour la sécurité d'autrui non seulement en cas de mise en danger concrète, mais déjà en cas de mise en danger abstraite accrue (ATF 143 IV 508 consid. 1.3 ; 142 IV 93 consid. 3.1 ; 131 IV 133 consid. 3.2). Subjectivement, l'art. 90 al. 2 LCR exige un comportement sans scrupules ou gravement contraire aux règles de la circulation, c'est-à-dire une faute grave et, en cas d'acte commis par négligence, à tout le moins une négligence grossière. Celle-ci doit être admise lorsque le conducteur est conscient du caractère généralement dangereux de son comportement contraire aux règles de la circulation. Mais une négligence grossière peut également exister lorsque, contrairement à ses devoirs, l'auteur ne prend absolument pas en compte le fait qu'il met en danger les autres usagers, en d'autres termes s'il se rend coupable d'une négligence inconsciente. Dans de tels cas, une négligence grossière ne peut être admise que si l'absence de prise de conscience du danger créé pour autrui repose elle-même sur une absence de scrupules (ATF 131 IV 133 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_345/2019 du 18 avril 2019 consid. 2.1). Plus la violation de la règle de la circulation est objectivement grave, plus on admettra l'existence d'une absence de scrupules, sauf indice particulier permettant de retenir le contraire (ATF 142 IV 93 consid. 3.1).

3.3.3. La vitesse doit toujours être adaptée aux circonstances, notamment aux particularités du véhicule et du chargement, ainsi qu'aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité. Dans le domaine des excès de vitesse, la jurisprudence a été amenée à fixer des règles précises afin d'assurer l'égalité de traitement. Ainsi, le cas est objectivement grave au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, sans égard aux circonstances concrètes, en présence d'un dépassement de la vitesse autorisée de 25 km/h ou plus à l'intérieur des localités, de 30 km/h ou plus hors des localités et sur les semi-autoroutes dont les chaussées, dans les deux directions, ne sont pas séparées et de 35 km/h ou plus sur les autoroutes (ATF 143 IV 508 consid. 1.3).

3.4.1. En l'espèce, il est établi, et au demeurant non contesté par l'appelante, qu'elle a roulé à une vitesse de 70 km/h sur la route de Jussy, alors que, par arrêté du Département de l'infrastructure, la vitesse y était temporairement limitée à 30 km/h en raison de travaux.

Les photographies numériques du contrôle des panneaux de signalisation en place versées par la police sont datées du 22 mai 2020 à 7h, soit deux jours après l'infraction. Il ne s'agit donc pas, comme l'allègue l'appelante, d'une composition pour les besoins de la cause, mais bien de photographies originales de l'époque. Il n'est toutefois pas possible d'établir avec certitude, sur cette seule base, que le panneau était bien en place le jour des faits. Cela étant, le courrier du 29 septembre 2021 de l'OCT confirme en tant que de besoin que la vitesse était alors limitée à 30 km/h en raison des travaux et que la signalisation avait été dûment vérifiée. En outre, à teneur du procès-verbal des mesures de vitesse établi par l'opérateur certifié, la vitesse prescrite pour le tronçon à hauteur du no 116 de la route de Jussy était bien de 30 km/h. L'opérateur a coché la case correspondante aux "véhicules venant de la direction de la route de Monniaz" par opposition à celle des "véhicules fuyant la direction de l'avenue de Peillonnex". L'appelante ne peut donc être suivie lorsqu'elle allègue que cela signifierait que la voie pour se rendre en direction de l'avenue de Peillonnex n'était plus concernée par la limitation de vitesse. En effet, il est constant qu'elle n'était pas un véhicule "fuyant" ladite direction et qu'elle "venait" de la direction opposée. Force est donc de constater que l'appelante tente vainement de donner au moyen de preuve une portée qu'il n'a pas pour consolider sa thèse.

Le courrier du chef du secteur 1______ de l'OCT du 14 avril 2021 produit par l'appelante n'emporte pas non plus la conviction, dans la mesure où la période de fin de la limitation de vitesse n'y est pas clairement mentionnée, de sorte que l'on ne saurait retenir qu'elle se rapportait au jour de l'infraction. Par surabondance, il ressort du plan annexé que les limitations de vitesse auraient été supprimées dans les deux sens de la circulation, puisque marquées toutes les deux de pastilles jaunes, ce qui contredit manifestement les propos de l'appelante. En effet, bien qu'admettant devant le MP que les voies de circulation étaient séparées par une barrière en raison de travaux, elle a prétendu que ceux-ci se trouvaient uniquement sur la voie opposée. Or, à teneur des photographies versées par la police, les travaux étaient présents dans les deux sens de marche.

Pour le surplus, la police a confirmé que le contrôle s'était déroulé tout à fait normalement, selon la procédure idoine, et que l'infraction avait été bien enregistrée par le système de mesure.

Au vu de ces éléments, la Cour tient pour établie la présence d'une signalisation visible limitant la vitesse à 30 km/h, les déclarations de l'appelante ne convaincant pas.

Aussi, en circulant à 70 km/h sur le tronçon en question limité à 30 km/h, et en commettant ainsi un excès de vitesse d'au moins 35 km/h, marge de sécurité déduite, l'appelante a gravement violé une règle de la circulation routière et engendré un danger abstrait accru, dans la mesure où elle n'était pas, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, à même d'éviter qu'un accident de la circulation ne se produise pour le cas où une personne ou un obstacle imprévu serait survenu d'un côté ou de l'autre de la route. Or, cette éventualité était hautement probable en présence de travaux, d'une part, et d'un trottoir ainsi que de nombreuses sorties de véhicules bordant des habitations, d'autre part. La première condition objective de la création d'un danger sérieux pour la sécurité du trafic est réalisée.

3.4.2. Tel qu'exposé précédemment, la limitation de vitesse applicable était dûment signalée. L'appelante reconnaît avoir vu, à tout le moins, des travaux sur la voie opposée, ainsi qu'avoir circulé à 70 km/h en croyant que le tronçon était limité à 50 km/h. Ce faisant, elle était consciente qu'elle commettait déjà un important dépassement de vitesse dans une configuration des lieux pouvant impliquer la présence, notamment, de piétons ou d'ouvriers. Or, ces circonstances auraient dû l'inciter à redoubler de prudence (cf. arrêts du Tribunal fédéral 6B_672/2018 du 20 septembre 2018 consid. 1.2 et 6B_444/2016 du 3 avril 2017 consid. 1.3.2). Inattentive à la signalisation et à la présence de travaux, elle a, par une négligence grossière, à la limite du dol éventuel, adopté une vitesse excessive par rapport aux conditions de la route et fait fi des risques de danger qu'elle créait pour autrui. L'élément subjectif de l'infraction est donc également réalisé et l'appelante échoue à démontrer l'existences de circonstances particulières

Partant, le verdict de culpabilité rendu à l'encontre de l'appelante du chef de violation grave des règles de la circulation routière, au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, sera confirmé.

4. 4.1. La violation grave des règles de la circulation routière est sanctionnée par une peine privative de liberté de trois ans au plus ou par une peine pécuniaire (art. 90 al. 2 LCR).

4.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 consid. 5 et 134 IV 17 consid. 2.1).

4.3. La peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (art. 34 al. 1 CP).

4.4. La Directive B.5 édictée par le Procureur général (barème LCR) préconise le prononcé d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende pour les excès de vitesse de 33 à 34 km/h, lorsque la vitesse est limitée jusqu'à 30 km/h (hors et en localité). Dès 35 km/h de dépassement, le prévenu fait l'objet d'un acte d'accusation. Si de telles prescriptions n’ont qu'une valeur indicative, elles jouent néanmoins un rôle dans l’appréciation subjective de la faute.

Un autre facteur déterminant est la teneur de l’art. 90 al. 4 let. a LCR qui prescrit, dès 40 km/h de dépassement de la limite de 30 km/h, une peine privative de liberté d'au moins un an.

4.5. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP).

Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis – ou du sursis partiel –, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis. Celui-ci est ainsi la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185 s. ; ATF 134 IV 1 consid. 4.2.2 p. 5).

Si le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans (art. 44 al. 1 CP).

4.6. En l'espèce, la faute de l'appelante n'est pas négligeable. Elle n'a pas adapté son comportement aux particularités du tronçon, en présence d'un chantier et des risques d'accidents qu'il comporte, alors-même qu'elle avait conscience qu'elle commettait un excès de vitesse dans cette configuration, par pure convenance personnelle. Elle a été inattentive à la signalisation en place et persiste à en nier l'existence, allant jusqu'à détourner le sens des moyens de preuve pour fonder sa thèse. Sa prise de conscience est nulle, sa collaboration sans particularité. Elle ne fait l'objet d'aucun antécédent judiciaire, élément neutre.

La peine privative de liberté de huit mois, assortie du sursis et d'un délai d'épreuve de deux ans sera donc confirmée, compte tenu que seule la déduction de la marge de sécurité a permis à l'appelante d'échapper à la peine-plancher de l'art. 90 al. 3 et 4 LCR.

5. L'appelante, qui succombe, supportera les frais de la procédure envers l'État comprenant un émolument de CHF 1'500.- (art. 428 CPP et art. 14 al. 1 let. e du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale).

Vu l'issue de la procédure, il n'y a pas lieu de revoir la répartition des frais de première instance.

6. Compte tenu de ce qui précède, il n'y a pas lieu de faire droit à ses conclusions en indemnisation (art. 429 CPP a contrario).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/850/2022 rendu le 12 juillet 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/12053/2020.

Le rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 1'655.-, qui comprennent un émolument de CHF 1'500.-.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

" Déclare A______ coupable de violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR cum art. 26, 27 et 32 LCR, art. 4 et 4a OCR, art. 22 OSR).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 8 mois (art. 40 CP).

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 2 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 989.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP).

[ ]

Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.

Condamne A______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire fixé à CHF 600.-."


 

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police et au Service cantonal des véhicules.

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente :

Gaëlle VAN HOVE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'589.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

80.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'655.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'244.00