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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/17631/2019

AARP/242/2020 du 06.07.2020 sur JTDP/1744/2019 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : PLAINTE PÉNALE;MAGASIN;VIOLATION DE DOMICILE;NE BIS IN IDEM;CONCOURS RÉEL;EXPULSION(DROIT PÉNAL);IMPUTATION
Normes : CP.30.al1; CP.186; CP.51; CP.66abis
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/17631/2019AARP/242/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 6 juillet 2020

 

Entre

A______, sans domicile fixe, comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1744/2019 rendu le 11 décembre 2019 par le Tribunal de police,

 

et

C______, domiciliée c/o Société D______, ______,

E______ SA, domiciliée ______,

F______, domiciliée ______,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ a appelé du jugement du 11 décembre 2019, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté du chef de dommages à la propriété d'importance mineure (art. 144 al. 1 cum art. 172ter du code pénal suisse [CP]) et de la violation de domicile "du 21 juin 2019" (art. 186 CP), mais l'a reconnu coupable de violation de domicile (art. 186 CP), de vols d'importance mineure (art. 139 ch. 1 cum art. 172ter CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]). Le TP l'a condamné à une peine privative de liberté de 4 mois et à une amende de CHF 500.-, la peine privative de liberté de substitution étant fixée à 5 jours, a révoqué le sursis octroyé le 8 juin 2019 par le Ministère public (MP) à la peine de 90 jours-amende à CHF 10.00, sous déduction d'un jour de détention avant jugement, et expulsé A______ de Suisse pour une durée de trois ans. Le TP a par ailleurs rejeté les conclusions en indemnisation de A______ et les frais de procédure, qui ont été mis à la charge du prévenu.

b. A______ demande la constatation de la non validité des plaintes déposées par E______ SA et la F______, ainsi que de l'interdiction d'entrée du 16 mai 2019 rendue par cette dernière. Il conclut à son acquittement du chef de violation de domicile au préjudice de la F______, à la réduction de sa peine en conséquence et au maintien du sursis révoqué par le Tribunal de police, avec avertissement et prolongation du délai d'épreuve. Il conclut à la renonciation de son expulsion facultative et à la mise des frais de la procédure à la charge de l'État, lui-même devant être indemnisé pour la période non couverte par l'assistance juridique.

c. Par ordonnance pénale du 22 juin 2019 et acte d'accusation du 24 septembre 2019, il était reproché à A______ d'avoir :

- entre les 9 et 21 juin 2019, puis du 27 juin au 27 août 2019, séjourné en Suisse sans être au bénéfice des autorisations nécessaires et sous le coup d'une décision d'interdiction d'entrée en Suisse, valable du 14 juin 2019 au 13 juin 2022, notifiée le 21 juin 2019 ;

- le 21 juin 2019, dérobé des victuailles d'une valeur de CHF 11.41 dans le magasin E______, sis rue 1______, et violenté C______ en la poussant violemment au niveau de la poitrine et en saisissant son sein gauche ;

- le 27 août 2019, vers 19h00, dans l'enseigne F______ [à] G______ [GE], dérobé et endommagé des lames de rasoirs pour un montant total de CHF 22.80.

Il lui est encore reproché d'avoir, dans les circonstances décrites supra, pénétré sans droit dans l'enseigne F______ [à] G______, alors qu'il fait l'objet, depuis le 16 mai 2019, d'une décision d'interdiction d'entrée dans les magasins F______ de Genève, Nyon et Gland, valable durant deux ans.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. a. Le 21 juin 2019, A______ a dérobé aux alentours de 18h50 un "wrap" au poulet, un fromage à la crème et une baguette, d'une valeur totale de CHF 11.41, dans un magasin E______. Conduit dans le bureau de H______, gérant et représentant légal, qui appelait la police, A______ a violemment poussé une agente de sécurité [de la société] D______, C______, au niveau de la poitrine, et saisi son sein gauche. A______ a été arrêté ce même jour et remis en liberté le lendemain.

a.b. E______ SA a déposé le jour des faits plainte pénale contre A______ pour notamment vol à l'étalage. Le nom du signataire ne figure pas sur le formulaire de plainte. La signature est apposée sous la ligne réservée au responsable de magasin. La même signature apparaît sur le procès-verbal d'audition de H______, dont il ressort qu'il avait établi à l'intention de la police la plainte du magasin pour le vol de CHF 11.41.

À la demande du Tribunal de police, E______ SA a produit le 9 décembre 2019 une procuration du 21 juin 2019, signée par le président du conseil d'administration et un autre administrateur, autorisant H______ à entreprendre tout acte juridique en lien avec la plainte déposée contre A______.

a.c. Le 16 août 2019, A______ a envoyé un courrier d'excuse à C______, qui avait déposé plainte à son encontre le 21 juin 2019.

b.a. D'après un formulaire du 16 mai 2019, il était fait interdiction à A______ d'accéder à tous magasins F______ et affiliés pour une durée de deux ans.

Ce formulaire est libellé en différentes langues, notamment en français et en anglais, et signé, sous la version française, par le prévenu. Il comporte en outre des pictogrammes figurant une personne s'opposant au passage en tendant la main, et des reproductions des enseignes de divers types de magasins F______ et affiliés.

D'après un courrier du 4 novembre 2019 du responsable du service sûreté surveillance, I______, le formulaire a été signé par un "manager suppléant", J______, conformément au règlement en cas de délits et ses annexes. Il ressort d'une annexe au courrier qu'un gérant ou son remplaçant ainsi qu'un agent de sécurité devaient signer l'interdiction d'entrée.

b.b. Le 27 août 2019, A______ a, dans l'enseigne F______ [à] G______, dérobé des lames de rasoirs pour un montant total de CHF 22.80. Il a été arrêté par la police et s'est soumis à un éthylotest, négatif à deux reprises.

b.c. La [société] F______ a déposé le 27 août 2019 plainte pénale, signée par K______ par ordre ("P.O.") du responsable du service sûreté surveillance, I______, contre A______. pour vol à l'étalage et violation de domicile. Au bas du formulaire d'interdiction d'entrée annexé, figure, sous la mention "GÉRANT(E)" la même signature que sur la plainte.

Aux termes du courrier du 4 novembre 2019 susmentionné, les responsables de magasin étaient autorisés, par ordre, à signer une plainte au nom du représentant de la société, à savoir I______. Ce dernier avait validé la décision de déposer plainte à l'encontre de A______. D'après le règlement en cas de délits de la coopérative, annexé au courrier susmentionné, seul le service de sûreté-surveillance était autorisé à déposer une plainte (art. 3.13). Selon un document joint, le gérant, son remplaçant ou un agent de sécurité étaient autorisés à signer le formulaire de plainte.

Il ressort d'un extrait du registre du commerce que I______ y est inscrit, avec pouvoir de signature, collective à deux, conjointement avec le président, le directeur ou un sous-directeur.

c. A______ a expliqué avoir commis les vols pour des besoins de première nécessité.

À la police, il a exposé en français ne plus se souvenir de l'interdiction d'entrée dans les magasins F______, mais se rappelait de l'interdiction d'entrée en Suisse. Il avait une licence en anglais. Au MP, il a expliqué, toujours en français et accompagné d'un avocat, pouvoir lire l'arabe, l'anglais, ayant un "bac+3" dans cette langue, ainsi qu'un peu le français, "mais pas vraiment". Il ressort du procès-verbal de l'audition qu'il avait lu ses droits en français et que le procureur qualifiait son français "d'impeccable". Il se souvenait avoir signé le recto, mais il n'avait pas vu le verso de l'interdiction d'entrée. Il avait signé car il avait peur "qu'ils" appellent la police.

Devant le TP, il a persisté à dire savoir lire un peu le français. Lorsqu'il avait volé des biscuits à la F______, il avait dû payer CHF 20.- d'amende et on lui avait expliqué qu'il n'avait pas le droit d'entrer dans le magasin. Il pensait qu'il ne s'agissait que du magasin de ______ [lieu]. Il n'avait pas les compétences linguistiques lui permettant de comprendre la version anglaise du formulaire d'interdiction d'entrée des enseignes F______ et affiliées qui lui avait été remise.

Il n'avait pas voulu faire du mal à C______, ni eu l'intention de la pousser violemment, ni saisi son sein gauche. En raison de sa nature méditerranéenne, il pouvait avoir l'air énervé et agressif lorsqu'il parlait, y compris avec les mains.

Il a reconnu avoir séjourné illégalement entre les 9 et 21 juin 2019, puis entre les 27 juin et 27 août 2019.

C. a. Avec l'accord des parties, le Président de la CPAR a ordonné la procédure écrite.

b.a. Dans son mémoire du 30 avril 2020, A______ relève que la plainte du 21 juin 2019 de E______ SA avait été signée par une personne non identifiée et non identifiable. Si toutefois il était considéré que H______ était le signataire, il ne ressortait pas du dossier ou du registre du commerce qu'il bénéficiait d'un pouvoir de représentation pour déposer une plainte au nom de son employeur. E______ SA n'avait pas ratifié la plainte dans le délai de trois mois. Tout portait à croire que la procuration versée par l'entreprise avait été établie ultérieurement pour les besoins de la procédure et donc antidatée. La plainte du 21 juin 2019 devait être invalidée et il devait être acquitté des chefs d'infraction y figurant.

La plainte de la [société] F______ était signée par K______, simple employé de magasin, sur ordre de I______, certes inscrit au registre du commerce, mais ne disposant que d'un pouvoir de représentation limité. I______ ne pouvait être ni considéré ni interrogé en tant que partie plaignante, n'étant pas valablement autorisé à représenter la société. Il n'était pas un mandataire commercial au sens de l'art. 462 CO, mais a priori un fondé de procuration au sens de l'art. 458 al. 1 CO. L'extrait de règlement interne était en outre incomplet et n'avait aucune valeur probante. Le suivre reviendrait à admettre qu'en l'absence du représentant du service en charge de la sécurité, plusieurs autres employés, dont le statut et les pouvoirs ne ressortaient de "nulle part", seraient habilités à représenter et/ou engager par leur signature individuelle (pour ordre), la responsabilité de la personne morale pour tout acte. La plainte n'avait enfin pas été valablement ratifiée par la personne morale ou un représentant habilité à le faire.

La déclaration d'interdiction d'entrée engageait la personne morale, lésée par la violation de sa liberté de domicile en cas d'infraction. Son signataire, sous le libellé "signature gérant(e)" était inconnu. À l'exception des déclarations de I______, rien au dossier ne permettait de retenir que J______ était "manager suppléant" du magasin F______ [à] G______. On ignorait également s'il s'agissait de sa signature au bas de la déclaration ou s'il avait le droit de représenter la [société] F______ et de l'engager par sa signature individuelle. La déclaration d'interdiction d'entrée n'était ainsi pas valable.

Si l'interdiction était toutefois valable, elle n'avait en tout état pas été comprise. Le texte n'était pas traduit en arabe, seule langue que le prévenu maîtrisait. Il avait menti sur son niveau d'étude pendant la procédure préliminaire. Le TP ne pouvait prendre pour crédibles ses déclarations à ce sujet, sans aucune preuve de l'existence d'un tel niveau d'étude et d'un diplôme. Sa situation personnelle était incompatible avec ses propos. L'interdiction ne lui avait pas été traduite et/ou expliquée. Il avait présumé de bonne foi qu'il devait la signer et régler la somme de CHF 20.-. Il avait tout au plus compris qu'il ne pouvait plus se rendre dans l'enseigne de la gare, mais non qu'il s'agissait d'une interdiction d'entrée dans tous les magasins F______. Il subsistait un doute sérieux et insurmontable qu'il ait compris la teneur et l'étendue de l'interdiction d'entrée. Il ne pensait dès lors pas avoir pénétré dans le magasin contre la volonté de l'ayant droit. Il était partant sous l'emprise d'une erreur sur les faits.

Il avait agi en proie à une profonde détresse, ce qui justifiait son comportement et devait mener à une atténuation de la peine. Son comportement était dicté par une grande nécessité et non par volonté de suivre le chemin de la délinquance. La révocation du sursis du 8 juin 2019 le placerait dans une situation précaire et nécessiteuse, dès lors qu'il se retrouverait débiteur d'un montant de CHF 900.-. Le pronostic défavorable quant à son futur comportement se réaliserait par la révocation du sursis. Un avertissement aurait un effet dissuasif plus concret.

À l'exception de l'infraction à la LEI, il n'avait commis que des contraventions. Au vu de sa faute, qui ne saurait être qualifiée de grande, et de sa situation personnelle, une expulsion facultative était une mesure disproportionnée.

Il avait droit d'être indemnisé au vu des acquittements prononcés par le TP pour la période où il n'avait pas pu bénéficier d'un avocat d'office, selon la note d'honoraires produite.

b.b. A______ verse une note d'honoraires pour l'activité de son conseil, déployée du 28 juin au 30 septembre 2019 et consacrée à deux déplacements et 8h20 d'activité de collaboratrice, dont 5h30 consacrées à un recours à la Chambre pénale de recours puis au Tribunal fédéral, dans lesquels il a succombé.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel, sous suite de frais et dépens.

Il fait sienne la motivation du Tribunal de police. Au regard de la jurisprudence et des documents produits par les parties plaignantes, le premier juge avait à juste titre déclaré valables les plaintes et les interdictions d'entrée litigieuses. La peine était proportionnée au vu de la faute commise par A______, tant s'agissant du genre de peine, de sa quotité que de l'absence de sursis.

d. La F______ conclut à la constatation de la validité de l'interdiction d'entrée du 16 mai 2019 et de la plainte du 27 août 2019 ainsi qu'à la condamnation de A______ pour vol et violation de domicile.

A______ avait compris l'interdiction d'entrée, traduite en huit langues dont l'anglais, sur laquelle figuraient des pictogrammes explicites. Il avait ainsi "compris la volonté du magasin".

e. Le Tribunal de police se réfère intégralement à son jugement.

D. A______ est né le ______ 1978, de nationalité algérienne, célibataire et sans enfant. Il indique avoir fait des études pendant 10 ans. Il a quitté l'Algérie en 2016, pays dans lequel vivent son père et son frère, et est arrivé en Suisse en février ou mars 2019. Sans domicile, ni travail ni revenu, il vit de l'aide d'associations caritatives, notamment le L______ Genève. Il fait part de projets de mariage avec une amie helvète, à laquelle il n'a pas osé parler de sa détention. Il a également l'objectif de trouver un travail et un contrat, voire une activité bénévole, avec l'aide de son assistante sociale.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, A______ a été condamné les :

-       10 mars 2019, par le MP, à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à CHF 10.- l'unité, avec sursis, révoqué le 27 juin 2019, pour séjour et entrée illégaux ;

-       8 juin 2019, par le MP, à une peine pécuniaire de 90 jours-amende, sous déduction d'un jour de détention préventive, à CHF 10.- l'unité, avec sursis, délai d'épreuve de trois ans, pour dommages à la propriété, séjour illégal et lésions corporelles simples, pour les faits suivants :

le 7 juin 2019, il avait étranglé et mordu le bras d'un "assistant-manager" d'un restaurant alors que ce dernier lui demandait de quitter le restaurant. Il avait également endommagé son collier ;

-       27 juin 2019, par le MP de l'arrondissement de M______ [VD], à 10 jours de peine privative de liberté pour séjour illégal ;

-       1er avril 2020, par le MP, à une peine privative de liberté de 130 jours, pour lésions corporelles simples, injure, menaces et séjour illégal.

E. Me B______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, comptabilisant, sous des libellés divers, 45 minutes d'activité de chef d'étude et 13h d'activité de collaboratrice, dont 45 minutes dédiées à la rédaction de la déclaration d'appel.


 

EN DROIT :

1.             L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2.             2.1. Aux termes de l'art. 30 al. 1 CP, si une infraction n'est punie que sur plainte, toute personne lésée peut porter plainte contre l'auteur.

2.2.       Lorsque le lésé est une personne morale, la qualité pour porter plainte en son nom se détermine selon sa structure interne (ATF 117 IV 437 consid. 1a). Il s'agit en principe de l'organe qui a pour mission de veiller sur les intérêts lésés par l'infraction et dont les pouvoirs sont inscrits au registre du commerce (ATF 118 IV 167 consid. 1b). La personne, dont la fonction consiste précisément à veiller à la sauvegarde du bien juridiquement protégé et lésé par l'infraction, a également qualité pour déposer plainte, ce pour autant qu'une telle démarche ne soit pas contraire à la volonté de l'entreprise - respectivement de ses organes si celle-ci est une personne morale - et puisse être approuvée par cette dernière (ATF 118 IV 167 consid. 1c ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_7/2018 du 17 octobre 2018 consid. 2.3 ; 6B_99/2012 du 14 novembre 2012 consid. 3 et 6B_762/2008 du 8 janvier 2009 consid. 3.5). Dans la mesure où la plainte a été déposée par un représentant sans pouvoir, la ratification par le lésé doit intervenir dans le délai de l'art. 31 CP (ATF 122 IV 207 consid. 3a p. 208).

Est ainsi habilité à déposer plainte pénale pour violation de domicile le représentant d'une société immobilière disposant d'un pouvoir général conféré tacitement par actes concluants (ATF 118 IV 167 consid. 1c) ou la personne, non inscrite au registre du commerce, chargée pour une société d'exploiter un "night-club" (arrêt du Tribunal fédéral 6B_762/2008 du 8 janvier 2009 consid. 3.5). Il en va de même du "gérant" de l'entreprise lésée ou de son "Geschäftsführer", ou encore de l'un de ses représentants ayant la qualité de "Filialleiter" (arrêt du Tribunal fédéral 6B_99/2012 du 14 novembre 2012 consid. 3.3 et 3.4). Le président d'une fondation pouvait signer une procuration donnée à un avocat de porter plainte. Même, si en vertu du registre du commerce et des statuts de la fondation, le président disposait d'un pouvoir de signature à deux, le Tribunal fédéral a considéré qu'il était chargé de sauvegarder les intérêts de la fondation de par sa fonction de président (arrêt du Tribunal fédéral 6B_545/2016 du 6 février 2017 consid. 1). Dans des jurisprudences plus anciennes, la secrétaire d'un hôtel a été autorisée à déposer plainte pour violation de domicile (ATF 73 IV 68 p. 70), tout comme un placeur dans un cinéma pour obtention frauduleuse d'une prestation (C. RIEDO, Der Strafantrag, Bâle 2004, p. 385). La CPAR a jugé que le responsable et représentant légal d'un magasin, bien que non inscrit au Registre du commerce, pouvait être considéré comme un mandataire commercial chargé de veiller sur le magasin et était en conséquence détenteur du pouvoir de déposer plainte pour dommages à la propriété et violation de domicile, sans qu'une procuration spéciale ne doive lui être conférée (AARP/609/2013 du 3 décembre 2013 consid. 2.2).

2.3.1. En l'espèce, il ne ressort certes pas de la formule quel est le nom de la personne qui a signé la plainte au nom de E______ SA, mais on connaît sa fonction, à savoir responsable de magasin. Or le gérant, H______, était présent lors des faits et à l'arrivée de la police. La signature figurant sur son procès-verbal d'audition est la même que celle de la plainte. Au demeurant, la procuration signée par deux membres du conseil d'administration est au profit de cet employé, ce qui n'aurait pas été le cas si une autre personne avait signé. La CPAR considère partant comme établi que H______, à savoir un responsable de magasin ou un gérant, certes non inscrit au RC, a déposé plainte au nom de E______ SA, en tant que personne chargée de veiller sur le magasin dont il a la responsabilité.

Or, au vu de la jurisprudence précitée, est habilité à porter plainte la personne, dont la fonction consiste à veiller à la sauvegarde du bien juridiquement protégé et lésé par l'infraction, à savoir précisément un gérant. Contrairement à ce que l'appelant soutient, une procuration générale pour ce faire n'est pas nécessaire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_762/2008 du 8 janvier 2009 consid. 3.5).

La procuration envoyée par E______ SA paraît certes tardive pour faire office de ratification, mais elle est au demeurant inutile vu la qualité pour porter plainte du gérant. Elle soutient cependant l'indication de l'approbation des organes de l'entreprise à la plainte déposée par l'un des responsables de magasin de l'enseigne, étant au surplus rappelé que l'octroi d'un pouvoir de représentation ne nécessite pas une forme particulière (art. 32 ss de la loi fédérale complétant le Code civil suisse [CO, Code des obligations]).

La plainte déposée par E______ SA est dès lors valable.

2.3.2. Conformément à la structure interne de la [société] F______, le responsable du service sûreté surveillance, inscrit au registre du commerce, a valablement déposé plainte. Il n'a certes pas signé lui-même la plainte. K______ l'a fait par ordre et donc en son nom, étant précisé que ce dernier était en tout état habilité à signer seul la plainte, vu qu'il était avec très grande vraisemblance gérant ou gérant suppléant de magasin. En effet, sa signature est apposée au bas de la nouvelle formule d'interdiction d'entrée, sous la mention "GÉRANT(E)". I______ a précisé dans son courrier du 4 novembre 2019 et ses annexes que les gérants et leurs remplaçants, ainsi que les agents de sécurité étaient habilités à signer la plainte, indice allant dans le sens qu'un simple employé n'aurait pu signer la plainte. C'est le lieu de préciser que ce courrier provenant d'un organe et employé de la société est un moyen de preuve exploitable (art. 139 al. 1 et 141 a contrario CPP) et n'avait pas besoin d'être signé par d'autres organes pour être valable. Il en est de même de la plainte, la jurisprudence susmentionnée permettant à un organe de déposer plainte seul, malgré un pouvoir de signature à deux, pour autant qu'il soit chargé de sauvegarder les intérêts de la personne morale, ce qui est le cas en l'espèce. Enfin, I______ a confirmé que la décision de porter plainte correspondait à la volonté de l'entreprise.

La plainte de la [société] F______ est ainsi valable.

3.             3.1. Sera reconnu coupable de violation de domicile au sens de l'art. 186 CP toute personne qui, d'une manière illicite et contre la volonté de l'ayant droit, aura pénétré dans une maison, dans une habitation, dans un local fermé faisant partie d'une maison, dans un espace, cour ou jardin clos et attenant à une maison, ou dans un chantier, ou y sera demeuré au mépris de l'injonction de sortir à lui adressée par un ayant droit.

3.2. La volonté de l'ayant droit interdisant à quelqu'un de pénétrer dans un local déterminé peut être exprimée valablement par les organes d'une personne morale mais aussi par de simples employés de l'ayant droit ou résulter des circonstances (ATF
90 IV 74 consid. 2b).

3.3. Selon l'art. 13 al. 1 CP, quiconque agit sous l'influence d'une appréciation erronée des faits est jugé d'après cette appréciation si elle lui est favorable. Agit sous l'emprise d'une erreur sur les faits celui qui n'a pas connaissance ou qui se base sur une appréciation erronée d'un élément constitutif d'une infraction pénale. L'intention délictuelle fait défaut (ATF 129 IV 238 consid. 3.1 p. 240).

3.4. En l'espèce, l'interdiction d'entrée du 16 mai 2019 des magasins F______ et affiliés est valable. Elle est signée par un "manager suppléant", les informations fournies par la [société] F______ à ce sujet étant exploitables. En tout état, la jurisprudence permet à tout employé de signifier à une personne la volonté d'une société d'interdire de pénétrer dans un local, donc il importe au final peu quelle était la fonction précise du signataire.

L'appelant a spontanément déclaré ne pas se souvenir de cette interdiction. Il ne l'a plus répété par la suite, alléguant n'avoir vu que son recto et ne pas avoir compris son contenu ou avoir cru que seul le magasin de la gare lui était interdit. Contrairement à ce que le premier juge a retenu, la CPAR tient pour établi que l'appelant comprend le français. La majorité de ses auditions lors de la procédure préliminaire s'est déroulée en français, avec la présence, à une reprise, d'un avocat, qui n'a pas demandé de traduction pour son client. Il a pu répondre aux questions de manière cohérente et prendre connaissance de ses droits, remis en français par écrit. Il avait dès lors la capacité de comprendre la teneur de l'interdiction d'entrée du 16 mai 2019, qu'il a au demeurant signée. Il a également indiqué avoir des connaissances d'anglais, même si son niveau ne s'apparente probablement pas à un "Bac+3". Or l'interdiction d'entrée est traduite en anglais, et accompagnée de pictogrammes clairs. Il en ressort de manière manifeste que l'entrée de l'intégralité des magasins F______ et affiliés lui était interdite. Au demeurant, il a finalement reconnu devant le TP avoir reçu des explications au sujet de l'interdiction d'entrée, contrairement à ce qu'il soutient par l'intermédiaire de son conseil en appel. C'est partant en toute connaissance de cause qu'il a pénétré dans une filiale de l'entreprise, contre la volonté de l'ayant droit.

Ayant conscience de l'interdiction qui lui avait été faite de pénétrer dans les enseignes F______, il ne pouvait être sous l'emprise d'une erreur sur les faits, son intention délictuelle ne faisant en l'espèce pas défaut.

Sa culpabilité pour violation de domicile sera confirmée.

3.5. L'appelant n'a pas remis en cause, à juste titre, sa condamnation pour les autres chefs de culpabilité, qui sera également confirmée, à l'exception de la seconde période du séjour illégal (27 juin au 27 août 2019). En effet, le MP l'a condamné le 1er avril 2020 à cette même infraction, pour la période du 21 juin 2019 au 13 février 2020. En vertu du principe ne bis in idem, cette partie des faits sera classée (art. 404 al. 2 CPP, 329 al. 5 cum 329 al. 1 let. c et 379 CPP).

4.             4.1. La peine menace de l'infraction de la violation de domicile est une peine privative de liberté de trois ans au plus ou une peine pécuniaire, tandis que celle du séjour illégal est une peine privative de liberté d'un an au plus ou une peine pécuniaire. Le vol d'importance mineure et les voies de fait sont répressibles de l'amende.

4.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1).

4.3. Selon l'art. 48 let. a ch. 2CP, le juge atténue la peine si l'auteur a agi dans une détresse profonde. Cette circonstance est réalisée lorsque l'auteur est poussé à transgresser la loi pénale par une situation proche de l'état de nécessité, c'est-à-dire que, sous la pression d'une détresse particulièrement grave, il croit ne pouvoir trouver une autre issue que dans la commission de l'infraction. La détresse peut être de nature matérielle ou morale (ATF 107 IV 94 consid. 4a p. 95).

4.4. Aux termes de l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits.

L'art. 46 al. 1 CP dispose que, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel. Si la peine révoquée et la nouvelle peine sont du même genre, il fixe une peine d'ensemble en appliquant par analogie l'art. 49. Au sens de l'art. 46 al. 2 CP, s'il n'y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation. Il peut adresser au condamné un avertissement et prolonger le délai d'épreuve de la moitié au plus de la durée fixée dans le jugement. Il peut ordonner une assistance de probation et imposer des règles de conduite pour le délai d'épreuve ainsi prolongé. Si la prolongation intervient après l'expiration du délai d'épreuve, elle court dès le jour où elle est ordonnée.

4.5. Au sens de l'art. 49 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine. Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement.

Lorsque, parmi plusieurs infractions à juger, l'une au moins a été commise avant d'autres jugées précédemment (concours rétrospectif partiel), les nouvelles infractions - soit celles commises après l'entrée en force d'un précédent jugement - doivent faire l'objet d'une peine indépendante. Ainsi, il convient d'opérer une séparation entre les infractions commises avant le premier jugement et celles perpétrées postérieurement à celui-ci. Le juge doit tout d'abord s'attacher aux infractions commises avant ledit jugement, en examinant si, eu égard au genre de peine envisagé, une application de l'art. 49 al. 2 CP entre en ligne de compte. Ensuite, il doit considérer les infractions commises postérieurement au jugement précédent, en fixant pour celles-ci une peine indépendante, le cas échéant en faisant application de l'art. 49 al. 1 CP. Enfin, le juge additionne la peine complémentaire ou la peine cumulative retenue pour sanctionner la ou les infractions commises antérieurement au jugement précédent à celle retenue pour sanctionner les infractions commises postérieurement à cette décision (ATF
145 IV 1 consid. 1).

4.6. En l'espèce, la faute de l'appelant n'est pas négligeable. Il a porté atteinte au patrimoine d'autrui, à la liberté et aux règles régissant le droit des étrangers. Il persiste à rester en Suisse sans aucun droit. Il a envoyé une lettre d'excuse à l'agente de sécurité, mais a persisté jusque devant le TP à nier lui avoir saisi le sein. Certes, les biens dérobés devaient couvrir ses premiers besoins et n'étaient que de faibles valeurs. Il était cependant en contact avec des associations et sa précarité n'explique seule pas son comportement délictuel ainsi que son insistance à rester en Suisse en situation irrégulière. Il n'avait en particulier aucune raison de frapper l'employée qui l'avait démasqué, étant précisé qu'il a déjà été puni pour ce genre de comportement. L'atténuante de la profonde détresse sera partant exclue.

Le genre de peine pour le séjour illégal et la violation de domicile, à savoir la peine privative de liberté, n'est à juste titre pas contesté.

Le séjour illégal a été commis entre les 9 et 21 juin 2019, soit avant l'ordonnance pénale du 27 juin 2019. La violation de domicile a été réalisée avant l'ordonnance pénale du 1er avril 2020.

Conformément à la jurisprudence, ce sera une peine complémentaire, pour la période pénale du 9 au 21 juin 2019, de 30 jours de peine privative de liberté, qui sera fixée et additionnée à la peine de base, qui correspond à 10 jours de peine privative de liberté fixés par le MP le 27 juin 2019. S'agissant de la violation de domicile, elle sera fixée à 30 jours de peine privative de liberté, puis additionnée à la peine de base, qui correspondant à 130 jours de peine privative de liberté fixés par le MP le 1er avril 2020. Ensemble, l'appelant sera condamné à 60 jours de peine privative de liberté, la peine fixée par le premier juge étant réformée.

Le montant de l'amende globale, à savoir CHF 500.-, paraît équitable au vu de la faute de l'appelant ainsi que sa situation personnelle et sera partant confirmé.

Vu ses antécédents et son absence de remise en question, seul un pronostic défavorable peut être posé. L'appelant connaissait la sanction qu'il risquait en récidivant, ce qui ne l'a pas empêché d'agir et se placer lui-même dans une situation précaire. Il a récidivé après avoir été mis en liberté dans la présente procédure. Un avertissement n'aurait aucun effet sur l'appelant, qui a déjà bénéficié du sursis sans saisir sa chance. La révocation du sursis octroyé par le MP le 8 juin 2019 sera partant confirmée.

5.             5.1. À teneur de l'art. 51 CP, le juge impute sur la peine la détention avant jugement subie par l'auteur dans le cadre de l'affaire qui vient d'être jugée ou d'une autre procédure. Un jour de détention correspond à un jour-amende. L'imputation de la détention a lieu, en premier lieu, sur les peines privatives de liberté et, en second lieu, sur les autres peines, comme la peine pécuniaire, le travail d'intérêt général et l'amende. L'indemnisation financière est subsidiaire à l'imputation, et le prévenu n'a pas le droit de choisir entre l'une ou l'autre (ATF 141 IV 236 consid. 3.3 p. 239 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_84/2014 du 13 août 2014 consid. 5.1). La détention avant jugement doit être imputée sur la peine même si cette détention résulte d'une procédure antérieure (ATF 141 IV 236 consid. 3.3 p. 239 ; ATF 133 IV 150 consid. 5.1 p. 155).

5.2. En l'espèce, l'appelant a subi 108 jours de détention avant jugement dans la présente procédure et un jour dans la procédure ayant abouti à l'ordonnance pénale du 8 juin 2019. Conformément à la jurisprudence, 60 jours seront imputés sur la peine prononcée dans le présent arrêt et 49 jours (1 + 48 jours) seront imputés sur la peine de 90 jours-amende fixée dans l'ordonnance pénale du 8 juin 2019, avec sursis, désormais révoquée.

6.             6.1. Aux termes de l'art. 66abis CP, le juge peut expulser un étranger du territoire suisse pour une durée de trois à quinze ans si, pour un crime ou un délit non visé à l'art. 66a CP, celui-ci a été condamné à une peine ou a fait l'objet d'une mesure au sens des art. 59 à 61 ou 64 CP.

Comme toute décision étatique, le prononcé d'une expulsion non obligatoire doit respecter le principe de la proportionnalité ancré aux art. 5 al. 2 et 36 al. 2 et 3 Cst. Il convient ainsi d'examiner si l'intérêt public à l'expulsion l'emporte sur l'intérêt privé de la personne à demeurer en Suisse. Une telle pesée des intérêts répond également aux exigences découlant de l'art. 8 par. 2 CEDH concernant les ingérences dans la vie privée et familiale (cf. arrêts 6B_242/2019 du 18 mars 2019 consid. 1.1; 6B_1314/2019 du 29 janvier 2019 consid. 5.1; 6B_607/2018 du 10 octobre 2018 consid. 1.4.1; 6B_371/2018 du 21 août 2018 consid. 3.2). S'agissant d'un étranger arrivé en Suisse à l'âge adulte, l'examen de la proportionnalité suppose une prise en compte de la nature et de la gravité de la faute, du temps écoulé depuis la commission de l'infraction, du comportement de l'auteur durant cette période, de la durée de son séjour en Suisse, de la solidité des liens sociaux, culturels et familiaux avec le pays hôte et avec le pays de destination (cf. ATF 139 I 145 consid. 2.4 p. 149; 139 I 31 consid. 2.3.3 p. 34 ss; 135 II 377 consid. 4.3 p. 381; arrêts 6B_242/2019 précité consid. 1.1; 6B_1314/2019 précité consid. 5.1; 6B_607/2018 précité consid. 1.4.1; 6B_371/2018 précité consid. 3.2). D'après une jurisprudence constante, les relations visées par l'art. 8 CEDH sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (ATF 144 II 1 consid. 6.1 p. 12; 135 I 143 consid. 1.3.2 p. 146).

6.2.1. En l'espèce, il existe un intérêt public à l'expulsion de l'appelant.

Certes, les infractions commises par l'appelant, qui ne sont pas toutes des contraventions, ne paraissent pas troubler fortement l'ordre public mais il est relevé que l'appelant commence à s'inscrire durablement dans la délinquance, ayant un casier déjà bien fourni, alors même qu'il n'est arrivé en Suisse qu'en hiver 2019.

Le prononcé d'une expulsion sera dès lors, par sa nature, vraisemblablement propre à l'empêcher de commettre de nouvelles infractions en Suisse.

6.2.2. L'intérêt de l'appelant à rester en Suisse paraît inexistant.

Il est arrivé en Suisse depuis peu de temps et vit depuis en situation irrégulière. Il maîtrise certes le français et était en contact avec des associations locales. Il ne prétend cependant pas avoir de la famille ou des liens sociaux particulièrement forts avec des personnes en situation régulière en Suisse, à l'exception d'une amie intime, sur laquelle il n'a cependant donné aucun détail, sauf qu'il n'a pas osé lui avouer son séjour en détention, ce qui n'est pas de nature à crédibiliser son existence. L'appelant ne peut quoiqu'il en soit se prévaloir d'un droit au respect de sa "vie familiale", au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH, compte tenu des exigences en la matière en cas de concubinage (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_704/2019 du 28 juin 2019 consid. 1.3.2). Il n'a pratiquement aucune chance d'obtenir à court ou moyen terme le droit de séjourner en Suisse. Il ne peut exercer une activité lucrative autorisée, malgré ses recherches avec [l'association] L______ Genève. Ses chances de réinsertion en Algérie, pays qu'il a quitté en 2016, paraissent bonnes. Il a davantage de perspectives professionnelles dans son pays, puisqu'il ne peut travailler en Suisse, et maîtrise principalement l'arabe. Il y a encore un père et un frère. Les inconvénients sociaux et économiques d'un retour dans le pays d'origine n'ont pas à être pris en compte, dans la mesure où ils se produisent typiquement en cas d'expulsion. De telles difficultés touchent de manière comparable un grand nombre de personnes se trouvant dans cette situation et ne sauraient justifier l'application de la clause de rigueur (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1474/2019 du 23 mars 2020). L'intérêt de l'appelant à demeurer en Suisse est dès lors moindre que l'intérêt public présidant à son expulsion.

L'expulsion de l'appelant pour une durée de trois ans du territoire suisse sera confirmée.

7.             L'appelant demande une indemnisation fondée sur l'art. 429 CPP, qui consacre le droit du prévenu à une indemnité partielle pour ses frais de défense s'il est acquitté en partie.

Au vu des acquittements prononcés en première instance et sa condamnation pour la majorité des chefs d'accusation, il sera indemnisé à hauteur d'un cinquième pour ses dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure. Il convient de retrancher de la note d'honoraire produite 5h30 consacrées à des procédures où il a succombé. Il lui sera ainsi alloué CHF 226.20 (correspondant à un cinquième des 2h50 subsistantes au tarif de CHF 300.- [CHF 850.-], deux déplacements [CHF 200.-], l'équivalent de la TVA à 7.7 % en sus [CHF 80.85]).

Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

8.             Conformément à l'art. 442 al. 4 CPP, la part des frais de la procédure supportée par l'appelant (voir infra ch. 9) sera compensée à due concurrence avec les indemnités qui lui sont octroyées pour ses frais de défense.

9.             L'appelant, qui succombe quasiment intégralement, sera condamné, conformément aux art. 426 al. 1 et 428 al. 1 CPP, au paiement des quatre cinquièmes des frais de la procédure d'appel, comprenant un émolument de CHF 1'500.- (art. 14 al. 1 let. e règlement fixant le tarif des frais en matière pénale du 22 décembre 2010 [RTFMP - E 4 10.03]). Le solde sera laissé à la charge de l'État.

10.         10.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats du canton du for du procès. L'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique du 28 juillet 2010 (RAJ ; E 2 05.04) dispose que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus : avocat stagiaire CHF 110.- (let. a) ; collaborateur CHF 150.- (let. b) ; chef d'étude CHF 200.- (let. c). En cas d'assujettissement, l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance, et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

Il est admis que l'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure soit forfaitairement majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail décomptées depuis l'ouverture de la procédure, 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3) ainsi que la déclaration d'appel (ordonnance de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2014.51 du 21 novembre 2014 consid. 2.1 ; décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.165 du 24 janvier 2014 consid. 4.1.3 et BB.2013.127 du 4 décembre 2013 consid. 4.2).

10.2. En l'occurrence, l'état de frais produit par le conseil de l'appelant paraît adéquat et conforme aux dispositions et principes qui précèdent, de sorte qu'il sera admis sans en reprendre le détail, étant toutefois précisé que les 45 minutes d'activité de collaboratrice dédiées à la rédaction de la déclaration d'appel seront retranchées car comprises dans le forfait.

En conclusion, l'indemnité sera arrêtée à CHF 2'568.65, correspondant à 45 minutes d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 150.-) et 12h15 d'activité au tarif de CHF 150.-/heure (CHF 1'837.50) plus la majoration forfaitaire de 20 % (CHF 397.50) et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% (CHF 150.-).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1744/2019 rendu le 11 décembre 2019 par le Tribunal de police dans la procédure P/17631/2019.

L'admet très partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Classe la procédure s'agissant de l'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI pour la période du 27 juin au 27 août 2019.

Acquitte A______ des chefs de dommages à la propriété d'importance mineure (art. 144 al. 1 cum art. 172ter CP) et de violation de domicile (art. 186 CP).

Déclare A______ coupable de violation de domicile (art. 186 CP), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), de voies de fait (art. 126 al. 1 CP) et de vols d'importance mineure (art. 139 ch. 1 cum art. 172ter CP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 60 jours, sous déduction de 60 jours de détention avant jugement, complémentaire aux peines prononcées par le Ministère public de l'arrondissement de M______ [VD] le 27 juin 2019 et le Ministère public du canton de Genève le 1er avril 2020.

Condamne A______ à une amende de CHF 500.-.

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 5 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si l'amende n'est pas payée.

Révoque le sursis octroyé le 8 juin 2019 par le Ministère public du canton de Genève à la peine de 90 jours-amende à CHF 10.-, sous déduction de 49 jours-amende, correspondant à 49 jours de détention avant jugement.

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de trois ans (art. 66abis CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Alloue à A______ CHF 226.20 au titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure, pour la période précédant la nomination d'un défenseur d'office.

Rejette ses conclusions en indemnisation pour le surplus.

Compense à due concurrence l'indemnité allouée à A______ avec les frais de procédure mis à sa charge.

Prend acte de ce que l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure de première instance, a été fixée à CHF 2'714.05.

Arrête à CHF 2'568.65, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Condamne A______ aux frais de la procédure de première instance, qui s'élèvent à CHF 2'927.-, et aux quatre cinquièmes des frais de la procédure d'appel, en CHF 1'372.-, qui comprennent un émolument de CHF 1'500.-. Laisse le solde de ces frais à la charge de l'État.

Ordonne la confiscation et la destruction de l'objet figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 2______.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Secrétariat d'Etat aux migrations et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

Siégeant :

Monsieur Pierre BUNGENER, président ; Mesdames Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE et Gaëlle VAN HOVE, juges.

 

Le greffier :

Alexandre DA COSTA

 

Le président :

Pierre BUNGENER

 


 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération du 19 mars 2010 (LOAP; RS 173.71), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

P/15572/2019

ÉTAT DE FRAIS

AARP/242/2020

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

2'927.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

140.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

0.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :
Condamne A______ aux quatre cinquièmes des frais de la procédure d'appel

CHF


1'715.00


Total général (première instance + appel) :

CHF

4'642.00