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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2504/2025

DCSO/606/2025 du 06.11.2025 ( PLAINT ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2504/2025-CS DCSO/606/25

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 6 NOVEMBRE 2025

 

Plainte 17 LP (A/2504/2025-CS) formée en date du 4 juin 2025 par A______ SA.

* * * * *

Décision communiquée par courrier A à l’Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

- A______ SA

______

Case postale ______

______ [GE].

- B______ AG

C______ AG Rechtsdienstleistungen

______

______ [BE].

- Office cantonal des poursuites.


EN FAIT

A.           a. A______ SA est une société anonyme inscrite le ______ 2008 au Registre du commerce. Elle a son siège au chemin 1______ no. 2______, [code postal] D______ [GE]. E______, domicilié à la route 3______ no. 4______, [code postal] F______ [GE], en est l’administrateur disposant de la signature individuelle.

b. Le 17 mai 2024, B______ AG a engagé une poursuite à l’encontre de A______ SA pour les sommes de 159’870 fr. avec intérêts à 5% l’an dès le 17 mai 2024, 1’467 fr. 30 et 2’750 fr., réclamées au titre de diverses factures, intérêts jusqu’au 16 mai 2024 et dommages-intérêts.

c. L’Office a établi le commandement de payer, poursuite n° 5______ le 27 mai 2024 et l’a remis à la poste en vue de sa notification à A______ SA à l’adresse chemin 1______ no. 2______, [code postal] D______.

Le suivi postal de l’envoi fait ressortir que des avis en vue du retrait de l’acte d’ici au 6 juin 2024 ont été déposés dans la case postale les 29 et 30 mai 2024 et que le service de distribution spéciale de la poste a ensuite tenté, sans succès, de notifier l’acte en date des 12, 13, 14 et 17 juin 2024.

d. Le 2 août 2024, l’Office a tenté de faire notifier le commandement de payer à l’administrateur E______ à son adresse, route 3______ no. 4______, [code postal] F______.

Un avis de retrait a été déposé le 7 août 2024, puis le service de distribution spéciale de la poste a tenté de procéder à la notification de l’acte les 20, 21, 22 et 26 août 2024, sans succès.

Les 11 et 26 novembre 2024, la notification de l’acte a été tentée par l’entremise des agents communaux, en vain.

e. Le commandement de payer a ensuite été notifié à A______ SA par voie de publication le 17 janvier 2025.

f. B______ AG a requis la continuation de la poursuite le 11 février 2025.

g. L’Office a établi la commination de faillite le 24 février 2025 et l’a remise à la poste en vue de sa notification à la poursuivie à l’adresse chemin 1______ no. 6______, [code postal] D______.

L’avis en vue du retrait a été déposé dans la case postale de la poursuivie le 26 février 2025. Les tentatives du service de distribution spéciale de la poste effectuées les 27 et 31 mars 2025 sont restées infructueuses.

h. Le 8 mai 2025, E______ s’est présenté à l’Office pour récupérer les actes de poursuite qui lui étaient adressés, dont la commination de faillite.

B. a. Par acte déposé à l’Office le 5 juin 2025, transmis à la Chambre de surveillance et parvenu à cette dernière le 16 juillet 2025, A______ SA a formé une plainte au sens de l’art. 17 LP contre cette commination de faillite, dont elle sollicite l’annulation. Elle expose que le commandement de payer ne lui a pas été valablement notifié et qu’elle n’a donc pas été en mesure de faire opposition à cette poursuite.

b. L’effet suspensif à sa plainte a été accordé par ordonnance du 16 juillet 2025.

c. Dans son rapport établi le 13 août 2025, l’Office a conclu au rejet de la plainte.

Il expose avoir tenté à plusieurs reprises de notifier le commandement de payer à A______ SA avant de procéder à la notification de cet acte par voie de publication.

d. B______ SA s’est déterminée le 18 août 2025, concluant au rejet de la plainte, sous suite de frais.

e. La cause a été gardée à juger le 20 août 2025.

EN DROIT

1.             1.1 La voie de la plainte au sens de l’art. 17 LP est ouverte contre les mesures de l’Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire (al. 1), ainsi qu’en cas de déni de justice ou de retard à statuer (al. 3). L’autorité de surveillance doit par ailleurs constater, indépendamment de toute plainte et en tout temps
(ATF
136 III 572 consid. 4), la nullité des mesures de l’Office contraires à des dispositions édictées dans l’intérêt public ou dans l’intérêt de personnes qui ne sont pas parties à la procédure (art. 22 al. 1 LP).

La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP ; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l’art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP). Elle peut également être déposée en tout temps en cas de nullité de l’acte contesté (art. 22 al. 1 LP), de retard à statuer et de déni de justice (art. 17 al. 3 LP).

1.2 En l’espèce, la plainte formée le 5 juin 2025 ne respecte pas le délai de 10 jours prévu par l’art. 17 al. 2 LP en tant qu’elle est dirigée contre la commination de faillite, qui a été notifiée à la plaignante le 8 mai 2025.

Il sera en revanche entré en matière sur le grief soulevé quant à la régularité de la notification du commandement de payer, susceptible d’entrainer la nullité de la poursuite et qu’il convient d’examiner en tout temps.

2. La plaignante se plaint de la notification irrégulière du commandement de payer, poursuite n° 5______ pour prétendre à l’annulation de la commination de faillite qui lui a été notifiée dans cette poursuite.

2.1.1 Un commandement de payer est un acte de poursuite qui doit faire l’objet d’une communication revêtant la forme qualifiée de la notification (art. 72 LP). Cette notification consiste en la remise de l’acte en mains du poursuivi ou, en l’absence de ce dernier, en mains d’une personne de remplacement désignée par la loi et aux lieux prévus par la loi (art. 64, 65 et 66 al. 1 à 3 LP).

La notification est opérée par le préposé ou un employé de l’Office ou par la Poste (art. 72 al. 1 LP) ; dans cette dernière hypothèse, l’employé postal agit en qualité d’auxiliaire de l’Office, auquel ses actes sont imputables (ATF 119 III 8 cons. 3b). La notification d’un commandement de payer fait courir le délai de dix jours pour y former opposition (art. 74 al. 1 LP).

2.1.2 L’art. 65 LP dresse une liste des personnes qui sont réputées être les destinataires directs autorisés à recevoir des actes de poursuite dirigés contre les personnes morales ou les sociétés. Le but de cette disposition est, compte tenu des lourdes conséquences attachées à la notification d’un acte de poursuite, de garantir une notification effective à l’un ou l’autre des représentants autorisés afin qu’il puisse, par exemple pour le commandement de payer, examiner l’opportunité d’y former opposition en pleine connaissance de cause (ATF 118 III 10 consid. 3a, JdT 1994 II 119 ; 117 III 10 consid. 5a ; 116 III 8 consid. 1b).

Lorsqu’aucun représentant de la personne morale au sens de l’art. 65 al. 1 LP ne peut être trouvé dans les bureaux de celle-ci, l’agent notificateur peut notifier l’acte de poursuite à un employé de la poursuivie (art. 65 al. 2 LP ; Jaques, De la notification des actes de poursuite, in BlSchK, 2011, pp. 177 ss., pp. 185-186, § 5.2 et les références citées ; ATF 117 III 10 consid. 5a). La notification à un employé suppose que ce dernier est rencontré dans les bureaux de la société ou de la personne morale, seul moyen d’être certain que l’acte de poursuite sera transmis dès que possible au représentant autorisé​ (Jeanneret/Lembo, CR LP, 2025, N 17 ad art. 65 LP).

C’est à l’Office qu’incombe le fardeau de la preuve de la notification régulière de l’acte, et en particulier, dans le cas d’une notification à une personne de remplacement au sens de l’art. 65 al. 2 LP, de l’échec de la tentative de notification à un représentant au sens de l’art. 65 al. 1 ch. 2 LP (ATF 117 III 10 consid. 5d).

2.1.3 La notification peut intervenir par publication lorsque le débiteur n’a pas de domicile connu ou lorsqu’il se soustrait obstinément à la notification
(art. 66 al. 4 ch. 1 et 2 LP).

En raison du risque élevé que le débiteur ne prenne pas effectivement connaissance de la publication et parce qu’elle est susceptible de porter atteinte à la bonne réputation du débiteur, il n’est possible de recourir à la notification par voie édictale qu’en ultima ratio, lorsqu’il n’y a pas d’autres moyens d’atteindre le débiteur. Cette stricte subsidiarité est une condition générale applicable aux trois hypothèses dans lesquelles l’art. 66 al. 4 LP autorise une notification par voie de publication (décision de la Chambre de surveillance DCSO/601/2024 du 29 novembre 2024 consid. 3.1.3 ; Jeanneret/Lembo, in CR LP, 2005, n. 19 ad art. 66 LP et les références citées).

La notification par voie édictale pour cause de soustraction à la notification (art. 66 al. 4 ch. 2 LP) présuppose ainsi en particulier que les modes de notification principal et subsidiaire prévus par les articles 64, 65 et 66 al. 1 à 3 LP aient été tentés vainement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_542/2014 consid. 5.1.2 ; Angst/Rodriguez, in BAK SchKG I, 2021, n° 22 ad art. 66 LP ; Penon/Wohlgemuth, in Kommentar SchKG, 2017, Kren Kostkiewicz/Vock [éd.], n. 24 ad art. 66 LP ; jeanneret/lembo, in CR LP, 2025, n° 21 ad art. 66 LP ; Gehri, in KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, N 14 ad art. 66 LP ; Jaques, De la notification des actes de poursuite, BlSchK 2011 p. 177 ss, 186 ; Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Articles 1-88, 1999, n° 66 ad art. 66 LP ; décisions de la Chambre de surveillance DCSO/601/2024 du 29 novembre 2024 consid. 3.1.3 ; DCSO/191/2020 du 12 juin 2020 consid. 2.1 ; DCSO/583/2017 du 9 novembre 2017 consid. 2.1 ; DCSO/595/2017 du 9 novembre 2017 consid. 2.2 ; DCSO/251/2016 du 11 août 2016 consid. 2.1).

2.1.4 Un vice affectant la procédure de notification entraîne la nullité de cette dernière si l’acte notifié n’est pas parvenu à la connaissance du débiteur
(ATF 110 III 9 consid. 2). Si en revanche, malgré ce vice, le débiteur a connaissance de l’acte notifié ou de son contenu essentiel, la notification n’est qu’annulable (ATF 128 III 101 consid. 2). Le délai pour former une plainte (art. 17 al. 2 LP), comme celui pour former opposition si l’acte notifié était un commandement de payer, commence alors à courir au moment de cette prise de connaissance (ATF 128 III 101 consid. 2).

2.2 En l’espèce, l’Office a notifié le commandement de payer à la plaignante par publication le 17 janvier 2025.

Avant de procéder par voie édictale, l’Office a tenté de notifier ce commandement de payer au siège de la plaignante sis chemin 1______ no. 2______ à D______ par la poste, qui a laissé des avis de retrait les 29 et 30 mai 2024 et a, par le biais de son service de distribution spéciale, tenté de remettre l’acte les 12, 13, 14 et 17 juin 2024. L’Office a ensuite essayé de notifier l’acte à l’administrateur de la plaignante au domicile de ce dernier, situé route 3______ no. 4______ à F______, dans un premier temps par la poste, qui a déposé un avis de retrait le 7 août 2024 et tenté de remettre l’acte par le biais de son service de distribution spéciale les 20, 21, 22 et 26 août 2025. L’Office a ensuite fait appel à des agents communaux qui ont procédé à des tentatives de notification en date des 11 et 26 novembre 2024.

L’Office a ainsi recouru à tous les modes de notification prévus par l’art. 65 LP et pouvait, partant, retenir que la plaignante tentait régulièrement de se soustraire à la notification de cet acte de poursuite. La notification du commandement de payer par voie de publication est ainsi conforme aux articles 65 et 66 LP.

Le grief tiré de l’irrégularité de la notification du commandement de payer n’étant pas fondé, la plainte sera rejetée.

3.             La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. A OELP) et ne donne pas lieu à l’allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 5 juin 2025 par A______ SA contre la commination de faillite dans la poursuite n° 5______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Monsieur Luca MINOTTI et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs ; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

La présidente :

Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.