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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/3389/2024

DCSO/491/2025 du 09.09.2025 ( PLAINT ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3389/2024-CS DCSO/491/25

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU MARDI 9 SEPTEMBRE 2025

 

Causes jointes A/3389/2024-CS et A/4319/2024-CS; plaintes formées en date du 15 octobre 2024 par A______.

* * * * *

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 10 septembre 2025
à :

- A______

______

______.

- B______

______

______.

- C______ Sàrl

______

______.

- Office cantonal des poursuites.

 


EN FAIT

A. a. Les époux D______ et A______ s'opposent dans un litige conjugal de grande intensité depuis plusieurs années.

Une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale (cause C/1______/2012) s'est déroulée de septembre 2012 à décembre 2014, ayant fait l'objet d'un jugement du Tribunal de première instance (ci-après le Tribunal) le 13 mai 2013, d'un arrêt de la Cour de justice (ci-après la Cour) le 11 avril 2014 et d'un arrêt du Tribunal fédéral du 1er décembre 2014. Au terme de la procédure, A______ a été condamné à verser une contribution mensuelle d'entretien de 30'000 fr. à D______.

Une seconde procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, initiée en juillet 2014, s'est conclue par un jugement du Tribunal le 30 juillet 2015 refusant la modification de la contribution d'entretien (cause C/2______/2014).

Une procédure de divorce est pendante entre les époux depuis le 5 novembre 2015 (cause C/3______/2015), qui n'a toujours pas fait l'objet d'un jugement, mais est émaillée de nombreux incidents et requêtes de mesures provisionnelles.

A______ a ainsi requis à trois reprises la modification de la contribution d'entretien en faveur de son épouse, sans succès (ordonnance OTPI/236/2016 du Tribunal du 10 mai 2016, confirmée par arrêt ACJC/1254/2016 de la Cour du 23 septembre 2016 et arrêt du Tribunal fédéral 5A_808/2016 du 21 mars 2017; ordonnance OTPI/469/2019 du Tribunal du 17 juillet 2019, confirmée par arrêt ACJC/70/2020 de la Cour du 14 janvier 2020 et arrêt du Tribunal fédéral 5A_157/2020 du 7 août 2020; ordonnance OTPI/301/2021 du Tribunal du 20 avril 2021, confirmée par arrêt de la Cour ACJC/1195/2021 du 13 septembre 2021 et arrêt du Tribunal fédéral 5A_895/2021 du 27 octobre 2021).

La Cour a rejeté par arrêt ACJC/835/2024 du 24 juin 2024 une demande de A______ en révision des décisions rendues sur mesures provisionnelles.

b. A______ refuse de verser la contribution d'entretien en faveur de son épouse, estimant en substance qu'elle est excessive car son épouse ne disposait que de 5'000 fr. par mois durant la vie commune et ne pouvait prétendre qu'à une pension mensuelle de 8'000 fr.

c. A______ était propriétaire d'un appartement à E______ (Valais).

Se prévalant des décisions rendues dans les procédures susmentionnées, D______ a entrepris un processus d'exécution forcée visant ce bien afin de recouvrer les contributions impayées. Elle en a obtenu le séquestre, puis la saisie et enfin la réalisation.

Selon A______, son épouse avait été, dans un premier temps, d'accord avec la vente de gré à gré de ce bien, afin d'en tirer un prix plus élevé que par une vente aux enchères. Elle s'était toutefois ravisée et avait fait pression pour qu'une vente aux enchères publique soit rapidement organisée, laquelle s'était tenue le 20 janvier 2020. Elle avait enchéri et emporté l'adjudication pour un prix de 620'000 fr., soit un montant très inférieur au prix du marché de l'avis de A______. Ce dernier aurait en effet reçu des offres de vente comprises entre 2'600'000 fr. et 3'700'000 fr. Le prix d'adjudication n'avait pas permis d'éteindre, par compensation, la créance en poursuite, laissant un découvert de 221'000 fr. qui avait conduit à la délivrance d'un acte de défaut de biens en faveur de D______. En outre, cette dernière avait réalisé une plus-value à la revente de l'appartement au prix de 1'621'786 fr. en avril 2021 et persistait néanmoins à lui réclamer l'intégralité des contributions d'entretien, sans imputation de dite plus-value. En tout état, son épouse avait bradé ce bien car il valait à tout le moins 5'000'000 fr. à l'époque, chiffre qu'elle avait elle-même allégué et reconnu dans le cadre de ses conclusions en liquidation du régime matrimonial dans la procédure de divorce. Actuellement, il vaudrait 7'000'000 fr. selon A______.

d. Les époux A______/C______ sont copropriétaires, à raison d'une moitié chacun, de la parcelle 4______ de la commune de G______, construite d'une villa qui a constitué le domicile de la famille pendant la vie commune.

Sur la base de l'acte de défaut de biens émis suite à la réalisation du bien de E______, D______ a requis à l'encontre de son mari un séquestre, exécuté sous n° 5______, de la part de copropriété de ce dernier sur la villa de G______ et une nouvelle poursuite, n° 6______, en validation du séquestre.

e. Se prévalant de nouvelles créances en entretien non honorées et de créances en frais judiciaires et dépens mis à la charge de son époux dans diverses procédures civiles et pénales, D______ a encore obtenu plusieurs séquestres de la part de copropriété de son mari sur la parcelle 4______ (séquestres nos 7______, 8______, 9______, 10______, 11______, 12______, 13______).

Elle a également intenté de nouvelles poursuites à l'encontre de celui-ci, notamment pour valider ces séquestres : n° 14______ pour un montant de 350'836 fr. 10; n° 15______ pour un montant de 491'289 fr. 80; n° 16______ pour un montant de 340'879 fr. 65; n° 17______, pour un montant de 1'810'859 fr. 25; n° 18______ pour un montant de 32'100 fr. 85; n° 19______ pour un montant de 49'100 fr. 85; n° 20______ pour un montant de 1'501'214 fr. 65.

f. Les poursuites visées sous lettres d et e supra ont conduit à la conversion des séquestres en saisie définitive de la part de copropriété de A______ sur la parcelle 4______, dans le cadre de plusieurs séries (séries n° 81 21______, n° 81 22______, n° 81 23______ et n° 81 24______). Celles-ci sont parvenues au stade de la réalisation.

Dans la réquisition de vente concernant les deux premières séries, D______ a demandé à l'Office de pouvoir acquérir de gré à gré la part de copropriété de son mari par compensation avec les créances qu'elle détenait à l'encontre de celui-ci, comme elle l'avait fait pour l'appartement de E______, ce à quoi A______ s'est opposé.

L'Office a refusé d'entrer en matière, D______ n'étant pas l'unique créancière pouvant prétendre à être désintéressée dans le cadre de la réalisation de de la part de copropriété de A______ saisie. Cette décision de l'Office a été validée par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance) dans le cadre d'un obiter dictum de la décision DCSO/523/22 du 15 décembre 2022 (cause A/820/2022).

g. Les diverses actions judiciaires des époux et les processus d'exécution forcée consécutifs ont engendré de très nombreuses procédures, notamment des plaintes auprès de la Chambre surveillance.

A______ y a manifesté un fort ressentiment à l'encontre de son épouse qu'il accusait d'adopter des comportements abusifs dans le cadre des poursuites qu'elle intentait à son encontre en recouvrement des contributions d'entretien exorbitantes auxquelles il avait été injustement condamné. Il citait l'exemple de la réalisation de son appartement de E______ qui avait permis à celle-ci de réaliser une plus-value qu'elle refusait toutefois d'imputer sur les montants qu'elle lui réclamait. Il dénonçait un pillage de son patrimoine (cf. notamment la cause A/2697/2021 et la présente cause).

h. Dans les procédures opposant A______ à D______, cette dernière a été représentée dans un premier temps par l'avocat F______, puis, dès 2017, par l'avocat B______.

B. a. Par acte déposé le 20 août 2024 auprès de la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte concluant à l'annulation des neuf poursuites intentées par son épouse. Il a en substance soutenu que toutes les décisions rendues à Genève dans les litiges l'opposant à son épouse depuis 2017 étaient nulles car cette dernière n'était pas valablement représentée par Me B______, ce conseil n'étant pas en mesure de produire une procuration valable justifiant de ses pouvoirs. Il en découlait que les poursuites en exécution des jugements civils prononcés à Genève étaient nulles non seulement pour avoir été intentées par un avocat "illégitime", mais également parce qu'elles étaient fondées sur des décisions nulles. Il se réservait de solliciter les autorités pénales genevoises et suisses pour "élucider ces graves infractions à la loi suisse".

b Par décision DCSO/529/24 du 7 novembre 2024, la Chambre de surveillance a rejeté cette plainte dans la mesure de sa recevabilité, considérant que A______ n'avait allégué aucune circonstance permettant de penser que Me B______ n'aurait pas valablement représenté D______ devant les diverses autorités et juridictions saisies des litiges l'opposant à son épouse depuis plus de sept ans et qu'il se fondait uniquement sur l'argument formel de l'absence de procuration écrite originale pour se légitimer, alors qu'un tel document n'était pas obligatoire dans une procédure d'exécution forcée et que l'absence d'un tel document dans une procédure civile n'était pas un motif d'irrecevabilité des actes de la partie (cause A/2666/2024).

C. a. Par courrier du 17 novembre 2023, A______ a invité Me B______ à "s'autodénoncer" au Procureur général pour son "implication directe dans une série d'actions illicites et illégales graves, y inclus au travers de la justice genevoise, contre moi et mes enfants depuis 2018". Il y évoquait "la destruction de sa vie, de sa famille et du pillage de ses biens qui dur[ai]ent déjà depuis une décennie". Il réclamait la "restitution dans les meilleurs délais des biens pris de [lui] / "introuvables" / volés [depuis le début de] cette affaire judiciaire grave : sa propriété à G______ avec tous les objets qui se trouvaient dans la maison lorsque [ses] enfants et [lui] av[aient] été forcés de partir en juillet 2013 sur la base de la fraude judiciaire; 10'000'000 fr. pris de [lui] y inclus la valeur incontestable de [son] appartement de [E______], [ses] effets privés introuvables, y inclus les bijoux ainsi que les espèces (…)". Il demandait également le "retrait de toutes les poursuites frauduleuses et illicites, obtenues exclusivement sur la base de la fraude judiciaire colossale maintenant prouvée comme telle par pièce et en possession du Ministère public de Genève".

b. A______ a dénoncé Me B______ à la Commission du barreau le 18 janvier 2024 concluant à sa radiation permanente du registre des avocats autorisés à exercer à Genève. A l'appui, il invoquait le fait que cet avocat et sa cliente participaient à une "ample corruption judiciaire" depuis 2018, respectivement 2012. Il avait pu s'en convaincre suite à un signalement au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant en vue d'une mesure de protection en raison de son comportement lors d'une audience du Tribunal de première instance, par le juge qui la présidait – juge par ailleurs membre de la Commission du barreau et dont la récusation avait été sollicitée pour ce motif. Il soutenait que ce signalement était resté sans suite et qu'il avait par conséquent porté plainte pénale contre le juge susvisé.

c. A______ a requis, le 19 janvier 2024, la poursuite de Me B______ et de C______ SARL pour un montant de 8'474'655 fr. plus intérêts à 10 % l'an dès le 1er septembre 2012, à titre de "fraude et vol dès 2018 (en relation dès 2012)".

d. L'Office a établi deux commandements de payer, poursuites n° 25______ et 26______, conformes aux réquisitions de poursuites. Ils ont été notifiés aux prétendus débiteurs le 31 janvier 2024. Ces derniers ont formé opposition à réception de ces actes.

e. A______ a également requis une poursuite pour un montant similaire à l'encontre de son épouse. Cette dernière ayant formé opposition au commandement de payer, il a requis la mainlevée de l'opposition par requête du 6 juillet 2024. Le sort de cette poursuite n'est pas connu.

f. A______ a fait parvenir à Me B______, le 7 février 2024, un courrier à la teneur suivante : "Malgré mes avertissements faits en bonne foi et par suite de votre persistance à poursuivre les chemins illégaux et illicites, déjà admis, (…) de vous emparer de ma propriété à Genève avec l'aide de juges genevois corrompus et comme annoncé, je suis déjà, selon mon droit à la défense légitime et la protection de ma propriété, en train d'entreprendre des démarches décisives immédiates y inclus avec les plus hautes autorités en Suisse ainsi que avec les média suisses et étrangers de démasquer votre conduite et l'exposer au public genevois et suisse. Par suite de seulement un pas initial de blocage de votre propriété et en complément, étant en contact avec les autorités fédérales sur votre comportement choquant, il semble que des mesures les plus sévères pourront être applicables à votre conduite inacceptable y compris des sanctions lourdes dont la nature vous certainement apprendrez dans le temps voulu. Egalement, votre conduite grave est maintenant sous la considération à plusieurs agences à l'étranger qui réagiront plus tôt que plus tard. Tout ça jusqu'au vous comprendrez que le comportement illicite et des tentatives de pillage de la propriété des gens innocents comme moi ne payent pas et vous disparaissez de la vie de mes enfants et de ma vie … mais seulement après que le dégât que vous avez fait à nous soit payé et réparé".

g. Me B______ et C______ SARL se sont adressés à l'Office, le 9 février 2024, afin que ce dernier constate la nullité des poursuites n° 25______ et n° 26______ en raison de leur caractère abusif. En effet, la démarche du prétendu créancier avait pour seul objectif d'exercer une pression sur Me B______ et son Etude d'avocat afin qu'ils se démettent de leur mandat de défense des intérêts de D______.

h. L'Office a constaté par décisions du 20 février, reçues le 21 février 2024 par A______, le caractère abusif des poursuites et leur nullité.

Il a en substance retenu que le contexte dans lequel s'inscrivaient les poursuites attaquées, l'atteinte au crédit des prétendus débiteurs qu'elles représentaient, le montant élevé de celles-ci et l'énoncé de la cause de la prétendue créance permettaient de retenir que les motivations du prétendu créancier étaient étrangères à un pur but de recouvrement.

i. A______ a contesté le contenu de ces décisions par courrier reçu le 24 mai 2024 par l'Office, estimant qu'elles représentaient un "faux grave [et] des accusations sérieuses mais complètement infondées contre [lui]". L'Office n'avait aucune autorisation légale pour juger de la validité de ses poursuites.

A______ a encore envoyé un courriel à l'Office le 27 mai 2024 l'avertissant que ses démarches n'étaient pas conformes au droit suisse et que ses décisions avaient été rendues en violation grave de plusieurs dispositions légales. Elles se fondaient notamment sur plusieurs faux et des dissimulations de preuve. Elle était par conséquent "un faux per se". Bien que les décisions émanent d'un juriste titulaire du brevet d'avocat, il ne ressortait pas clairement de la décision de l'Office qu'il avait compris les conséquences légales de ses actions.

j. L'Office a confirmé ne pas avoir l'intention de revenir sur ses décisions par courrier du 31 mai 2024 à A______.

k. A______ a adressé le 22 août 2024 à l'Office deux nouvelles réquisitions de poursuite contre Me B______ et C______ SARL, de 10'000'000 fr. chacune, plus intérêts à 10 % l'an dès le 1er septembre 2012. La cause de l'obligation mentionnée était : "selon documents du Ministère public de Genève du 16.11.2023; vol et participation au vol de mes biens – non contesté et avoué par écrit !!".

Dans un courrier joint, il reprochait à l'Office d'avoir saboté ses deux premières poursuites et que toute "nouvelle tentative" en ce sens serait "sanctionnée par des plaintes pénales immédiates et résolues".

l. L'Office a établi le 26 août 2024 deux nouveaux commandements de payer, poursuites n° 27______ et n° 28______, qui ont été notifiés aux prétendus débiteurs le 9 septembre 2024. Ceux-ci ont formé opposition aux commandements de payer à leur réception.

m. Ils ont également saisi l'Office, par courrier recommandé du 4 septembre 2024, d'une demande de constat de la nullité des poursuites en raison de leur caractère abusif, pour des motifs similaires à ceux développés dans leur démarche contre les poursuites n° 25______ et n° 26______. Ils ajoutaient que l'augmentation du montant réclamé à 10'000'000 fr. était incompréhensible, confirmant l'incongruité du montant réclamé.

n. L'Office a rendu deux décisions constatant la nullité des poursuites en raison de leur caractère abusif le 3 octobre 2024 fondées sur les mêmes motifs que ceux énoncés dans ses décisions précédentes.

Ces décisions ont été reçues par A______ le 5 octobre 2024.

D. a. Par deux actes au contenu quasiment similaire déposés au greffe de la Chambre de surveillance le 15 octobre 2024, A______ a formé une plainte contre chacune des décisions annulant les poursuite n° 27______ et 28______, respectivement contre Me B______ et contre C______ SARL, concluant à leur annulation et à ce que les poursuites aillent leurs voies.

Il soutenait disposer des preuves irréfutables et déterminantes qu'il avait été la victime d'une fraude judicaire colossale et d'un vol de plus de 10'000'000 fr. orchestrés par son épouse et Me B______, au travers de sa société C______ SARL, grâce à des "fabrications de la justice genevoise, y inclus le Ministère public". Me B______ l'avait notamment avoué lors d'une audience du 16 novembre 2023 tenue par le Ministère public. Malgré ses dénonciations et ses preuves incontestables, l'Office et le Tribunal s'évertuaient à ne pas vouloir admettre cet état de fait. Les décisions entreprises étaient dépourvues de tout contenu, constituaient un vide judiciaire et une dissimulation des preuves qu'il avait soumises. La qualification des poursuites d'abusives était une "invention" et constituait un "usage du langage incorrect, illicite, non professionnel, offensif, abusif et dévalorisant". Les décisions n’étaient pas motivées, ou uniquement par des phrases générales, déplacées dans le cas précis. L'Office agissait de manière obscure et n'indiquait pas le contenu des pièces qu'il citait. De manière contradictoire, il n'avait pas déclaré abusive et nulle la poursuite requise à l'encontre de D______. De son côté, le plaignant avait produit toutes les pièces nécessaires, notamment le procès-verbal de l'audience du 16 novembre 2023 lors de laquelle ses affirmations, justifiées par pièces, n'avaient pas été démenties par Me B______ et son épouse, ce qui impliquait reconnaissance du vol de 10'000'000 fr.

A l'appui de ses plaintes, A______ a notamment produit le procès-verbal d'audience du 16 novembre 2023 qui portait sur l'ouverture d'une instruction préliminaire à son encontre pour violation d'une obligation d'entretien. Il en ressortait qu'il y avait soutenu qu'il refusait de payer la contribution d'entretien fixée en faveur de son épouse car elle avait été obtenue par une fraude préméditée par un groupe genevois que son épouse avait organisé. Sa vie avait été détruite et son patrimoine pillé. Il avait déposé plusieurs pièces à l'appui de ses explications. Il avait demandé l'éloignement de Me B______ de la procédure car il le menaçait et avait menacé sa fille qu'il avait qualifiée de terroriste. La procureure lui avait expliqué qu'elle ne pouvait écarter un avocat, ce à quoi il avait répondu qu'en ne faisant rien elle violait ses droits fondamentaux et à un procès équitable.

b. Le greffe de la Chambre de surveillance a ouvert une seule procédure, cause n° A/3389/2024, sur la base de la plainte de A______ concernant la poursuite n° 27______, n'ayant pas réalisé que le plaignant avait déposé deux plaintes similaires, mais concernant deux poursuites distinctes.

c. Dans des observations du 17 octobre 2024 dans la cause A/3389/2024, Me B______ a conclu au rejet de la plainte le concernant et à la confirmation de la décision de l'Office qui en constatait la nullité. Il concluait également à ce qu'il soit ordonné à l'Office des poursuites de ne plus donner une suite automatique aux réquisitions de poursuites dirigées par A______ à l'encontre de son Etude ou de lui-même.

d. Dans ses déterminations du 5 novembre 2024 dans la cause A/3398/2024, l'Office a conclu au rejet de la plainte, persistant à estimer, en substance, que les poursuites n° 25______ et 27______ étaient abusives, car elles avaient un objectif externe au but de la poursuite, ne consistant pas à recouvrer le montant réclamé, mais à faire pression sur Me B______.

e. La Chambre de surveillance a informé les parties par avis du 7 novembre 2024 que la cause A/3398/2024 était gardée à juger.

f. Ayant constaté l'omission de traitement de la plainte concernant la poursuite n° 28______ contre C______ SARL, la Chambre de surveillance a ouvert une procédure, cause A/4319/2024, fixé des délais à cette dernière et à l'Office pour se déterminer.

g. Dans leurs observations des 6 et 7 mai 2025, l'Office et C______ SARL ont pris des conclusions et exposé une argumentation similaires à celles qu'ils avaient développées dans la cause parallèle.

h. A______ a répliqué les 10, 19, 20 mai et 2 juin 2025, persistant en substance dans ses conclusions.

i. C______ SARL a dupliqué le 4 juin 2025, persisté dans ses conclusions et complété celles-ci en ce sens qu'elle invitait la Chambre de surveillance à donner instruction à l'Office de ne plus donner suite automatiquement aux réquisitions de poursuite de A______ contre elle-même et Me B______.

j. A______ a tripliqué le 23 juin 2025, persistant dans ses conclusions et indiquant que le montant du préjudice de 10'000'000 fr. invoqué dans la poursuite litigieuse n'était qu'une infime partie du dommage subi, son épouse s'étant emparée dans l'ancien domicile conjugal de nombreux objets précieux et lingots d'or. Il a fait état de l'existence d'un "groupe / organisation de malfaiteurs genevoise et suisse [qui] avait été établie en juillet 2012 avec trois buts spécifiques :[le] pillage de tous [ses] biens de grande valeur en Suisse et, [s'il s'y] oppos[ait], [sa] persécution organisée et préméditée au travers de la justice genevoise que les membres de cette organisation de malfaiteurs contrôl[ai]ent presque entièrement (…) et, si nécessaire, de [le] faire tuer ou assassiner".

k. La Chambre de surveillance a informé les parties par avis du 3 juillet 2025 que les causes A/3389/2024 et A/4319/2024 étaient gardées à juger.

EN DROIT

1. Déposées en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie potentiellement lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), les plaintes sont recevables.

2. La jonction des causes A/4319/2024 et A/3389/2024 sera ordonnée sous ce dernier numéro de cause en raison de leur connexité (art. 70 LPA, applicable à la procédure devant la Chambre de surveillance en vertu des articles 9 al. 4 LaLP et 20a al. 3 LP).

3. 3.1 Sont nulles les poursuites introduites en violation du principe de l'interdiction de l'abus de droit, tel qu'il résulte de l'art. 2 al. 2 CC (ATF 140 III 481 consid. 2.3.1). La nullité doit être constatée en tout temps et indépendamment de toute plainte par l'autorité de surveillance (art. 22 al. 1 LP).

L'Office n'est pas compétent pour statuer sur le bienfondé matériel des prétentions du créancier déduites en poursuite. Cette question relève de la compétence du juge ordinaire. Saisi d'une réquisition de poursuite répondant aux exigences de l'art. 67 LP, l'Office est donc tenu d'y donner suite par la notification d'un commandement de payer (art. 71 al. 1 LP), sans avoir à se soucier de la réalité de la créance indiquée dans la réquisition de poursuite. L'Office ne peut ainsi exiger des explications sur la nature de la prétention ni refuser d'émettre un commandement de payer, même si la cause de la créance semble peu plausible voire imaginaire. Il est donc pratiquement exclu que le créancier obtienne de manière abusive l'émission d'un commandement de payer et puisse invoquer le grief de l'abus de droit à l'encontre de la créance litigieuse dans le cadre d'une plainte auprès de l'autorité de surveillance (ATF 136 III 365 consid. 2.1, avec la jurisprudence citée; 115 III 18 consid. 3b, JdT 1991 II 76; 113 III 2 consid. 2b, JdT 1989 II 120; arrêts du Tribunal fédéral 5A_250-252/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1, 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1, 5A_890/2012 du 5 mars 2013 consid. 5.3, 5A_595/2012 du 24 octobre 2012 consid. 5).

Ce nonobstant, la nullité d'une poursuite pour abus de droit peut être admise par les autorités de surveillance, dans des cas exceptionnels, notamment lorsqu'il est manifeste que le poursuivant agit dans un but n'ayant pas le moindre rapport avec la procédure de poursuite ou pour tourmenter délibérément le poursuivi; une telle éventualité est, par exemple, réalisée lorsque le poursuivant fait notifier plusieurs commandements de payer fondés sur la même cause et pour des sommes importantes, sans jamais requérir la mainlevée de l'opposition, ni la reconnaissance judiciaire de sa prétention, lorsqu'il procède par voie de poursuite contre une personne dans l'unique but de détruire sa bonne réputation, lorsque par esprit de chicane il requiert une poursuite pour un montant manifestement trop élevé, lorsqu'il reconnaît, devant l'Office des poursuites ou le poursuivi lui-même, qu'il n'agit pas envers le véritable débiteur, ou encore lorsqu'il requiert la poursuite en contradiction avec des attentes suscitées chez l'autre partie, par exemple en introduisant une nouvelle poursuite alors que des pourparlers sont sur le point d'aboutir en vue du retrait d'une poursuite précédente portant sur la même créance (venire contra factum proprium). L'existence d'un abus ne peut donc être reconnue que sur la base d'éléments ou d'un ensemble d'indices démontrant de façon patente que l'institution du droit de l'exécution forcée est détournée de sa finalité (ATF 140 III 481 consid. 2.3.1, JdT 2015 II 298; 130 II 270 consid. 3.2.2; 115 III 18 consid. 3b, JdT 1991 II 76; arrêts du Tribunal fédéral 5A_1020/2018 du 11 février 2019, 5A_317/2015 du 13 octobre 2015 consid. 2.1, 5A_218/2015 du 30 novembre 2015 consid. 3; décision de la Chambre de surveillance DCSO/321/10 du 8 juillet 2010 consid. 3.b).

3.2 En l'espèce, il ressort des divers écrits du plaignant qu'il est convaincu d'être l'objet d'une campagne visant à le spolier injustement de sa fortune, orchestrée par son épouse et l'avocat de celle-ci, dans le cadre de leur divorce, avec la complicité des autorités judiciaires et d'exécution forcée genevoises. Il s'estime par conséquent en droit de réclamer un dédommagement de la part de son épouse, de son conseil et de l'Etude de ce dernier. A priori, le plaignant ne mésuse donc pas de l'institution de la poursuite pour dettes, même si le montant et les fondements de la créance qu'il allègue apparaissent incongrus, ce qui n'est pas encore suffisant pour déclarer une poursuite abusive et nulle.

Cela étant, l'ensemble des décisions prises par les autorités judiciaires dans le litige entre le plaignant et son épouse ont été systématiquement contestées par celui-là devant toutes les instances de recours possibles et confirmées par les plus hautes instances du pays. Sa conviction d'être la victime de menées illicites et d'avoir droit à un dédommagement doit ainsi être relativisée. Le montant du préjudice articulé est de surcroît exorbitant et inexpliqué.

Force est de constater que son épouse et son conseil agissent à son encontre par des procédés d'exécution forcée légaux sur la base de décisions judiciaires exécutoires confirmées à de multiples reprises, y compris par le Tribunal fédéral. Par ailleurs, le processus d'exécution forcée est conduit correctement par l'intimé et sa cliente, ce qui a été confirmé à maintes reprise par l'autorité de surveillance et le Tribunal fédéral après examen et rejet de la plupart des griefs du plaignant. Ce dernier a certes été particulièrement choqué par la manière dont s'est déroulée la réalisation de son appartement de E______ et le rôle joué par son épouse; si cette dernière et son conseil ont mené cette opération d'une façon qui a été favorable à celle-là, aucune irrégularité ne peut a priori être reprochée à l'intéressée, à son conseil ni à l'Office qui a organisé la vente forcée, au vu des griefs formulés par le plaignant. Celui-ci fait également grand cas d'un procès-verbal d'audience devant le Ministère public du 16 novembre 2023 qui établirait l'existence d'une démarche dolosive de l'intimé; à sa lecture, rien ne permet de retenir que l'intimé y aurait reconnu des torts ou la dette en poursuite, ni que le plaignant aurait indubitablement prouvé le complot allégué et le préjudice qui en découlerait par les pièces qu'il avait produites.

Dans un tel contexte, le plaignant ne saurait soutenir que la créance invoquée à l'appui des poursuites est articulée de bonne foi.

En tout état, les poursuites litigieuses visent un avocat et son Etude, soit une profession sensible à l'existence de poursuites, surtout pour des montants aussi importants. Elles sont susceptibles de nuire à la réputation et à la marche des affaires de l'homme de loi. Elles s'inscrivent dans un ensemble de mesures hostiles prises par le plaignant à l'encontre de Me B______ et de son Etude (reproche largement répandu de participation à une ample corruption judiciaire, ainsi qu'à une fraude et un vol avec la complicité des autorités judiciaires, dénonciation à la Commission du barreau, démarches judiciaires en vue de faire constater l'inexistence du mandat confié par D______, invitation à se démettre dudit mandat, invitation à s'autodénoncer auprès du Ministère public, menaces de déposer des plaintes pénales, de s'en prendre à ses biens ou encore de lancer une campagne nationale, voire internationale, de dénigrement). Le plaignant a expressément menacé l'intimé de représailles s'il ne se démettait pas du mandat de défense des intérêts de son épouse et ne cessait ses menées à son encontre. Ses poursuites participent par conséquent d'une campagne d'intimidation à l'encontre de l'avocat de son épouse et de cette dernière. En ce sens, elles s'éloignent des buts dévolus à la poursuite – à savoir simplement obtenir le paiement d'un montant que l'on estime dû – et visent essentiellement à tourmenter l'intimé.

Le plaignant voit une contradiction dans l'attitude de l'Office qui n'a déclaré abusives et nulles que les poursuites contre Me B______ et C______ SARL et non pas celle contre D______. Cette contradiction n'est qu'apparente. L'épouse du plaignant n'a pas demandé à l'Office ou à l'autorité de surveillance de constater le caractère abusif de la poursuite la visant, ce qui signifie qu'elle n'a pas considéré qu'à son encontre les poursuites en question étaient malveillantes. En outre, dans la mesure où elle serait l'auteur et la bénéficiaire du vol dont le plaignant s'estime la victime, la créance en poursuite est moins improbable que celle dirigée contre l'avocat de son épouse et son Etude. En outre, la dimension de contrainte attachée à la poursuite contre l'intimé n'est pas présente dans la poursuite contre D______, puisque l'un des buts avérés des poursuites contre celui-là et son Etude est de les contraindre à renoncer au mandat de représentation de celle-ci.

En résumé, même si l'examen du bienfondé d'une créance en poursuite n'est en principe pas de la compétence de l'Office, ni de la Chambre de surveillance, l'incongruité particulière de son fondement et de son montant, cumulée aux circonstances du cas d'espèce et à l'attitude globale du plaignant envers les intimés et les autorités, permettent de retenir que les poursuites litigieuses relèvent d'une finalité étrangère à l'exécution forcée et sont abusives, de sorte qu'elles ont été annulées à bon droit par l'Office dans les décisions entreprises.

Il en résulte de ce qui précède que les plaintes seront rejetées.

4. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

Préalablement :

Ordonne la jonction, sous le numéro de cause A/3389/2024, des causes A/3389/2024 et A/4319/2024.

A la forme :

Déclare recevables les plaintes formées le 15 octobre 2024 par A______ contre les décisions de l'Office du 3 octobre 2024 constatant la nullité des poursuites n° 25______ et n° 26______ en raison de leur caractère abusif.

Au fond :

Les rejette.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Messieurs Alexandre BÖHLER et
Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

Le président : La greffière :

Jean REYMOND Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.