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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/1079/2024

DCSO/383/2024 du 14.08.2024 ( PLAINT ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1079/2024-CS DCSO/383/24

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU MERCREDI 14 AOÛT 2024

 

Plainte 17 LP (A/1079/2024-CS) formée en date du 28 mars 2024 par A______.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

- A______

c/o MME B______

______

______ [GE].

- ETAT DE GENEVE, SERVICE CANTONAL D'AVANCE ET DE RECOUVREMENT DES PENSIONS ALIMENTAIRES (SCARPA)

Rue Ardutius-de-Faucigny 2

1204 Genève.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Le Service cantonal d'avance et de recouvrement des pensions alimentaires (ci-après le SCARPA) a requis et obtenu du Tribunal de première instance (ci-après le Tribunal), le 21 mars 2024, le séquestre des indemnités journalières de chômage de A______ en mains de C______, à concurrence de 12'618 fr. 38. Il se fondait sur un acte de défaut de biens et la cession en sa faveur d'une créance d'entretien en faveur de D______ et E______ pour la période du 1er avril au 10 octobre 2015 fixée par jugement JTPI/12383/2015 du 20 octobre 2015 du Tribunal statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale.

b. L'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) a exécuté le même jour le séquestre, auquel le n° 1______ a été attribué, en invitant le C______ à retenir la totalité des indemnités perçues par A______, jusqu'à ce que le montant saisissable soit déterminé.

c. Suite à l'audition du 27 mars 2024 du débiteur, l'Office a arrêté à 3'200 fr. son minimum vital mensuel et fixé la quotité saisissable de ses gains mensuels à toute somme supérieure audit montant. Il a retenu les charges incompressibles suivantes : base mensuel d'entretien pour un débiteur vivant seul : 1'200 fr.; loyer : 850 fr. (participation au loyer de B______ avec laquelle il est en colocation, sans relation de concubinage); frais de recherche d'emploi : 80 fr.; transports : 70 fr.; frais médicaux non pris en charge par une assurance : 1'000 fr. (traitement dentaire avec plan de paiement à raison de 1'000 fr. par mois); assurance-maladie : 0 fr. (impayée).

d. L'Office a notifié le procès-verbal de séquestre aux parties le 3 avril 2024.

e. Il a porté le minimum vital du débiteur à 3'615 fr. par mois le 17 avril 2024 pour tenir compte d'un montant insaisissable de 401 fr. versé au débiteur à titre d'allocation de formation, ce dont il a informé le C______ le jour même.

B. a. Par acte expédié le 28 mars 2024 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), A______ a formé une plainte contre le séquestre au motif qu'il compromettait son minimum vital.

b. Par courrier du 9 avril 2024, A______ a complété sa plainte en alléguant des charges incompressibles de 3'880 fr. 55 (1'200 fr. de montant de base mensuel; 850 fr. de frais de logement; 673 fr. 55 de cotisation d'assurance-maladie; 50 fr. de pension alimentaire versée au SCARPA; 1'000 fr. de frais médicaux non remboursés; 107 fr. de frais de communications). Compte tenu des allocations de chômage de 3'100 fr. nets par mois (allocations de formation déduites), son budget mensuel était déficitaire.

c. Dans ses observations du 29 avril 2024, l'Office a persisté dans son calcul du minimum vital du débiteur et conclu au rejet de la plainte.

d. Les parties ont été informées le 7 mai 2024 que l'instruction de la cause était close.

EN DROIT

1.             1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de l'article 17 al. 1 LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire. L'autorité de surveillance doit par ailleurs constater, indépendamment de toute plainte et en tout temps (ATF 136 III 572 consid. 4), la nullité des mesures de l'Office contraires à des dispositions édictées dans l'intérêt public ou dans l'intérêt de personnes qui ne sont pas parties à la procédure (art. 22 al. 1 LP). Tel est le cas d'une saisie violant de façon manifeste le minimum vital du débiteur (ATF 114 III 78; arrêt du Tribunal fédéral 5A_680/2015 du 6 novembre 2015 consid. 3).

1.2 La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP). Elle peut également être déposée en tout temps en cas de nullité de l'acte contesté (art. 22 al. 1 LP), de retard à statuer et de déni de justice (art. 17 al. 3 LP).

1.3 En l'occurrence, la plainte soulève le grief de l'atteinte manifeste au minimum vital du débiteur, soit la nullité du séquestre entrepris, de sorte qu'elle est recevable en tout temps et sans respect des formes requises, dans la mesure où l'atteinte invoquée est réalisée. Il est dès lors inutile d'examiner la recevabilité formelle de la plainte : en cas d'atteinte au minimum vital, la plainte serait en tout état recevable; si une telle atteinte ne devait pas être retenue, elle serait en tout état rejetée et la question sa recevabilité serait sans intérêt.

Quoi qu'il en soit, formée par écrit le 28 mars 2024, la plainte est intervenue par écrit dans le délai de dix jours dès l'exécution du séquestre et en tous les cas avant la notification du procès-verbal de séquestre, point de départ habituel du délai de plainte en cas de séquestre de sorte qu'elle est recevable à ces égards à tout le moins.

2. 2.1.1 Selon l'art. 93 al. 1 LP – applicable au séquestre par renvoi de
l'art. 275 LP –, les revenus relativement saisissables tels que les revenus du travail ne peuvent être saisis – respectivement séquestrés – que déduction faite de ce que le préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital).

Pour fixer le montant saisissable – en fonction des circonstances de fait existant lors de l'exécution de la saisie (ATF 115 III 103 consid. 1c; ATF 112 III 79 consid. 2) – l'Office doit d'abord tenir compte de toutes les ressources du débiteur; puis, après avoir déterminé le revenu global brut, il évalue le revenu net en opérant les déductions correspondant aux charges sociales et aux frais d'acquisition du revenu; enfin, il déduit du revenu net les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur et de sa famille, en s'appuyant pour cela sur les directives de la Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse (ci-après conférence des préposés; BlSchK 2009, p. 196 ss), respectivement, à Genève, sur les Normes d'insaisissabilité édictées chaque année par l'autorité de surveillance (ci-après : NI; publiées au recueil systématique des lois genevoises : RS/GE E.3.60.04; Ochsner, Le minimum vital (art. 93 al. 1 LP), in SJ 2012 II p. 119 ss, 123; Collaud, Le minimum vital selon l'article 93 LP, in RFJ 2012 p. 299 ss, 303; arrêt du Tribunal fédéral 5A_919/2012 du 11 février 2013 consid. 4.3.1).

2.1.2 Les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur se composent en premier lieu d'une base mensuelle d'entretien, fixée selon la situation familiale du débiteur, qui doit lui permettre de couvrir ses dépenses élémentaires, parmi lesquelles l'alimentation, les vêtements et le linge, les soins corporels, l'entretien du logement, les frais culturels, la téléphonie et la connectivité, l'éclairage, l'électricité, le gaz, les assurances privées, etc. (art. I NI; OCHSNER, Le minimum vital, op. cit., p. 128). La base mensuelle d'entretien est fixée sous forme de forfaits attribués au débiteur et aux membres de sa famille en fonction de la composition du groupe familial. Pour un débiteur vivant seul il s'élève à 1'200 fr. (art. 1 NI).

2.1.3 D'autres charges indispensables, comme les frais de logement (art. II.1 et II.3 NI), les primes d'assurance-maladie obligatoire (art. II.3 NI), les contributions d'entretien dues en vertu de la loi (art. II.5 NI) doivent être ajoutées à cette base mensuelle d'entretien, pour autant qu'elles soient effectivement payées (ATF 121 III 20 consid. 3b, JdT 1997 II p. 163; ATF 120 III 16 consid. 2c, JdT 1996 II p. 179; ATF 112 III 19, JdT 1988 II p. 118; OCHSNER, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 82 ad art. 93 LP). S'il s'avère que les charges ne sont payées qu'irrégulièrement, l'Office ne tiendra compte que d'un montant correspondant à la moyenne de ce qui a été acquitté pour la charge en question durant l'année précédant la saisie. Il peut toutefois retenir intégralement la charge impayée si le débiteur démontre qu'il entend désormais assumer celle-ci régulièrement et qu'il a déjà effectué au moins un premier versement (Ochsner, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 82 et 83 ad art. 93 LP; Ochsner, Le minimum vital (art. 93 al. 1 LP), in SJ 2012 II p. 119 ss, p. 127; Collaud, op. cit., in RFJ 2012 p. 299 ss, p. 309; Nicolet, Van Hove, Woessner, Guillard, Jurisprudence de l’Autorité de surveillance des Offices de poursuite et de faillites du Canton de Genève de 1995 à 1998, in SJ 2000 II p. 199 ss, p. 213).

2.1.4 Lorsqu'elle est saisie d'une plainte, l'autorité de surveillance vérifie uniquement si la retenue fixée par l'Office ou le calcul qu'il a effectué est conforme aux faits déterminant la quotité saisissable des revenus du débiteur, compte tenu des circonstances existant au moment de l'exécution de cette mesure (ATF 121 III 20 consid. 3, JdT 1997 II 163). Si le plaignant souhaite invoquer des faits nouveaux, il lui appartient de les faire valoir par la voie de la révision de la saisie auprès de l'Office et non par la voie de la plainte (art. 93 al. 3 LP; ATF 108 III 10; VONDER MÜHLL, Basler Kommentar SchKG I, n° 54 ad art. 93 LP; DCSO/243/2015 du 20 août 2015 consid. 2.2 et 2.3). Il informe l'Office de toute modification des circonstances propre à entraîner une modification de l'ampleur de la saisie, notamment à partir du moment où il établit qu’il paie effectivement de nouvelles charges admissibles dans le calcul du minimum vital (art. 93 al. 3 LP; ATF 121 III 20 consid. 3b, JdT 1997 II p. 163; ATF 120 III 16 consid. 2c, JdT 1996 II p. 179; ATF 112 III 19, JdT 1988 II p. 118; WINKLER, Kommentar SchKG, 2017, Kren Kostkiewicz / Vock [éd.], n° 82 ad art. 93 LP).

Dès qu'il a connaissance de telles circonstances, par le débiteur ou d'une autre manière, l'Office doit immédiatement les élucider et, le cas échéant, rendre une nouvelle décision (arrêt du Tribunal fédéral 5A_675/2011 du 19 janvier 2012 consid. 3.2; WINKLER, op. cit., n° 83 ad art. 93 LP).

2.2 En l'espèce, le plaignant adresse trois reproches à l'Office, emportant une atteinte à son minimum vital : ne pas avoir tenu compte des primes d'assurance-maladie, de ses frais de téléphonie et du paiement de la contribution d'entretien faveur de son épouse et de sa fille à hauteur de 50 fr. par mois.

S'agissant du premier, l'Office n'a pas admis cette charge en raison de son non-paiement. Le plaignant n'a pas établi payer ses primes d'assurance-maladie dans le cadre de la présente procédure, de sorte que ce grief se révèle infondé.

En ce qui a trait au second, les frais de téléphonie sont compris dans le montant de base mensuel, de sorte que l'Office en a bien tenu compte et ce grief est également sans mérite.

Concernant le troisième, il s'agit d'un fait nouveau dont l'Office n'avait pas été informé et dont le plaignant se prévaut pour la première fois devant la Chambre de surveillance. Il n'appartient pas à cette dernière de procéder à une révision de la décision entreprise, mais uniquement de vérifier si l'Office avait bien appliqué le droit sur la base des éléments dont il disposait au moment de rendre sa décision. Tel est bien le cas en l'occurrence. L'Office s'est d'ailleurs dit prêt à entrer en matière sur une modification de la saisie litigieuse sur la base de ces circonstances nouvellement annoncées, pour peu que les versements se révèlent réguliers, ce que le plaignant devra démontrer auprès de l'Office pour qu'il en tienne compte.

En définitive, la plainte sera rejetée, les deux premiers griefs soulevés étant infondés et le troisième devant être présenté devant l'Office et non devant la Chambre de surveillance.

3. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 28 mars 2024 et complétée le 9 avril 2024 par A______ contre le séquestre n° 1______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Ekaterine BLINOVA et
Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.