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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/936/2023

DCSO/368/2023 du 31.08.2023 ( PLAINT ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : Minimum vital; nullité; plainte hors délai
Normes : LP.93; LP.22
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/936/2023-CS DCSO/368/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 31 AOÛT 2023

 

 

Plainte 17 LP (A/936/2023-CS) formée en date du 13 mars 2023 par A______, élisant domicile en l'étude de Me Philippe Currat, avocat.

* * * * *

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

c/o Me CURRAT Philippe

Currat & Associés, Avocats

Rue de Saint-Jean 73

1201 Genève.

- CONFEDERATION SUISSE

Schwarztorstrasse 50

3003 Berne.

- ETAT DE GENEVE, ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE
Service du recouvrement
Rue du Stand 26
Case postale 3937
1211 Genève 3.

- Office cantonal des poursuites.


EN FAIT

A. a. A______ fait notamment l’objet des poursuites nos 1______ et 2______ engagées à son encontre par la CONFEDERATION SUISSE, respectivement l’ETAT DE GENEVE en paiement des sommes, hors frais et intérêts, de 3'787 fr. 35 et 487 fr. 80.

b. Le 30 mars 2022, l'Office cantonal des poursuites (ci-après: l'Office) a adressé à A______ un avis de saisie l’invitant à sa présenter à l’Office en cas de changement de sa situation, une nouvelle saisie devant avoir lieu sur les mêmes actifs, à savoir son salaire, que ceux visés par la saisie précédente.

Ce courrier recommandé n’ayant pas été retiré, il a été retourné à l’Office.

c. Par courrier du 2 mai 2022, l’Office a fait notifier au poursuivi un avis de confirmation de saisie de gains en ses mains d’un montant de 1'739 fr. par mois dès le mois de mai 2022. Cette lettre, envoyée par pli recommandé, n’a pas été retirée au guichet postal.

d. Le procès-verbal de saisie, n° 3______ a été adressé à A______ le 13 juin 2022 par courrier recommandé, qu’il n’a pas retiré, et par courrier simple. Les gains d'indépendant de A______ étaient saisis en ses mains à hauteur de 1'739 fr. par mois et de "toutes sommes lui revenant à titre de primes, gratifications et/ou 13ème salaire", pour la période allant du 27 octobre 2022 au 2 mai 2023.

Se fondant sur une évaluation antérieure de la situation financière du poursuivi, l’Office a retenu que celui-ci travaillait « à son compte » comme administrateur de la société B______ SA et réalisait un revenu mensuel de 8'522 fr. 75. Les charges du ménage qu'il formait avec sa compagne (qui ne percevait aucun revenu) et leurs deux enfants, âgés alors de 14 et 10 ans, totalisaient 6'983 fr. 70 par mois, comprenant l'entretien de base de la famille (1'700 fr. pour le couple + 1’200 fr. pour les enfants – 600 fr. d’allocations familiales), le loyer (3'880 fr.), les frais d’un animal domestique (50 fr.), les repas pris à l’extérieur par le débiteur (242 fr.), les frais de transport de sa compagne (70 fr.), les frais d’assurance-maladie des enfants (132 fr. 85 x 2) et les frais de repas extérieur de l’enfant aîné (176 fr.).

Les revenus de A______ ont été estimés, lors de son audition du 21 octobre 2021, sur la base des sommes reçues de sa part ou de tiers sur son compte [auprès de] C______ pour la période de mars à septembre 2021, d’un total de 51'136 fr. 50. Le protocole d’audition, signé par A______, indique que ses revenus, établis sur une moyenne de six mois, selon ses relevés C______, s’élevaient à 8’522 fr. 75.

e. Le 3 janvier 2023, A______ a fait parvenir à l’Office la preuve du paiement de son loyer de septembre à décembre 2022 depuis un compte ouvert à [la banque] D______, un décompte de débits intervenus sur son compte C______ et le relevé des mouvements survenus sur ce compte du 18 décembre 2020 au 15 février 2022, dont seule est produite à la procédure la période du 4 novembre 2021 au 15 décembre 2022.

f. Le 30 janvier 2023, l’Office a envoyé un rappel à A______ pour le règlement des sommes saisies en novembre et décembre 2022.

g. Par courrier de son conseil du 7 février 2023, A______ a indiqué à l’Office être salarié et non pas indépendant. Ses revenus et ses charges ne permettaient pas une saisie à hauteur de 1'739 fr. par mois sans atteindre son minimum vital.

h. Le 14 février 2023, l’Office a informé le poursuivi que les éléments fournis le 3 janvier 2023 n’étaient pas suffisants pour revoir le montant de la saisie. Il a sollicité la remise de documents complémentaires, soit ses fiches de salaire, les relevés de ses différents comptes bancaires et sa demande en vue de percevoir les allocations familiales pour ses fils.

i. Par courriers des 24 février et 3 mars 2023, A______ a persisté à contester la saisie, sans toutefois fournir les documents demandés.

j. Par courrier du 6 mars 2023, l’Office a sollicité une nouvelle fois la remise par le poursuivi de ses décomptes bancaires, ses fiches de salaire et des quittances de loyer et des primes d’assurance-maladie de la famille, afin d’adapter, cas échant, le montant de la saisie.

B. a. Par acte expédié par messagerie sécurisée le 13 mars 2023, A______ forme plainte contre le procès-verbal de saisie du 13 juin 2022, invoquant le fait que la saisie porte sur des revenus d’indépendant alors qu’il est salarié, que le total des retenues dépasse largement la somme nécessaire pour couvrir la série litigieuse et que les frais figurant dans le procès-verbal n’étaient ni détaillés, ni justifiés. Il conclut à l’annulation du procès-verbal et au renvoi de la cause à l’Office afin de revoir ces éléments.

A______ se prévaut de son bordereau fiscal pour l’année 2021 – taxation d’office - qui retient un revenu imposable à l’ICC de 37'000 fr., et du certificat de salaire établi en sa faveur par B______ SA pour l’année 2022, présentant un salaire annuel net de 46'656 fr., ce qui réparti sur douze mois représente un revenu mensuel de 3'888 fr. Il fait également valoir une facture de prime d’assurance-maladie obligatoire de 631 fr. 30 du mois d’avril 2023.

b. Par courrier du 28 mars 2023, l’Administration fiscale cantonale a renoncé à formuler des observations.

c. Dans son rapport du 12 avril 2023, l’Office s’en remet à justice sur la recevabilité de la plainte, constate que le plaignant est insaisissable à compter de janvier 2023 et conclut pour le surplus au rejet de la plainte. D’après les statuts de B______ SA, publiés sur internet, le plaignant était l’actionnaire de la société, de sorte qu’il se justifiait de l’assimiler à un indépendant. Les explications fournies au sujet de ses revenus étaient douteuses. L’Office s’était ainsi fondé sur les sommes perçues sur le compte C______ de mars à septembre 2021, admettant toutefois s’être trompé dans son calcul du fait qu’il avait divisé le total perçu, de 51'136 fr. 50, par six mois alors que la moyenne intervenait sur sept mois. A______ avait ainsi reçu sur son compte la somme mensuelle de 7'305 fr. par mois (et non 8'522 fr. 75). Il y avait toutefois lieu d’ajouter à ces revenus 15’520 fr. (3'880 fr. x 4 mois), dès lors que le loyer du ménage avait été réglé, de mars à juin 2021, depuis un autre compte bancaire. Les revenus du débiteur étaient donc de 9'522 fr. par mois ([51'136 fr. 50 + 15'520 fr.] / 7 mois) au moment de l’exécution de la saisie. Il n’y avait pas lieu de tenir compte des primes d’assurance-maladie, aucun justificatif de paiement n’ayant été fourni. Aussi, la saisie opérée du 27 octobre 2022 au 3 janvier 2023 était correcte. A compter du mois de janvier 2023, il y avait néanmoins lieu de procéder à une révision pour tenir compte des éléments nouveaux dont le plaignant avait fait état par courrier du 3 janvier 2023. Les revenus mensuels nets de A______ pouvaient être estimés, sur la base de ses révélés C______ et des loyers payés pendant quatre mois en 2022 depuis le compte de [la banque] D______, à 6'683 fr. 27. Ce montant n’étant pas suffisant pour couvrir ses charges, d’un total de 6'783 fr. 70, le poursuivi était insaisissable à compter de janvier 2023.

d. Par courrier du 1er mai 2023, A______ se prévaut du fait que l’Office a admis s’être trompé dans le calcul de ses revenus. En toute hypothèse, cette manière de procéder reposait uniquement sur la division de la somme des crédits sur la période concernée, sans aucun examen quant à la source desdits crédits, qui ne pouvaient être considérés sans autre analyse comme des revenus tirés d’une activité indépendante. Le montant du salaire retenu par l’Office était donc arbitraire. Le plaignant conteste également l’estimation faite par l’Office de ses ressources pour la période partant du mois de janvier 2023, sans donner davantage de précision. Il se limite à indiquer que le montant des loyers était payé depuis un compte ouvert à [la banque] D______ au nom de E______ SA, dont il était administrateur. La société l’avait en effet autorisé à payer le loyer depuis son compte commercial, à charge pour lui de lui rembourser ces montants ultérieurement. Il était par ailleurs administrateur unique de B______ SA, de F______ SA et de G______ SA, transformée en 2023 en H______ SA. Il ne percevait toutefois des revenus que de B______ SA, F______ SA et H______ SA n’ayant pas d’actifs ni d’activité en l’état.

e. Par courriers du 17 mai 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1.1. La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de l'art. 17 LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire (al. 1), ainsi qu'en cas de déni de justice ou de retard à statuer (al. 3). L'autorité de surveillance doit par ailleurs constater, indépendamment de toute plainte et en tout temps (ATF 136 III 572 consid. 4), la nullité des mesures de l'Office contraires à des dispositions édictées dans l'intérêt public ou dans l'intérêt de personnes qui ne sont pas parties à la procédure (art. 22 al. 1 LP).

1.1.2. La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

Lorsque le débiteur entend se plaindre d'une saisie prétendument contraire aux art. 92 et 93 LP, ce délai de dix jours commence à courir avec la communication du procès-verbal de saisie (ATF 107 III 7 consid. 2).

Le débiteur est censé avoir renoncé à se prévaloir de ce moyen s'il ne s'est pas adressé à l'autorité de surveillance dans les dix jours suivants la communication du procès-verbal de saisie. La jurisprudence a cependant tempéré cette exigence et admis, pour des raisons d'humanité et de décence, que la nullité d'une saisie peut être prononcée, malgré la tardiveté de la plainte, lorsque la mesure attaquée prive le débiteur et les membres de sa famille des objets indispensables au vivre et au coucher. L'exception ainsi faite à la règle a été étendue aux cas où la saisie porte une atteinte flagrante au minimum vital, à telle enseigne que son maintien risquerait de placer le débiteur dans une situation absolument intolérable (ATF 97 III 7, JdT 1973 II 20 ss; cf. ég. ATF 114 III 78, JdT 1990 II 162 ss).

1.1.3. Selon l'art. 138 al. 3 let. a CPC, applicable par renvoi de l'art. 31 LP, un acte communiqué par envoi recommandé est réputé notifié lorsqu'il n'a pas été retiré à l'expiration d'un délai de garde de sept jours, si le destinataire devait s'attendre à recevoir la notification.

1.2. En l’espèce, le plaignant, qui se savait objet des poursuites nos 1______ et 2______, devait s’attendre à recevoir de l’Office des communications liées à une saisie. La présomption de notification au terme du délai de garde de sept jours prévue par l'art. 138 al. 3 let. a CPC lui est donc applicable. L’intéressé n’invoque du reste aucune irrégularité affectant la notification du procès-verbal de saisie du 13 juin 2022. La plainte formée le 13 mars 2023 contre ledit procès-verbal intervient donc largement après l’échéance du délai de dix jours prévu par l’art. 17 al. 2 LP. Elle est ainsi a priori irrecevable.

Il convient toutefois d'examiner si la saisie porte une atteinte flagrante au minimum vital du plaignant, ce qui aurait pour effet d'entraîner sa nullité (art. 22 al. 1 LP).

2. 2.1.1. Selon l'art. 93 al. 1 LP, les revenus relativement saisissables tels que les revenus du travail ne peuvent être saisis que déduction faite de ce que le préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital). Cette disposition garantit à ces derniers la possibilité de mener une existence décente, sans toutefois les protéger contre la perte des commodités de la vie; elle vise à empêcher que l'exécution forcée ne porte atteinte à leurs intérêts fondamentaux, les menace dans leur vie ou leur santé ou leur interdise tout contact avec le monde extérieur. Les besoins du poursuivi et de sa famille reconnus par la jurisprudence sont ceux d'un poursuivi moyen et des membres d'une famille moyenne, c'est-à-dire du type le plus courant. Ils doivent toutefois tenir compte des circonstances objectives, et non subjectives, particulières au poursuivi (ATF 134 III 323 consid. 2; 108 III 60 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_912/2018 du 16 janvier 2018 consid. 3.1).

Le revenu tiré d'une activité professionnelle indépendante comprend toutes les prestations que le débiteur reçoit en contrepartie de celles qu'il apporte dans le cadre de cette activité, que ces contreparties soient en argent ou en nature (Kren Kostkiewicz, in KUKO SchKG, 2ème éd., 2014, n. 10 ad art. 93 LP). Pour établir ce revenu brut, l'Office doit interroger le débiteur sur le genre d'activité qu'il exerce ainsi que le volume et la nature de ses affaires. Lorsque l'instruction menée par l'Office n'a révélé aucun élément certain, il faut tenir compte des indices à disposition. Si le débiteur ne tient pas de comptabilité régulière ou que les éléments comptables fournis ne sont pas fiables, le produit de son activité indépendante doit être déterminé par comparaison avec d'autres activités semblables, au besoin par appréciation. Le salarié qui est employé d'une société dont il est l'actionnaire ou l'animateur principal doit être assimilé à un indépendant (ATF 126 III 89; 121 III 20, JdT 1997 II 163; 120 III 16, JdT 1996 II 179;
83 III 63; arrêts du Tribunal fédéral 5A_976/2018 du 27 mars 2019; 7B.212/2002 du 27 novembre 2002; Ochsner, Commentaire Romand LP, 2005, n. 25 ss et 82 ss ad art. 93 LP et les références citées).

2.1.2. Les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur se composent en premier lieu d'une base mensuelle d'entretien, fixée selon la situation familiale du débiteur, qui doit lui permettre de couvrir ses dépenses élémentaires, parmi lesquelles l'alimentation, les vêtements et le linge, les soins corporels, l'entretien du logement, les frais culturels, la téléphonie et la connectivité, l'éclairage, l'électricité, le gaz, les assurances privées, etc. (art. I NI; Ochsner, Le minimum vital, (art. 93 al. 1 LP), in SJ 2012 II p. 119 ss, p. 128). D'autres charges indispensables, comme les frais de logement (art. II.1 et II.3 NI), les primes d'assurance maladie obligatoire (art. II.3 NI), les contributions d'entretien dues en vertu de la loi (art. II.5 NI) ou les frais de formation des enfants (art. II.6 NI), doivent être ajoutées à cette base mensuelle d'entretien, pour autant qu'elles soient effectivement payées (Ochsner, Commentaire Romand, op. cit., n° 82 ad art. 93 LP).

2.1.3. Conformément à l'obligation de renseignement qui lui incombe en vertu de l'art. 91 al. 1 ch. 2 LP, le débiteur doit fournir à l'Office toutes les informations et pièces permettant à celui-ci de calculer son minimum d'existence au sens de l'art. 93 al. 1 LP. Cette obligation doit être remplie au moment de l'exécution de la saisie déjà, et non au stade de la procédure de plainte (ATF 119 III 70 consid. 1; Vonder Mühll, in BSK SchKG I, N 65 ad art. 93 LP).

2.1.4. Le caractère irrégulier des revenus d'un débiteur indépendant ne fait pas obstacle à la saisie d'un montant mensuel fixe, déterminé sur la base d'un revenu mensuel moyen. L'Office, qui encaisse les mensualités fixes, ne pourra toutefois procéder à leur distribution en faveur des créanciers participant à la saisie qu'à la péremption de celle-ci et après détermination du montant effectivement saisissable (ATF 112 III 19 cons. 2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_328/2013 du 4 novembre 2013 consid. 5.4.1; 5A_16/2011 du 2 mai 2011 consid. 2.2).

Les revenus du travail ne peuvent être saisis que pour une durée d'une année à compter de l'exécution de la saisie (art. 93 al. 2 LP). Si, durant ce délai, l'Office a connaissance d'une modification déterminante pour le montant de la saisie, il adapte l'ampleur de celle-ci aux nouvelles circonstances (art. 93 al. 3 LP). L'application de cette disposition suppose ainsi un changement dans la situation du poursuivi par rapport à celle qui existait - et qui avait été constatée par l'Office - au moment de la saisie (Gilliéron, Commentaire LP, n. 140 ad art. 93 LP).

C'est avant tout au débiteur qu'il incombe d'informer l'Office de toute modification des circonstances propre à entraîner une modification de l'ampleur de la saisie (Winkler, Kommentar SchKG, 2017, Kren Kostkiewicz / Vock [éd.], n° 82 ad art. 93 LP). Dès qu'il a connaissance de telles circonstances, par le débiteur ou d'une autre manière, l'Office doit immédiatement les élucider et, le cas échéant, rendre une nouvelle décision (arrêt du Tribunal fédéral 5A_675/2011 du 19 janvier 2012 consid. 3.2; Winkler, op. cit., n° 83 ad art. 93 LP). Cette décision ne déploiera toutefois ses effets que pour le futur, la saisie antérieure continuant à s'appliquer jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle décision de l'Office (Kren Kostkiewicz, KUKO SchKG, 2ème éd., 2014, n° 72 ad art. 93 LP).

2.1.5. Lorsqu'elle est saisie d'une plainte, l'autorité de surveillance vérifie uniquement si la retenue fixée par l'Office ou le calcul qu'il a effectué est conforme aux faits déterminant la quotité saisissable des revenus du débiteur, compte tenu des circonstances existant au moment de l'exécution de cette mesure (ATF 121 III 20 consid. 3, JdT 1997 II 163). Si le plaignant souhaite invoquer des faits nouveaux, il lui appartient de les faire valoir par la voie de la révision de la saisie auprès de l'Office et non par la voie de la plainte (art. 93 al. 3 LP; ATF 108 III 10; Vonder Mühll, op. cit., n° 54 ad art. 93 LP; DCSO/243/2015 du 20 août 2015 consid. 2.2 et 2.3).

2.2. En l’espèce, le plaignant soutient que la saisie n’aurait pas dû être exécutée en ses mains, puisqu’il est salarié et non indépendant. Dans la mesure où il ne conteste ni être l’actionnaire de B______ SA, ni « être à son compte » en tant qu’administrateur de cette société, ou encore tiré des revenus de cette activité, on ne saurait reprocher à l’Office de l’avoir assimilé à un indépendant.

Le plaignant se prévaut de son bordereau fiscal lié à l’année 2021 et de son certificat de salaire 2022 pour contester les revenus de 8’522 fr. 75 retenus par l’Office dans le procès-verbal de saisie du 13 juin 2022. A teneur de ces documents, il aurait perçu, durant la saisie, un salaire de l’ordre de 3'100 fr. en 2021 et 3'900 fr. en 2022, ce qui apparaît peu crédible au vu du train de vie de la famille, dont le loyer seul s’élève à 3'880 fr. par mois. De plus, le bordereau fiscal précise qu’il s’agit d’une taxation d’office, le plaignant n’ayant pas rendu de déclaration d’impôts pour l’année 2021. Enfin, ces documents n’ont pas été fournis à l’Office au moment de l’exécution de la saisie, de sorte qu’ils ne peuvent en tout état de cause être pris en considération dans le cadre de la présente procédure.

Faute pour le plaignant d’avoir fourni d’autres pièces probantes, on ne saurait faire grief à l’Office d’avoir estimé ses revenus en faisant une moyenne des sommes reçues sur son compte C______. L’intéressé ne donne aucune précision sur l’origine ou la cause des montants perçus sur ce compte en 2021 pour exclure qu’il s’agisse de revenus. Il a en outre signé le protocole d’audition du 4 octobre 2021, signifiant ainsi son accord avec la manière de procéder de l’Office qui a considéré les montants crédités sur le compte comme étant des revenus.

L’Office a admis avoir mal calculé la moyenne des revenus perçus sur le compte C______, les sommes mensualisées se chiffrant à 7'305 fr. et non à 8'522 fr. 75. Il se prévaut néanmoins du fait que le plaignant a disposé, durant la même période, d’autres revenus de l’ordre de 15'520 fr. lui ayant permis de régler son loyer pendant quatre mois, ce qui a porté le total de ses ressources mensuelles à 9'522 fr.

Il résulte en effet des relevés C______, qui étaient déjà en possession de l’Office au moment de l’exécution de la saisie, que le loyer de 3'880 fr. par mois n’a pas été payé de ce compte de mars à juin 2021, alors que le plaignant a soutenu s’acquitter régulièrement de cette charge. Dans le cadre de la présente procédure, l’intéressé a précisé que le loyer avait été réglé depuis le compte de la société E______ SA, dont il était administrateur. Il a allégué qu’il s’agissait d’un prêt de la société, sans toutefois produire de pièce établissant une obligation de rembourser ces sommes. Partant, il se justifie de retenir que celles-ci constituent un revenu. Il y a ainsi lieu d’ajouter la somme de 15'520 fr. (3'880 fr. x 4 mois) au montant de 51'136 fr. 50 perçu sur son compte C______, ce qui porte le total des ressources reçues par le plaignant de mars à septembre 2021 à 66'656 fr. 50. Ce montant, réparti sur sept mois, représente un salaire mensuel net de 9'522 fr. 35.

S’agissant de son minimum vital, c’est en vain que le plaignant reproche à l’Office de ne pas avoir retenu des primes d’assurance-maladie obligatoire de 631 fr. 30, dès lors qu’il ne prouve pas s’acquitter régulièrement de ce montant.

Après déduction du minimum vital de la famille de 6'983 fr. 70 par mois, le plaignant dispose d’un solde de 2'538 fr. Partant, ce dernier échoue à établir une atteinte flagrante à son minimum vital permettant de conclure à la nullité du procès-verbal de saisie entrepris.

Il s’ensuit que la plainte, déposée hors délai, est irrecevable.

Au demeurant, il n’y a pas lieu d’examiner le montant des revenus retenus par l’Office dès le mois de janvier 2023 sur la base des éléments nouveaux invoqués par le plaignant le 3 janvier 2023, dès lors que la plainte du 13 mars 2023 ne porte pas sur le prononcé d’une éventuelle révision. Le plaignant n’invoque aucune diminution de ses revenus et ne conteste, au surplus, pas précisément le calcul effectué par l’Office. Ce dernier a en outre constaté l’insaisissabilité du débiteur dès le mois de janvier 2023, de sorte que l’examen de cette décision serait dépourvue d’intérêt concret.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

 

Déclare irrecevable la plainte formée le 13 mars 2023 par A______ contre le procès-verbal de saisie, série n° 3______, établi le 13 juin 2022.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Natalie OPPATJA et
Monsieur Mathieu HOWALD, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

La présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.