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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/955/2023

DCSO/180/2023 du 27.04.2023 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Minimum vital; rente LPP
Normes : lp.93; lp.92
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/955/2023-CS DCSO/180/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 27 AVRIL 2023

 

Plainte 17 LP (A/955/2023-CS) formée en date du 16 mars 2023 par A______, comparant en personne.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

______

______.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. A______ fait l'objet de la poursuite n° 1______ engagée à son encontre par B______, dont la continuation a été requise le 7 juin 2022 et portant sur une créance en 4'282 fr. 95.

b. Le 21 juin 2022, l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) a adressé à A______ un avis de saisie pour le 11 juillet 2022.

c. Le 15 août 2022, l'Office a effectué un passage au domicile de la poursuivie et a remis dans sa boîte à lettres un avis d'ouverture forcée.

d. A______ ayant ignoré les communications de l'Office, ce dernier a avisé, par courrier du 4 janvier 2023, l'institution supplétive LPP, Assurance risque des chômeurs, de la saisie conservatoire de la rente versée à l'intéressée.

e. L'institution supplétive LPP, Assurance risque des chômeurs, a répondu à l'Office, le 13 janvier 2023, que A______ bénéficiait d'une rente invalidité LPP mensuelle de 374 fr. 36.

f. A______ s'est présentée le 22 février 2023 à l'Office pour y être auditionnée. Selon le protocole d'audition du débiteur du même jour, elle perçoit une rente de l'assurance-invalidité de 1'882 fr. par mois, une rente LPP de 362 fr. 15, un revenu de 200 fr. versé par C______ et des prestations du service des prestations complémentaires de 1'049 fr. par mois. Son loyer se monte à 702 fr. par mois, ses cotisations personnelles AVS/AI/APG à 57 fr. 35 et ses frais médicaux à 78 fr. 80. Les frais d'animal domestique, en 50 fr. par mois, ont été pris en considération. A l'issue de cette audition, l'Office a communiqué oralement à A______ sa décision de saisir intégralement la rente LPP.

B. a. Par acte posté le 16 mars 2023, A______ forme plainte auprès de la Chambre de surveillance contre la décision de l'Office de saisir sa rente LPP de 362 fr. par mois. Elle allègue que le budget établi par l'Office ne lui permet pas de vivre avec dignité. Une fois ses factures réglées, il ne lui restait presque rien pour arriver à la fin du mois.

A l'appui de sa plainte, elle a produit la feuille de calcul de son minimum vital établi par l'Office le 22 février 2023 dans la série 2______, le protocole de son audition et le plan de calcul des prestations complémentaires.

b. Aux termes de son rapport, l'Office a présenté le calcul du minimum vital de la poursuivie. Ses revenus, en 3'493 fr. 15, étaient supérieurs à ses charges, en 2'087 fr. Dans la mesure où seule la rente LPP était relativement saisissable, au sens de l'art. 93 LP, de sorte qu'elle pouvait être intégralement saisie.

c. Le rapport de l'Office a été transmis à A______ le 11 avril 2023. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1. 1.1 La voie de la plainte au sens de l'art. 17 LP est ouverte contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire (al.1), ainsi qu'en cas de déni de justice ou de retard à statuer (al. 3). L'autorité de surveillance doit par ailleurs constater, indépendamment de toute plainte et en tout temps (ATF 136 III 572 consid. 4), la nullité des mesures de l'Office contraires à des dispositions édictées dans l'intérêt public ou dans l'intérêt de personnes qui ne sont pas parties à la procédure (art. 22 al. 1 LP). Doit en particulier être qualifiée de nulle une saisie plongeant le débiteur dans une situation de détresse insupportable.

La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

Lorsque la plainte est dirigée contre la saisie (ou le séquestre), le délai de dix jours prévu par l'art. 17 al. 2 LP commence à courir avec la communication du procès-verbal de saisie ou de séquestre (ATF 107 III 7 consid. 2), avec pour conséquence qu'il ne peut en principe être entré en matière sur une plainte déposée avant cette communication (en ce sens : Jent-Sorensen, in BSK SchKG I, 2010, N 19 ad art. 112 LP et Zondler, in Kommentar SchKG, 2017, Kren Kostkiewicz/Vock [éd.], N 4 ad art. 114 LP).

1.2 La recevabilité de la plainte paraît en l'espèce douteuse, puisque déposée avant la communication du procès-verbal de saisie mais plus de dix jours après la communication du calcul du minimum vital intervenue lors de l'audition du 22 février 2023.

La question peut toutefois rester indécise dès lors que la plaignante allègue en substance que la saisie de sa rente LPP la plongerait dans une situation de détresse insupportable. Un tel grief pouvant, s'il se vérifie, conduire à la nullité de la saisie, laquelle devrait être constatée par la Chambre de céans nonobstant l'absence d'une plainte recevable, il y a lieu d'entrer en matière.

2. 2.1.1 Selon l'art. 93 al. 1 LP, les revenus relativement saisissables tels que les revenus du travail ne peuvent être saisis que déduction faite de ce que le préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital). Cette disposition garantit à ces derniers la possibilité de mener une existence décente, sans toutefois les protéger contre la perte des commodités de la vie; elle vise à empêcher que l'exécution forcée ne porte atteinte à leurs intérêts fondamentaux, les menace dans leur vie ou leur santé ou leur interdise tout contact avec le monde extérieur. Les besoins du poursuivi et de sa famille reconnus par la jurisprudence sont ceux d'un poursuivi moyen et des membres d'une famille moyenne, c'est-à-dire du type le plus courant. Ils doivent toutefois tenir compte des circonstances objectives, et non subjectives, particulières au poursuivi (ATF 134 III 323 consid. 2; 108 III 60 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_912/2018 du 16 janvier 2018 consid. 3.1).

Pour fixer le montant saisissable - en fonction des circonstances de fait existant lors de l'exécution de la saisie (ATF 115 III 103 consid. 1c) - l'Office doit d'abord tenir compte de toutes les ressources du débiteur; puis, après avoir déterminé le revenu global brut, il évalue le revenu net en opérant les déductions correspondant aux charges sociales et aux frais d'acquisition du revenu; enfin, il déduit du revenu net les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur et de sa famille, en s'appuyant pour cela sur les Normes d'insaisissabilité édictées par l'autorité de surveillance en vigueur lors de l'exécution de la saisie (ci-après : NI-2023; Collaud, Le minimum vital selon l'article 93 LP, in RFJ 2012 p. 299 ss, 303; arrêt du Tribunal fédéral 5A_919/2012 du 11 février 2013 consid. 4.3.1).

Les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur se composent en premier lieu d'une base mensuelle d'entretien, fixée selon la situation familiale du débiteur, qui doit lui permettre de couvrir ses dépenses élémentaires, parmi lesquelles la nourriture et les frais de vêtement. D'autres charges indispensables, comme les frais de logement, doivent être ajoutées à cette base mensuelle d'entretien, pour autant qu'elles soient effectivement payées (Ochsner, in CR-LP, n° 82 ad art. 93 LP).

Doivent en particulier être ajoutées à la base mensuelle d'entretien les frais médicaux ou de médicaments (art. 9 NI-2023) qu'ils soient effectifs, nécessaires et ne soient pas pris en charge par une assurance (ATF 129 III 242 consid. 4.1).

Selon l'art. II.8 NI-2023, les frais effectifs d'entretien d'un animal domestique sont pris en considération à concurrence d'un montant maximal de 50 fr. par mois.

2.1.2 Selon l'art. 92 al. 1 ch. 9a LP, les rentes versées au titre de l'assurance invalidité et les prestations complémentaires à l'AVS/AI sont insaisissables. L'art. 93 al. 1 LP prévoit en revanche que les rentes versées par des institutions de prévoyance professionnelle peuvent être saisies, déduction faite de ce que l'Office estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital) (ATF 120 III 71 consid. 4).

Dans les cas où les revenus du débiteur comprennent, outre des revenus relativement saisissables au sens de l'art. 93 al. 1 LP, une rente absolument insaisissable en vertu de l'art. 92 al. 1 ch. 9a LP, il convient d'ajouter le montant de cette dernière aux autres sources de revenu pour calculer la part saisissable (ATF135 III 20 consid. 5.1).

2.2. En l'espèce, c'est à raison que l'Office a pris en considération, pour établir les revenus de la débitrice, les rentes AI et LPP, les prestations complémentaires et la rente de C______ perçues par elle, au vu de la jurisprudence constante selon laquelle les revenus insaisissables doivent être ajoutés aux revenus saisissables afin de calculer la part saisissable.

La plaignante ne critique à juste titre pas les montants retenus à titre de revenus par l'Office, qui totalisent 3'493 fr. 15. S'agissant des charges, l'Office a d'abord admis l'entretien de base, en 1'200 fr., correspondant à celui pour une personne vivant seule, sans charge de famille, ce qui n'est pas critiqué ni critiquable. Les autres charges retenues se composent des cotisations AVS/AI/APG en 57 fr. 35 par mois, du loyer en 702 fr., des frais médicaux non couverts (78 fr. 80), des frais de transport (70 fr.) et des frais d'animal domestique (50 fr.), pour un total de 2'087 fr. Ce calcul est conforme aux principes applicables et n'est pas concrètement contesté, étant précisé que la plaignante n'allègue ni ne documente aucune autre charge supplémentaire. C'est par ailleurs à juste titre que l'Office n'a pas pris en considération la prime d'assurance-maladie, entièrement couverte par le subside. Dans la mesure où les revenus excèdent les charges ainsi déterminées pour plus de 1'000 fr. par mois, la saisie de la rente LPP, à hauteur de 362 fr. 14, ne prête pas le flanc à la critique.

Mal fondée, la plainte doit être rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 16 mars 2023 par A______ dans la série 2______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Monsieur Frédéric HENSLER et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

La présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.