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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/1011/2021

DCSO/198/2021 du 27.05.2021 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : opposition tardive; notification simplifiée
Normes : lp.74.al1; ordonnance covid-19 justice et droit procédural.7
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1011/2021-CS DCSO/198/21

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 27 MAI 2021

 

Plainte 17 LP (A/1011/2021-CS) formée en date du 18 mars 2021 par A______, comparant en personne.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du à :

-       A______

Avenue ______

______ Genève.

- B______ SA

Service du contentieux

______ Zürich.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Par réquisition du 9 novembre 2020, B______ SA a engagé à l'encontre de A______ une poursuite en recouvrement d'un montant de 2'463 fr. 65, allégué être dû en vertu d'un acte de défauts de biens délivré le
3 avril 2017.

b. A réception de la réquisition de poursuite, l'Office cantonal des poursuites
(ci-après : l'Office) a établi le 9 novembre 2020 un commandement de payer, poursuite n° 1______, qu'il a communiqué le même jour à la Poste pour notification au débiteur. Selon les explications de l'Office, non contestées, cette première tentative de notification - ordinaire - du commandement de payer n'a pas abouti et, le 4 décembre 2020, la Poste a retourné l'acte, non notifié, à l'Office.

Celui-ci a alors décidé de procéder à une notification simplifiée au sens de l'art. 7 de l'Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural.

c. Le 17 décembre 2020, l'Office a adressé à A______, par pli A+, un courrier l'informant qu'un acte de poursuite lui serait notifié par la même voie dans les jours suivants. Selon le suivi des envois de la Poste ("Track & Trace"), le pli contenant ce courrier a été déposé dans la boîte aux lettres du poursuivi le
19 décembre 2020.

d. Le 4 janvier 2021, l'Office a adressé à A______, par pli A+, le commandement de payer, poursuite n° 1______, accompagné d'un courrier rappelant au poursuivi qu'il pouvait former opposition dans les dix jours à compter de la date de réception de l'acte. Selon le suivi postal "Track & Trace", ce pli a été déposé dans la boîte aux lettres de A______ le 5 janvier 2021.

e. Le 5 mars 2021, A______ s'est rendu dans les locaux de l'Office, où il a formé opposition - valant également opposition pour non-retour à meilleure fortune - au commandement de payer, poursuite n° 1______.

f. Par décision du 8 mars 2021, distribuée au guichet postal le 16 mars 2021, l'Office a refusé d'enregistrer l'opposition (ordinaire et pour non-retour à meilleure fortune) formée le 5 mars 2021 au motif qu'elle était tardive, le délai prévu par l'art. 74 al. 1 LP ayant expiré le 15 janvier 2021.

B. a. Par acte expédié le 18 mars 2021 au greffe de la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre la décision de l'Office susmentionnée, concluant implicitement à son annulation et à l'enregistrement de son opposition (y compris pour non-retour à meilleure fortune) formée le 5 mars 2021.

Il a exposé qu'il n'avait pas pu former opposition dans le délai légal car il se trouvait à l'étranger du 27 décembre 2020 au 14 janvier 2021 compris. En outre, lors du passage du postier, il n'avait "pas pu recevoir la notification ni faire opposition puisqu['il était] absent". En annexe à sa plainte il a produit des documents de voyage (billets d'avion électroniques).

A______ n'a pas indiqué s'il avait ou non reçu et pris connaissance de l'avis du 17 décembre 2020 l'informant de la prochaine réception d'un acte de poursuite.

b. Dans son rapport explicatif du 22 mars 2021, l'Office a conclu au rejet de la plainte, au motif que le commandement de payer avait été valablement notifié le
5 janvier 2021 et que l'opposition formée le 5 mars 2020 l'avait été après l'expiration du délai légal de dix jours. Il a par ailleurs considéré qu'une restitution du délai pour former opposition n'entrait pas en considération, dans la mesure où le poursuivi, qui devait s'attendre à recevoir un acte de poursuite (l'avis du 17 décembre 2020 ayant été distribué par la Poste avant son départ présumé de Genève), n'invoquait aucun empêchement non fautif au sens de l'art. 33 al. 4 LP.

c. La créancière poursuivante a renoncé à se déterminer sur la plainte.

d. Par avis du 27 avril 2021, la Chambre de surveillance a transmis le rapport explicatif de l'Office à A______ et informé les parties que l'instruction de la cause était close.

Le plaignant n'a pas réagi à ce courrier.

EN DROIT

1. 1.1 La plainte est recevable pour avoir été déposée auprès de l'autorité compétente (art. 6 al.1 et 3 LaLP, art. 17 al. 1 LP), par une partie lésée dans ses intérêts
(ATF
138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), dans le délai utile de dix jours (art. 17 al. 2 LP) et selon la forme prescrite par la loi
(art. 9 al. 1 et 2 LaLP, art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), à l'encontre d'une décision de l'Office sujette à plainte - à savoir le refus d'enregistrer une opposition (ordinaire et pour non-retour à meilleure fortune) au motif de sa tardiveté.

Elle est en revanche irrecevable en tant que le plaignant y sollicite implicitement une restitution du délai pour former opposition : selon l'art. 8 de l'Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural, en effet, la restitution d'un délai courant depuis une notification simplifiée au sens de l'art. 7 de cette même Ordonnance relève de la compétence de l'office des poursuites ayant procédé à cette notification, et non de l'autorité de surveillance. Au demeurant, la demande de restitution de délai formée implicitement en même temps que la plainte est tardive, car déposée plus de dix jours après que l'empêchement allégué a pris fin (le plaignant admet être revenu à Genève le 14 janvier 2021 et il a formé opposition le 5 mars 2021; cf.
art. 33 al. 4 et 74 al. 1 LP).

1.2 L'autorité de surveillance constate les faits d'office, apprécie librement les preuves et ne peut, sous réserve de l'art. 22 LP, aller au-delà des conclusions des parties (art. 20a al. 2 ch. 2 et 3 LP). Celles-ci ont néanmoins une obligation de collaborer (art. 20a al. 2 ch. 2 2ème phrase LP), qui implique en particulier qu'elles décrivent l'état de fait auquel elles se réfèrent et produisent les moyens de preuve dont elles disposent (ATF 123 III 328 consid. 3). Il en est ainsi, notamment, lorsque la partie saisit dans son propre intérêt l'autorité de surveillance ou qu'il s'agit de circonstances qu'elle est le mieux à même de connaître ou qui touchent à sa situation personnelle, surtout lorsqu'elle sort de l'ordinaire (arrêts du Tribunal fédéral 5A_898/2016 du 27 janvier 2017 consid. 5.2; 5A_253/2015 du 9 juin 2015
consid. 4.1). A défaut de collaboration, l'autorité de surveillance n'a pas à établir des faits qui ne résultent pas du dossier (ATF 123 III 328 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_898/2016 précité consid. 5.2).

2. 2.1 Dans le contexte de la pandémie de coronavirus, le Conseil fédéral a promulgué le 16 avril 2020 l'Ordonnance instaurant des mesures en lien avec le coronavirus dans le domaine de la justice et du droit procédural (RS 272.81; ci-après : Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural), par laquelle, se fondant sur le droit de nécessité, il a procédé à des modifications ponctuelles et provisoires de diverses dispositions du droit en vigueur. Afin de tenir compte des difficultés pouvant affecter les canaux par lesquels les actes de poursuite étaient usuellement notifiés, il a en particulier prévu à l'art. 7 de ladite Ordonnance une procédure de notification facilitée dérogeant aux art. 64 à 66 LP.

Selon l'art. 7 al. 1 de l'Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural en vigueur au moment de la notification litigieuse, un acte de poursuite peut être notifié contre une preuve de notification n'impliquant pas la remise d'un reçu lorsqu'une première tentative de notification par la voie ordinaire a échoué et que le destinataire a été informé de la notification au plus tard le jour la précédant. La preuve de la notification remplace l'attestation visée à l'art. 72 al. 2 LP (art. 7 al. 2 de l'Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural). Le commentaire officiel de l'art. 7 de l'Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural, repris par l'Instruction n° 8 du Service de haute surveillance LP du 28 septembre 2020, précise que la notification par pli A+ est conforme aux exigences posées par cette disposition.

2.2 L'art. 74 al. 1 LP prévoit que le débiteur poursuivi peut former opposition au commandement de payer dans les dix jours à compter de sa notification. La date de cette notification est attestée, dans le cas d'une notification par la voie ordinaire, par l'attestation de notification prévue par l'art. 72 al. 2 LP et, dans le cas d'une notification par voie simplifiée au sens de l'art. 7 de l'Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural, par la preuve de notification mentionnée à l'al. 1 de cette disposition (art. 7 al. 2 de l'Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural).

2.3 Si, en raison d'un vice de la notification, le commandement de payer n'est pas parvenu en mains du poursuivi, la poursuite est absolument nulle et sa nullité peut et doit être constatée en tout temps (ATF 110 III 9 consid. 2). Si, en revanche, malgré ce vice, le débiteur a connaissance de l'acte notifié ou de son contenu essentiel, la notification n'est qu'annulable (ATF 128 III 101 consid. 2). Le délai pour former une plainte (art. 17 al. 2 LP), comme celui pour former opposition au commandement de payer, commence alors à courir au moment de cette prise de connaissance (ATF 128 III 101 consid. 2).

2.4 En l'occurrence, le plaignant, qui s'est limité à invoquer un séjour à l'étranger du 27 décembre 2020 au 14 janvier 2021 inclus, ne conteste pas que les conditions d'une notification facilitée au sens de l'art. 7 de l'Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural étaient réalisées. Il ne remet ainsi pas en cause les explications de l'Office selon lesquelles le commandement de payer a fait l'objet, entre les
9 novembre et 4 décembre 2020, d'une tentative infructueuse de notification ordinaire par l'intermédiaire d'un agent postal. Il ne soutient pas davantage qu'il n'aurait pas reçu en temps utile l'information préalable requise par l'art. 7 al. 1 let. b de l'Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural, laquelle lui a en l'espèce été transmise par écrit, à savoir par le courrier que l'Office lui a envoyé le
17 décembre 2020 et qu'un agent postal a déposé dans sa boîte aux lettres le
19 décembre 2020 - à savoir plusieurs jours avant son départ pour l'étranger.

Il est en outre constant que le plaignant a effectivement reçu et pris connaissance du commandement de payer à son retour de voyage. A cet égard, rien n'indique que cette prise de connaissance ne coïnciderait pas avec la date de son retour à Genève, à savoir le 14 janvier 2020 ou les quelques jours qui ont suivi. En particulier, le plaignant, qui est le mieux à même de renseigner la Chambre de céans à ce sujet, ne soutient pas qu'il aurait été empêché de relever sa boîte aux lettres ou de prendre connaissance de son courrier dans les jours (voire dans les semaines) qui ont suivi son retour de voyage.

La preuve de la notification du commandement de payer, soit en l'espèce le suivi des envois de la Poste ("Track & Trace") dont il ressort que le pli contenant l'acte a été déposé le 5 janvier 2021 dans la boîte aux lettres du plaignant, tenant lieu de procès-verbal de notification (art. 7 al. 2 de l'Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural), le délai d'opposition de dix jours prévu par l'art. 74 al. 1 LP a couru à partir de cette date et a ainsi expiré le 15 janvier 2021. La décision attaquée, par laquelle l'Office a refusé d'enregistrer l'opposition formée le 5 mars 2021 (soit plus d'un mois et demi après que le plaignant est rentré à Genève) en raison de son caractère tardif, est donc bien fondée.

En conséquence, la plainte sera rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 18 mars 2021 par A______ contre la décision de rejet d'opposition rendue par l'Office cantonal des poursuites le 8 mars 2021 dans la poursuite n° 1______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

La présidente :

Nathalie RAPP

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l'art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.