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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3048/2024

JTAPI/611/2025 du 05.06.2025 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3048/2024 LCI

JTAPI/611/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 5 juin 2025

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par Me Julien BLANC, avocat, avec élection de domicile

 

contre

 

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

 


EN FAIT

1.             Madame A______ est propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune de ______[GE] (ci-après : la parcelle), sise ______[GE], sur laquelle sont érigés un restaurant (bâtiment no F2______) et un dépôt (bâtiment no F3______).

2.             Par courrier du 15 mars 2022, le département du territoire (ci-après : le département) a informé l’intéressée avoir été saisi d’une plainte relative à la sécurité incendie dans le restaurant susmentionné et qu’il serait procéder à une visite des lieux le 30 mars 2022 afin de vérifier les installations en lien avec ledit restaurant.

3.             Par courrier du 14 avril 2022, le département a informé Mme A______ qu’à l’occasion du contrôle réalisé sur la parcelle, il avait été constaté qu’un ou plusieurs éléments soumis à la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) avaient été réalisés sans autorisation et que les locaux ne respectaient pas les prescriptions de protection incendie, notamment :

A.      la modification de la toiture du bâtiment no F2______, y compris la pose de nouvelles frises sur les avant-toits et la pose de quatre fenêtres de toit ;

B.       le changement de toutes les fenêtres du bâtiment no F2______ ;

C.       la modification des cloisons intérieures des combles et du 2ème étage du bâtiment no F2______ ;

D.      la construction d’un avant-toit sur le balcon du 1er étage du bâtiment no F2______ ;

E.       l’ouverture dans une dalle d’environ 50 m2 du 1er étage du bâtiment no F2______ ;

F.        la construction d’un escalier entre le rez-de-chaussée et le sous-sol dans le bâtiment no F2______ ;

G.      la construction de deux chambres froides au sous-sol du bâtiment no F2______ avec la pose des refroidisseurs sur la façade sud ;

H.      la pose d’une gaine de ventilation sur la façade est du bâtiment no F2______ ;

I.          le changement de la couleur du crépis sur la façade nord du bâtiment no F2______ ;

J.         l’agrandissement du bâtiment no F2______ et l’installation d’une chambre froide ;

K.      l’installation d’un portail à l’est de la parcelle ;

L.       l’installation de cheminement en bois et dallettes ;

M.     l’installation de deux bassins d’eau ;

N.      l’installation de sept pavillons en bois ;

O.      l’installation de palissades en bois ;

P.        l’inexistence du compartimentage du bâtiment no F2______, notamment entre la cuisine et la salle de restaurant, ainsi qu’entre les différents étages ;

Q.      le manque d’issues de secours du restaurant, une seule issue existante pour une capacité d’environ 70 places ;

R.       la non-conformité de l’unique issue de secours du bâtiment no F2______ qui s’ouvre dans le sens inverse de fuite et qui est motorisée avec un système non-homologué, limitant ainsi la capacité d’occupation du restaurant à 20 places maximum ;

S.        la non-conformité de l’évacuation du sous-sol, du 2ème étage et des combles du bâtiment no F 2______ ;

T.       la non-conformité du balisage de sécurité du bâtiment no F2______ ;

U.      le non-compartimentage entre la chaufferie et le reste des locaux du bâtiment no F2______.

Un dossier d’infraction a été ouvert sous le n° I-4______ et un délai de dix jours imparti à Mme A______ pour transmettre ses éventuelles observations et/ou explications quant aux faits relevés ci-dessus.

4.             Par courrier du 6 mai 2022, sous la plume de son conseil, Mme A______ a requis une prolongation de ce délai au 6 juin 2022.

5.             Par courriel du 11 mai 2022, le département a donné une suite favorable à cette requête.

6.             Dans le délai prolongé, Mme A______, sous la plume de son conseil, s’est déterminée comme suit, reprenant la numérotation suivie par le département dans son courrier du 14 avril 2022 :

A.    Elle avait refait entièrement, à l’identique, la toiture du bâtiment n° F2______, selon la facture ci-annexée de l’entreprise B______ Sàrl en 2005. Peu après l’acquisition du bâtiment, elle avait en effet engagé des travaux de rafraîchissement pour lesquels elle avait elle-même consulté la police des constructions. Aucun dépôt de demande d’autorisation de construire n’avait été exigé dans ce cadre. Les échafaudages posés avaient permis la réalisation des travaux de rafraîchissement de la façade, dans une teinte acceptée ensuite par le service des monuments et des sites (ci-après : SMS), tout comme l’intervention en toiture de B______ Sàrl ;

B.     Les fenêtre n’avaient pas été changées. Seuls les vitrages avaient été doublés dans le cadre des travaux entrepris vingt auparavant environ ;

C.     S’agissant des cloisons intérieures des combles et du 2ème étage, lesquels n’étaient pas exploités en restaurant, la situation qui prévalait avant les quelques modifications qui étaient intervenues lors de l’acquisition du bâtiment étaient inconnues. Elle se demandait si le département avait connaissance de la situation qui préexistait et s’il existait un plan de l’intérieur du restaurant qui se nommait le C______ ;

D.    L’avant-toit sur le balcon du 1er étage était préexistant à l’acquisition du bâtiment. Elle n’avait procédé à aucun changement ;

E.     S’agissant de l’ouverture de la dalle du premier étage, il était relevé que l’état préexistant n’était pas une « dalle », mais un plancher. L’étage était exploité en restaurant et aucune autorisation n’était nécessaire pour procéder à cette ouverture. Une autorisation aurait-elle été nécessaire, qu’un tel aménagement aurait été autorisable, l’immeuble n’ayant à l’époque pas été mis à l’inventaire ;

F.      L’escalier entre le rez-de-chaussée et le sous-sol était préexistant et n’avait pas été construit ou créé. Il avait été rénové et stabilisé, sans qu’aucune autorisation ne fût nécessaire ;

G.    Les deux chambres froides concernées étaient existantes lorsqu’elle avait acquis le bâtiment ;

H.    S’agissant des gaines de ventilation, cette installation avait également été réalisée dans le cadre des travaux mentionnés ci-dessus, l’entreprise D______ lui ayant confirmé que cette réalisation répondait « aux normes exigées par le DALE » dans un courrier du 4 novembre 2003 ;

I.        Le changement de couleur du crépi extérieur avait été réalisé avant la mise à l’inventaire du bâtiment. Etaient joints en annexe ; une copie de l’arrêté du Conseil d’État portant mise à l’inventaire des bâtiments nos F2______ et F5______, ainsi qu’une copie du rapport de visite du 17 mars 2016 ayant précédé cette mesure, lesquels contenaient nombre de photographies de l’état des lieux à cette date ;

J.       S’agissant du bâtiment n° F5______ et des installations de « chambre froide », ce bâtiment était cadastré tel quel et il n’avait pas été agrandi ;

K.    Le portail est de la parcelle en métal était existant et constituait l’entrée sur le parking du restaurant le C______ ;

L.     Quant à l’installation d’un cheminement en bois et dallettes, il s’agissait d’un aménagement décoratif complètement amovible. Il ne s’agissait donc pas d’une construction au sens de la LCI ;

M.   Les deux bassins d’eau relevaient également d’un aménagement décoratif complètement amovible de sorte qu’il ne s’agissait pas non plus d’une construction au sens de la LCI ;

N.    Les sept pavillons en bois étaient démontables et à vocation purement décorative en vue de l’exploitation du restaurant en terrasse extérieure. N’étant pas définitifs, ils ne constituaient pas des installations au sens de la LCI ;

O.    Les palissades en bois, tant côté rue que côté voies de chemin de fer, ne dépassaient pas deux mètres ;

P.      A priori, il n’y avait pas lieu de « compartimenter » le bâtiment n° F2______. Elle était cependant disposée à étudier une solution idoine ;

Q.    S’agissant des issues de secours, elle n’exploitait pas plus de 45 places dans le restaurant, de sorte que l’issue de secours du lieu accessible au public était garantie. Au demeurant, cette situation préexistait du temps de l’exploitation du C______, avec une capacité plus importante ;

R.     Quant à la non-conformité de l’unique issue de secours du bâtiment no F2______, elle planifiait des travaux en vue d’une ouverture de la porte dans le sens extérieur, tout en relevant que celle-ci s’ouvrait déjà vers l’intérieur à l’époque du C______ ;

S.      S’agissant de l’évacuation du sous-sol, deuxième étage et combles, le deuxième étage, exploité en bureau, n’était pas accessible au public et à la clientèle du restaurant, qui n’y avaient pas accès. Le bureau était marqué privé. Le sous-sol n’était pas accessible au public non plus. Il était exploité en dépôt muni d’une évacuation sur la rue ;

T.     S’agissant du balisage de sécurité du bâtiment n° F2______, elle étudiait la mise en œuvre de travaux complémentaires ;

U.    Enfin, s’agissant du non-compartimentage entre chaufferie et locaux, elle étudiait la pose d’une porte protectrice vers la chaufferie. La porte actuelle était préexistante au changement de l’installation du chauffage, remplacée en 2017 suite à un incendie.

Elle entendait être en parfaite conformité avec les lois, règlements et directives en vigueur pour l’exploitation de son restaurant. Aussi, elle était disposée à trouver des améliorations pour la sécurité des lieux et envisageait donc le dépôt d’une demande d’autorisation de construire s’agissant des points P, R, T et U ci-dessus. À cette fin, elle sollicitait un délai au 30 septembre 2022.

7.             Le 26 août 2022, dans le cadre de l’instruction du dossier d’infraction no I-4______, le département a confirmé que la réalisation des éléments listés était soumise à l’obtention d’une autorisation de construire selon la LCI.

Il s’agissait notamment de :

1.        la modification de la toiture du bâtiment n° F2______, y compris la pose de nouvelles frises sur les avant-toits et la pose de 4 fenêtres de toit ;

2.        la modification des cloisons intérieures des combles et du 2ème étage du bâtiment no F2______ ;

3.        l’ouverture dans une dalle d’environ 50 m2 du 1er étage du bâtiment n° F2______ ;

4.        la construction de deux chambres froides au sous-sol du bâtiment n° F2______ avec la pose des refroidisseurs sur la façade sud ;

5.        la pose d’une gaine de ventilation sur la façade est du bâtiment n° F2______ ;

6.        l’agrandissement du bâtiment n° F5______ et l’installation d’une chambre froide ;

7.        l’installation de cheminement en bois et dallettes ;

8.        l’installation de deux bassins d’eau ;

9.        l’installation de 7 pavillons en bois ;

10.    l’installation de palissades en bois.

En application des art. 129 ss LCI, il était ordonné à Mme A______, dans un délai de 30 jours, de requérir une autorisation de construire définitive, complète et en bonne et due forme par le biais d’un mandataire professionnellement qualifié, avec mention, sur le formulaire de requête dans la description du projet « Demande de régularisation I-4______ ».

Alternativement, si elle ne souhaitait pas régulariser la situation par l’obtention d’une autorisation de construire, il lui était loisible de procéder à la mise en conformité des lieux en procédant au démontage des éléments 1 à 10 et à la mise en conformité des éléments P à U listés dans le courrier du 14 avril 2022, selon les prescriptions de protection incendie AEAI, dans un délai de 30 jours. Dans cette hypothèse, un reportage photographique ou tout élément attestant de manière univoque de cette mise en conformité devrait lui parvenir dans le même délai.

À défaut du dépôt d’une requête en autorisation de construire dans le délai imparti et sans mise en conformité complète telle que proposée ci-dessus, elle s’exposait à toutes autres mesures et/ou sanctions justifiées par la situation.

À l’issue de l’instruction d’une éventuelle requête déposée auprès de la direction des autorisations de construire ou sans dépôt dans le délai imparti, il serait statué par décision séparée sur les mesures applicables visant au rétablissement d’une situation conforme au droit.

Enfin, s’agissant de la sanction administrative portant sur la réalisation des travaux sans droit, celle-ci ferait également l’objet d’une décision à l’issue du traitement du dossier n° I-4______, raison pour laquelle elle restait en l’état réservée.

8.             Suite à plusieurs échanges entre le département et Mme A______, cette dernière a, sous la plume d’un conseil, requis le 28 septembre 2022 une prolongation de délai au 15 novembre 2022 pour le dépôt du dossier d’autorisation, délai qui lui a été accordé.

9.             Le 15 décembre 2022, une requête en autorisation de construire portant sur la régularisation de l’infraction no I-4______, transformations diverses d’un bâtiment et aménagements extérieurs a été déposée par le biais du mandataire de Mme A______. Cette requête a été enregistrée sous le numéro de référence DD 6______.

10.         Par décision du ______ 2023, le département a délivré l’autorisation requise.

11.         Le 21 avril 2023, le département a ordonné à Mme A______, suite à l’octroi de l’autorisation DD 6______, de rétablir une situation conforme au droit en procédant à la réalisation des travaux d’ici au 31 juillet 2023.

Cette décision n’a pas fait l’objet d’un recours et est entrée en force.

12.         Le 21 juillet 2023, le mandataire professionnellement qualifié (ci-après : MPQ) de Mme A______ a sollicité une prolongation de délai de six mois.

13.         Le 7 août 2023, le département a informé Mme A______ qu’il prolongeait le délai de remise en état selon l’autorisation de construire DD 6______ au 29 décembre 2023, au plus tard.

14.         Par décision du ______ 2024, le département a constaté que l’ordre de réaliser les travaux conformément à l’autorisation délivrée n’avait pas été respecté, malgré la prolongation de délai accordée et a, en conséquence, infligé une amende de CHF 500.- à Mme A______.

Le département lui a en outre ordonné de finaliser le permis d’occuper d’ici au 29 février 2024.

15.         Le 7 février 2024, Mme A______ a informé le département, qu’en raison des conditions météorologiques, les peintures extérieures de la gaine de ventilation et l’enlèvement du climatiseur n’avaient pas pu être effectués. Ces travaux étaient prévus pour février/mars 2024. Sur cette base, elle a sollicité la reconsidération de l’amende administrative de CHF 500.- prononcée à son encontre le ______ 2024, ainsi qu’une prolongation de délai au 15 avril 2024 afin de finaliser le permis d’occuper.

16.         Le 13 février 2024, le département lui a répondu maintenir la sanction administrative contenue dans sa décision. Il a revanche accordé la prolongation sollicitée au 15 avril 2024.

17.         Le 15 avril 2024, Mme A______ a requis une nouvelle prolongation de délai au 15 mai 2024 afin de finaliser les travaux relatifs au climatiseur, au groupe frigorifique et au contrôle acoustique.

18.         Par décision du ______ 2024, le département a infligé une seconde amende administrative de CHF 1’500.- à Mme A______ au motif que l’ordre de réaliser les travaux conformément à l’autorisation de construire, initialement d’ici au 31 juillet 2023, n’avait toujours pas été respecté et ce malgré plusieurs délais accordés. Il a en outre accordé une prolongation de délai au 31 mai 2024.

S’agissant d’une décision d’exécution d’une décision en force, cette décision ne pouvait pas faire l’objet d’un recours (art. 59 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). L’amende pouvait, quant à elle, faire l’objet d’un recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) dans un délai de 30 jours dès sa notification.

19.         Le 23 mai 2024, Mme A______ a, sous la plume de son conseil, sollicité du département qu’il reconsidère la sanction administrative prononcée le ______ 2024 et annule l’amende administrative de CHF 1’500.-.

Cette amende entrait en totale contradiction avec la prolongation du délai accordée. On ne comprenait en effet pas pourquoi une sanction était prononcée alors que le département avait fait droit à sa demande de prolongation de délai, régulièrement présentée par elle-même et son MPQ, avant l’échéance du précédent délai déjà accordé.

Par ailleurs, cette sanction supposerait un comportement fautif de sa part, ce qui n’était pas le cas en l’espèce puisque ses mandataires avaient expliqué au département les raisons qui avaient ralenti une partie des travaux, voire empêché leur réalisation au cours de l’hiver, à savoir des conditions météorologiques défavorables, ainsi que certaines considérations financières.

Cela étant, les éléments liés à la sécurité des lieux, prioritaires, avaient été achevés au 12 décembre 2023.

Le montant de l’amende était en outre excessif.

Renseignements pris auprès de son MPQ, ce dernier lui avait confirmé que les travaux de régularisation étaient eux aussi achevés au 23 mai 2024 et que les derniers documents, en cours de finalisation, seraient remis au département le 31 mai 2024.

20.         Par acte du 29 mai 2024, Mme A______ a interjeté recours contre l’amende prononcée le ______ 2024 auprès du tribunal.

Elle l’a retiré le 27 juin 2024.

21.         Par décision du ______ 2024, le département a sanctionné Mme A______ d’une nouvelle amende d’un montant de CHF 5’000.- après avoir fait constater par ses collaborateurs le 19 juin 2024 que l’ordre du 21 avril 2023 n’avait toujours pas été respecté dès lors que les travaux liés aux conditions de la police du feu n’étaient toujours pas terminés et que le vestiaire du 2ème étage avait été transformé en salon de massage. Le montant de cette amende tenait compte de l’attitude de l’intéressée à ne pas se conformer à ses ordres des 21 avril 2023, ______2024 et ______ 2024.

De plus, le département a ordonné à Mme A______, dans un nouveau délai d’ici au 2 septembre 2024 de rétablir une situation conforme au droit en procédant à la réalisation des travaux conformément à l’autorisation DD 6______, notamment les 23 réserves du courriel de la police du feu du 20 juin 2024.

Il était encore rappelé qu’en cas de non-respect de cet ordre et/ou sans nouvelles de l’intéressée dans le délai imparti, celle-ci s’exposait à toutes nouvelles mesures et/ou sanction justifiée par la situation, notamment l’interdiction d’utiliser les locaux.

S’agissant d’une mesure d’exécution d’une décision en force, cette décision ne pouvait pas faire l’objet d’un recours (art. 59 LPA).

22.         Par acte du 16 septembre 2024, Mme A______ a recouru contre l’amende administrative prononcée par le département dans sa décision du ______ 2024 auprès du tribunal, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation.

L’amende administrative prononcée par le département présentait un caractère disproportionné, dès lors qu’aucune faute ne lui était imputable et qu’elle s’était déjà acquittée, antérieurement, de deux amendes, l’une d’un montant de CHF 500.-l’autre de CHF 1’500.-, dont le bien-fondé était déjà contestable.

La collaboration avec le département avait toujours été constante, sans que celui-ci ne tienne compte des réalités pratiques en fixant des délais d’exécution de manière arbitraire. Le retrait du recours contre la seconde amende témoignait d’une volonté de conciliation, alors même que les travaux n’avaient souffert d’aucun retard.

Aussi, immédiatement après avoir eu connaissance du retrait de son recours déposé le 29 mai 2024, le département s’était empressé de solliciter de nouveaux travaux et d’infliger une nouvelle amende administrative de CHF 5’000.-. En agissant ainsi, le département avait fait preuve d’un comportement contraire à la bonne foi.

Elle avait certes sollicité plusieurs prolongations de délai, mais le département y avait toujours donné une suite favorable, jusqu’au 15 avril 2024, sans préciser qu’il se serait agi d’une ultime prolongation. A cela s’ajoutait que le département avait fait preuve d’un comportement totalement incompréhensible en infligeant cette précédente amende de CHF 1’500.- tout en accordant la prolongation de délai demandée au 31 mai 2024. La sanction prononcée le ______ 2024 était donc contradictoire avec le comportement adopté par le département jusqu’alors de sorte que le recours qui avait été déposé – avant d’être retiré – aurait en réalité eu de bonnes chances de succès.

Le retrait de son recours et le paiement de l’amende ne sauraient donner un fondement à une sanction qui n’en avait pas. Au contraire, le fait de s’acquitter du montant de cette amende ne faisait que confirmer son attitude conciliante et collaborante dès le début de la procédure de régularisation, éléments dont le département aurait dû tenir compte pour renoncer à toute amende. En ne le faisant pas, le département avait clairement excédé son pouvoir d’appréciation.

Par ailleurs, aucun comportement fautif ne pouvait lui être reproché. Elle relevait prioritairement que le département n’avait jamais tenu compte de considérations pratiques dans la fixation des différents délais d’exécution, lesquels avaient tous été fixés arbitrairement, à des échéances qui ne tenaient pas compte des conditions météorologiques, des disponibilités des entreprises ou fournisseurs ou encore de l’exploitation du restaurant.

De plus, depuis le début de la procédure de régularisation, elle avait fait preuve d’un comportement exempt de toute faute ou négligence. Les prolongations accordées découlaient uniquement du déroulement du chantier qui avait pris un temps qui n’avait jamais été estimé par le département, tant en raison des impératifs de construction que des conditions météorologiques défavorables. Le délai initial fixé à quatre mois ne tenait compte ni de l’ampleur des travaux à effectuer, ni de leur coût, ni de leur nature.

Elle avait en outre pris le soin de procéder en priorité aux travaux d’ordre sécuritaire, lesquels s’étaient terminés avant le 29 décembre 2023.

Les travaux demandés par autorisation de construire DD 6______ étaient intégralement terminés depuis le 27 août 2024 et son architecte avait adressé au département l’attestation globale de conformité par courriel du 29 mai 2024.

Le département faisait une fois de plus preuve de mauvaise foi en lui reprochant de ne pas avoir communiqué des documents puisque le collaborateur du département avait omis de lui communiquer une référence informatique lui permettant de déposer les documents concernés sur la plateforme idoine.

Enfin, la décision indiquait de manière erronée que le vestiaire du 2ème étage avait été transformé en salon de massage, comme s’il s’agissait d’une activité étrangère à la destination commerciale de l’immeuble. Le 2ème étage n’était de surcroît pas visé par l’injonction ou l’autorisation. Sur ce point, il était rappelé que l’immeuble avait une affectation commerciale et que l’exploitation d’un salon de massage n’entrait donc pas en contradiction avec son but. L’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) avait d’ailleurs émis un préavis favorable à ce salon de bien-être le 11 mars 2024.

Il était surprenant que le département ait organisé une visite le 19 juin 2024, pratique assez rare à sa connaissance dont on pouvait supposer qu’elle l’avait été en seule réponse de la demande de reconsidération relative à la précédente amende prononcée.

La quotité de l’amende de CHF 5’000.- était totalement disproportionnée. D’une part, les travaux et démarches sollicités par courriel du département du 20 juin 2024 ne figuraient, pour la plupart d’entre eux, pas dans l’autorisation de construire. D’autre part, il n’y avait eu aucun retard dans l’exécution dès lors que les délais avaient été dûment prolongés. Par ailleurs, un éventuel retard s’agissant de leur exécution ne saurait justifier une amende et encore moins d’un tel montant.

Dans tous les cas, tous les points de l’autorisation étaient réalisés, à l’exception de deux éléments mineurs, à savoir l’installation des serrures anti-panique, laquelle avait d’ores et déjà été planifiée, de sorte que le montant de l’amende prononcée relevait d’un excès du pouvoir d’appréciation de l’autorité.

23.         Le 25 novembre 2024, l’OAC a transmis ses observations, concluant au rejet du recours et à la confirmation de décision querellée, sous suite de frais.

L’argument selon lequel aucune faute ne serait imputable à la recourante ne pouvait être retenu. En effet, les travaux avaient été exécutés sans autorisation préalable, plaçant le département devant le fait accompli. Deux amendes s’étaient révélées nécessaires, les ordres adressés à l’intéressée n’ayant pas été respectés. Le fait d’avoir déjà été sanctionnée ne la dispensait pas de se conformer aux exigences légales. Plusieurs délais avaient pourtant été sollicités par la recourante elle-même et systématiquement accordés, notamment les 6 mai et 28 septembre 2022, puis encore jusqu’au 31 mai 2024. Les contraintes pratiques avaient ainsi été prises en compte. Un constat sur place, effectué en présence d’un collaborateur de la police du feu, avait permis de relever que, près d’une année après l’échéance initiale, les prescriptions essentielles en matière de sécurité, notamment celles visées dans le préavis du 5 janvier 2023, n’avaient toujours pas été exécutées. Le fait que la recourante n’eût pas recouru contre les deux premières amendes, ou qu’elle eût retiré l’un de ses recours, ne lui était d’aucune utilité. Il lui avait été loisible de contester dites décisions et ses choix en la matière n’avaient aucune incidence sur le fait qu’elle avait été sanctionnée à trois reprises, pour avoir persisté à ne pas se conformer aux ordres donnés. Elle devait considérer chaque délai comme un ultime délai, accordé à bien plaire, et non partir du principe que des prolongations lui seraient indéfiniment octroyées. Un tel comportement dénotait un certain mépris à l’égard des décisions de l’autorité.

L’affirmation selon laquelle l’autorité aurait attendu le retrait de son recours pour imposer de nouveaux travaux relevait de la pure spéculation.

S’agissant des mesures imposées, celles-ci découlaient directement de l’autorisation de construire complémentaire DD 6______ et relevaient de la compétence de l’autorité chargée de la sécurité des bâtiments. La transformation du vestiaire en salon de massage contrevenait en outre aux plans visés ne varietur et aurait dû faire l’objet d’une autorisation de construire distincte, non sollicitée. Le préavis de l’OCIRT ne dispensait pas de cette exigence.

Enfin, la quotité de l’amende avait été fixée en tenant compte de la durée de l’infraction, de son caractère répété et du comportement adopté face aux décisions du département. Les éléments restants à exécuter, bien que limités, concernaient directement la sécurité des usagers et ne pouvaient être considérés comme négligeables. L’amende prononcée apparaissait ainsi proportionnée au regard des circonstances du cas d’espèce et apte à atteindre le but poursuivi, à savoir le respect effectif des obligations légales.

24.         Par réplique du 17 décembre 2024, la recourante a formulé des allégués complémentaires et persisté dans les développements juridiques et conclusions pris dans son acte de recours du 16 septembre 2024.

Par courrier du 3 juin 2022, elle avait apporté une réponse détaillée à chacun des 21 éléments initialement relevés par le département, réponse dont il n’avait pas été tenu compte par la suite. Ce n’était qu’après cet échange que l’office avait restreint son analyse à dix éléments nécessitant une autorisation, tout en admettant la possibilité de procéder à leur démontage, ainsi qu’à la mise en conformité de six autres. Un délai de 30 jours lui avait alors été imparti de manière arbitraire, sans considération pour la technicité des travaux. Elle avait néanmoins annoncé le dépôt d’un dossier de régularisation, en rappelant que plusieurs des éléments visés existaient déjà lors de l’achat et que le bâtiment était inscrit à l’inventaire. Elle avait également manifesté son intention de régulariser certains travaux relatifs à la sécurité incendie, bien qu’ils ne fussent pas exigés à ce stade.

L’autorisation de construire avait été délivrée et les travaux réalisés dans les délais prolongés. Ce n’était qu’après la visite du 19 juin 2024 que, par courriel du lendemain, le département avait exigé des travaux supplémentaires, non mentionnés dans l’ordre du 21 avril 2023. Les éléments visés à ce stade, notamment ceux relatifs à la configuration des vestiaires ou aux points sécuritaires, ne figuraient dans aucune décision préalable. Tous les travaux avaient été achevés le 27 août 2024 et le département avait classé le dossier n° I-4______' le 11 octobre 2024 suite à la visite sur site le 2 octobre 2024.

Elle avait sollicité la reconsidération de l’amende, sans succès, alors même qu’aucune infraction n’était plus reprochée. Aucun des délais fixés n’avait été qualifié d’ultime, ce qui rendait d’autant plus injustifié le reproche d’inexécution. Le montant de l’amende apparaissait excessif, d’autant que les trois sanctions visaient, selon elle, les mêmes faits. Les deux premières avaient été payées dans un souci d’économie de procédure, sans reconnaissance cependant de leur bien-fondé. Le cas cité par l’autorité, relatif à des logements insalubres, ne pouvait être transposé à la présente affaire, qui portait sur des défauts mineurs ayant tous été régularisés. Le fait d’avoir exécuté l’ensemble des travaux dans un délai d’environ une année ne justifiait en rien une sanction de cette ampleur.

25.         Par duplique du 2 avril 2024, le département a persisté dans ses conclusions.

La recourante persistait, pour l’essentiel, dans les arguments déjà développés dans son recours, sans faire valoir d’élément nouveau susceptible de remettre en cause la position qu’il avait exposée dans ses observations du 25 novembre 2024.

26.         Par courrier du 22 janvier 2025, sous la plume de son conseil, la recourante a adressé une écriture spontanée au tribunal.

Il était choquant de lire qu’elle aurait persisté à ne pas se conformer aux ordres du département alors qu’elle avait pleinement collaboré à cette procédure de mise en conformité depuis son début. A tel point que celle-ci avait été classée, en l’absence d’infraction constatée lors du dernier contrôle ayant eu lieu le 2 octobre 2024.

Ce n’était pas parce que l’architecte, à fin 2023, avait tardé à solliciter une prolongation de délai pour l’exécution des travaux que la première amende avait été infligée le ______ 2024. Cela étant, le délai avait ensuite été prolongé à deux reprises par le département. On ne pouvait donc retenir aucune faute.


 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 LPA.

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_712/2020 du 21 juillet 2021 consid. 4.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/53/2025 du 14 janvier 2025 consid. 4).

5.             La recourante conteste l’amende administrative d’un montant de CHF 5’000.- infligée par le département, tant dans son principe que dans sa quotité.

6.             Les propriétaires ou leurs mandataires, les entrepreneurs et les usagers sont tenus de se conformer aux mesures ordonnées par le département en application des art. 129 et 130 LCI (art. 131 LCI). Le département notifie aux intéressés, par lettre recommandée, les mesures qu’il ordonne. Il fixe un délai pour leur exécution, à moins qu’il n’invoque l’urgence (art. 132 al. 1 LCI).

7.             Est passible d’une amende administrative de CHF 100.- à CHF 150’000.- tout contrevenant à la LCI, à ses règlements d’application ainsi qu’aux ordres du département (art. 137 al. 1 LCI).

8.             Il est tenu compte, dans la fixation du montant de l’amende, du degré de gravité de l’infraction ; la violation des prescriptions par cupidité ainsi que les cas de récidive constituent notamment des circonstances aggravantes (art. 137 al. 3 LCI).

9.             L’art. 137 al. 1 let. c LCI érige la contravention aux ordres donnés par le département en infraction distincte de la contravention à la LCI et à ses règlements d’application (let. a et b). De par sa nature, cette infraction est très proche de celle visée par l’art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), soit l’insoumission à une décision de l’autorité, qui, d’une part, constitue un moyen d’exécution forcée, dans la mesure où elle permet d’exercer une certaine pression sur le destinataire d’une injonction de l’autorité afin qu’il s’y conforme et, d’autre part, en tant que disposition pénale, revêt un caractère répressif (cf. Alain MACALUSO/ Laurent MOREILLON/ Nicolas QUELOZ [éd.], Commentaire romand du Code pénal II, Art. 111-392 CP, 2017, n. 2 ad art. 292 p. 1887).

10.         À l’instar de cette disposition pénale, la condamnation de l’auteur pour infraction à l’art. 137 al. 1 let. a LCI n’a pas pour effet de le libérer du devoir de se soumettre à la décision de l’autorité. S’il persiste dans son action ou son omission coupable, il peut être condamné plusieurs fois pour infraction à l’art. 137 al. 1 let. c LCI, sans pouvoir invoquer le principe ne bis in idem, dès lors que l’on réprime à chaque fois une autre période d’action ou d’omission coupables. De plus, la sanction de l’insoumission peut être augmentée chaque fois qu’une menace de l’appliquer est restée sans effet (cf. ATA/147/2014 du 11 mars 2014 consid. 11 et les références ; ATA/455/2000 du 9 août 2000 consid. 3d).

11.         Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/508/2020 du 26 mai 2020 consid. 4 ; ATA/206/2020 du 25 février 2020, consid. 4b ; ATA/13/2020 du 7 janvier 2020, consid. 7b). En vertu de l’art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), il y a en effet lieu de faire application des dispositions générales (art. 1 à 110) du CP.

12.         En vertu de l’art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du CP s’appliquent à titre de droit cantonal supplétif, sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal (ATA/611/2016 du 12 juillet 2016 consid. 10c et les références citées). Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (cf. not. ATA/625/2021 du 15 juin 2021 consid. 4b ; ATA/559/2021 du 25 mai 2021 consid. 7d ; ATA/13/2020 du 7 janvier 2020 consid. 7c ; ATA/1828/2019 du 17 décembre 2019 consid. 13c ; ATA/1277/2018 du 27 novembre 2018 consid. 6c ; Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 8e éd., 2020, p. 343 n. 1493).

13.         Il est ainsi en particulier nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (cf. not. ATA/625/2021 du 15 juin 2021 consid. 4b ; ATA/559/2021 du 25 mai 2021 consid. 7d ; ATA/13/2020 du 7 janvier 2020 consid. 7c ; ATA/1828/2019 du 17 décembre 2019 consid. 13c ; ATA/1277/2018 du 27 novembre 2018 consid. 6c ; Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, ibidem).

14.         L’autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d’une sanction doit faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine). La culpabilité doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle, ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure (cf. ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 ; 134 IV 17 consid. 2.1 ; 129 IV 6 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1024/2020 du 25 janvier 2021 consid. 1.1 ; 6B_28/2016 du 10 octobre 2016 consid. 5.1 ; 6B_1276/2015 du 29 juin 2016 consid. 2.1 ; cf. aussi ATA/559/2021 du 25 mai 2021 consid. 7e) et ses capacités financières (cf. ATA/719/2012 du 30 octobre 2012 consid. 20 et les références citées).

15.         Néanmoins, toujours selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et, selon l’art. 47 CP, jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende (ATA/313/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/124/2016 du 9 février 2016 ; ATA/824/2015 du 11 août 2015 ; ATA/569/2015 du 2 juin 2015 ; ATA/886/2014 du 11 novembre 2014), le juge ne la censurant qu’en cas d’excès (ATA/313/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/124/2016 du 9 février 2016 ; ATA/824/2015 du 11 août 2015 ; ATA/147/2014 du 11 mars 2014). L’autorité ne viole le droit en fixant la peine que si elle sort du cadre légal, si elle se fonde sur des critères étrangers à l’art. 47 CP, si elle omet de prendre en considération des éléments d’appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu’elle prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d’appréciation (ATF 136 IV 55 consid. 5.6 ; 135 IV 130 consid. 5.3.1 ; 134 IV 17 consid. 2.1 ; 129 IV 6 consid. 6.1 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_28/2016 du 10 octobre 2016 consid. 5.1 ; 6B_1276/2015 du 29 juin 2016 consid. 2.1).

16.         Enfin, l’amende doit respecter le principe de la proportionnalité garanti par l’art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101 ; ATA/313/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/871/2015 du 25 août 2015 ; ATA/824/2015 du 11 août 2015), lequel commande que la mesure étatique soit nécessaire et apte à atteindre le but prévu et qu’elle soit raisonnable pour la personne concernée (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2 ; 139 I 218 consid. 4.3).

17.         En l’espèce, la recourante ne conteste pas avoir réalisé des travaux sans autorisation et ainsi avoir mis l’autorité devant le fait accompli. Il ressort des pièces au dossier que le département a effectivement œuvré avec la recourante afin que la situation soit régularisée. Aussi, contrairement à ce que soutient la recourante, force est de constater que le département a tenu compte des circonstances ayant occasionné des retards dès lors qu’il a prolongé à plusieurs reprises les délais initialement fixés, notamment les 6 mai et 28 septembre 2022.

Par ailleurs au moment où la DD 6______ a été obtenue, le département a imparti un délai initial de trois mois, lequel a été prolongée, à la demande de la recourante, pour une durée de six mois. Malgré cette prolongation, la recourante ne s’est pas exécutée et une première amende a été prononcée. Malgré un nouveau délai pour s’exécuter, elle s’est vu infliger une deuxième amende le ______ 2024.

Force est ainsi de constater que malgré les prolongations successives accordées, la recourante n’a pas finalisé le permis d’occuper dans le délai imparti, le département ayant mis en évidence lors de la visite du 19 juin 2024 que la recourant ne s’était pas conformée aux ordres lui ayant été imposés, lesquels correspondaient aux exigences de l’autorisation de construire délivrée.

En agissant de la sorte, conformément à la jurisprudence rappelée ci-dessus, le département n’a pas excédé son pouvoir d’appréciation en retenant que la recourante a effectivement commis une faute en ne se conformant pas à ses ordres et aux conditions de l’autorisation de construire délivrée.

À cela s’ajoute que contrairement à ce que soutient la recourante, l’exploitation d’un salon de massage au 2ème étage relève d’un changement d’affectation qui aurait dû faire l’objet d’une autorisation de construire, de sorte que celle-ci a commis une faute déjà en n’exécutant pas l’autorisation de construire selon les plans visés ne varietur.

Au vu de ce qui précède, le tribunal retiendra que l’amende est justifiée dans son principe.

18.         La recourante conteste également la quotité de l’amende qu’elle considère disproportionnée. La recourante ne saurait être suivie. En effet, comme rappelé ci-dessus, les deux premières amendes prononcées ne l’ont manifestement pas amenée à respecter les ordres du département. Force est ainsi de constater, comme l’a fait le département, qu’en dépit des assurances données, l’entièreté des travaux n’avait pas été réalisé presque un an après le délai initialement imparti à la recourante pour ce faire.

La recourante allègue encore que la quotité de l’amende serait disproportionnée au motif que tous les points de l’autorisation avaient été exécutés, à l’exception de deux éléments mineurs. Là encore, elle ne saurait être suivie. En effet, les serrures anti-panique relèvent des prescriptions en matière de sécurité incendie et ne sauraient ainsi être qualifiées d’éléments mineurs. Bien au contraire, comme l’a à juste titre retenu le département, le fait de ne pas respecter des ordres relatifs à mise en conformité de prescriptions en matière de sécurité incendie ajoute à la gravité de la faute de la recourante.

Au vu de ce qui précède, la quotité de l’amende, proportionnée et apte à sanctionner le comportement illicite et répété de la recourante, sera confirmée.

19.         Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

20.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe est condamnée au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 900.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 16 septembre 2024 par Madame A______ contre la décision du département du territoire du ______ 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par l’avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Laetitia MEIER DROZ, présidente, Loïc ANTONIOLI et Diane SCHASCA, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Laetitia MEIER DROZ

 

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

 

Genève, le

 

La greffière