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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/650/2024

JTAPI/434/2025 du 24.04.2025 ( OCPM ) , ADMIS

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;ACCORD SUR LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES;ENFANT;DROIT DE DEMEURER;REGROUPEMENT FAMILIAL;TRAVAILLEUR;RÉVOCATION(EN GÉNÉRAL);ARBITRAIRE DANS LA LÉGISLATION
Normes : ALCP.6.par1; ALCP.24.par1; ALCP.3.par1; ALCP.3.par6; Cst.9
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/650/2024

JTAPI/434/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 24 avril 2025

 

dans la cause

 

Mineure A______, représentée par Me Gian Luigi BERARDI, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             La mineure A______ (ci-après : la mineure), née le ______ 2007, est ressortissante espagnole.

2.             Elle est arrivé une première fois en Suisse le 5 mars 2009 avec sa sœur et son frère, nés en 2001 et 2003, son père, Monsieur B______ et sa mère, Madame C______, laquelle avait alors déposé une demande d'autorisation de séjour avec prise d'activité lucrative en sa faveur et une demande de regroupement familial en faveur de ses trois enfants, demande qui a été refusée par décision du 15 mars 2010 de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), au motif que l'ensemble de la famille était dépendante de l’aide sociale depuis le 1er avril 2009.

3.             Suite à l’acceptation de la nouvelle demande d’autorisation de séjour déposée le 17 mai 2011 par sa mère, la mineure a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour dans le cadre du regroupement familial avec cette dernière, avec mention d’une arrivée en Suisse le 1er mai 2011. L’autorisation de séjour avec exercice d’une activité lucrative de Mme C______ était valable jusqu’au 30 avril 2016.

4.             Par ordonnance du 17 janvier 2017, confirmée par ordonnance du 20 juin 2017, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : TPAE) a accordé à M. B______ l’autorité parentale et la garde exclusive sur ses trois enfants et instauré une curatelle d’assistance éducative en leur faveur.

5.             Par décision du 23 mai 2017, entrée en force, l'OCPM a refusé de renouveler l’autorisation de séjour de Mme C______ et a prononcé son renvoi de Suisse. Il était retenu que cette dernière n'avait pas la garde de ses enfants, les voyait de façon extrêmement sporadique et que l'exercice du droit de visite pouvait aisément être aménagé depuis l'étranger.

6.             Par décision du 3 janvier 2020, entrée en force, l’OCPM a révoqué avec effet rétroactif les autorisations de séjour de Monsieur B______ et de ses trois enfants, D______, E______ et F______. Une nouvelle autorisation de séjour de courte durée leur avait été délivrée à dater du 15 mars 2019.

Il y était notamment précisé que la jurisprudence relative à l’art. 3 par. 6 annexe I de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681) s’appliquait aux enfants de ressortissants de l’UE/AELE qui exerçaient un droit de séjour comme travailleurs. En l’occurrence, le précité n’ayant toutefois jamais eu la qualité de travailleur au sens de l’ALCP, ses enfants ne pouvaient se prévaloir de cette disposition pour maintenir leur droit à une autorisation de séjour entre les années 2009 et 2019.

7.             Par courrier du 21 mars 2023, dans le cadre de la demande de renouvellement de l'autorisation de séjour de M. B______ et de ses enfants, l'OCPM a invité l’intéressé à le renseigner sur l'emploi du temps actuel de tous les membres majeurs de la famille, à lui transmettre des justificatifs de son état de santé et à lui indiquer si une demande de reconnaissance d'une invalidité avait été déposée, à lui transmettre des justificatifs de ses recherches d'emploi et de ses efforts d'intégration socio-professionnelle, les attestations de scolarité de la mineure F______ avec le dernier bulletin de notes et du comportement, ainsi que les attestation récapitulatives du département de l’instruction publique (ci-après : DIP) pour les trois enfants.

Ce courrier étant resté sans suite, l’OCPM a envoyé un rappel à l’intéressé le 28 août 2023.

8.             Par décision du 30 mai 2023, le TPAE a pris acte de l’accord de M. B______, actuellement sans domicile fixe, en faveur du placement de la mineure auprès de sa mère Mme C______.

Il ressort de cette décision qu’en date du 28 avril 2023, M. B______ avait eu le projet d’essayer de s’installer en Espagne avec sa fille pour y démarrer une nouvelle vie, ce que cette dernière avait accepté. Néanmoins, le 22 mai 2023, il avait annoncé être rentré d’Espagne à la demande de la précitée.

9.             Par décision du 2 juin 2023, le TPAE a nommé Monsieur Gian Luigi BERARDI, avocat auprès du service social international, aux fonctions de curateur de représentation en vue de l’obtention d’une autorisation de séjour en faveur de la mineure, ce en raison de l’incapacité d’agir actuelle de ses représentant légaux, voire du conflit d’intérêt existant dans ce contexte avec ces derniers.

10.         Par courrier du 18 octobre 2023, faisant suite à une demande de renseignements et pièces complémentaires de l’OCPM, le curateur de la mineure lui a notamment transmis les décisions du TPAE des 30 mai et 19 septembre 2023 relatives à son placement, une attestation de parcours scolaire genevois de 2011-2012 à 2023-2024 du 6 septembre 2023 ainsi qu’un courrier de soutien du service de protections des mineurs (ci‑après :  SPMi) du 14 août 2023, précisant que F______ vivait « actuellement sous la responsabilité de sa mère ».

Sa mandante - de même que ses parents, détenteurs de l'autorité parentale conjointe et, successivement, du droit de garde et ou/du droit de visite et cela du moins jusqu'à la majorité de leur fille - pouvaient se prévaloir de l'arrêt 2C 997/2015 du 30 juin 2016 à l'appui de la prolongation de leur autorisation de séjour, étant rappelé que le but du droit de séjour fondé sur l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP était d'encourager la poursuite de l'intégration des enfants en formation et que F______, désormais âgée de 16 ans, était scolarisée à Genève depuis l’âge de 5 ans. Subsidiairement, elle devait pouvoir bénéficier de l'art. 20 de l’ordonnance sur l'introduction progressive de la libre circulation des personnes entre, d'une part, la Confédération suisse et, d'autre part, l'Union européenne et ses Etats membres, ainsi qu'entre les Etats membres de l'Association européenne de libre-échange du 22 mai 2002 (Ordonnance sur l'introduction de la libre circulation des personnes, OLCP – RS 142.203).

11.         Par courrier du 21 novembre 2023, l’OCPM a signifié à la mineure, par l’intermédiaire de son curateur, son intention de refuser sa demande de renouvellement de son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse. Un délai de 30 jours lui était octroyé pour faire valoir son droit d’être entendu.

12.         Le 29 novembre 2023, la mineure a été placée, avec l’accord de son père, au foyer « G______ ».

13.         Le 21 décembre 2023, la mineure, sous la plume de son curateur, a transmis ses observations écrites, invitant l’OCPM à prolonger son autorisation de séjour.

Elle était actuellement inscrite en 11ème année au Cycle d’orientation (ci-après : CO) de H______ en section « Langues vivantes et communication ». Elle comptait beaucoup d’absence et n’était pas promue malgré une moyenne générale de 4,6 sur 6. Selon un entretien téléphonique de son curateur avec son conseiller social au CO de I______, cette situation s’expliquait par sa situation familiale difficile, étant notamment relevé qu’il lui arrivait de manquer l’école car elle devait garder ou aller chercher son petit frère J______ après l’école. Il suffirait que sa moyenne de 3,1 en mathématique passe à 3,5 pour qu’elle soit promue.

Par ailleurs, depuis le 5 décembre 2023, elle avait été placée au foyer d’urgence G______ « au vu de la situation du père, qui demeurait précaire et de la relation entre la mère et la fille qui semblait se détériorer ». Cette mesure avait été autorisée à titre super provisionnel le 11 décembre 2023 par le TPAE. Il conviendrait dès lors, à titre subsidiaire, d’analyser également son dossier sous l’angle des art. 30 al. 1 let. c de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 33 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201).

Elle pouvait en outre se prévaloir d’un droit au renouvellement de son autorisation de séjour en vue de lui permettre d’achever sa formation en vertu de l’art. 3 par. 6 ALCP. En effet, on ne saurait raisonnablement exiger d’elle, qui résidait depuis l’âge de cinq ans en Suisse, où elle avait effectué toute sa scolarité, qu’elle poursuive sa formation dans son pays d’origine dans la mesure où elle n’y avait pas reçu un enseignement de base et n’y avait plus aucune attache.

Sa mère avait enfin déménagé le 1er décembre 2023 dans un appartement de trois pièces, à K______.

Etaient notamment joints le courrier du 18 octobre 2024 et ses annexes du curateur, un courriel du 11 décembre 2023 de la curatrice d’J______, son demi-frère, laquelle relevait notamment le très bon lien du précité avec ses frères et sœurs et qu’il n’était pas dans son intérêt d’être renvoyé en Espagne avec sa mère.

14.         Par décision du 26 janvier 2024, l’OCPM a refusé de renouveler l’autorisation de séjour de la mineure et a prononcé son renvoi de Suisse, un délai au 26 avril 2024 lui étant imparti pour ce faire. Le dossier ne faisait pas apparaitre que le renvoi ne serait pas possible, pas licite ni raisonnablement exigible.

L’intéressée ne remplissait pas les conditions du droit au regroupement familial sous l’angle de l’art. 3 par. 1 annexe I ALCP, ses parents n’ayant plus de droit légal à résider en Suisse. Ils ne pouvaient en effet plus se prévaloir de l’ALCP et ne pouvaient pas non plus prétendre à une autorisation de séjour sous un quelconque autre angle légal. Placée en foyer au début du mois de décembre 2023, la mineure ne résidait par ailleurs plus avec ses parents. Toutefois, M. B______, qui détenait seul l’autorité parentale et la garde sur sa fille, avait le droit de déterminer son lieu de résidence. Tous deux avaient ainsi envisagé, courant 2023, un retour en Espagne afin de tenter de s’y réinstaller.

L’octroi d’une autorisation de séjour sans activité lucrative, en application de l’art. 24 annexe I ALCP et de la jurisprudence Zhu et Chen, n’était pas envisageable, M. B______ ne disposant pas de moyens financiers suffisants pour assumer, de manière autonome, sa prise en charge financière et l’entretien de la mineure.

S’agissant de l’art. 3 par. 6 annexe I ALCP, selon toute vraisemblance, F______ terminerait le CO au mois de juin 2024 et les études actuellement suivies en Suisse pourraient être poursuivies en Espagne, sans obstacle majeur. Par ailleurs, elle ne souffrirait d’aucune rupture du lien familial que ce soit avec son père ou sa mère, tous deux ressortissants espagnols et ne bénéficiant plus d’un droit de séjour en Suisse. En outre, l’Espagne proposait des solutions de placement similaires à celles offertes en Suisse. Enfin, elle parlait espagnol et s’était montrée favorable à l’idée d’une réinstallation en Espagne avec son père. Son retour dans ce pays, avec la présence de ses deux parents, apparaissait dès lors exigible.

Sous l’angle de l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), ses parents ne pouvant plus se prévaloir d’un droit de séjour en Suisse, elle ne pouvait invoquer cette disposition pour demeurer en Suisse.

Aucun élément du dossier ne laissait de plus apparaitre un cas personnel d’une extrême gravité au sens des art. 20 OLCP et 30 al. 1 let. b LEI. Si elle avait vécu de nombreuses années en Suisse, son intégration y faisait toutefois défaut. En effet, elle ne justifiait pas avoir mené à terme, ni même mis en place, une formation qualifiante. Un renvoi en Espagne ne compromettrait pas sa carrière professionnelle et n’interromprait pas ses études en cours, étant rappelé qu’elle était en fin de cursus et en échec scolaire. En outre, elle pourrait compter sur la présence et le soutien de l’ensemble de sa famille une fois de retour en Espagne et pourrait y poursuive des études d’équivalente qualité.

Elle ne remplissait enfin pas non plus les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour dans le cadre du placement selon l’art. 30 al. 1 let. c LEI. En effet, des solutions de placement similaires pouvaient être envisagées depuis l’Espagne dans l’hypothèse où son père se trouverait en incapacité d’assurer sa prise en charge. Sa présence en Suisse ne pouvait donc être considérée comme étant la seule alternative. Elle n’était pas orpheline de père et de mère et il ne ressortait pas du dossier que son père se trouvait dans l’absolue incapacité de s’occuper d’elle, son placement en foyer étant essentiellement motivé par le fait qu’il ne disposait pas d’un logement convenable pour l’accueillir.

15.         Par acte du 23 février 2024, la mineure, sous la plume de son curateur, a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision, concluant à son annulation et au renouvellement de son autorisation de séjour, le tout sous suite de frais.

C’était à tort que l’autorité intimée avait considéré que son renvoi en Espagne était exigible, déjà parce qu’elle vivait en Suisse depuis quinze ans. Arrivée en 2009, à l’âge d’un an et demi, elle y avait ainsi passé son enfance et son adolescence, période cruciale pour le développement de sa personnalité et son intégration. C’était le seul pays où elle avait été scolarisée et elle y achèverait sa scolarité obligatoire. Ses connaissances de la langue espagnole étaient sommaires, et partant, insuffisantes pour lui permettre d’intégrer rapidement le système scolaire obligatoire espagnole sans compromettre les acquis scolaires atteints en Suisse et, de manière plus générale, le résultat des efforts consentis à cet effet. Son renvoi y apparaissait dès lors inexigible, d’autant plus qu’elle éprouvait des difficultés à exploiter ses acquis dans des situations nouvelles. Dans un courrier du 8 janvier 2024, sa curatrice avait ainsi insisté sur son besoin essentiel à continuer à résider en Suisse, qu’elle considérait comme son pays, n’ayant jamais connu d’autre lieu de résidence. Un renvoi en Espagne serait extrêmement délétère et risquerait fortement de l’atteindre dans sa santé mentale. Le refus litigieux était ainsi manifestement contraire à son intérêt prépondérant, tel que protégé par l’art. 3 de la Convention relative aux droits de l’enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989, approuvée par l’Assemblée fédérale le 13 décembre 1996. Instrument de ratification déposé par la Suisse le 24 février 1997 (CDE - RS 0.107) et son renvoi en Espagne inexigible, étant relevé que lorsqu’elle y était retournée en 2023, elle avait souhaité repartir après quelques semaines car ses amis à Genève lui manquaient. Partant, elle pouvait prétendre au renouvellement de son autorisation de séjour en application de l’art. 3 par. 6 annexe I ALCP.

S’agissant de l’art. 8 CEDH, la décision litigieuse omettait le volet « vie privée », également protégé, étant rappelé qu’elle vivait légalement en Suisse depuis douze ans, son père ayant bénéficié d’un permis de séjour valable jusqu’au 29 mars 2021. L’actuelle dépendance de ses parents à l’aide sociale ne pouvait valablement lui être opposée ni constituer un motif sérieux en faveur de son renvoi, au regard de l’art. 2 al. 2 CDE. Elle renvoyait à cet égard à l’appréciation de sa curatrice. Le refus querellé était partant disproportionné.

Ces considérations valaient a fortiori s’agissant de l’application des art. 20 OLCP et 30 al. 1 let. b LEI.

En lien avec les art. 30 al. 1 let. c LEI et 33 OASA (enfants placés), elle renvoyait à l’arrêt du Tribunal fédéral 2C_997/2015, dont elle et son père, détenteur exclusif de l’autorité parentale et de sa garde pouvaient se prévaloir. Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral avait en effet admis qu’une enfant européenne de 11 ans et se préparant à entrer au cycle d’orientation devait être autorisée à poursuivre sa formation en Suisse, avec sa mère, et cela quand bien même elle faisait l’objet d’un placement en raison des problèmes de santé de sa mère, par ailleurs dépourvue de ressources suffisantes pour subvenir à leur entretien.

Elle invitait enfin le tribunal à traiter son cas conjointement à celui de son père.

Elle a joint un chargé de pièces, dont deux courriers du SPMI des 8 janvier et 14 février 2024 desquels il ressort notamment que toute la fratrie, recomposée, vivait en Suisse et entretenait des liens forts. Le placement de la mineure auprès de sa mère n’avait pas été concluant et il serait invraisemblable d’imaginer le renvoi de la mineure avec celle-ci. F______ était une jeune fille ne présentant pas de difficultés importantes, bien intégrée en Suisse, respectueuse et qui avait l’ambition d’être stable dans le futur, en Suisse, à défaut d’avoir pu bénéficier de cette stabilité auprès de ses parents. Un éventuel renvoi en Espagne serait extrêmement délétère pour elle. F______ ne devait pas être séparée de son père seul parent et figure d’attachement qui s’était montré présent de manière régulière depuis sa naissance et auquel elle était très attachée. C’était dans ce contexte qu’elle lui avait dit « oui » quant à l’idée d’aller en Espagne. Après avoir touché le fond au printemps dernier, M. B______ faisait tout pour stabiliser sa situation.

16.         Le 21 mai 2024, l’OCPM a transmis son dossier et ses observations. Il a conclu au rejet du recours, les arguments invoqués par la recourante n’étant pas de nature à modifier sa position.

En l’occurrence, à l'instar de sa sœur et de son frère, la mineure, arrivée en Suisse à l’âge de trois ans, avait été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour UE/AELE (permis B UE/AELE) à titre de regroupement familial valable au 26 mai 2015, laquelle avait toutefois été révoquée par décision du 3 janvier 2020 avec effet rétroactif au jour de sa délivrance, dès lors que son père n'avait jamais acquis la qualité de travailleur salarié, au sens de l'art. 6 annexe I ALCP. Ainsi, elle n'aurait jamais dû être mise au bénéfice d'une autorisation de séjour sur la base de l'art. 3 annexe I ALCP. Par la suite, elle avait bénéficié d'un permis de séjour de courte durée UE/AELE à titre de regroupement familial valable du 15 mars 2019 au 29 mars 2021. Elle avait intégré le système scolaire obligatoire en 2020. Au printemps 2023, elle avait interrompu l'école pour se rendre avec son père en Espagne, avec l’intention de s’y établir, pour revenir en Suisse le 1er mai 2023. Depuis cette date, elle et son père vivaient séparés, à ce jour dans deux foyers distincts, et étaient pris en charge par l'assistance sociale. Il rappelait pour le surplus la situation administrative de chacun des membres de sa famille.

Au fond, l'intéressée, âgée de 16 ans révolus et scolarisée, ne pouvait se prévaloir de l'art 3 par. 6 annexe I ALCP. En effet, à leur arrivée en Suisse en octobre 2010, respectivement mars 2009, ni la recourante ni son père ne disposaient d’une droit – propre ou dérivé – de séjour en Suisse, sur la base de l’ALCP. Ainsi, quand elle avait débuté l’année scolaire 2012/2013 à Genève, elle ne pouvait pas se prévaloir de cette disposition lui garantissant l’admission aux cours d’enseignement général, d’apprentissage et de formation professionnelle dans les mêmes conditions que les ressortissants suisses. Il en découlait qu’elle ne pouvait pas se prévaloir du droit à la poursuite de la scolarité obligatoire sur cette même base, et cela d’autant moins qu’à ce jour encore, ni l’un ni l’autre ne pouvait se prévaloir d’un droit de présence en Suisse sur la base de l’ALCP. Son père n’avait enfin pas le droit de garde sur elle, car ils vivaient séparés dans deux foyers distincts, ce qui empêchait, par surabondance de moyen, qu’elle se prévale de l’art. 3 par. 6 annexe I ALCP.

Elle ne pouvait pas plus se prévaloir de l’art. 8 CEDH, n’ayant séjourné sur le territoire suisse au bénéfice d’une autorisation de séjour UE/AELE que durant deux ans, soit du 15 mars 2019 au 29 mars 2021.

L’art. 30 al. 1 let. c LEI en lien avec l’art. 33 OASA ne sauraient non plus s’appliquer à sa situation dès lors qu’elle ne démontrait pas qu’une prise en charge en Espagne ne serait pas possible par les membres de sa famille, en particulier par son père, qui faisait également l’objet d’une décision d’éloignement de Suisse, ou l’Etat.

Pour terminer, l’art. 20 OLCP, en lien avec les art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA, ne conférait aucun droit à la délivrance d’une permis pour motifs importants. La recourante était par ailleurs sous l’autorité parentale et la garde de son père qui faisait l’objet d’une décision de renvoi. Tous deux étaient entièrement pris en charge par l’assistance sociale et ceci depuis plusieurs années pour un montant considérable. Bien qu’arrivée en Suisse à l’âge de 3 ans, elle retrouverait sa famille en Espagne, soit principalement son père, sa mère et sa sœur. A cela s’ajoutait que conformément à ce qui était requis dans l’expertise du SPMi, elle ne serait pas séparée de son père auquel elle était très attachée et qui semblait prendre sérieusement ses responsabilités envers elle, dans le but de revivre ensemble dès que possible. Son parcours scolaire ne s’opposait pas non plus à son renvoi. Elle devrait terminer sa dernière année de l’enseignement obligatoire le 28 juin 2024 et pourrait mettre ses acquis et connaissances scolaires à profit en Espagne où elle s’était rendue en 2023, avec son père, avec l’intention de s’y installer.

Ainsi, au regard de ces éléments, bien qu’un retour dans sa patrie ne serait certainement pas exempt de difficultés, elle devrait pourrait les surmonter avec le soutien des siens et/ou d’organismes d’aide aux jeunes et aux familles.

17.         Le 11 juillet 2024, dans le délai prolongé pour sa réplique, la recourante, sous la plume de son curateur, a persisté dans les conclusions et termes de son recours.

Elle contestait la position de l’OCPM concernant l’art. 3 par. 6 annexe I ALCP. Si certes son père n’avait pas recouru contre la décision du 3 janvier 2020 révoquant leurs autorisations de séjour UE/AELE avec effet rétroactif au jour de leur délivrance, c’était, d’une part, parce que l’OCPM avait simultanément annoncé qu’il leur délivrerait une autorisation de courte durée avec effet au 15 mars 2019 et valable jusqu’au 29 mars 2021, en lien avec sa nouvelle activité de magasinier auxiliaire auprès de la Ville de K______, de durée déterminée. D’autre part, son supérieur lui avait laissé entrevoir un engagement de durée indéterminée ce qui n’avait finalement pas pu se réaliser en raison de la pandémie de COVID 19. En tout état, seul était décisif le fait que son père avait, en définitive, bien revêtu la qualité de travailleur entre le 15 mars 2019 et le 29 mars 2021. Il serait au surplus disproportionné de lui opposer la situation administrative de son père. Il s’ensuivait qu’elle disposait bien d’un droit autonome à achever sa formation au sens de l’ALCP.

Elle n’avait finalement pas été promue en juin 2024 mais devrait être inscrite à la rentrée prochaine à l’L______ pour une année préparatoire.

Subsidiairement, elle pouvait également se prévaloir de l’art. 20 OLCP. En effet, les enfants mineurs pouvaient avoir un statut de séjour différent de celui de leurs parents et indépendant de ces derniers, en particulier si l’enfant concerné réalisait en sa présence, comme en l’espèce, le cas de rigueur. En tout état, une éventuelle prise en charge en Espagne par sa famille n’était pas de nature à atténuer le déracinement que constituerait son renvoi de Suisse, pays dans lequel elle avait pratiquement toujours vécu.

18.         Dans sa duplique du 24 juillet 2024, l’OCPM a informé le tribunal que par écriture du 21 mai 2024, il avait demandé la suspension de la procédure A/708/2024 concernant le père de l’intéressée, laquelle avait été suspendue jusqu’au 16 décembre 2024 par décision du tribunal du 15 juillet 2024.

Partant, afin qu’il puisse se prononcer en tout état de cause dans le présent cas, lequel était traité en parallèle avec celui de M. B______, il sollicitait également la suspension de la présente procédure en application de l’art. 78 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10), pour une durée de six mois.

19.         Le 12 août 2024, la recourante, sous la plume de son curateur, s’est prononcé favorablement à une telle suspension.

20.         Par décision du 19 août 2024 (DITAI/439/2024), le tribunal a prononcé la suspension de la procédure jusqu'au 24 janvier 2025.

21.         Par courrier du 4 février 2025, le tribunal a informé les parties de la reprise de l’instruction du recours et imparti un délai au 20 février 2025 à la recourante pour se déterminer sur la suite de la procédure et lui fournir toutes informations et pièces utiles s’agissant de sa situation scolaire et personnelle.

22.         Par courrier du 13 février 2025, le tribunal a invité la recourante à lui faire parvenir un nouveau formulaire M.

En effet, dans le cadre de la procédure concernant son père, l’OCPM l’avait informé être disposé à octroyer à ce dernier une autorisation de séjour UE/AELE avec activité salarié. Au vu de ce qui précédait, un délai au 13 mars 2025 lui était imparti afin d’informer le tribunal de tous développement en lien avec sa situation administrative.

23.         Le 20 février 2025, la recourante a informé le tribunal être inscrite à l’L______ depuis le 19 août 2024, dans la filière « transition préparatoire à l’école de culture générale ». Depuis le 1er octobre 2024, elle avait emménagé avec son père, dans un appartement de trois pièces, que ce dernier sous-louait à sa sœur, Madame M______.

Elle a joint son attestation de scolarité et le contrat de bail.

24.         Par courrier du 4 mars 2025, l’OCPM a informé le tribunal qu’il s’était déclaré disposé à octroyer au père de la recourante une nouvelle autorisation de séjour UE AELE à partir du 15 avril 2024. Il avait néanmoins maintenu sa décision du 26 janvier 2024 refusant le renouvellement de l’autorisation de séjour de courte durée UE/AELE du précité, dont la validité avait expiré le 29 mars 2021, dès lors qu’entre le 29 mars 2021 et le 14 avril 2024, celui-ci ne pouvait tirer aucun droit de l’ALCP.

Dans ces circonstances, il était également disposé à octroyer une autorisation de séjour UE/AELE à titre de regroupement familial à la recourante, qui était placée sous l’autorité parentale et le droit de garde de son père, avec qui elle résidait actuellement, à compter du 15 avril 2024.

Sa décision du 26 janvier 2024 était toutefois maintenue en ce qui concernait le refus de renouvellement de son autorisation de séjour UE/AELE à titre de regroupement familial, dont la validité avait pris fin le 29 mars 2021.

25.         Le 13 mars 2025, la recourante, sous la plume de son conseil s’est déterminée sur ledit courrier.

Il était douteux que son père ne puisse tirer aucun droit de l’ALCP après le 29 mars 2021, dès lors qu’il pourrait à priori se prévaloir d’un droit dérivé compte tenu de sa formation. Elle renvoyait à ce sujet aux arguments exposé dans son recours.

Scolarisée en particulier pendant la période de validité de la dernière autorisation de courte durée, couvrant la période du 15 mars 2019 au 29 mars 2021, elle pouvait en effet prétendre au renouvellement de son autorisation de séjour en vertu d’un droit autonome tiré de l’art. 3 par. 6 annexe I ALCP. Partant, il convenait de renouveler son autorisation de séjour également durant la période comprise entre le 29 mars 2021 et le 14 avril 2024.

Elle relevait enfin que la durée totale de son séjour légal n’était pas sans importante pour la délivrance d’un éventuel permis d’établissement ou l’octroi d’un permis selon l’art. 20 OLCP, voire en matière de naturalisation.

26.         Par courrier du 28 mars 2025, l’OCPM a indiqué se référer à ses observations du 21 mai 2024.

27.         Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 ss LPA.

A cet égard, sous l’angle de l’intérêt actuel et pratique à l'admission du recours de la mineure, quand bien l’OCPM a indiqué être disposé à octroyer une autorisation de séjour UE/AELE à titre de regroupement familial à la recourante, à compter du 15 avril 2024, il sera constaté, à toutes fins utiles, que celle-ci dispose toujours, de fait, d’un intérêt à ce qu’il soit statué sur sa demande de renouvellement de son autorisation de séjour à compter du 29 mars 2021, la durée de son séjour légal en Suisse ayant son importance dans le cadre de la délivrance d’un éventuel permis d’établissement, de l’octroi d’un permis selon l’art. 20 OLCP ou en matière de naturalisation.

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             La recourante conclut à l’annulation de la décision querellée et au renouvellement de son permis de séjour. Elle se prévaut des art. 3 par. 1 et 6 Annexe I ALCP, 20 OLCP, en lien avec les art. 30 al. 1 let b LEI et 31 OASA, 30 al. 1 let. c LEI, 2 al. 2 et 3 CDE et 8 CEDH.

6.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie de Suisse des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), dont l'ALCP.

7.             Ainsi, l'ALCP et l'OLCP s'appliquent en premier lieu aux ressortissants des pays membres de l'UE/AELE et aux membres de leur famille, la LEI ne s'appliquant à eux que pour autant que ses dispositions soient plus favorables que celles de l'ALCP et si ce dernier ne contient pas de dispositions dérogatoires (art. 12 ALCP ; art. 2 LEI).

8.             Le champ d’application personnel et temporel de l’ALCP ne dépend en principe pas du moment auquel un ressortissant UE arrive ou est arrivé en Suisse, mais seulement de l’existence du droit de séjour garanti par l’accord au moment où l’étranger le fait valoir (ATF 134 II 10 consid. 2 ; 131 II 339 consid. 2). En outre, l'application de l'ALCP suppose que la personne visée entre dans l'une des différentes situations de libre circulation prévues par l'accord (travailleur salarié, indépendant, chercheur d'emploi, étudiant, etc.) et qu'elle remplisse les conditions afférentes à son statut (ATF 131 II 329 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.169/2004 consid. 6).

9.             Aux termes de l’art. 16 par. 2 ALCP, dans la mesure où l’application de l’accord implique des notions de droit communautaire, il sera tenu compte de la jurisprudence pertinente de la Cour de justice des Communautés européennes (actuellement : Cour de justice de l’Union européenne; ci-après : la CJUE) antérieure à la date de sa signature. La jurisprudence postérieure à la date de la signature de l’ALCP est cependant prise en compte par le Tribunal fédéral pour assurer le parallélisme du système qui existait au moment de la signature de l’accord et tenir compte de l’évolution de la jurisprudence de l’UE (cf. ATF 143 II 57 consid. 3.6 p. 61 et les références citées).

10.         Pour prétendre à l'application des dispositions de l'ALCP, il faut que le ressortissant étranger dispose d'un droit de séjour fondé sur l'accord (arrêt 2C_308/2017 du 21 février 2018 consid. 5.1).

11.         Les parties contractantes règlent, conformément à l'annexe I, notamment le droit au séjour des membres de la famille, quelle que soit leur nationalité (art. 7 let. d ALCP) et le droit d'exercer une activité économique pour les membres de la famille, quelle que soit leur nationalité (let. e). Les membres de la famille d'une personne ressortissant d'une partie contractante ayant un droit de séjour ont le droit de s'installer avec elle (art. 3 par. 1 1ère phr. annexe I ALCP). Sont considérés comme membres de la famille, quelle que soit leur nationalité, le conjoint et leurs descendants de moins de 21 ans ou à charge (art. 3 par. 2 let. a annexe I ALCP) ; ses ascendants et ceux de son conjoint qui sont à sa charge (art. 3 par. 2 let. b annexe I ALCP). Les droits attribués aux membres de la famille sont des droits dérivés, dont le sort est généralement lié au destin du droit originaire duquel ils sont issus. Les enfants peuvent bénéficier du regroupement familial sans restrictions jusqu'à leur 21ème anniversaire. Un droit de séjour dérivé pour un membre de la famille (ressortissant d'un État tiers) doit également être admis si le séjour de ce membre de la famille est indispensable à l'effectivité du droit de séjour d'un bénéficiaire de l'accord. Cette situation se présente avant tout en lien avec le droit de séjour, respectivement le droit de demeurer sur le territoire du pays d'accueil, d'un enfant ressortissant d'une partie contractante. Un droit de séjour d'un parent doit être admis dans toutes les situations dans lesquelles un tel droit est nécessaire pour que le bénéficiaire du droit originaire de séjour puisse effectivement en profiter (Cesla AMARELLE/Minh Son NGUYEN [éd.], Code annoté de droit des migrations, vol. III : Accord sur la libre circulation des personnes [ALCP], 2014, p. 102 à 109).

12.         Selon l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP, les enfants d'un ressortissant d'une partie contractante qui exerce ou non, ou qui exerçait une activité économique sur le territoire de l'autre partie contractante, sont admis aux cours d'enseignement général, d'apprentissage et de formation professionnelle dans les mêmes conditions que les ressortissants de l'État d'accueil, si ces enfants résident sur son territoire.

13.         Ce droit autonome fondé sur l’art. 3 par. 6 Annexe I ALCP reconnu à un enfant mineur UE/AELE, qui séjourne déjà en Suisse au titre du regroupement familial, y a entamé une formation professionnelle et ne peut plus se prévaloir de son droit dérivé notamment en raison de la rupture du lien avec le parent UE/AELE détenteur du droit originaire, reste limité à la durée de la formation (directives et commentaires du secrétariat d'Etat aux migrations - ci-après : SEM - concernant l’introduction progressive de la libre circulation des personnes, directives OLCP, janvier 2025, ch. 7.5.2.1). Un tel droit n’existe cependant qu’aux conditions cumulatives suivantes :

-          Il s’agit d’un enfant d’un ressortissant UE/AELE qui exerce ou non, ou a exercé une activité lucrative en Suisse ;

-          Cet enfant a séjourné en Suisse auprès du parent ressortissant UE/AELE détenteur du droit originaire ;

-          L’enfant a déjà entamé une formation professionnelle en Suisse au moment de la séparation de ses parents ;

-          On ne peut raisonnablement exiger de l’enfant qu’il poursuive sa formation professionnelle dans son pays d’origine où il serait soumis à des difficultés d’adaptation insurmontables.

14.         Interprétant cette disposition dans l'arrêt Baumbast du 17 septembre 2002 (C-413/1999, Rec. 2002 I-7091), la CJUE a jugé que les enfants d'un citoyen de l'Union européenne qui sont venus dans un Etat membre, alors qu'un de leurs parents exerçait des droits de séjour en tant que travailleur dans cet Etat membre, sont en droit d'y séjourner afin d'y poursuivre des cours d'enseignement général. Le fait que les parents des enfants concernés ont entre-temps divorcé ou qu'un seul des parents est un citoyen de l'Union et que ce dernier n'est plus un travailleur dans l'Etat membre d'accueil, ou encore le fait que les enfants ne sont pas eux-mêmes des citoyens de l'Union n'ont à cet égard aucune incidence (arrêt Baumbast, point 63). Elle a confirmé cette jurisprudence dans deux arrêts du 23 février 2010 (arrêts de la CJUE C-310-08 Ibrahim et C-480/08 Teixeira, point 37), en précisant que le parent qui exerçait la garde de l'enfant avait également un droit de séjour, indépendamment de ses moyens d'existence (cf. ATF 142 II 35 consid. 4.1 ; 139 II 393 consid. 3.2 et 3.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_997/2015 du 30 juin 2016 consid. 2.1 ; 2C_792/2013 du 11 février 2014 consid. 4.1).

15.         Le Tribunal fédéral a précisé les contours de l’art. 3 par. 6 Annexe I ALCP, sur la base de cette jurisprudence, dans de nombreux arrêts :

Il a ainsi rappelé que le droit d'obtenir une autorisation de séjour en vertu de l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP concernait les enfants ayant commencé leur formation alors que la communauté conjugale était encore intacte, dans un but d'intégration (cf. ATF 136 II 177 consid. 3.2 ; arrêt 2C_997/2015 du 30 juin 2016 consid. 2.1 ; 2C_195/2011 du 17 octobre 2011 consid. 1.1) et que cette jurisprudence impliquait que l'enfant ait déjà commencé à s'intégrer dans le pays d'accueil, ce qu’il a nié pour des enfants en bas âge, même s'ils se trouvaient en garderie ou à l'école enfantine (cf. ATF 139 II 393 consid. 4.2.2 où il s'agissait d'une enfant âgée de six ans ; cf également arrêts 2C_185/2019 du 4 mars 2021 consid. 7.2.1; 2C_815/2020 du 11 février 2021 consid. 4.2; 2C_870/2018 du 13 mai 2019 consid. 3.3.2 et 3.4.1).

Il a également souligné que le but du droit de séjour fondé sur l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP est d'encourager la poursuite de l'intégration des enfants en formation. Partant, un tel séjour est soumis à la condition que le retour de l'enfant dans son pays d'origine n'apparaisse pas exigible (ATF 139 II 393 consid. 4.2 ; cf. arrêt 2C_669/2015 du 30 mars 2016 consid. 6.3, dans lequel le Tribunal fédéral a laissé ouverte la question de savoir si un enfant de neuf ans avait commencé une formation au sens de cette disposition, considérant que le retour de celui-ci au Portugal avec sa mère, de nationalité portugaise, qui en avait la garde et avec laquelle celui-ci habitait, n'apparaissait pas inexigible ; cf. encore arrêt 2C_997/2015 du 30 juin 2016 consid. 2.2).

Il a retenu que les enfants d'un ressortissant d'une partie contractante au sens de cette disposition jouissent d'un droit indépendant de leurs parents à demeurer dans l'Etat d'accueil, afin d'y terminer leur formation, lorsque l'on ne peut raisonnablement pas exiger d'eux qu'ils retournent dans leur pays d'origine pour achever celle-ci (cf. ATF 142 II 35 consid. 4.1; 139 II 393 consid. 4.2; arrêts 2C_815/2020 du 11 février 2021 consid. 4.2 et réf. cit. ; 2C_673/2019 du 3 décembre 2019 consid. 5.1; 2C_870/2018 du 13 mai 2019 consid. 3.1; 2C_997/2015 du 30 juin 2016 consid. 2). Si les conditions de l'art. 3 par. 6 annexe I ALCP sont réunies, le parent qui exerce la garde de l'enfant bénéficie alors également d'un droit de séjour à titre dérivé, indépendamment de ses moyens d'existence (cf. ATF 142 II 35 consid. 4.2; 139 II 393 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2021 consid. 7.1 du 27 juillet 2022 et les références citées).

Il a notamment admis que le renvoi en Lettonie ne pouvait être exigé vis-à-vis d’une enfant née en Suisse, ayant obtenu un titre de séjour dans ce pays, ayant toujours vécu à Genève et ne parlant que le français. Élève studieuse et volontaire entretenant de bons rapports avec ses camarades de classe, âgée de onze ans au moment de l’arrêt attaqué, elle terminait la sixième année primaire et se préparait à entrer au cycle d’orientation. Elle ne se trouvait donc pas dans les premières années de l’école primaire mais à l’aube de son adolescence, période essentielle du développement personnel et scolaire, où un soudain déplacement de son centre de vie pouvait constituer un véritable déracinement pour elle et s’accompagner de grandes difficultés d’intégration. Elle ne pouvait par conséquent être considérée comme une enfant en bas âge ou au début de sa scolarité au sens de la jurisprudence qui, en raison de son jeune âge, ne devrait pas avoir de grandes difficultés à s’adapter à un autre système scolaire et à un nouvel environnement. Il apparaissait en outre qu’elle ne parlait pas le letton, ne s’était jamais rendue en Lettonie et que tous les membres de la famille de sa mère se trouvaient en Russie, pays dont ni elle ni sa mère n’avaient la nationalité. Elle résidait enfin en foyer depuis 2010, sa mère s’étant vu retirer la garde en raison de problèmes d’alcoolisme et de dépression et n’étant dès lors pas en mesure de s’occuper d’elle (arrêt du Tribunal fédéral 2C_997/2015 du 30 juin 2016 consid. 3.1).

Il a encore considéré qu’un enfant âgé de 13 ans au moment où l’autorité précédente avait statué, qui était né et avait grandi en Suisse, et qui devait en principe se trouver en neuvième année HarmoS (accord intercantonal du 14 juin 2007 sur l’harmonisation de la scolarité obligatoire; RS/GE C 1 06), n’était plus un enfant en bas âge, en début de scolarité, fréquentant une garderie ou l’école enfantine. L’intéressé approchait au contraire de la fin de l’école obligatoire et ne se trouvait pas à un âge dans lequel un enfant vit essentiellement dans le cadre familial, soit une situation permettant de retenir que, sous réserve de circonstances particulières, il pourra s’adapter sans difficultés à son nouvel environnement. Il se trouvait au contraire au début de l’adolescence, période essentielle du développement personnel et scolaire où un soudain déplacement du centre de vie peut constituer un véritable déracinement et s’accompagner de grandes difficultés d’intégration. Un médecin pédiatre avait en outre indiqué par écrit qu’un départ de Suisse serait une source de stress majeur et compromettrait son développement. Dans de telles circonstances, l’intéressé avait le droit de terminer son école obligatoire en Suisse conformément à l’art. 3 par. 6 Annexe I ALCP et on ne pouvait raisonnablement pas exiger de lui qu’il retourne dans son pays d’origine – dans lequel il n’avait jamais vécu – pour ce faire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_673/2019 précité consid. 5.2).

Il a également souligné que le fait que le parent n'ait plus la qualité de travailleur au sens de l'art. 6 Annexe I ALCP, ni celle de personne inactive au sens de l'art. 24 Annexe I ALCP n'avait pas d'incidence sur le droit de l'enfant qui est installé dans l'Etat d'accueil d'y séjourner afin de terminer sa formation (arrêt 2C_997/2015 précité consid. 2.1). Un tel raisonnement reviendrait d'ailleurs à faire dépendre le droit de l'enfant de rester en Suisse de celui de son parent, vidant ainsi l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP et la jurisprudence y relative de leur substance. En l’occurrence, si la mère avait le statut de travailleuse ou celui de personne inactive au sens de l'art. 24 Annexe I ALCP, sa fille aurait le droit de rester en Suisse auprès d'elle en application de l'art. 3 par. 1 Annexe I ALCP, qui prévoit que les membres de la famille d'une personne ressortissant d'une partie contractante ayant un droit de séjour ont le droit de s'installer avec celle-ci (consid. 3.2).

Très récemment, dans un arrêt du 21 janvier 2025 (2C_369/2024), le Tribunal fédéral a enfin précisé s’agissant d’une recourante née en 2012 et scolarisée en Suisse depuis 2016, que celle-ci ne pouvait pas se prévaloir de l’art. 3 par. 6 Annexe I ALCP, quand bien même sa scolarisation était bien avancée, dès lors qu’elle était déjà installée et scolarisée en Suisse avant que son père n’exerce des droits de séjour en tant que travailleur migrant, ce qui constituait pourtant une condition pour pouvoir bénéficier d'un droit en application de la jurisprudence Baumbast précitée (cf. supra consid. 5.1 et arrêt 2C_631/2023 du 13 septembre 2024 consid. 5.2.3 ; consid. 5.2). Il n'importait dès lors pas que le père de la recourante ait exercé une activité lucrative de 2018 à 2020 dès lors que la reconnaissance d'un droit de séjour fondé sur l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP impliquait au préalable un regroupement familial conforme au droit de l'enfant auprès de son parent citoyen de l'Union européenne. Dans ces circonstances, la recourante ne pouvait pas, plusieurs années plus tard, tirer argument du fait que son père avait exercé une activité lucrative de 2018 à 2020 et qu'elle aurait ainsi eu, par le passé, un droit au regroupement familial (consid. 5.2).

16.         Une décision est arbitraire (art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101) lorsqu’elle est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou qu’elle heurte d’une manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité (ATF 150 I 50 consid. 3.2.7 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_205/2024 du 15 octobre 2024 consid. 5.1 ; ATA/1261/2024 du 29 octobre 2024 consid. 3.3).

Il n’y a pas arbitraire du seul fait qu’une solution autre que celle de l’autorité semble concevable, voire préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable ; il faut encore que cette décision soit arbitraire dans son résultat ; la notion d’arbitraire ne se confond donc pas avec ce qui apparaît discutable ou même critiquable (ATF 149 I 329 consid. 5.1 et 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_205/2024 du 15 octobre 2024 consid. 5.1).

17.         En l’espèce, dans son courrier du 4 mars 2025, l’OCPM indique être finalement disposé à octroyer une autorisation de séjour UE/AELE à la recourante, à titre de regroupement familial avec son père, ce à compter du 15 avril 2024. Il entendait toutefois maintenir sa décision du 26 janvier 2024, en ce qui concernait le refus de renouvellement de son autorisation de séjour UE/AELE à titre de regroupement familial, dont la validité avait pris fin le 29 mars 2021, au motif notamment que l'intéressée ne pouvait pas se prévaloir de l'art. 3 par. 6 annexe I ALCP dès lors qu’à leur arrivée en Suisse en octobre 2010, respectivement mars 2009, ni elle ni son père ne disposaient d’un droit – propre ou dérivé – de séjour en Suisse, sur la base de l’ALCP. Ainsi, quand elle avait débuté l’année scolaire 2012/2013 à Genève, elle ne pouvait pas se prévaloir de cette disposition lui garantissant l’admission aux cours d’enseignement général, d’apprentissage et de formation professionnelle dans les mêmes conditions que les ressortissants suisses. Ce constat découlait du fait que, par décision du 3 janvier 2020, il avait révoqué avec effet rétroactif les autorisations de séjour de M. B______ et de ses trois enfants.

Il convient de s’arrêter sur la situation familiale et personnelle de la mineure. Pour rappel, cette dernière, née en septembre 2007, est arrivé une première fois en Suisse en 2009. A cette occasion, la première demande d’autorisation de séjour déposée par sa mère a été refusée par décision du 15 mars 2010. En mai 2011, la mineure a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour à titre de regroupement familial avec sa mère suite à la délivrance en faveur de cette dernière d’une autorisation de séjour avec exercice d’une activité lucrative, valable jusqu’au 30 avril 2016.

Il ressort pour le surplus du dossier que le père de la recourante a également été mis au bénéfice d’une autorisation de séjour avec activité lucrative valable jusqu’au 26 mai 2015, laquelle a toutefois été révoquée avec effet rétroactif au jour de sa délivrance, par décision du 3 janvier 2020. Cette décision révoquait également les autorisations de séjour de F______ et de ses frère et sœur, accordées au titre du regroupement familial avec leur père. Une nouvelle autorisation de séjour de courte durée avait alors été délivrée aux précités, à dater du 15 mars 2019.

Dès son arrivée en Suisse, la situation de la mineure s’est révélée extrêmement précaire, cette dernière vivant tour à tour chez sa mère, son père ou dans un foyer, sans véritable stabilité ni soutien de la part de ses parents, défaillants à de nombreux égards. Jusqu’en 2017, ses parents ont disposé de l’autorité parentale conjointe la concernant, sa garde étant quant à elle confiée exclusivement à son père depuis 2010, avec un droit de visite en faveur de la mère. Cette situation familiale a pesé lourdement sur le parcours scolaire de la mineure, scolarisée à Genève depuis 2012, laquelle n’a pas été promue en juin 2024, à l’issue de sa 11ème année au CO de H______, en raison notamment de ses nombreuses absences liées au fait qu’elle devait manquer l’école pour s’occuper de son petit frère. La mineure poursuit aujourd’hui sa scolarité à l’L______.

Cela étant, dans deux courriers des 8 janvier et 14 février 2024, le SPMI a souligné que la recourante était une jeune fille ne présentant pas de difficultés importantes, bien intégrée en Suisse, respectueuse et qui avait l’ambition d’être stable dans le futur, en Suisse, à défaut d’avoir pu bénéficier de cette stabilité auprès de ses parents. Un éventuel renvoi en Espagne serait extrêmement délétère pour elle. F______ ne devait pas être séparée de son père seul parent et figure d’attachement qui s’était montré présent de manière régulière depuis sa naissance et auquel elle était très attachée, précisant que c’était dans ce contexte qu’elle lui avait dit « oui » quant à l’idée de retourner en Espagne. Après avoir touché le fond au printemps dernier, M. B______ faisait tout pour stabiliser sa situation.

Il doit enfin être relevé que le séjour de la mineure s’est poursuivi à Genève, sans discontinuité, à tout le moins depuis 2011. Le bref séjour d’un mois en Espagne de la recourante, en 2023, ne saurait valablement être considéré comme une interruption du séjour en Suisse, étant en particulier rappelé les circonstances dans lesquelles il s’est déroulé et l’âge de la recourante (15 ans) lorsqu’il a eu lieu.

Ceci étant rappelé, il en découle les conséquences suivantes en lien avec l’art. 3 par. 6 annexe I ALCP. Formellement, en 2012/2013, lorsqu’elle a débuté sa scolarisation en Suisse, ses deux parents étaient au bénéfice d’une autorisation de séjour, ce que ne conteste au demeurant pas l’OCPM. En cela, la situation de la recourante se distingue de celle appréhendée dans l’arrêt du Tribunal fédéral 2C_369/2024.

La mineure a ainsi été admise aux cours d'enseignement général, d'apprentissage et de formation professionnelle dans les mêmes conditions que les ressortissants de l'État d'accueil, ce qui a fait naitre son droit, indépendant de celui de ses parents, d’y séjourner afin d’y poursuivre des cours d’enseignement général et d’y terminer sa formation. Ce droit autonome aurait ainsi dû être pris en compte par l’OCPM le 3 janvier 2020, lorsqu’il a révoqué l’autorisation de la recourante avec effet rétroactif, dès lors qu’elle était alors âgée de 12 ans et scolarisée depuis huit ans. Il apparait en outre douteux que la révocation avec effet rétroactif de l’autorisation de séjour de son père - 10 ans après sa délivrance - puisse impacter son droit autonome à poursuivre son enseignement en Suisse, au vu de son âge et de la durée de sa scolarité, étant par ailleurs rappelé que la poursuite de son séjour en Suisse n’était pas remise en question puisqu’une autorisation de séjour, certes de courte durée, a été délivrée à la famille, parallèlement à la révocation de leurs autorisations antérieures. Enfin, l’OCPM ne conteste pas que la mère de la recourante a disposé de la qualité de « travailleuse » entre 2011 et 2017 et obtenu une autorisation de séjour à ce titre, ce dont il doit aussi être tenu compte.

Cette situation très particulière, amène dès lors le tribunal à retenir qu’il serait contraire à l’objectif d’intégration poursuivi par le législateur et confirmé par la jurisprudence de dénier à la recourante le bénéfice du droit de poursuivre sa formation et de bénéficier d’une autorisation de séjour à ce titre, en application de l’art. 3 par. 6 Annexe I ALCP, à compter du 29 mars 2021. Au vu des circonstances singulières du cas d’espèce, retenir une autre solution heurterait d’une manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. Le Tribunal fédéral a d’ailleurs rappelé dans son arrêt 2C_997/2015 précité que le fait que le parent perde la qualité de travailleuse au sens de l'art. 6 Annexe I ALCP, n'avait pas d'incidence sur le droit de l'enfant qui était installé dans l'Etat d'accueil d'y séjourner afin de terminer sa formation, sauf à faire dépendre le droit de l'enfant de rester en Suisse de celui du parent, vidant ainsi l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP et la jurisprudence y relative de leur substance.

Ainsi, il doit être admis que la recourante pouvait se prévaloir de l’art. 3 par. 6 annexe I ALCP pour obtenir le renouvellement de son autorisation de séjour dès le 29 mars 2021, indépendamment de la situation administrative de ses parents à cette date. Cette solution tient enfin compte de l’intérêt de la recourante, dont la résilience doit être saluée, à pouvoir pérenniser et stabiliser sa situation administrative, indépendamment de celle de son père, qui reste encore très fragile.

18.         Au vu de cette solution, il n’y a pas lieu d’examiner si la recourante pourrait également se prévaloir d’autres dispositions pour voir son autorisation de séjour renouvelée à compter du 29 mars 2021, étant au surplus relevé, que la délivrance d’une autorisation de séjour en faveur de la précitée n’est plus contestée par l’OCPM seul étant litigieux, la date à partir de laquelle cette autorisation doit l’être.

21. Au vu de ce qui précède, le recours sera admis, la décision contestée annulée et le dossier renvoyé à l'OCPM pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

22. Vu cette issue, aucun émolument ne sera mis à la charge de la recourante, qui obtient gain de cause, et une indemnité de procédure de CHF 1'000-, à la charge de l'autorité intimée, lui sera allouée (art. 87 LPA et 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03).

19.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 23 février 2024 par la mineure A______, agissant sous la plume de son curateur, contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 26 janvier 2024 ;

2.             l’admet ;

3.             annule la décision précitée et renvoie le dossier à l'office cantonal de la population et des migrations pour nouvelle décision dans le sens des considérants ;

4.             dit qu’il n'est pas perçu d'émolument ;

5.             alloue à la recourante, à la charge de l'État de Genève, soit pour lui l'office cantonal de la population et des migrations, une indemnité de procédure de CHF 1'000.- ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière