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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3990/2024

JTAPI/318/2025 du 27.03.2025 ( OCPM ) , REJETE

REJETE par ATA/997/2025

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;ACCORD SUR LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES;CAS DE RIGUEUR
Normes : ALCP.6.par1; ALCP.24.par1; OLCP.20; OLCP.23; OASA.31
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3990/2024

JTAPI/318/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 27 mars 2025

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______, née le ______ 1992, est ressortissante de Bulgarie.

2.             Le 20 mars 2017, elle a sollicité la délivrance d’une autorisation de séjour pour exercer une activité lucrative. Elle expliquait résider en Suisse depuis l’âge de 12 ans et avoir un contrat de travail de durée indéterminée. Elle possédait une carte de légitimation qui arrivait à son terme le 5 juillet 2017.

3.             L’autorisation de séjour (Permis B) valable jusqu’au 5 juillet 2022 lui a été délivrée.

4.             Le 1er juillet 2022, Mme A______ a sollicité le renouvellement de son autorisation de séjour.

5.             Après plusieurs demandes de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), Mme A______ a adressé un courrier à ce dernier le 5 décembre 2023 et produit des documents et justificatifs.

Elle a exposé être confrontée à l’état de santé très compliqué de son père, lequel avait été hospitalisé plusieurs mois et pour qui elle avait consacré toute son énergie et son temps. Entre octobre 2022 et mai 2023, les choses s’étaient dégradées. À ce jour, son père était enfin à la maison dans un état de santé médiocre et faible mais plusieurs personnes s’occupaient de lui et elle avait pu se décharger de certaines responsabilités. Elle avait fourni à l’OCPM, au mois de mai 2023, un dossier avec des justificatifs, notamment de l’Hospice général.

6.             Le 2 septembre 2024, l’OCPM a informé Mme A______ de son intention de refuser le renouvellement de son autorisation de séjour ou l’octroi d’une nouvelle autorisation, et de prononcer son renvoi de Suisse. L’exécution de son renvoi apparaissait être a priori possible, licite et exigible.

Un délai de 30 jours lui était accordé pour exercer par écrit son droit d’être entendu.

7.             Mme A______ n’a pas transmis d’observations.

8.             Par décision du 1er novembre 2024, l’OCPM a refusé le renouvellement de son autorisation de séjour ou l’octroi d’une nouvelle autorisation. L’octroi d’une autorisation d’établissement était également refusé. L’OCPM prononçait également son renvoi de Suisse, avec un délai de départ au 1er février 2025.

Elle n’exerçait plus d’activité lucrative à tout le moins depuis le mois de septembre 2019 et ne disposait plus du statut de travailleur depuis le 1er novembre 2019, date à laquelle elle a bénéficié de prestations d’aide sociale.

Elle ne remplissait pas les conditions relatives au droit de demeurer en Suisse, aucune raison majeure ne pouvant être reconnue.

Après sept années de séjour en Suisse, elle ne pouvait pas se prévaloir d’une intégration dite exceptionnelle au point de ne plus raisonnablement exiger le renvoi en Bulgarie, ni que sa réintégration dans ce pays serait compromise. Il n’existait pas de motif démontrant que le retour en Bulgarie la placerait dans une situation personnelle d’extrême gravité.

Son intégration sociale et professionnelle ne pouvait à l’évidence être qualifiée de particulièrement poussée et irréprochable, bénéficiant de prestations d’aide sociale depuis le 1er novembre 2009 à ce jour pour un montant de CHF 83’263.80 (état au 19 octobre 2024) et qu’elle faisait l’objet de 27 actes de défaut de biens pour un montant total de CHF 31’747.80 (état au 24 juillet 2024). Elle n’avait pas acquis des connaissances à ce point spécifiques qu’elle ne put les mettre en pratique dans son pays d’origine. En conséquence, son intégration en Suisse ne revêtait aucun caractère exceptionnel.

Sa situation personnelle ne se distingue guère de celle de bon nombre de ses concitoyens connaissant les mêmes réalités en Bulgarie.

Pour ce qui était précisément de la situation médicale de ses parents et du support qu’elle leur apportait, ces derniers pouvaient être aidés par le frère de l’intéressée qui était également domicilié à Genève et au bénéfice d’une autorisation de séjour pour l’exercice d’une activité lucrative, valable jusqu’au 11 octobre 2025. Les problèmes de santé dont souffraient ses parents ne représentaient pas un motif déterminant, considérant qu’elle pouvait leur rendre visite et que ces derniers pourraient également recevoir des soins de qualité équivalente en Bulgarie.

En définitive, l’examen des circonstances et la pesée des intérêts en présence, dont ressortait la prépondérance de l’absence d’intégration sociale et économique par rapport à la durée de séjour de Mme A______ en Suisse, ne faisait pas apparaître le refus de renouvellement de l’autorisation de séjour comme disproportionné ni contraire au droit. Considérant qu’il existait un motif de révocation d’une autorisation de séjour, les conditions d’octroi d’une autorisation d’établissement n’étaient a fortiori pas réalisées.

9.             Par acte du 30 novembre 2024, Mme A______ (ci-après : la recourante) a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant à son annulation et au prolongement de son permis de séjour, subsidiairement à l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas d’extrême urgence, sous suite de frais.

Sa réintégration sociale dans son pays d’origine était fortement compromise. Elle vivait en Suisse depuis plus de 20 ans et y était arrivée en tant que mineure. L’ensemble de sa famille proche était en Suisse et elle ne possédait en Bulgarie que des membres de sa famille éloignée avec qui elle n’entretenait aucune relation. Ses chances d’obtenir un emploi en Bulgarie étaient nulles, ne maîtrisant pas suffisamment le bulgare pour pouvoir trouver un emploi. Elle n’avait pas non plus terminé son cursus scolaire obligatoire et ne possédait aucune formation qu’elle pourrait faire valoir en Bulgarie. Enfin, elle ne connaissait pas le système administratif bulgare, de sorte qu’elle était devenue une parfaite étrangère. Ainsi, pour ce motif déjà, la décision de l’OCPM devait être annulée.

La décision de l’OCPM était manifestement disproportionnée. S’il était vrai qu’elle bénéficiait des aides sociales depuis que son droit au chômage s’était éteint, ce n’était pas par complaisance. La grave maladie qui avait atteint son père et la nécessité qu’il suive un traitement lourd, au point que son pronostic vital fut engagé, l’avaient particulièrement atteinte et avaient compliqué ses possibilités de retrouver un emploi rapidement. Cette situation avait perduré pendant plusieurs années et, malgré tout, elle avait suivi un stage pendant plusieurs mois dans le but de retrouver un emploi. L’état de santé de son père s’était toutefois stabilisé. Les dettes auxquelles elle faisait face étaient sur le point d’être liquidées suite à la procédure de désendettement entreprise par l’Hospice général. Ces dettes étaient en réalité un problème administratif lié au fait qu’elle avait, par erreur, été inscrite à deux primes d’assurance maladie obligatoire, ce qui n’était pas de sa responsabilité et ne lui était donc pas imputable. L’amélioration prochaine de sa situation professionnelle lui permettrait, à terme, de sortir définitivement et durablement de l’aide sociale.

Au surplus, elle maîtrisait parfaitement le français, était inconnue des services de police et n’était pas inscrite dans le casier judiciaire.

Si, par impossible, le motif exposé ne devait pas suffire à lui octroyer la prolongation de son autorisation de séjour, il convenait d’analyser les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour pour cas d’extrême gravité, conditions semblant manifestement remplies.

10.         L’OCPM s’est déterminé sur le recours le 30 janvier 2025, proposant son rejet. Il a produit son dossier.

L’autorisation de séjour avait été délivrée à la recourante en 2017 grâce à son emploi auprès de B______, et non pas en vertu des dispositions sur le regroupement familial. Elle était alors âgée de 25 ans et ne pouvait plus prétendre à une carte de légitimation, respectivement à un permis Ci. N’exerçant plus d’activité lucrative et percevant des prestations de l’aide sociale depuis 2019, elle ne contestait pas ne plus remplir les conditions pour l’octroi d’un tel permis.

Si les conditions d’admission sans activité lucrative n’étaient plus remplies, une autorisation de séjour pouvait être délivrée lorsque des motifs importants l’exigeaient. L’admission des personnes sans activité lucrative réelle et effective dépendait simplement de l’existence de moyens financiers suffisants et d’une affiliation une caisse maladie. En l’occurrence, la recourante résidait en Suisse depuis 2004. Bien que la durée de son séjour put aujourd’hui être qualifiée de longue, cet élément n’était pas déterminant à lui seul. Elle n’avait en particulier pas démontré être intégrée sur le plan professionnel et réalisait, de par sa dépendance durable à l’aide sociale, un motif de révocation. Les explications fournies à l’appui du recours en lien avec les graves problèmes de santé de son père ne suffisaient pas à justifier l’absence d’activité lucrative de 2019 à ce jour, d’autant plus que sa mère et son frère vivaient au même domicile et que des solutions alternatives, telles que le recours à l’aide à domicile, étaient possibles. Elle n’avait pas non plus allégué avoir été elle-même frappée par une incapacité de travail durable.

Elle affirmait être motivée à retrouver du travail : il lui était rappelé qu’en tant que ressortissante de l’union européenne, elle pourra prétendre à un nouveau titre de séjour dès qu’elle aura un nouvel emploi lui permettant de subvenir à ses besoins ; aussi, elle était invitée à communiquer sans délai toute nouvelle prise d’emploi.

11.         Invitée à répliquer, la recourante n’a pas transmis d’écritures.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             La loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), notamment par l'ALCP. La loi ne s'applique aux ressortissants des États membres de l'Union européenne que lorsque l'ALCP n'en dispose pas autrement ou lorsqu'elle prévoit des dispositions plus favorables (art. 12 ALCP et 2 al. 2 LEI).

6.             En l'espèce, la recourante étant de nationalité bulgare, sa situation doit être examinée sous l'angle de l'ALCP et de l'OLCP.

7.             Les droits d'entrée, de séjour et d'accès à une activité économique conformément à l'ALCP, y compris le droit de demeurer sur le territoire d'une partie contractante après la fin d'une activité économique, sont réglés par l'Annexe I ALCP (art. 3, 4 et 7 let. c ALCP).

8.             Selon l'art. 6 par. 1 Annexe I ALCP, le travailleur salarié ressortissant d’une partie contractante qui occupe un emploi d’une durée égale ou supérieure à un an au service d’un employeur de l’État d’accueil reçoit un titre de séjour d’une durée de cinq ans au moins à dater de sa délivrance. Il est automatiquement prolongé pour une durée de cinq ans au moins. Lors du premier renouvellement, sa durée de validité peut être limitée, sans pouvoir être inférieure à un an, lorsque son détenteur se trouve dans une situation de chômage involontaire depuis plus de douze mois consécutifs.

9.             La notion de travailleur, qui délimite le champ d'application du principe de la libre circulation des travailleurs, doit être interprétée de façon extensive, tandis que les exceptions et dérogations à cette liberté fondamentale doivent, au contraire, faire l'objet d'une interprétation stricte (ATF 131 II 339 consid. 3.2). Doit ainsi être considérée comme un « travailleur » la personne qui accomplit, pendant un certain temps, en faveur d'une autre personne et sous la direction de celle-ci, des prestations en contrepartie desquelles elle touche une rémunération. Cela suppose l'exercice d'activités réelles et effectives, à l'exclusion d'activités tellement réduites qu'elles se présentent comme purement marginales et accessoires. Une fois que la relation de travail a pris fin, l'intéressé perd en principe la qualité de travailleur, étant entendu cependant que, d'une part, cette qualité peut produire certains effets après la cessation de la relation de travail et que, d'autre part, une personne à la recherche réelle d'un emploi doit être qualifiée de travailleur. La recherche réelle d'un emploi suppose que l'intéressé apporte la preuve qu'il continue à en chercher un et qu'il a des chances véritables d'être engagé ; sinon il n'est pas exclu qu'il soit contraint de quitter le pays d'accueil après six mois (arrêt du Tribunal fédéral 2C_390/2013 du 10 avril 2014 consid. 3.1).

Un étranger au bénéfice d'une autorisation de séjour UE/AELE peut perdre le statut de travailleur au sens de l'ALCP et par conséquent se voir refuser la prolongation, respectivement se voir révoquer l'autorisation de séjour dont il est titulaire si 1) il se trouve dans un cas de chômage volontaire ; 2) on peut déduire de son comportement qu'il n'existe (plus) aucune perspective réelle qu'il soit engagé à nouveau dans un laps de temps raisonnable ou 3) il adopte un comportement abusif, par exemple en se rendant dans un autre État membre pour y exercer un travail fictif ou d'une durée extrêmement limitée dans le seul but de bénéficier de prestations sociales meilleures que dans son État d'origine ou que dans un autre État membre (ATF 141 II 1 consid. 2.2.1).

10.         Une fois que la relation de travail a pris fin, l'intéressé perd en principe la qualité de travailleur, étant entendu cependant que, d'une part, cette qualité peut produire certains effets après la cessation de la relation de travail et que, d'autre part, une personne à la recherche réelle d'un emploi doit être qualifiée de travailleur durant la période de douze mois visée par l’art. 6 par. 1 Annexe I ALCP (ATF 141 II 1 consid. 2.2.2).

La jurisprudence a notamment retenu que le détenteur d’une autorisation de séjour CE/AELE au chômage involontaire pendant dix-huit mois - mois durant lesquels la personne était restée inactive et avait touché des indemnités de chômage puis des prestations d’assistance - perdait le statut de travailleur (arrêt du Tribunal fédéral 2C_390/2013 du 10 avril 2014 consid. 4.3 et les références citées).

11.         A teneur de l'art. 23 al. 1 OLCP, les autorisations de séjour de courte durée, de séjour et frontalières UE/AELE peuvent être révoquées ou ne pas être prolongées, si les conditions requises pour leur délivrance ne sont plus remplies.

Cela ne signifie cependant pas que ces conditions initiales doivent rester remplies de manière ininterrompue ; ainsi, une personne qui a obtenu une autorisation de séjour UE/AELE au regard de sa qualité de travailleur, puis qui tombe au chômage involontaire ou se trouve en incapacité temporaire de travail due à une maladie ou à un accident continue à bénéficier de son autorisation et celle-ci peut même, à certaines conditions, être prolongée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1162/2014 du 8 décembre 2015 consid. 3.3). En revanche, une personne qui serait au chômage volontaire ou qui se comporterait de façon abusive peut se voir retirer son autorisation (ATF 141 II 1 c. 2.1.2).

12.         Les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI).

13.         En l’espèce, la recourante a perdu sa qualité de travailleur, ce qu’elle ne semble pas contester. Elle n’a plus exercé d’activité professionnelle depuis novembre 2019, à l’exception de quelques mois de stage en 2022-2023. Elle se trouve entièrement prise en charge par l’Hospice général. Elle ne semble pas non plus effectuer de recherches d’emploi et ne démontre pas qu’à brève échéance, elle sera à nouveau employée, ses allégations, dans son recours, quant à l’amélioration prochaine de sa situation professionnelle qui lui permettra à terme de sortir définitivement et durablement de l’aide sociale n’étant aucunement documentées. En conséquence, les conditions pour le renouvellement de son autorisation de séjour sous l’angle de l'art. 6 par. 1 Annexe I ALCP ne sont plus remplies.

14.         Il convient d'examiner si une autre disposition de l'ALCP autoriserait la recourante à poursuivre son séjour en Suisse.

15.         Selon l’art. 24 par. 1 Annexe I ALCP, une personne ressortissante d’une partie contractante n’exerçant pas d’activité économique dans l’État de résidence et qui ne bénéficie pas d’un droit de séjour en vertu d’autres dispositions de l'accord reçoit un titre de séjour d’une durée de cinq ans au moins à condition qu’elle prouve aux autorités nationales compétentes qu’elle dispose pour elle-même et les membres de sa famille de moyens financiers suffisants pour ne pas devoir faire appel à l’aide sociale pendant leur séjour (let. a) et d’une assurance-maladie couvrant l’ensemble des risques (let. b).

Les moyens financiers susvisés sont considérés comme suffisants lorsqu’ils dépassent le montant en dessous duquel les nationaux, eu égard à leur situation personnelle et, le cas échéant, et à celle des membres de leur famille, peuvent prétendre à des prestations d’assistance (art. 24 par. 2 Annexe I ALCP).

16.         Selon l'art. 16 al. 1 OLCP, tel est le cas si ces moyens dépassent les prestations d'assistance qui seraient allouées en vertu des directives « Aide sociale : concepts et normes de calcul » de la conférence suisse des institutions d'action sociale (CSIAS), à un ressortissant suisse, éventuellement aux membres de sa famille, sur demande de l'intéressé et compte tenu de sa situation personnelle. En d'autres termes, la condition de l'art. 16 al. 1 OLCP est remplie si les moyens financiers d'un citoyen suisse, dans la même situation, étaient tels qu'ils lui fermeraient l'accès à l'aide sociale (ATF 135 II 265 consid. 3.3).

17.         En l’espèce, la recourante se trouve entièrement à la charge de l’Hospice général depuis plus de cinq ans – pour un montant ascendant, au 19 octobre 2024, à plus de CHF 83'000.- – et n’indique pas bénéficier d’autres sources de revenu, voire d’une fortune. En conséquence, elle ne dispose pas des moyens financiers nécessaires pour prétendre à la prolongation de son autorisation pour séjour sans activité lucrative.

18.         Il convient d’examiner ensuite si un titre de séjour fondé sur l’art. 20 OLCP aurait dû lui être octroyé.

19.         Selon l’art. 20 OLCP, si les conditions d'admission sans activité lucrative ne sont pas remplies au sens de l'ALCP ou au sens de la Convention instituant l'AELE, une autorisation de séjour UE/AELE peut être délivrée lorsque des motifs importants l'exigent. Il n'existe cependant pas de droit en la matière, l'autorité cantonale statuant librement, sous réserve de l'approbation du secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM ; art. 29 OLCP).

20.         S'agissant de la notion de « motifs importants », il convient de s'inspirer, par analogie, de la jurisprudence et de la pratique relatives à l'application de l'art. 36 de l'ancienne ordonnance limitant le nombre des étrangers du 6 octobre 1986 (OLE). L'existence de « raisons importantes » au sens de cette dernière disposition constitue une notion juridique indéterminée qu'il convient d'interpréter en s'inspirant des critères développés par la pratique et la jurisprudence en relation avec les cas personnels d'extrême gravité au sens de l'art. 13 let. f OLE, soit actuellement l'art. 31 OASA (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5385/2009 du 10 juin 2010 consid. 6.2).

Dès lors que l'admission des personnes sans activité lucrative dépend simplement de l’existence de moyens financiers suffisants et d’une affiliation à une caisse maladie, les cas visés par l’art. 20 OLCP et l'art. 31 OASA ne sont envisageables que dans de rares situations, notamment lorsque les moyens financiers manquent ou, dans des cas d’extrême gravité, pour les membres de la famille ne pouvant pas se prévaloir des dispositions sur le regroupement familial (par ex. frère et sœur, oncle, neveu, tante ou nièce) (Directives OLCP ch. 8.5).

21.         Les critères de reconnaissance du cas de rigueur développés par la pratique et la jurisprudence - qui sont aujourd'hui repris à l'art. 31 al. 1 OASA - ne constituent pas un catalogue exhaustif, pas plus qu'ils ne doivent être réalisés cumulativement. Aussi, il convient d'examiner si l'existence d'un cas de rigueur grave doit être admise in casu à la lumière des critères d'évaluation pertinents en la matière, en particulier au regard de la durée du séjour de l'intéressé en Suisse, de son intégration (au plan professionnel et social), de sa situation familiale, de sa situation financière, de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation, de son état de santé et de ses possibilités de réintégration dans son pays d'origine (art. 31 al. 1 OASA ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-3227/2013 du 8 mai 2014 consid. 5.4 et 5.5).

22.         Les conditions auxquelles la reconnaissance d'un cas de rigueur est soumise doivent être appréciées de manière restrictive. Il est nécessaire que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d'existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, autrement dit qu'une décision négative prise à son endroit comporte pour lui de graves conséquences. Lors de l'appréciation d'un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas particulier. La reconnaissance d'un cas individuel d'une extrême gravité n'implique pas forcément que la présence de l'étranger en Suisse constitue l'unique moyen pour échapper à une situation de détresse. Par ailleurs, le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il s'y soit bien intégré (au plan professionnel et social) et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas individuel d'une extrême gravité ; encore faut-il que la relation de l'intéressé avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger de lui qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-3227/2013 du 8 mai 2014 consid. 5.4 et les références citées).

23.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas de rigueur, il convient de citer, en particulier, la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, une maladie grave ne pouvant être soignée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir à l'aide sociale, ou des liens conservés avec le pays d'origine (par exemple sur le plan familial) susceptibles de faciliter sa réintégration (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 130 II 39 consid. 3).

24.         Des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d'un cas de rigueur, lorsque l'intéressé démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d'urgence, indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation du nombre des étrangers. De même, l'étranger qui entre pour la première fois en Suisse en souffrant déjà d'une sérieuse atteinte à la santé ne saurait se fonder sur ce motif médical pour réclamer la reconnaissance d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; 123 II 125 consid. 5b/dd et les référence citées).

25.         En l'absence de liens d'une certaine intensité avec la Suisse, l'aspect médical et les éventuelles difficultés de réintégration de la personne concernée dans le pays d'origine ne sauraient justifier, à eux seuls, l'octroi d'un permis humanitaire pour cas de rigueur (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-2712/2012 du 9 juillet 2014 consid. 5.7 ; C-3216/2010 du 29 janvier 2014 consid. 3.6).

26.         Selon la jurisprudence, le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse durant une assez longue période, qu'il s'y soit bien intégré et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer de tels motifs importants ; encore faut-il que la relation de l'intéressé avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger de lui qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-3337/2010 du 31 janvier 2012, consid. 4.3 et la jurisprudence citée). L'intégration n'est pas réalisée lorsque la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et recourt à l'aide sociale pour vivre (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-3337/2010 du 31 janvier 2012, consid. 4.3).

27.         En l'espèce, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, le tribunal ne peut que constater qu'aucun motif important ne commande que la recourante puisse obtenir un titre de séjour en se fondant sur l’art. 20 OLCP.

Elle réside en Suisse depuis 2004, soit depuis plus de 20 ans, ce qui représente une longue durée. Cela étant, cette durée de séjour n’est pas suffisante pour permettre, à elle seule, de lui octroyer le renouvellement de son autorisation de séjour. En effet, son intégration sociale ne dépasse pas celle qui résulte ordinairement d'une telle durée de séjour, n’ayant pas fait valoir qu’elle se serait particulièrement engagée dans la vie culturelle ou associative genevoise, ou aurait créé des liens particulièrement marqués avec Genève. Son intégration ne peut être considérée comme réussie, d’une part parce qu’elle dépend totalement de prestations de l’Hospice général depuis le novembre 2019 et, d’autre part, parce qu’elle fait l’objet de 27 actes de défaut de bien et que le prétendu prochain assainissement de sa situation financière allégué dans le recours n’étant aucunement documenté. De plus, elle ne possède pas de connaissances professionnelles si spécifiques qu’elle ne pourrait les mettre à profit en Bulgarie, étant rappelé qu’elle a elle-même reconnu ne jamais avoir terminé de formation professionnelle alors qu’elle a suivi un cursus scolaire à Genève depuis qu’elle a 12 ans. Elle n'a d'ailleurs pas prouvé, ni même allégué, qu'elle aurait développé des attaches si profondes avec la Suisse que son départ ne pourrait être exigé. Aucun élément ne permet enfin de retenir que son retour en Bulgarie la placerait dans une situation plus difficile que celle de ses compatriotes restés au pays.

Concernant l’aide qu’elle apporte à son père malade, il sied de retenir que sa mère et son frère vivent dans le même foyer qu’elle et peuvent également prendre soin de son père ; de plus il existe des services d’aide à domicile ; par ailleurs, la recourante pourra venir voir son père depuis la Bulgarie. En tout état, la recourante indique que l’état de santé de son père est maintenant stabilisé et que sa propre situation professionnelle est sur le point de s’améliorer, ce qui lui permettra de sortir définitivement et durablement l’aide sociale, sans toutefois avoir apporté d’éléments concrets à ce propos.

28.         Dès lors que les conditions requises pour le renouvellement de son autorisation de séjour n’étaient pas réalisées, l’OCPM était fondé à révoquer l’autorisation de séjour de la recourante.

29.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande d'autorisation (ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a).

30.         Le renvoi d'un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

31.         En l’espèce, étant donné qu'il a refusé de délivrer une autorisation de séjour à la recourante, l'OCPM devait ordonner son renvoi de Suisse en application de l'art. 64 al. 1 let. c LEI, ne disposant, dans ce cadre, d’aucun pouvoir d’appréciation.

32.         Pour le surplus, rien ne permet de retenir que l'exécution du renvoi de la recourante ne serait pas possible, licite ou raisonnablement exigible au sens de la disposition précitée. La décision de l’OCPM se révèle conforme au droit sur ce point.

33.         Ne reposant sur aucun motif valable, le recours doit être rejeté.

34.         Comme l’a indiqué l’OCPM dans ses dernières écritures, la recourante pourra prétendre à un nouveau titre de séjour dès qu’elle aura obtenu un nouvel emploi lui permettant de subvenir à ses besoins.

35.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

36.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 30 novembre 2024 par Madame A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 1er novembre 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de Madame A______ un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière