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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/104/2025

JTAPI/73/2025 du 21.01.2025 ( MC ) , ADMIS

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;PROLONGATION
Normes : LEI.76
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/104/2025 MC

JTAPI/73/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 21 janvier 2025

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Mevlon ALIU, avocat

contre

 

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


 

EN FAIT

1.             M. A______, né le ______ 1986, originaire du Nigéria, en possession d'un passeport en cours de validité et titulaire d'une autorisation de séjour délivrée par les autorités italiennes valable jusqu'au 24 février 2025, a été condamné, les 24 septembre et 26 octobre 2023, pour non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (en raison de la violation de l'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève qui lui avait été notifiée par le commissaire de police le 15 février 2023 pour une durée de 12 mois.

2.             Le 26 avril 2024, M. A______ s'est vu notifier une nouvelle interdiction de pénétrer dans le canton de Genève – mesure liée à son implication dans le trafic de cocaïne – pour une durée de 24 mois.

3.             Le même jour, l'office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a prononcé à l'encontre de l'intéressé – qui avait déjà fait l'objet, le 27 juillet 2023, d'une invitation à quitter la Suisse immédiatement - une décision immédiatement exécutoire de renvoi de Suisse.

4.             Le 2 mai 2024, M. A______ a été, à nouveau, interpellé par les forces de l'ordre genevoises. Il ressort notamment de son audition par les enquêteurs qu'il ne dispose d'aucun lieu de résidence fixe en Suisse, où il n'a par ailleurs aucune attache, ni d'aucune source légale de revenu. Prévenu, notamment, de non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée, il a été maintenu en arrestation provisoire.

5.             Par jugement du 27 juin 2024, le Tribunal de police a déclaré M. A______ coupable d'infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants et de non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée, et l'a condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de 8 mois, incluant la révocation du sursis, sous déduction de 73 jours de détention avant jugement. Simultanément, l'autorité de jugement a ordonné l'expulsion de Suisse de l'intéressé pour une durée de 3 ans ainsi que son maintien en détention pour des motifs de sûreté. L'intéressé ayant fait appel de ce jugement, celui-ci n'est pas encore entré en force.

6.             Durant la détention pénale de M. A______, les autorités chargées de l'exécution de son renvoi ont effectué les démarches visant à la réadmission de l'intéressé en Italie. Le 28 mai 2024, les autorités italiennes ont accepté la réadmission de l'intéressé sur leur territoire. Compte tenu de la durée de validité de l'accord de réadmission, les autorités en charge du refoulement de M. A______ ont sollicité des autorités italiennes, le 7 décembre 2024, la prolongation de l'accord de réadmission de l'intéressé.

7.             A sa sortie de prison, le 15 décembre 2024, l'intéressé a été remis entre les mains des services de police en vue de son refoulement.

8.             Le même jour, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de six semaines, retenant notamment les violations commises par ce dernier contre les mesures d'interdiction territoriale prononcées contre lui.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il ne s'opposait pas à son renvoi en Italie, mais qu'il considérait la durée de détention de six semaines comme trop longue. Le procès-verbal de son audition indique qu'il était retenu pour des motifs de droit des étrangers depuis 14h00.

9.             Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour.

10.         A l'audience du 19 décembre 2024, M. A______ a uniquement contesté le fait d'avoir participé à un trafic de drogue, étant précisé qu'il n'avait jamais été confronté à la personne qui le mettait en cause. Sur question de son avocat, il était au courant de sa première interdiction territoriale. Il avait donné instruction à son avocate à l'époque de recourir contre cette mesure en lui fournissant différents documents, mais il ignorait si elle avait effectivement recouru.

La représentante du commissaire de police a indiqué ignorer si l'interdiction territoriale du 15 février 2023 avait fait l'objet d'une opposition.

Elle a conclu à la confirmation de l’ordre de mise en détention administrative sur le principe et sur la durée.

Le conseil de M. A______ a conclu à la mise en liberté immédiate de ce dernier, subsidiairement à la réduction de la durée de la détention administrative et également subsidiairement à ce que M. A______ soit contraint à se présenter régulièrement à la police jusqu'à la date de son départ.

11.         Par jugement (JTAPI/1269/2024) du même jour, le tribunal a confirmé l'ordre de mise en détention administrative pour une durée de six semaines, soit jusqu'au 25 janvier 2025 inclus;

12.         Par arrêt du 6 janvier 2025 (ATA/7/2025), la chambre administrative de la Cour de justice a rejeté le recours interjeté le 24 décembre 2024 par M. A______, contre le jugement du tribunal du 19 décembre 2024.

13.         Par courrier du 14 janvier 2025, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée d'un mois, soit jusqu'au
24 février 2025 inclus, dans l'hypothèse où le transfert de celui-ci devait être annulé. La réadmission en Italie de M. A______ était confirmée pour le 23 janvier 2025.

14.         Devant le tribunal, lors de l'audience de ce jour, la représentante de l’OCPM a conclu à la prolongation de la détention administrative pour une durée d'un mois.

Le conseil de l’intéressé a conclu au rejet de la prolongation de la détention administrative.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; 9 al. 3 LaLEtr).

2.             En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 15 décembre 2024 à 14h00.

3.             S'agissant de la légalité de la détention de M. A______, elle n'est pas remise en cause par ce dernier, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'y revenir, étant encore précisé que les circonstances qui ont conduit la chambre administrative de la Cour de justice à confirmer cette légalité dans son arrêt du 6 janvier 2025 n'ont pas changé et qu'il suffit donc de renvoyer aux considérants de cet arrêt, qui demeurent valables.

4.             Selon le texte de l'art. 76 al. 1 LEI, l'autorité "peut" prononcer la détention administrative lorsque les conditions légales sont réunies. L'utilisation de la forme potestative signifie qu'elle n'en a pas l'obligation et que, dans la marge d'appréciation dont elle dispose dans l'application de la loi, elle se doit d'examiner la proportionnalité de la mesure qu'elle envisage de prendre.

5.             Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de la personne concernée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/752/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).

Il convient dès lors d'examiner, en fonction des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi au sens de l'art. 5 par. 1 let. f CEDH est adaptée et nécessaire (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 ; 134 I 92 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_26/2013 du 29 janvier 2013 consid. 3.1 ; 2C_420/2011 du 9 juin 2011 consid. 4.1 ; 2C_974/2010 du 11 janvier 2011 consid. 3.1 ; 2C_756/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1).

Par ailleurs, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi doivent être entreprises sans tarder par l'autorité compétente (art. 76 al. 4 LEI). Il s'agit, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010 ; ATA/644/2009 du 8 décembre 2009 et les références citées).

6.             En l'occurrence, l'exécution du renvoi de M. A______ à destination de l'Italie devrait débuter le 22 janvier 2025 et s'achever par la remise du précité à la frontière italienne le 23 janvier 2025. Par ailleurs, M. A______ a à nouveau confirmé lors de l'audience du 21 janvier 2025 sa volonté de retourner en Italie.

Dans ces conditions, la prolongation de sa détention pour une durée d'un mois, soit jusqu'au 24 février 2025, apparaît comme largement théorique. Si cette détention devait néanmoins effectivement se prolonger, c'est vraisemblablement que M. A______ aurait refusé, contrairement à ses déclarations, de retourner en Italie. Dans ce cas, il serait légitime que les autorités compétentes disposent d'emblée d'une durée supplémentaire d'un mois pour tenter à nouveau un renvoi à destination de l'Italie

7.             Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée d'un mois, soit jusqu'au 24 février 2025 inclus.

8.             Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable la demande de prolongation de la détention administrative de Monsieur A______ formée le 14 janvier 2025 par l’office cantonal de la population et des migrations ;

2.             prolonge la détention administrative de Monsieur A______ pour une durée de d'un mois, soit jusqu'au 24 février 2025 inclus ;

3.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée Monsieur A______, à son avocat, à l’office cantonal de la population et des migrations et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière