Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/1118/2024 du 11.11.2024 ( ICCIFD ) , REJETE
ATTAQUE
En droit
Par ces motifs
république et | canton de genève | |||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 11 novembre 2024
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dans la cause
Madame A______ et Monsieur B______, représentés par TOUS-MANDATS.CH SÀRL, avec élection de domicile
contre
ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE
ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS
1. Madame A______ et Monsieur B______ (ci-après : les contribuables, puis les recourants) sont domiciliés au ______[GE], dans la villa appartenant au contribuable.
2. À teneur de leur déclaration fiscale 2020, la valeur locative après abattement de cette villa s’élevait à CHF 9'842.-.
3. Dans le cadre de l’ICC 2020, les contribuables ont revendiqué la déduction de leurs frais professionnels effectifs. Ceux-ci se composaient, pour la contribuable, de CHF 400.- de frais de repas, de CHF 125.- de frais de déplacement et de CHF 2'460.- de frais de « bureau télétravail maison dans studio » (code 41.63). Il était précisé que la contribuable avait télétravaillé sans interruption du 12 mars 2020 au 30 juin 2021 car elle était une « personne à risque ».
Dans le cadre de l’IFD 2020, la déduction pour frais professionnels se limitait au forfait applicable.
4. Les contribuables ont également revendiqué, dans le cadre de l’ICC et de l’IFD 2020, une déduction de CHF 11'794.- pour des frais liés au handicap du contribuable, précisant qu’il s’agissait de « frais de déplacement et de véhicule liés à un handicap ». Ils ont laissé vide la case « Allocations pour impotents » (code 98.42).
Ils ont sollicité des déductions similaires durant les périodes fiscales 2018 et 2019, à hauteur de CHF 14'384.- (2018) et de CHF 14'045.- (2019).
5. Par demandes de renseignements des 12 juillet et 7 octobre 2022 concernant les périodes fiscales 2018, 2019 et 2020, l’administration fiscale cantonale (ci-après : l’AFC-GE) a demandé aux contribuables de lui remettre, notamment, le détail de leurs frais de déplacement pour se rendre chez leurs médecins respectifs ainsi qu’une copie du carnet d’entretien et de la carte grise de leur véhicule.
6. Les 29 septembre 2022 et 15 décembre 2022, le contribuable a notamment transmis à l’AFC-GE les documents suivants :
- Des tableaux récapitulatifs faisant état d’achats d’essence de 1'845 litres en 2018, de 1'800 litres en 2019 et de 1'513 litres en 2020.
Considérant que son véhicule consommait 9 litres aux 100 km, le contribuable estimait avoir parcouru 20'499 km en 2018, 19'997 km en 2019 et 16'815 km en 2020.
Les frais de déplacement liés à son handicap s’élevaient ainsi à CHF 14'384.- en 2018 (20'499 km x 0,70 centimes + CHF 35.- de frais de parking), à CHF 14'045.- en 2019 (19'997 km x 0,70 centimes + CHF 47.- de frais de parking) et à CHF 11'794.- en 2020 (16'815 km x 0,70 centimes + CHF 23.- de frais de parking).
- Des listes de ses « médecins, orthopédiste, physiothérapeute », décrivant les trajets qu’il avait effectués en 2018, 2019 et 2020 pour se rendre auprès de ses soignants (p. ex. : « Dresse C______, rhumatologue, 10 km, 8 x l’an, soit 20 km aller-retour x 8 = 160 km » ; « autres médecins, laboratoires, pharmacies, opticiens, etc., 10 km, 52 x l’an, soit 20 km aller-retour x 52 = 1'040 km).
Cette liste faisait également état des trajets du contribuable pour se rendre au fitness (p. ex. D______, fitness, 4 km, 100 x l’an, soit 8 km aller-retour x 100 = 800 km).
Les « déplacements médecins et thérapies » du contribuable totalisaient ainsi 5'747 km en 2018, 5'789 km en 2019 et 4'095 km en 2020.
7. Dans ses avis de taxation ICC et IFD du 25 janvier 2023 relatifs aux périodes fiscales 2018, 2019 et 2020, l’AFC-GE a admis des déductions respectives de CHF 2'642.- (2018), CHF 2'653.- (2019) et CHF 2'307.- (2020) à titre de frais liés à un handicap.
Elle a indiqué que les frais de déplacement avaient été admis selon la liste établie par le contribuable, à raison de 3'747 km en 2018, 3'789 km en 2019 et 3'295 km en 2020, « y compris les 1'040 km non détaillés par [ses] soins », multipliés par 0.70 centimes.
Concernant la période fiscale 2020, l’AFC-GE a considéré que les frais liés au télétravail de la contribuable pendant la pandémie de covid-19 n’étaient pas déductibles car cette situation n’était pas considérée comme durable. Les frais de repas déclarés par la contribuable étaient en revanche admis à hauteur de CHF 1'600.- dans le cadre de l’ICC. Ses frais de déplacement étaient également admis à hauteur de CHF 500.-.
8. Par réclamations du 6 mars 2023 concernant les périodes fiscales 2018, 2019 et 2020, les contribuables, représentés par la fiduciaire TOUS-MANDATS.CH SÀRL, ont contesté que la situation de Mme B______ n’ait pas eu un caractère durable. La précitée était en effet une personne « à risque » et avait télétravaillé pendant plus d’une année sans interruption. Elle avait à cette fin réquisitionné le studio (représentant 25% de la valeur locative) et l’avait transformé en bureau.
S’agissant des frais de déplacement du contribuable, le domicile de ce dernier se situait à plus de 500 mètres à pied de l’arrêt de bus de sorte qu’il ne pouvait renoncer à l’utilisation d’un véhicule motorisé, ce qui était attesté par les certificats médicaux du Dr E______ et de la Dresse C______ du mois de mai 2021 versés au dossier. Le certificat de la Dresse C______ avait en outre attesté de la nécessité d’une pratique régulière du fitness.
La réclamation ne précisait pas que les contribuables faisaient élection de domicile auprès de TOUS-MANDATS.CH SÀRL.
9. Par courrier du 10 novembre 2023, TOUS-MANDATS.CH SÀRL a indiqué à l’AFC-GE que l’employeur de la contribuable, la banque F______ & Cie, n’établissait pas « ce genre d’attestation ». Il n’avait toutefois jamais été affirmé que la contribuable ne disposait pas d’une place de travail. Celle-ci était en revanche considérée comme une personne « à haut risque », raison pour laquelle elle avait travaillé à domicile sans interruption durant la pandémie de covid-19.
10. Par décisions datées du 12 janvier 2024 et expédiées sous pli simple, mentionnant le 23 janvier 2024 comme date de notification, l’AFC-GE a rejeté les réclamations susmentionnées dans la mesure où elles portaient sur les frais d’utilisation du studio (période fiscale 2020) et les frais liés à un handicap (périodes fiscales 2018, 2019 et 2020).
La taxation 2020 était maintenue en ce qui concernait les frais liés au télétravail de la contribuable. Le télétravail se définissait comme l’occupation durable d’une pièce uniquement dédiée à l’activité professionnelle lorsque l’employeur ne mettait aucune place de travail à disposition. Il ne pouvait être considéré comme durable lorsqu’il était dû à des restrictions sanitaires temporaires ou lorsque l’employeur mettait une place à la disposition de son collaborateur et offrait en parallèle à ce dernier la liberté de télétravailler pour des motifs de convenance personnelle ou de santé (personne à risque). La contribuable n’avait d’ailleurs pas été en mesure de fournir à l’AFC-GE une attestation de son employeur selon laquelle aucune place de travail ne lui était mise à disposition.
Les taxations étaient également maintenues en ce qui concernait les frais liés au handicap du contribuable. Selon les jugements du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) du 13 août 2015 (JTAPI/963/2015) et du 7 mars 2022 (JTAPI/215/2022) portant sur les taxations 2011 et 2016 des contribuables, seuls étaient déductibles les frais étroitement liés à un handicap, soit les frais de déplacement du contribuable auprès de ses médecins, orthopédiste et physiothérapeute. Les autres frais de déplacement du précité ne constituaient pas des frais déductibles selon la circulaire no 11 de l’administration fédérale des contributions du 31 août 2015 (cf. ch. 4.3.6 « Frais de transport et de véhicule » ; ci-après : la circulaire de l’AFC-CH), dont l'interprétation était très restrictive. Le contribuable ne pouvait pas non plus bénéficier d’une déduction forfaitaire annuelle pour impotence étant donné qu’il ne percevait aucune allocation pour impotent.
11. Par actes expédiés le 23 février 2024, les contribuables ont recouru auprès du tribunal contre les décisions sur réclamation « du 23 janvier 2024 » (recte : du 12 janvier 2024), sous la plume de leur mandataire.
Ils ont sollicité l’annulation de ces décisions en tant qu’elles refusaient la déductibilité des frais de déplacement de CHF 14'384.40, de CHF 14'044.75 et de CHF 11'793.60 durant les périodes fiscales 2018 à 2020, ainsi que la déductibilité des autres frais professionnels effectifs de CHF 2'460.- durant la période fiscale 2020. Ils ont conclu à ce qu’il soit ordonné à l’AFC-GE de prendre en considération l’ensemble des frais de déplacement déclarés, à concurrence du surcoût résultant de l’utilisation d’un véhicule individuel au lieu des transports publics, et à l’émission de nouveaux bordereaux tenant compte des considérants.
À la forme, ils ont exposé que l’AFC-GE avait notifié les bordereaux ICC/IFD 2018, 2019 et 2020 le 23 janvier 2024. Leurs recours avaient été déposés dans les 30 jours et étaient par conséquent recevables.
Sur le fond, ils ont réitéré leurs arguments relatifs à la déductibilité de leurs frais professionnels et de déplacement. Cette déductibilité s’appliquait en particulier pour les trajets vers et depuis le fitness, cette activité ayant été prescrite par le médecin traitant du contribuable en complément à la physiothérapie. Était notamment produit un certificat médical de la Dresse C______ du 5 mai 2022, valable un an, à teneur duquel le contribuable souffrait d’une affection rhumatologique chronique avec un important handicap fonctionnel, rendant indispensable la pratique régulière d’exercices de fitness ciblés. Les déplacements quotidiens qui ne relevaient pas de la convenance personnelle et qui n’avaient pas de caractère récréatif, mais qui visaient à accomplir des tâches essentielles comme se rendre à la poste, à la pharmacie et à la banque, devaient également être pris en compte.
12. Les recours susmentionnés, enregistrés sous les causes A/658/2024 (période fiscale 2020), A/660/2024 (période fiscale 2019) et A/661/2024 (période fiscale 2018), comportaient la signature électronique du mandataire des contribuables.
13. Par plis recommandés du 27 février 2024, le tribunal a imparti aux contribuables un délai au 13 mars 2024 pour lui transmettre des exemplaires des recours munis de la signature manuscrite originale de leur mandataire, sous peine d’irrecevabilité.
14. Par courrier du 6 mars 2024, le mandataire des contribuables a transmis au tribunal trois exemplaires des recours portant sa signature manuscrite, sans toutefois mentionner les numéros de procédure auxquels ils se référaient.
15. Par jugements JTAPI/376/2024 et JTAPI/377/2024 du 23 avril 2024, rendus dans les causes A/660/2024 et A/661/2024, le tribunal a déclaré irrecevables les recours portant sur les périodes fiscales 2018 et 2019, faute de comporter une signature olographe.
16. Les contribuables ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre les jugements précités, concluant à leur annulation et au renvoi de la cause au tribunal pour examen au fond.
Ils avaient adressé au tribunal une seule enveloppe qui contenait les trois recours signés manuscritement. Le greffe du tribunal, pensant qu’il s'agissait de trois exemplaires similaires dans la même cause, les avait tous les trois classés dans la procédure A/658/2024, et ce à tort, les deux autres recours ayant ainsi été déclarés irrecevables. La présidente du tribunal en charge de ces procédures avait confirmé l’erreur de son greffe mais avait expliqué que pour des raisons de compétence, il convenait de déposer un recours auprès de la chambre de céans.
17. Le tribunal a confirmé ces faits.
18. Par arrêts ATA/703/2024 et ATA/704/2024 du 10 juin 2024, la chambre administrative a admis les recours formés par les contribuables, annulé les jugements entrepris et renvoyé les causes A/660/2024 et A/661/2024 au tribunal pour examen des autres conditions de recevabilité et, le cas échéant, du fond du litige.
19. Dans ses réponses du 22 avril 2024 concernant les causes A/658/2024, A/660/2024 et A/661/2024, l’AFC-GE a conclu au rejet des recours et à la confirmation des décisions sur réclamation du 12 janvier 2024.
Il convenait de s’en tenir au jugement JTAPI/215/2022 rendu le 7 mars 2022 qui concernait les mêmes parties et portait sur les mêmes faits. Conformément à ce jugement, le contribuable pouvait uniquement déduire ses frais de déplacement auprès de ses médecins, orthopédiste et physiothérapeute, à l’exclusion de ceux destinés à l’accomplissement de ses tâches quotidiennes, récréatives ou sociales, lesquels n’avaient pas été occasionnés, stricto sensu, par son handicap. Le contribuable n’avait pas non plus établi que, pour ces autres déplacements, il aurait emprunté exclusivement les transports publics s’il n’avait pas été handicapé. Aucune déduction ne pouvait enfin être admise pour les trajets au fitness dès lors que le contribuable n’avait pas démontré que cette activité était étroitement liée à son handicap.
20. Les contribuables n’ont pas répliqué.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).
2. Le litige concerne les déductions pour frais de déplacement ainsi que les déductions pour frais professionnels que les recourants peuvent faire valoir dans le cadre de l’ICC et de l’IFD 2017 à 2020.
3. Selon l’art. 70 al. 1 LPA, applicable en vertu de l’art. 2 al. 2 LPFisc, le tribunal peut, d’office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune.
4. En l’espèce, les procédures A/658/2024, A/660/2024 et A/661/2024 opposent les mêmes parties, se rapportent au même complexe de faits lors de trois années fiscales successives et traitent d’un problème juridique identique. Par conséquent, le tribunal les joindra sous la procédure A/658/2024.
5. Les recours formés à l’encontre des décisions sur réclamation du 12 janvier 2024 n’ont été expédiés au greffe du tribunal que le 23 février 2024, soit 31 jours après la date de notification alléguée par les recourants. Il convient dès lors de déterminer en premier lieu s’ils peuvent être considérés comme recevables ratione temporis.
6. Aux termes des art. 140 al. 1 LIFD et 49 al. 1 LPFisc, le contribuable peut s’opposer à la décision sur réclamation de l’autorité de taxation en s’adressant au tribunal dans les 30 jours à compter de la notification de la décision attaquée.
L’art. 46 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) prévoit que les décisions sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit (art. 46 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). Les art. 19 LPFisc et 116 al. 1 LIFD, qui traitent de la notification en matière d’ICC et d’IFD ne dérogent pas à ce principe (ATA/461/2018 du 8 mai 2018 consid. 5).
7. Le délai commence à courir le lendemain de la notification. Il est considéré comme respecté si le recours est remis à l’autorité de recours, à un office de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse à l’étranger le dernier jour ouvrable du délai au plus tard (art. 133 al. 1 LIFD, 41 al. 1 LPFisc, 17 al. 1 et 4 LPA).
La notification d'un acte soumis à réception, comme une décision ou une communication de procédure, est réputée faite au moment où l'envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., 2011, n. 2.2.8.3 p. 302 s).
Le fardeau de la preuve de la notification incombe à l'autorité qui entend en tirer une conséquence juridique (ATF 129 I 8 consid. 2.2). Si la notification d’un acte envoyé sous pli simple ou sa date sont contestées et s’il existe effectivement un doute à ce sujet, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l'envoi (ATF 124 V 400 consid. 2a ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_225/2012 du 26 septembre 2012 consid. 2.1.2 ; 8C_227/2011 du 22 mars 2012 consid. 4.2 ; 2C_637/2007 du 4 avril 2008 consid. 2.4.1 in RDAF 2008 II p. 197). En l’absence d'envoi recommandé, la preuve de la notification d’un acte peut également résulter de l’ensemble des circonstances, en particulier de la correspondance échangée ou de l’absence de protestation de la part d’une personne qui reçoit des rappels (ATF 142 IV 125 consid. 4.3 ; 136 V 295 consid. 5.9).
8. Les délais fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont en principe pas susceptibles d’être prolongés, restitués ou suspendus, si ce n’est par le législateur lui-même (art. 21 al. 1 LPFisc, 119 al. 1 LIFD et 16 al. 1 LPA). Ainsi, celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos de sorte que la décision en cause acquiert force obligatoire (ATA/85/2020 du 28 janvier 2020 consid. 3 et les références citées). Le strict respect des délais légaux se justifie pour des raisons d’égalité de traitement et n’est pas constitutif de formalisme excessif (ATF 142 V 152 consid. 4.2 in fine).
9. En l’espèce, les décisions sur réclamation litigieuses ont été adressées par l’AFC-GE directement au domicile des recourants. Ces derniers n’avaient toutefois pas élu domicile auprès de leur mandataire. Cette notification est ainsi conforme aux exigences des art. 46 al. 2 LPA, 19 LPFisc et 116 al. 1 LIFD.
En revanche, le moment auquel les recourants ont reçu les décisions sur réclamation litigieuses, datées du 12 janvier 2024, ne peut être précisément déterminé, l’AFC-GE ayant choisi de les leur communiquer par pli simple. À cet égard, la simple mention d’une « date de notification » – en l’occurrence le 23 janvier 2024 – sur les décisions querellées ne constitue pas une preuve du fait que celles-ci sont bien parvenues dans la sphère des recourants à la date spécifiée.
La date de réception effective des décisions litigieuses ne saurait non plus être établie par l’indication figurant dans le recours, selon laquelle l’AFC-GE a « notifié » celles-ci le 23 janvier 2024. Cette indication se limite probablement à reprendre celle figurant en tête desdites décisions, laquelle est dénuée de portée juridique comme indiqué ci-avant. Partant, il ne saurait être inféré avec certitude de cette mention que les contribuables ont effectivement reçu les décisions entreprises le 23 janvier 2024 et que le délai de recours de 30 jours avait expiré lorsqu’ils ont expédié au tribunal le pli contenant les recours le 23 février 2024.
Au vu de ces circonstances particulières, et dans la mesure où ils remplissent les autres conditions de formes prescrites (art. 60, 64 et 65 LPA), les recours seront considérés comme recevables.
10. Le recourant conclut en premier lieu à la prise en considération de l’ensemble des frais de déplacement qu’il a déclarés durant les années fiscales 2018 à 2020, à concurrence du surcoût résultant de l’utilisation d’un véhicule individuel au lieu des transports publics. Il fait en substance valoir que compte tenu de son handicap, il ne pouvait pas renoncer à l’utilisation d’un véhicule motorisé privé pour ses déplacements, lesquels ne relevaient pas de la convenance personnelle.
11. Aux termes des art. 33 al. 1 let. hbis LIFD et 32 let. c de la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), sont déduits du revenu imposable les frais liés au handicap du contribuable lorsque celui-ci est handicapé au sens de la loi du 13 décembre 2002 sur l’égalité pour les handicapés (LHand - RS 151.3) et qu’il supporte lui-même les frais.
12. La circulaire de l’AFC-CH précise à cet égard ce qui suit :
- Les frais sont liés à un handicap lorsqu’ils sont occasionnés (lien de cause à effet) par un handicap (tel que le définit le chiffre 4.1 de la circulaire) et qu’ils ne constituent ni des frais d’entretien courant, ni des dépenses somptuaires. Les frais d’entretien sont les dépenses servant à satisfaire les besoins individuels, parmi lesquelles figurent les frais usuels d’alimentation, d’habillement, de logement, de soins corporels, de loisirs et de divertissements. Les dépenses engagées par simple souci de confort personnel ou excessivement élevées qui excèdent ce qui est usuel et nécessaire (dépenses somptuaires) ne sont pas déductibles (ch. 4.2).
- Parmi les frais liés à un handicap figurent en particulier les frais de transport et de véhicule. Les frais de transport pour se rendre chez le médecin, au lieu des thérapies, dans des structures de jour, etc., sont déductibles s’ils sont occasionnés par le handicap. Le montant déductible est plafonné au coût des transports publics ou d’un service de transport de personnes handicapées. Si l’usage de ce genre de transport n’est pas possible ou raisonnablement exigible de la part de la personne handicapée, seuls les frais d’utilisation d’un véhicule motorisé individuel (indemnité kilométrique) peuvent être portés en déduction (ch. 4.3.6).
Les frais engendrés par d’autres déplacements (en particulier les déplacements récréatifs) ne sont en général pas déductibles à titre de frais liés à un handicap. Ils ouvrent exceptionnellement droit à une déduction si la personne établit de manière plausible qu’elle emprunterait exclusivement les transports publics si elle n’était pas handicapée, mais que son handicap ne le lui permet pas. Dans ce cas, ces frais sont déductibles à concurrence du surcoût résultant de l’utilisation d’un véhicule individuel au lieu des transports publics (ibidem).
- À la place des frais qu’elles ont effectivement supportés, les personnes handicapées peuvent prétendre à une déduction forfaitaire annuelle variant selon leur situation. Les bénéficiaires d’une allocation pour impotence faible peuvent déduire CHF 2'500.-, ceux d’une allocation pour impotence moyenne CHF 5'000.- et ceux d’une allocation pour impotence grave CHF 7'500.- (ch. 4.4).
13. En droit fiscal, le principe de la légalité doit être strictement observé. S’agissant en particulier des déductions autorisées par la loi, leur caractère d’exception à l’impôt doit entraîner une interprétation restrictive de leur nature et de leur étendue (ATA/726/2020 du 4 août 2020 consid. 5g ; ATA/1728/2019 du 26 novembre 2019 consid. 3f ; ATA/858/2018 du 21 août 2018 consid. 13b ; ATA/958/2014 du 2 décembre 2014 consid. 14b et les arrêts cités). Le principe de la légalité ne permet donc pas d’introduire des déductions fiscales qui ne sont pas prévues par la loi (ATA/21/2024 du 9 janvier 2024 consid. 3.6 et l’arrêt cité).
14. En vertu des principes de l’étanchéité des exercices et de la périodicité de l’impôt, chaque exercice est considéré comme un tout autonome, sans que le résultat de l’un puisse avoir une influence sur les suivants, et le contribuable ne saurait choisir au cours de quelle année fiscale il fait valoir les déductions autorisées. Les déductions doivent être demandées dans la déclaration d’impôts de l’année au cours de laquelle les faits justifiant l’octroi des déductions se sont produits (ATA/1637/2019 du 5 novembre 2019 consid. 8a ; ATA/1470/2017 du 14 novembre 2017 consid. 5d ; ATA/547/2012 du 21 août 2012 consid. 6) ; plus généralement, les deux principes précités impliquent que tous les revenus effectivement réalisés ainsi que tous les frais engagés durant la période fiscale en cause sont déterminants pour la taxation de cette période (arrêt du Tribunal fédéral 2C_87/2015 du 23 octobre 2015 consid. 8.1.2 et les références citées ; Message concernant les lois fédérales sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes ainsi que sur l’impôt fédéral du 25 mai 1983, FF 1983 III p. 177).
15. Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l’autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés ; cette maxime oblige notamment les autorités compétentes à prendre en considération d’office l’ensemble des pièces pertinentes qui ont été versées au dossier. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l’établissement des faits ; il incombe à celles-ci d’étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu’il s’agit d’élucider des faits qu’elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_649/2020 du 10 novembre 2020 consid. 6.4 ; ATA/1287/2021 du 23 novembre 2021 consid. 9a).
En matière fiscale, plus particulièrement, il appartient à l’autorité de démontrer l’existence d’éléments créant ou augmentant la charge fiscale, tandis que le contribuable doit supporter le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation d’impôts. S’agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d’en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l’échec de cette preuve, ces règles s’appliquant également à la procédure devant les autorités de recours (ATF 146 II 6 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_32/2020 du 8 juin 2020 consid. 3.5).
Concernant les frais liés à un handicap, le contribuable doit ainsi établir les coûts dont il se prévaut, pour lui-même ou une personne à sa charge, au moyen de certificats médicaux, de factures, de justificatifs d’assurance, etc. La nature du handicap et les frais qu’il occasionne peuvent être établis au moyen d’un questionnaire médical. Le contribuable qui prétend à la déduction de frais liés à un handicap peut faire remplir ce questionnaire par son médecin et le joindre à sa déclaration d’impôt (circulaire de l’AFC-CH, ch. 6).
Par ailleurs, conformément à la jurisprudence, dès lors que l’AFC-GE a écarté un montant lors de la taxation, puis lors de la réclamation, il appartient au recourant d’apporter spontanément les justificatifs y relatifs (arrêt du Tribunal fédéral 2C_132/2010 du 17 août 2010 consid. 3.5.3 ; ATA/830/2021 du 10 août 2021 consid. 5 et les références citées).
16. En l’espèce, en 2018, 2019 et 2020, le recourant n’a perçu aucune allocation pour impotent, si bien qu’en principe, une déduction forfaitaire pour frais de handicap n’entre pas en ligne de compte. Il lui appartenait donc de démontrer, au moyen de pièces justificatives probantes, l’existence des frais de handicap effectifs dont il s’est prévalu dans ses déclarations fiscales pour ces années (CHF 14'384.- en 2018, CHF 14'045.- en 2019 et CHF 11'794.- en 2020) ainsi que la réalisation des conditions prévues par la circulaire de l’AFC-CH.
En l’occurrence, l’AFC-GE ne conteste pas que le recourant n’est pas à même de faire usage des transports en commun en raison de son handicap et ne peut se déplacer qu’au moyen de son véhicule motorisé privé. Cette nécessité a du reste déjà été admise par le tribunal dans ses jugements des 13 août 2015 (consid. 10) et 7 mars 2022 (consid. 9). Il est dès lors acquis que les frais de véhicule privé du recourant sont déductibles, pour autant qu’ils aient été occasionnés stricto sensu par son handicap.
À cet égard, l’AFC-GE a défalqué des revenus 2018, 2019 et 2020 du recourant des montants respectifs de CHF 2'642.-, CHF 2'653.- et CHF 2'307.-, correspondant aux trajets effectués par ce dernier pour se rendre chez ses divers soignants, y compris auprès de ses « autres médecins, laboratoires, pharmacies, opticiens, etc. », alors que la nature précise de ces trajets n’était pas détaillée. Elle a en revanche refusé de prendre en considération les trajets effectués par le recourant pour se rendre à son fitness.
Or, force est de constater que le certificat médical produit par le recourant pour attester que ces déplacements étaient étroitement liés à son handicap a été établi le 5 mai 2022, soit respectivement trois ans et demi, deux ans et demi et un an et demi postérieurement aux périodes fiscales litigieuses. Conformément au principe de périodicité, ce certificat ne suffit dès lors pas pour admettre l’existence d’un lien de cause à effet entre le handicap du recourant et ses frais de trajet au fitness durant les années fiscales 2018, 2019 et 2020, étant rappelé que le principe de légalité impose de se montrer strict dans l’admission des déductions autorisées par la loi. Les décisions querellées ne prêtent dès lors pas le flanc à la critique en tant qu’elles refusent de déduire des revenus du recourant les frais de déplacement précités.
Le recourant persiste également à solliciter la déduction des frais engendrés par les déplacements qu’il a effectués en 2018, 2019 et 2020 dans le but d’accomplir ses tâches essentielles comme se rendre à la poste, à la pharmacie et à la banque. Il feint cependant d’ignorer que, conformément à la circulaire de l’AFC-CH et aux précédents jugements rendus par le tribunal de céans, il ne peut prétendre à la déduction de ces frais de déplacement qu’à condition de rendre plausible qu’il aurait emprunté exclusivement les transports publics pour effectuer ces trajets s’il n’avait pas été handicapé. Or, il n’allègue ni ne tente a fortiori de démontrer ce qui précède dans son recours. Partant, c’est à juste titre que l’AFC-GE a considéré que les frais en question n’étaient pas déductibles.
Les recours seront par conséquent rejetés sur ce point.
17. La recourante reproche pour sa part à l’AFC-GE d’avoir refusé de déduire de ses revenus des frais professionnels à hauteur de CHF 2'460.- en 2020, correspondant à la valeur locative du studio situé dans la villa de son époux, qu’elle avait transformé en bureau. Il s’était en effet agi d’une situation durable dès lors qu’elle avait télétravaillé dans cette pièce de manière ininterrompue pendant plus d’une année.
18. Selon l’art. 29 LIPP, le contribuable exerçant une activité lucrative dépendante peut déduire les frais de déplacement nécessaires entre le domicile et le lieu de travail jusqu’à concurrence de CHF 500.-, les frais supplémentaires résultant des repas pris hors du domicile et du travail par équipe et les autres frais indispensables à l’exercice de la profession (al. 1). Ces frais professionnels sont estimés forfaitairement à 3% du revenu net, à concurrence d’un montant minimum de CHF 600.- et d’un maximum de CHF 1'700.-, mais le contribuable peut justifier des frais plus élevés (al. 1 let. c et al. 2 LIPP). Cette disposition repose sur l’art. 9 al. 1 LHID, selon lequel les dépenses nécessaires à l’acquisition du revenu et les déductions générales sont défalquées de l’ensemble des revenus imposables (arrêt du Tribunal fédéral 2C_71/2014 du 15 septembre 2014 consid. 5.3).
L’art. 26 LIFD prévoit quant à lui la déduction des autres frais indispensables à l’exercice de la profession sur la base d’une estimation forfaitaire, tout en réservant la possibilité de justifier des frais plus élevés (al. 1 let. c et al. 2). Il a donc une portée semblable à l’art. 9 al. 1 LHID (arrêt du Tribunal fédéral 2C_71/2014 précité consid. 5.4).
19. Selon la jurisprudence, les frais d’utilisation d’un bureau privé peuvent être considérés comme des autres frais indispensables à l’exercice de la profession au sens des dispositions susmentionnées lorsque le contribuable doit régulièrement fournir une part essentielle de ses activités professionnelles à la maison, parce que l’employeur ne met pas à disposition une place de travail appropriée, et lorsqu’il dispose dans son logement privé d’une chambre particulière destinée principalement à des fins professionnelles et non privées. Si une chambre est utilisée principalement, mais pas exclusivement, à des fins professionnelles, la part de coût supportée pour l’utilisation privée doit être attribuée aux coûts de la vie du contribuable (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1033/2017 du 31 mai 2018, in RDAF 2019 II 656, consid. 3.1 et les arrêts cités).
L’octroi d’une déduction pour place de travail comme déduction pour charges professionnelles suppose que le contribuable doive effectuer une part importante de son travail professionnel à domicile (cf. par exemple la pratique du canton de Bâle-Campagne, qui se base sur 40 % du temps de travail). Dès lors, le fardeau de la preuve pour ce fait réducteur de l’impôt incombe au contribuable, conformément à la règle du fardeau de la preuve applicable de manière générale en droit fiscal. Le fardeau de la preuve de ces éléments incombe au contribuable (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1033/2017 précité, consid. 3.2).
Le contribuable qui, pour des raisons de convenance personnelle, préfère s’acquitter de tâches professionnelles à la maison alors qu’il pourrait utiliser un local à sa place de travail, n’a aucun droit à la déduction pour une chambre de travail privée. Le caractère nécessaire [au sens de l’art. 9 al. 1 LHID] va dépendre des circonstances, mais la pratique est stricte, en ce sens où, pour admettre une telle déduction, l’exercice des tâches sur le lieu du travail ne doit pas être possible ou à tout le moins ne pas être raisonnablement exigible. Ainsi, on peut admettre une telle déduction si un établissement scolaire ne comporte qu’une seule pièce qui doit être utilisée par l’ensemble des enseignants comme lieu de préparation des cours et qui sert en même temps de local pour les pauses et les discussions (arrêt du Tribunal fédéral 2C_71/2014 précité consid. 5.5.1 et les références citées).
20. Selon le Guide fiscal 2020 édité par l’AFC-GE, le télétravail se définit, sous l’angle fiscal, comme l’occupation durable d’une pièce uniquement dédiée à l’activité professionnelle lorsqu’aucune place de travail n’est mise à disposition par l’employeur pour l’exercice de l’activité de son employé. Dans le contexte spécifique du covid-19, le télétravail rendu nécessaire en raison de la pandémie n’est pas considéré comme une activité durable.
Certains auteurs considèrent toutefois que les employés ayant travaillé à domicile pendant la crise du covid-19 peuvent prétendre, selon les circonstances, à déduire de leur revenu imposable les frais d’une chambre de travail privée. Si le télétravail a été pratiqué pendant la pandémie, une partie importante du travail a en effet été effectuée à domicile au sens de la jurisprudence. Le Conseil fédéral ayant en outre appelé la population à travailler si possible à domicile en raison du risque de contamination du covid-19, l’impossibilité d’exiger raisonnablement l’utilisation d’une pièce de travail sur le lieu de travail devrait également être considérée comme établie (Branko BALABAN, Markus METZGER, Coronavirus: conséquences de la pandémie sur l’imposition des personnes physiques, Expertfocus 10/20 p. 749, 751).
21. Le tribunal de céans ne s’est, à ce jour, pas prononcé sur la possibilité pour le contribuable de déduire de ses revenus les frais d’utilisation d’une place de travail privée durant la période de pandémie de covid-19.
Il a en revanche été jugé, dans une décision du 21 août 2023, que la contribuable qui avait renoncé aux déductions forfaitaires et se prévalait de frais effectifs au sens des art. 26 LIFD et 29 LIPP, en l’occurrence des frais d'utilisation d’un bureau privé se trouvant dans la maison appartenant à son concubin, était tenue de démontrer l’existence des frais en question. Il lui incombait ainsi d’établir qu’elle avait versé un loyer à son concubin durant la période litigieuse, de manière à prouver qu’elle avait effectivement supporté de tels coûts dans l’exercice de son activité lucrative. Dans le cas contraire, elle était réputée avoir bénéficié gratuitement du logement appartenant à son compagnon et ne pouvait prétendre à aucune déduction fiscale à ce titre. Le fait que son compagnon ait été imposé sur la totalité de la valeur locative de son bien était irrelevant (JTAPI/886/2023 du 21 août 2023 consid. 9).
22. En l’espèce, la recourante n’a produit, dans le cadre du recours formé contre sa taxation 2020, aucune pièce susceptible de justifier la déduction qu’elle invoque. Elle n’a ainsi démontré, ni qu’elle avait effectivement travaillé à domicile sans interruption du 12 mars au 31 décembre 2020, ni qu’elle avait utilisé à cette fin le studio attenant à son domicile et appartenant à son époux, ni non plus que cette pièce représentait 25% de la valeur locative du bien immobilier concerné. Elle n’a enfin allégué à aucun moment qu’elle aurait versé un loyer à son époux en contrepartie de la mise à disposition de cette pièce et qu’elle aurait ainsi encouru des frais dans le cadre de l’exercice de son activité lucrative dépendante.
Conformément aux règles régissant le fardeau de la preuve en matière fiscale, elle ne saurait dès lors prétendre à la déduction sollicitée. Le recours s’avère dès lors mal fondé sur ce point.
23. À supposer que les faits mentionnés ci-dessus puissent être considérés comme établis, l’issue du litige n’en serait pas modifiée.
La recourante a en effet admis, dans le courrier que sa mandataire a adressé le 10 novembre 2023 à l’AFC-GE, qu’elle disposait d’une place de travail dans les locaux de son employeuse durant l’année fiscale 2020. Partant, elle n’était pas fondée à déduire de son revenu les frais d’utilisation d’une pièce privée au motif que son employeuse ne lui mettait pas de bureau à disposition.
L’on pourrait certes se demander si les frais précités pourraient être considérés comme des dépenses nécessaires à l’obtention du revenu, au motif qu’il ne pouvait être raisonnablement exigé de la recourante qu’elle travaille « en présentiel » entre le 12 mars et le 31 décembre 2020, en raison de la pandémie de covid-19 et de son éventuel statut de personne vulnérable.
Ce point peut toutefois rester indécis. Conformément à l’opinion doctrinale exprimée ci-dessus – et indépendamment du bien-fondé de la position exprimée par l’AFC-GE dans son Guide fiscal 2020 –, la nécessité d’engager les frais susmentionnés ne pourrait être admise, selon l’interprétation la plus favorable à la recourante, que pendant les périodes durant lesquelles le télétravail a été rendu obligatoire ou encouragé par les autorités dans le cadre des restrictions sanitaires mises en œuvre pour endiguer la propagation du covid-19. Durant l’année 2020, tel a été le cas du 13 mars 2020 au 22 juin 2020 ainsi que du 18 octobre 2020 au 31 décembre 2020, soit durant 177 jours (cf. « Coronavirus: décisions importantes du Conseil fédéral », disponible en ligne à l’adresse https://www.uvek.admin.ch/uvek/fr/home/detec/coronavirus/decisions-importantes.html).
Il s’ensuit que les frais effectifs que la recourante pourrait déduire de ses revenus dans le cadre de l’ICC 2020 s’élèveraient, dans le meilleur des cas, à CHF 1'193.-, correspondant à la valeur locative alléguée du studio (CHF 2'460.-) multipliée par un facteur 177/365 jours. En ajoutant à ce montant les frais de repas (CHF 400.-) et les frais de déplacement (CHF 125.-) invoqués par la recourante, c’est un montant total de CHF 1'718.- que la précitée aurait été en droit de déduire de ses revenus de l’année 2020 à titre de frais professionnels effectifs. Or, ce montant est inférieur aux déductions totales admises par l’AFC-GE dans le cadre de l’ICC 2020, à savoir CHF 2'100.-. Partant, la recourante ne dispose, en toute hypothèse, d’aucun intérêt à solliciter la modification de sa taxation sur ce point.
Dans le cadre de l’IFD 2020, la recourante s’est limitée à solliciter la déduction forfaitaire pour frais professionnels et n’a pas réclamé la prise en compte de ses frais effectifs. Elle ne saurait dès lors prétendre à ce que le tribunal examine la déductibilité des frais d’utilisation du studio au titre de l’IFD 2020.
Au vu de ce qui précède, le recours sera également rejeté sur ce point.
24. En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 900.-, lequel est couvert par les avances de frais versées à la suite du dépôt des recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. ordonne la jonction des causes A/658/2024, A/660/2024 et A/661/2024 sous le numéro de cause A/658/2024 ;
2. déclare recevable les recours interjetés le 23 février 2024 par Madame A______ et Monsieur B______ contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale du 12 janvier 2024 ;
3. les rejette ;
4. met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par les avances de frais ;
5. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
6. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Siégeant: Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST, présidente, Giedre LIDEIKYTE HUBER et Yuri KUDRYAVTSEV, juges assesseurs.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
Genève, le |
| La greffière |