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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2520/2023

JTAPI/168/2024 du 27.02.2024 ( LCR ) , REJETE

Descripteurs : RETRAIT DE PERMIS;FAUTE GRAVE;VITESSE MAXIMALE;RÉVOCATION(EN GÉNÉRAL);RECONSIDÉRATION
Normes : LCR.16c.al1.leta; LCR.16c.al2.lete
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2520/2023 LCR

JTAPI/168/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 27 février 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Bernard NUZZO, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______ est titulaire d'un permis de conduire pour les catégories B, D1, BE et D1E depuis le 5 février 1982 ainsi que pour la catégorie A depuis le 15 juillet 1985.

2.             Par ordonnance pénale du 27 septembre 2022, le Ministère public a déclaré
M. A______ coupable d'infractions graves contre l'art. 90 al. 2 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR – RS 741.01.), en concours avec une infraction à la loi fédérale sur les armes (LArm – RS 514.54).

Il lui était notamment reproché d'avoir circulé au guidon de son motocycle le 5 mars 2022, à la vitesse de 106 km/h, alors que la vitesse maximale autorisée à cet endroit était de 60 km/h, d'où un dépassement de 40km/h (marge de sécurité déduite) et le 7 mars 2022, à la vitesse de 96km/h, alors que la vitesse maximale autorisée à cet endroit était de 60 km/h, d'où un dépassement de 31 km/h (marge de sécurité déduite).

Il a été condamné à une peine pécuniaire de 135 jours-amende avec un montant du jour amende à CHF 50.- avec sursis et au paiement d'une amende de CHF 1'350.-,

3.             Par courrier du 30 janvier 2023, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a fait savoir à M. A______ que les faits précités avaient été portés à sa connaissance et qu'il pouvait faire part de ses observations par écrit dans un délai de quinze jours.

4.             A teneur du dossier, M. A______ n'a pas fait suite à ce courrier.

5.             Par ordonnance pénale du 1er mars 2023, le Ministère public a déclaré
M. A______ coupable de d'infractions graves contre l'art. 90 al. 2 LCR.

Il lui était reproché d'avoir circulé au guidon de son motocycle le 30 mai 2022, à la vitesse de 83km/h, alors que la vitesse maximale autorisée à cet endroit était de 50 km/h, d'où un dépassement de 28 km/h (marge de sécurité déduite).

Compte tenu du fait que l'infraction avait été commise antérieurement à l'ordonnance pénale du 27 septembre 2022, une peine complémentaire a été prononcée en le condamnant à une peine pécuniaire de 20 jours-amende pour un montant du jour-amende à CHF 30.- avec sursis et à une amende de CHF 500.-.

6.             Par décision du 15 mars 2023, l'OCV a prononcé le retrait du permis de conduire de M. A______ pour une durée de quatre mois en raison d'un dépassement de la vitesse maximale autorisée hors-localité de 40km/h en date du 5 mars 2022 et d'un dépassement de la vitesse maximale autorisée hors-localité de 31km/h en date du 7 mars 2022. C'est la plus grave des infractions qui servait de base afin de déterminer la mesure administrative imposée. Il ne justifiait pas d'un besoin professionnel du permis de conduire ni d'une bonne réputation, le système d'information relatif à l'admission à la circulation (SIAC) faisant apparaître un avertissement prononcé par décision du 20 janvier 2006, trois retraits du permis de conduire prononcés par des décisions des 14 mars 2007, 22 mai 2009 et 14 décembre 2012, ainsi qu'un retrait du permis de conduire pour une indéterminée, mesure levée le 18 avril 2018.

La durée du retrait a été fixée du 10 mai au 9 septembre 2023.

7.             Par courrier du 21 mars 2023, M. A______ a sollicité un report du délai d'exécution avec de nouvelles modalités qui commenceraient à courir à partir du 1er octobre 2023 au lieu du 10 mai 2023 en raison de déplacements personnels, entre les mois de juin et septembre 2023, qui ne pouvaient être ajournés.

8.             Par courrier du 24 mars 2023, l'OCV a autorisé M. A______ à déposer son permis au plus tard le 2 octobre 2023.

9.             Par courrier du 20 juin 2023, l'OCV a informé M. A______ qu'une nouvelle décision serait prononcée suite à la constatation d'une erreur d'appréciation ayant été commise concernant la durée du retrait du permis de conduire à prononcer, étant précisé que compte tenu de ses antécédents, une décision de sécurité, à savoir un retrait du permis de conduire à titre définitif, pour une durée indéterminée de minimum 5 ans, aurait dû être prononcée en application de l'art. 16c al. 2 let. e LCR.

10.         Par courrier du 21 juin 2023, M. A______ a fait suite au courrier précité en invoquant que la décision du retrait du permis de conduire du 15 mars 2023 était désormais définitive et exécutoire et qu'elle ne pouvait dès lors plus être modifiée. Au demeurant, il a considéré que l'erreur d'appréciation de la part de l'autorité n'était pas un motif de révision au sens de l'art. 80 LPA. Il a également contesté l'application de l'art. 16c al. 2 let. e LCR dans son dossier. Ainsi, aucune nouvelle décision ne devait être prononcée, faute de faits nouveaux.

11.         Par décision du 7 juillet 2023, déclarée exécutoire nonobstant recours, l'OCV a révoqué la décision du 15 mars 2023 et a prononcé le retrait du permis de conduire de M. A______ à titre définitif, pour une durée de minimum 5 ans, en raison d'un dépassement de la vitesse maximale autorisée hors-localité de 40km/h en date du 5 mars 2022 et d'un dépassement de la vitesse maximale autorisée hors-localité de 31km/h en date du 7 mars 2022. L'OCV a justifié cette nouvelle décision en raison d'une erreur de droit fondée sur un constat erroné des antécédents de M. A______ qui avait été commise s'agissant de la durée du retrait de permis à prononcer.

12.         Par acte du 7 août 2023, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant principalement à son annulation et, subsidiairement, à l'annulation suivie du renvoi de la cause à l'OCV pour une nouvelle décision, le tout sous suite de frais et dépens.

Il a notamment sollicité la restitution de l'effet suspensif compte tenu du préjudice irréparable causé par la révocation de la décision du 15 mars 2023 dans la mesure où il avait réglé sa conduite sur la base des nouvelles modalités d'exécution qui lui avaient été fournies et que cette nouvelle décision était immédiatement exécutoire.

Il a également fait valoir la violation des principes de proportionnalité et de bonne foi. L'OCV avait déjà effectué deux examens approfondis du dossier, sans modifier la décision du 15 mars 2023 avant l'échéance du délai de recours. L'OCV avait également violé les principes précités en révoquant la décision du 15 mars 2023, soit trois mois plus tard. Ce faisant il avait adopté un comportement contradictoire et dénué de toute cohérence. Il serait contraire à la sécurité du droit de faire supporter aux administrés les négligences de la part des autorités. La mesure fixant la durée minimum du retrait à 5 ans violait le principe de la proportionnalité. Ainsi, son intérêt privé, lequel faisait en tout état de cause l'objet d'une décision de retrait de permis pour une durée de quatre mois, l'emportait sur l'intérêt public à la révocation de la décision du 15 mars 2023.

13.         En date du 11 août 2023, l'OCV a transmis son dossier au tribunal accompagné de ses observations.

Il s'est opposé à la restitution de l'effet suspensif dans la mesure où M. A______ ne remplissait plus les conditions posées pour le maintien du permis de conduire et qu'il ne respectait pas les règles en vigueur. L'ordonnance pénale du 1er mars 2023, dont il n'avait pas été tenu compte dans le prononcé de la décision litigieuse, démontrait l'absence de volonté de M. A______ de se conformer aux règles de la circulation routière. Ainsi, l'intérêt public de la sécurité routière devait primer sur l'intérêt privé de M. A______ à recouvrer son droit de conduire.

14.         Par décision du 5 septembre 2023, le tribunal a rejeté la demande d'effet suspensif au recours formé par M. A______.

15.         En date du 9 octobre 2023, l'OCV a fait parvenir ses observations sur le fond au tribunal. Il a maintenu les termes de sa décision du 7 juillet 2023, laquelle, compte tenu des antécédents de M. A______, était conforme à la loi et à la jurisprudence fédérale en matière d'excès de vitesse.

16.         Par courrier du 12 octobre 2023, M. A______ a persisté intégralement dans les termes de son recours.

17.         Par courrier du 20 octobre 2023, l'OCV a informé le tribunal que M. A______ avait commis d'autres infractions de la circulation routière notamment en franchissant une bande cyclable (art. 27 et 90 LCR, art. 74 OSR), en contournant les véhicules par la droite pour les dépasser (art. 90 LCR, art. 8 OCR), en n'observant pas le signal de prescription "Obliquer à droite" (art. 27 et 90 LCR, art. 24 OSR), en utilisant une piste cyclable, un chemin pour piétons avec un véhicule non admis (art. 27, 43 et 90 LCR, art. 33 et 74a OSR) et en circulant sur un site propre réservés aux trams (art. 27, 43 et 90 LCR) les 12 mars 2023 et 15 avril 2023.

18.         Par courrier du 1er novembre 2023, M. A______ a conclu à l'irrecevabilité des nouvelles pièces transmises par l'OCV en date du 20 octobre 2023.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal des véhicules (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon le principe de la maxime d'office prévu par l'art. 19 LPA, l'autorité établit les faits d'office sans être limitée par les allégués ou les offres de preuve des parties. Elle réunit les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuves des parties (art. 20 LPA)

4.             En l'espèce, le recourant conclut à l'irrecevabilité des nouvelles pièces transmises par l'OCV dans son courrier du 20 octobre 2023.

5.             La présente procédure étant soumise à la maxime d'office, les nouvelles pièces transmises par l'OCV par courrier du 20 octobre 2023 s'agissant des autres infractions routières sont en principe recevables. Cela étant, comme on le verra ci-après, elles n'ont aucune incidence sur l'issue du litige et n'ont donc pas besoin d'être prises en considération.

6.             Le recourant fait grief à la décision litigieuse d'avoir été prise en violation des principes de proportionnalité et de bonne foi.

7.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

8.             En l'espèce, le recourant ne conteste pas les excès de vitesse commis, pour lesquels il a d'ores et déjà été condamné par l'ordonnance pénale du 27 septembre 2022 rendue par le Ministère public et devenue exécutoire et définitive.

Il estime toutefois que la décision rendue le 7 juillet 2023, révoquant la décision du 15 mars 2023, viole les principes de proportionnalité et de bonne foi par la durée indéterminée de minimum 5 ans du retrait de permis de conduire, mais aussi par le fait que l'autorité avait dû examiner à plusieurs reprises son dossier s'agissant des modalités d'exécution et qu'elle a révoqué sa décision seulement trois mois après.

9.             La révocation est une décision qui intervient suite à une procédure non contentieuse. Elle doit respecter les principes de procédure administrative, en particulier le droit d'être entendu, ainsi que les éventuelles règles spéciales de procédure applicables à la décision en cause. L'autorité compétente pour adopter une décision l'est également, en vertu du principe du parallélisme des formes, pour la révoquer, sauf règle légale expresse contraire. La révocation d'une décision peut intervenir d'office, de la propre initiative de l'autorité, ou à la suite d'une demande de reconsidération sur laquelle l'autorité sera entrée en matière, de son plein gré ou en raison de la présence d'un motif de reconsidération obligatoire (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, N 964).

La jurisprudence admet qu'en règle générale des décisions entrées en force, mais matériellement irrégulières, peuvent, dans certaines conditions, être révoquées. Dans ce contexte, l'intérêt à une bonne application du droit objectif doit être mis en balance avec celui de la sécurité du droit (Thierry TANQUEREL, op.cit., N 944).

L'examen des différents motifs qui sont susceptibles de s'opposer à une révocation, comparés à ceux qui justifient une telle démarche, montre qu'ils ne constituent pas des barrières infranchissables, mais simplement des éléments qui influencent la pesée des intérêts qui doit être toujours effectuée. Dans cette perspective, on peut sans doute largement ramener ces motifs à des expressions des principes de proportionnalité et de la bonne foi, qui doivent intervenir dans toute pesée des intérêts. La bonne foi est particulièrement en évidence quand il est question de droits acquis ou de droits subjectifs, quand tous les intérêts en présence ont déjà fait l'objet d'un examen approfondi d'emblée ou sur recours, ou encore quand c'est l'autorité elle-même qui a proposé de s'écarter de certaines exigences formelles en faveur de l'administré (ATF 137 I 69, 76) : dans ces circonstances, l'administré a de bonnes raisons de penser que la décision ne sera pas remise en cause par l'autorité qui l'a prise. La proportionnalité est au premier plan quand on tient compte du fait que le destinataire d'une décision a déjà entièrement fait usage d'une autorisation ou a consenti d'importants investissement sur la base d'une décision en force (Thierry TANQUEREL, op.cit., N 958).

10.         En l'espèce, l'OCV a révoqué sa décision du 15 mars 2023 en rendant une nouvelle décision le 7 juillet 2023 pour cause d'une erreur de droit fondée sur un constat erroné des antécédents du recourant.

S'agissant des conditions auxquelles la jurisprudence et la doctrine rappelées plus haut soumettent la révocation d'une décision entrée en force, il convient d'observer tout d'abord que la décision du 15 mars 2023 n'a pas créé de droits acquis (à défaut, pour la décision du 15 mars 2023, d'avoir, par exemple, fondé un rapport contractuel entre les parties ou d'avoir garanti au recourant une certaine durée de validité – voir à ce sujet Thierry TANQUEREL, op.cit., N 756 et ss).

La nouvelle décision du 7 juillet 2023 n'a pas non plus amené l'autorité intimée à réévaluer une situation au sujet de laquelle elle aurait déjà procédé à une pesée des intérêts, et sur laquelle elle aurait simplement décidé d'effectuer une pondération différente. En effet, cette nouvelle décision, comme on le verra ci-dessous, découle uniquement du souci d'appliquer la loi comme l'autorité intimée était obligée de le faire dès le départ, ne disposant, en fonction des faits considérés, d'aucune marge de manœuvre.

En outre, la décision initiale n'a pas conduit le recourant à prendre des dispositions sur lesquelles la nouvelle décision du 7 juillet 2023 le forcerait à revenir en lui causant un préjudice particulier. Le fait d'avoir convenu qu'il déposerait son permis durant la période du 2 octobre 2023 au 1er février 2024 ne constitue en aucun cas un tel préjudice, eu égard au fait que les infractions qu'il a commises contre les règles de la circulation routière entraînent de par la loi, en raison de ses antécédents, un retrait définitif de son permis de conduire pour une durée de minimum cinq ans. Ainsi, si cette décision avait été prise d'emblée, le recourant n'aurait disposé d'aucune marge de manœuvre pour prendre de meilleures dispositions que celles qu'il a pu prendre en fonction de la décision du 15 mars 2023.

Par conséquent, sous cet angle, l'autorité intimée pouvait révoquer sa décision sans enfreindre les principes de la bonne foi et de la personnalité.

Par ailleurs, en l'espèce, l''intérêt à la bonne application du droit prime sur celui de la sécurité du droit, compte tenu non seulement des antécédents du recourant, mais également des nouvelles infractions commises, qui sont graves et qui démontrent potentiellement l'inaptitude du précité à se comporter dans la circulation avec les égards qu'implique la sécurité d'autrui.

Compte tenu des conséquences dramatiques que peut avoir une attitude contraire à ce principe de base, et dès lors de l'intérêt public à prévenir de telles conséquences, l'erreur commise par l'autorité lors de l'appréciation de l'infraction dans le prononcé de la mesure ne saurait être retenue comme étant un motif s'opposant à la révocabilité de la décision du 15 mars 2023.

Par conséquent, la décision du 7 juillet 2023 révoquant la décision du 15 mars 2023 est valable.

11.         Pour déterminer s'il y a lieu de prononcer un retrait d'admonestation et cas échéant sa durée, la LCR distingue les infractions légères, moyennement graves et graves (art. 16a à 16c LCR).

12.         De jurisprudence constante, les limitations de vitesse, telles qu’elles résultent de la loi ou de la signalisation routière, valent comme limites au-delà desquelles la sécurité de la route est compromise. Elles indiquent aux conducteurs les seuils à partir desquels le danger est assurément présent. Leur respect est donc essentiel à la sécurité du trafic. En la matière, la jurisprudence a été amenée à fixer des règles précises afin d'assurer l'égalité de traitement entre conducteurs. Ainsi, les seuils fixés par la jurisprudence pour distinguer le cas de peu de gravité, le cas de moyenne gravité et le cas grave tiennent compte de la nature particulière du danger représenté pour les autres usagers de la route selon que l’excès de vitesse est commis sur une autoroute, sur une semi-autoroute, sur une sortie d’autoroute, etc. (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_216/2009 du 14 septembre 2009 consid. 5.2; 1C_83/2008 du 16 octobre 2008 et les références citées).

Ainsi, le cas est objectivement grave, c'est-à-dire sans égard aux circonstances concrètes ou encore à la bonne réputation du conducteur, en présence d'un dépassement de la vitesse autorisée de 25 km/h ou plus à l'intérieur des localités, de 30 km/h ou plus hors des localités et sur les semi-autoroutes et de 35 km/h ou plus sur les autoroutes (ATF 132 II 234 consid. 3.2 ; 124 II 259 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_216/2009 du 14 septembre 2009 consid. 5.2 ; ATA/25/2015 du 6 janvier 2015 consid. 5a).

13.         En l’espèce, le 5 mars 2022, la vitesse autorisée a été dépassée de 40 km/h, marge de sécurité déduite, sur un tronçon limité à 60 km/h.

Dans cette mesure, compte tenu de la jurisprudence rappelée ci-dessus, le recourant a commis une infraction grave au sens de l'art. 16c al. 1 let. a LCR, comme l'a retenu à juste titre la décision querellée.

14.         L'art. 16c al. 2 let. e LCR prévoit qu'après une infraction grave, le permis de conduire est retiré définitivement, si au cours des cinq années précédentes, le permis a été retiré en application de la let. d ou de l'art. 16b al. 2 let. e.

15.         Selon l'art. 16 al. 3 LCR, les circonstances doivent être prises en considération pour fixer la durée du retrait du permis de conduire, notamment l'atteinte à la sécurité routière, la gravité de la faute, les antécédents en tant que conducteur, ainsi que la nécessité professionnelle de conduire un véhicule automobile. La durée minimale du retrait ne peut toutefois être réduite. Cette dernière règle, qui rend incompressibles les durées minimales de retrait des permis, s'impose à l'autorité et aux tribunaux sans dérogation possible, même pour tenir compte des besoins professionnels - ou autres - particuliers du conducteur ; le législateur a en effet entendu exclure expressément la possibilité ouverte par la jurisprudence sous l'ancien droit de réduire la durée minimale du retrait en présence de circonstances particulières, notamment en faveur de conducteurs professionnels (ATF 135 II 334 consid. 2.2 ; 132 II 234 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_414/2019 du 28 août 2019 consid. 2 ; 1C_535/2017 du 16 octobre 2017 consid. 3 ; 1C_102/2016 du 20 décembre 2016 consid. 2.5).

16.         De jurisprudence constante, en droit de la circulation routière, un conducteur se trouve en état de récidive lorsqu’il commet un délit qui entraîne un retrait du permis obligatoire dans les deux ans – voire cinq ans – depuis la fin de l’exécution d’un précédent retrait (ATF 136 II 447 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_492/2020 du 18 novembre 2020 consid. 3.1 ; 1C_104/2015 du 22 juillet 2015 consid. 3.1). Les dispositions actuelles relatives au retrait du permis, en vigueur depuis le 1er janvier 2005, n’ont pas introduit de changement quant au point de départ du calcul du délai (ATF 136 II 447 consid. 5.3).

17.         En l'espèce, l'autorité intimée a décidé de prononcer le retrait du permis à titre définitif, pour une durée de minimum cinq ans.

Le dernier retrait de permis du recourant avait été prononcé pour une durée indéterminée le 9 août 2013, pour une durée de minimum de deux ans, en raison d'une infraction grave, mesure qui a été levée le 18 avril 2018. Ainsi, selon la jurisprudence, les infractions commises les 5 et 7 mars 2022 constituent un état de récidive pour le recourant. Partant, c'est à juste titre que l'OCV a prononcé le retrait du permis de conduire pour une durée indéterminée et d'au moins 5 ans d'après les dispositions légales précitées.

Les nombreuses sanctions prises à son encontre ne semblent pas avoir d'effet sur son comportement étant donné les récidives encore actuelles.

Au vu de ce qui précède, le tribunal constate que l'OCV a fait une application conforme du droit en tenant compte des infractions commises et des antécédents du recourant, étant rappelé que les dispositions susmentionnées ne lui laissaient en réalité aucune marge d'appréciation au sujet des conséquences des nouvelles infractions commises en 2022.

18.         Dans ces conditions, la décision querellée sera confirmée et, partant, le recours rejeté.

19.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d'un émolument s'élevant à CHF 700.-.

20.         Le recourant étant au bénéfice de l'assistance juridique, cet émolument sera laissé à la charge de l’État de Genève, sous réserve du prononcé d'une décision finale du service de l’assistance juridique sur la base de l’art. 19 al. 1 du règlement sur l'assistance juridique et l’indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale du 28 juillet 2010 (RAJ - E 2 05.04).

21.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 7 août 2023 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 7 juillet 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 700.- ;

4.             le laisse à la charge de l'État de Genève, sous réserve de la décision finale de l'assistance juridique en application de l'art. 19 al. 1 RAJ ;

5.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière