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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2395/2020

JTAPI/951/2021 du 20.09.2021 ( ICCIFD ) , ADMIS PARTIELLEMENT

ADMIS par ATA/441/2022

Descripteurs : TAXATION CONSÉCUTIVE À UNE PROCÉDURE;PRESTATION APPRÉCIABLE EN ARGENT;AMENDE;NE BIS IN IDEM;LIQUIDATION(EN GÉNÉRAL)
Normes : LIFD.151; LPFisc.59; LIFD.20.al1.letc; LIPP.22.alc
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2395/2020 ICCIFD

JTAPI/951/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 20 septembre 2021

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______, représentés par Me Philippe MANTEL, avocat, avec élection de domicile

 

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Le litige concerne la taxation 2009 à 2013 de Madame A______ et Monsieur B______.

2.             Le précité a exercé une activité lucrative indépendante dans son entreprise individuelle « B______ », active dans la pose de sols, parquets, moquettes, linoléums et nettoyages de fin de chantier jusqu’au 5 février 2010, date de cessation de l’exploitation.

Le 21 janvier 2010, C______ Sàrl (ci-après : la société) a été inscrite au Registre du commerce (ci-après : RC). Son but consiste en : « fourniture et pose de sols, parquets, moquettes, vinyles, marmoleums et prestations de services en relation avec le nettoyage de ces surfaces, ainsi que toutes opérations commerciales et financières en relation directe ou indirecte avec ce but ». Le précité, unique associé, détient l’intégralité des parts sociales.

3.             Par lettre du 30 avril 2019, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a ouvert à l’encontre de la société une procédure en rappel et en soustraction d’impôt pour les années 2010 à 2014.

4.             Le même jour, elle a informé les contribuables de l’ouverture à leur encontre d’une procédure en rappel d’impôt, ainsi que d’une procédure en soustraction d’impôt pour les années 2009 à 2017.

La division principale de la taxe sur la valeur ajoutée de l'administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) l’avait informée, d’une part de l’existence de recettes non comptabilisées et encaissées directement sur des comptes de l’actionnaire et, d’autre part, de l’enregistrement de charges non justifiées commercialement en lien avec le véhicule privé de l’épouse de l’actionnaire.

Un délai leur a été accordé pour se déterminer au sujet des reprises envisagées dont le détail leur a été communiqué.

5.             Dans le cadre de l’instruction de la cause, les contribuables ont notamment produit des relevés de compte.

6.             Le 20 août 2019, l’AFC-GE a informé la société de la clôture des procédures en rappel et en soustraction d’impôt ouvertes à son encontre et lui a notifié des bordereaux de rappel d’impôt et d’amendes pour les périodes fiscales 2010 à 2013. En ce qui concernait la période 2014, ces procédures s’étaient terminées sans redressements ni pénalités.

7.             Le 10 septembre 2019, la société a élevé réclamation à l’encontre de ces bordereaux. En substance, il convenait de tenir compte de charges non comptabilisées et de paiements en espèces à des fournisseurs.

8.             Par décision du 18 octobre 2019, l’AFC-GE a admis partiellement la réclamation de la société et lui a notifié des bordereaux rectificatifs. Elle a pris en compte une partie des charges sollicitées en déduction. Compte tenu des dégrèvements résultant des déductions supplémentaires, la provision pour impôt et les amendes ont été corrigées.

Aucun recours n’a été interjeté contre cette décision. 

9.             Le 16 décembre 2019, l’AFC-GE a informé les contribuables de la clôture des procédures en rappel et en soustraction d’impôt et leur a notifié des bordereaux de rappel d’impôt pour les années 2009 à 2012, 2013 (ICC seulement). Elle a également notifié à M. B______ seul des bordereaux d’amendes pour toutes ces périodes. En ce qui concernait les périodes 2014 à 2017, ces procédures s’étaient terminées sans redressements ni pénalités.

Pour l’année 2009, l’AFC-GE a procédé à une reprise au niveau du bénéfice d’exploitation du contribuable sans déduction d’aucune charge. Pour les périodes subséquentes, elle a effectué des redressements au titre de prestations appréciables en argent accordées par la société, correspondant au montant des recettes directement encaissées sous déduction des factures remises, et qui n’avaient pas été comptabilisées. Pour les années 2010 à 2012, les montants correspondaient aux reprises ressortant des bordereaux rectificatifs notifiés à la société, le 18 octobre 2019. Les redressements se présentaient comme suit :

2009

2010

2011

Recettes

224'792

241'345

492'279

Charges

0

-53'188

-201'835

Total

224'792

188'157

290'444

2012

2013

Recettes

232'480

38'485

Charges

-136'221

-14'544

Total

96'259

23'941

Sur le plan de la fortune, l’AFC-GE a fixé la valeur des titres de la société pour les années 2012 et 2013 à respectivement CHF 1'286'200.- et à CHF 858'200.- en application de la méthode des praticiens. Pour les années 2010 et 2011, ils n’étaient redevables d’aucun impôt sur la fortune.

Elle a considéré que les soustractions avaient été commises intentionnellement et a fixé la quotité des amendes à une demi-fois les impôts soustraits. Enfin, elle a facturé aux contribuables des intérêts sur rappel d’impôt.

10.         Le 13 janvier 2020, les contribuables ont élevé réclamation à l’encontre de ces bordereaux en concluant à leur annulation. Ils sollicitaient copie des pièces procédurales de la société, ainsi que l’évaluation des titres de cette dernière.

11.         Par courriel du 30 janvier 2020, l’AFC-GE leur a transmis le dossier fiscal de la société, après que celle-ci eut délié le fisc du secret fiscal en leur faveur.

12.         Le 6 mars 2020, les contribuables ont complété leur réclamation.

De 2009 à 2013, leur train de vie avait nécessité des dépenses mensuelles de quelque CHF 9'000.-, sans qu’ils n’aient pu constituer une épargne. Ils admettaient qu’ils avaient financé des charges privées au moyen de comptes ayant servi aux encaissements de factures de la société, les prélèvements privés ne s’étant toutefois élevés qu’à environ CHF 30'000.- à CHF 40'000.- par an.

Les offres et devis en ligne faisaient état d’un taux horaire pour la pose de parquets oscillant entre CHF 30.- et CHF 45.-. Compte tenu d’une durée de travail journalière de 8.5 heures, à raison de 240 jours ouvrables par an, l’on obtenait un chiffre d’affaires annuel maximal de CHF 90'000.-.

Même si la société n’avait pas démontré la déductibilité des charges, il incombait à l’AFC-GE d’établir l’enrichissement de l’actionnaire, lequel était nul en l’espèce. Par ailleurs, les dividendes qui étaient attribués aux contribuables s’écartaient de la réalité économique, le coût des fournitures et des sous-traitants n’ayant pas été pris en compte.

Les montants de TVA afférents aux chiffres d’affaires occultes auraient dû être déduits du bénéfice de la société. Ces montants d’impôt devaient être défalqués des prestations appréciables en argent taxables dans le chef des recourants.

Il convenait de tenir compte des amendes infligées à la société lors de la détermination des rendements de participation. Si tel n’était pas le cas, ils devraient payer des impôts sur le revenu, ainsi que des amendes, calculés sur un rendement de participation correspondant à une amende de la société. Le principe ne bis in idem était violé. Les dettes de rappel d’impôt, les amendes et les intérêts moratoires devaient être déduits de leur fortune. Ces derniers devaient également être défalqués de leur revenu.

Compte tenu des rappels d’impôts, la société était en faillite. Elle devait être valorisée sur la base de son excédent de liquidation présumé. Ses dettes excédaient largement l’actif circulant.

Enfin, les amendes devaient être réduites à due concurrence, compte tenu de la correction des montants de rappel d’impôt et leur quotité, ramenée au minimum. Le contribuable était insolvable, puisqu’il détenait la société pour seul actif.

13.         Par décision du 13 juillet 2020, l’AFC-GE a rejeté la réclamation en tant qu’elle concernait l’ICC 2009, ainsi que l’IFD 2009 et 2013. Elle a admis la réclamation en tant qu’elle concernait l’ICC 2010 à 2013, ainsi que l’IFD 2010 à 2012. Elle a notifié aux contribuables des bordereaux rectificatifs pour tenir compte de l’admission partielle de leur réclamation.

Il avait été établi dans le cadre du contrôle TVA que les contribuables avaient encaissé directement des recettes de la société sur des comptes ouverts à leur nom. Des charges en lien avec ces revenus avaient été prouvées. En revanche, sans justificatif, les prélèvements en espèces n’étaient pas probants, car il n’était pas possible d’établir si ces retraits avaient servi à financer des dépenses privées ou des charges commerciales. Les redressements se présentaient comme suit :

2010

2011

2012

2013

Chiffre d'affaires non déclaré

241'345

492'279

232'480

38'485

Factures non comptabilisées

-50'643

-140'438

-96'067

-14'544

Factures payées en espèces

-2'545

-61'397

-40'157

0

Avantages appréciables en argent

188'157

290'444

96'256

23'941

Les taux de marge résultant des reprises effectuées en tant qu’avantages appréciables en argent de 2009 à 2013 (à savoir 71 %, 78 %, 59 %, 41 % et 62 %) étaient « en ligne » avec les taux de marge brutes selon la comptabilité de la société pour les mêmes périodes fiscales. Étant donné que l’existence des prestations appréciables en argent avait pu être établie sur la base des encaissements effectivement reçus par les contribuables, il n’était pas nécessaire de démontrer l’évolution de leur fortune. Ils n’avaient pas déclaré leurs comptes bancaires. Leur argumentation relative au chiffre d’affaires maximal réalisable par un parqueteur ne pouvait être suivie, étant donné que la société n’avait pas déclaré de salaire.

Les personnes morales étaient imposées en tant que sujets fiscaux autonomes. Les dettes résultant du contrôle TVA constituaient une charge dont la société était débitrice, qui n’influençaient pas les montants bruts des prestations appréciables en argent reçues par les contribuables, correspondant au chiffre d’affaires de la société encaissé directement sur ses comptes. Ces dettes ne pouvaient être portées en déduction. Ce raisonnement s’appliquait s’agissant de la déductibilité des charges fiscales de la société. De plus, les impôts ne constituaient pas une charge déductible.

Pour les personnes physiques, les amendes ne constituaient pas non plus des charges déductibles. Les rendements de participations n’étaient pas influencés par les amendes infligées à la société et ces pénalités concernaient un sujet de droit distinct. Il n’y avait ainsi pas lieu de les déduire du revenu imposable du contribuable.

La déduction, sur le plan de la fortune, des dettes découlant du rappel d’impôt avait été acceptée pour les années 2012 à 2013, mais non pour les années précédentes, l’impôt sur la fortune étant nul. La déduction des amendes fiscales sur le plan de la fortune n’était pas tolérée, car selon la jurisprudence, elles ne constituaient que des dettes futures, non exigibles.

La déduction des intérêts résultant du rappel d’impôt était admise sur le plan du revenu « dès l’année suivant le supplément d’impôt auxquels ils se rattachaient ». La déductibilité de ces intérêts au niveau de la fortune était également acceptée, étant précisé qu’elle n’avait d’impact qu’en 2012 et 2013, l’impôt sur la fortune étant nul pour les deux années précédentes.

Au moment de l’estimation des parts sociales, à savoir à la fin des années 2012 et 2013, la société n’était pas en liquidation, ni proche de l’être. Il n’y avait donc pas lieu de rectifier la valorisation de ses titres en appliquant la méthode prévue pour les sociétés en liquidation.

Enfin, la quotité des amendes avait été fixée à une demi-fois l’impôt soustrait, en tenant compte des circonstances de la bonne collaboration du contribuable et du cumul des amendes entre la personne physique et la société. La quotité était dès lors maintenue.

14.         Par acte du 13 août 2020, les contribuables ont interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) à l’encontre de la décision du 13 juillet précédent en concluant à son annulation et, cela fait, à sa réforme, dans le sens de leur argumentation, le tout sous suite de dépens. Ils ont repris, en les développant, les arguments exposés dans leur réclamation.

Les dettes fiscales pour les années 2012 et 2013 avaient été déduites sur le plan de leur fortune. Les dettes découlant du rappel d’impôt pour les années 2009 à 2011 étaient également déductibles.

La jurisprudence invoquée par l’AFC-GE pour refuser la déduction des amendes sur le plan de leur fortune était fortement critiquable. La présomption d’innocence en matière fiscale, invoquée par le Tribunal fédéral dans cet arrêt, jouait un rôle mineur, ce d’autant que le contribuable avait admis sa faute.

Les intérêts liés au rappel d’impôt étaient déductibles de leur revenu pour chaque année visée par le rappel, ce que l’AFC-GE avait admis. Toutefois, c’était à tort qu’elle avait retenu que la déduction ne pouvait être acceptée qu’à compter de 2010. Autrement dit, les intérêts sur rappel d’impôt 2009 devaient être déduits en 2010 non seulement à hauteur de l’intérêt couru en 2010, mais à hauteur de l’intérêt non déduit par l’AFC-GE lors des taxations ultérieurs 2014 à 2019.

Le rappel d’impôt avait pour effet que la société se trouvait en état de surendettement. Elle ne disposait d’aucun actif. Même si elle n’était pas en liquidation, il n’y avait aucun sens économiquement de lui d’attribuer une valeur fiscale. Si la méthode des praticiens devait néanmoins être appliquée, la valeur de rendement devait prendre en considération les bénéfices diminués du montant des amendes, des intérêts de retard et de la TVA.

Les amendes devaient être réduites. Les reprises avaient été déterminées schématiquement par effet miroir avec les redressements opérés dans le chef de la société, en raison du fait que celle-ci ne tenait pas de comptabilité et qu’elle n’était pas en mesure de démontrer les charges grevant les chiffres d’affaires repris. Enfin, la fixation des amendes portant sur des chiffres d’affaires purement théoriques qui ne répondait à aucun objectif de prévention, puisqu’elle conduisait les recourants à la ruine.

15.         Dans sa réponse du 16 décembre 2020, l’AFC-GE a conclu à l’admission du recours en ce sens que les intérêts moratoires découlant du rappels d’impôt devaient être déduits sur le plan du revenu. La déduction des intérêts relatifs aux années 2014 à 2019 serait prise en compte dans le cadre de la procédure de taxation de la période fiscale 2020. Pour le surplus, elle a conclu au rejet du recours, reprenant, l’argumentation exposée dans ses précédentes écritures.

La collaboration du contribuable avait été prise en compte pour la fixation des amendes et la société n’était à ce jour pas en faillite. La quotité des amendes n’avait pas été arrêtée schématiquement et par effet miroir, mais en appréciant l’ensemble des circonstances, en tenant compte notamment de l’impact économique dans le chef du contribuable.

16.         Par réplique du 17 février 2021, les contribuables ont maintenu leur recours. Ils ne sollicitaient plus la déduction des amendes sur le plan de leur fortune.

Les intérêts sur rappel d’impôt n’étaient pas uniquement déductibles lors de l’année de leur paiement. En 2020, ils excédaient leur revenu, si bien que les défalquer cette année-là était inique.

17.         Dans sa duplique du 15 avril 2021, l’AFC-GE a persisté dans les conclusions de sa réponse.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             Le 1er janvier 2010 est entrée en vigueur la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), dont l'art. 69 abroge les cinq anciennes lois sur l’imposition des personnes physiques (aLIPP-I à V).

L’art. 72 al. 1 LIPP prévoit que cette loi s’applique pour la première fois pour les impôts de la période fiscale 2010, et que les impôts relatifs aux périodes fiscales antérieures demeurent régis par les dispositions de l’ancien droit, même après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi.

En l’espèce, le recours concerne les périodes fiscales 2009 à 2013. Il s’ensuit que la présente cause est régie par les dispositions de l’ancien droit (aLIPP-I à V) en tant qu’elle concerne l’ICC 2009 et par le nouveau droit (loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 - LIPP - D 3 08) s’agissant de l’ICC 2010 à 2013.

4.             Les recourants soutiennent que le montant des reprises se révèle disproportionné et qu’il s’écarte de la réalité économique.

5.             Lorsque des moyens de preuve ou des faits jusque-là inconnus de l'autorité fiscale lui permettent d'établir qu'une taxation n'a pas été effectuée, alors qu'elle aurait dû l'être, ou qu'une taxation entrée en force est incomplète ou qu'une taxation non effectuée ou incomplète est due à un crime ou à un délit commis contre l'autorité fiscale, cette dernière procède au rappel de l'impôt qui n'a pas été perçu, y compris les intérêts (art. 151 al. 1 LIFD ; art. 59 al. 1 LPFisc).

6.             Selon la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 2C_129/2018 du 24 septembre 2018 consid. 7.1), le rappel d'impôt n'équivaut pas à un nouvel examen complet de la taxation, mais ne porte que sur les points pour lesquels l'autorité fiscale dispose de nouveaux éléments. L'existence d'un rappel d'impôt ne saurait ainsi autoriser le contribuable à revenir librement sur l'ensemble de sa taxation. Sous réserve d'une erreur manifeste, celui-ci peut uniquement demander que la taxation soit reprise en sa faveur sur les points qui, précisément, font l'objet du rappel d'impôt. La détermination des faits et leur appréciation juridique antérieure restent déterminantes, qu'elles soient en faveur ou en défaveur du contribuable.

7.             Est imposable le rendement de la fortune mobilière, en particulier les dividendes, les parts de bénéfice, les excédents de liquidation et tous autres avantages appréciables en argent provenant de participations de tout genre (art. 20 al. 1 let. c LIFD ; art. 22 al. 1 let. c LIPP ; art. 6 al. 1 let. c aLIPP-IV).

Selon la jurisprudence, il y a distribution dissimulée de bénéfice lorsque les quatre conditions cumulatives suivantes sont remplies : 1) la société fait une prestation sans obtenir de contre-prestation correspondante ; 2) cette prestation est accordée à un actionnaire ou à une personne le ou la touchant de près ; 3) elle n'aurait pas été accordée dans de telles conditions à un tiers ; 4) la disproportion entre la prestation et la contre-prestation est manifeste de telle sorte que les organes de la société auraient pu se rendre compte de l'avantage qu'ils accordaient (ATF 140 II 88 consid. 4.1).

Un avantage appréciable en argent au sens de l'art. 20 al. 1 let. c LIFD représente, du point de vue de la société distributrice, un élément du bénéfice imposable en vertu de l'art. 58 al. 1 let. b dernier tiret LIFD (distributions dissimulées de bénéfice et avantages à des tiers non justifiés par l'usage commercial) ou de l'art. 58 al. 1 let. c LIFD (produits non comptabilisés ; arrêt 2C_445/2015 du 26 août 2016 consid. 6.3.4). Cette figure conduit ainsi à une reprise tant au niveau de l'impôt sur le bénéfice pour la société distributrice que de l'impôt sur le revenu pour le bénéficiaire de l'avantage, ce qui concrétise la double imposition économique voulue par le législateur (ATF 136 I 65 consid. 5.4).

8.             Selon la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 2C_16/2015 du 6 août 2015 consid. 2.5.5 à 2.5.8 = RDAF 2016 II 110), ce qui sera considéré comme une distribution dissimulée de dividende au niveau de la société représentera en principe un avantage appréciable en argent pour l'actionnaire. Dans la mesure où la prestation appréciable en argent de la société est entrée en force, les cantons effectuent généralement une imposition analogue auprès du détenteur de parts. Il n'existe néanmoins pas de véritable automatisme de taxation. Le versement de la prestation appréciable en argent par la société constitue certes un indice important dont il faut tenir compte dans l'imposition du détenteur de parts. Mais un effet d'extension de qualification échoue, car si la formulation du jugement (le dispositif) donne un accès à l'autorité de la chose jugée formelle et matérielle, tel n'est cependant pas le cas de l'établissement des faits ou des considérants quant au droit. Par conséquent, seuls les facteurs fiscaux (de la société) acquièrent l'autorité de la chose jugée. Une nouvelle appréciation du droit est indispensable au niveau de l'actionnaire, d'autant plus que la société et le détenteur de parts constituent - malgré leurs liens de droit commercial - deux sujets de droit et deux sujets fiscaux indépendants l'un de l'autre. En dérogation aux règles habituelles concernant le fardeau de la preuve, c'est au détenteur de parts, lorsqu'il est en même temps organe de la société, de contester dans les détails la nature et le montant de la prestation appréciable en argent prétendue par l'administration fiscale. S'il omet de contester l'un des aspects ou s'il se limite à un exposé sommaire, l'autorité de taxation peut partir du principe que la taxation entrée en force pour la société se justifie également vis-à-vis de l'actionnaire.

9.             En l’occurrence, les recourants font valoir que leur fortune n’a pas évolué durant les années en cause. En outre, en se fondant sur les statistiques du SECO, ils relèvent qu’un parqueteur travaillant 8.5 heures par jour, à raison de 240 jours par année, qui effectue des heures supplémentaires, ne pourrait réaliser qu’un chiffre d’affaires annuel maximum de CHF 168'000.-. L’autorité intimée n’a par ailleurs pas déduit le coût des fournitures et des sous-traitants. Il convient de se fonder sur l’évolution des soldes de leurs comptes bancaires.

L’AFC-GE ne partage pas leur point de vue. Elle a imputé les prestations appréciables en argent dans le chef des recourants, qui n’ont pas justifié les prélèvements privés. Compte tenu de ces derniers, le non-accroissement de leur fortune n’est pas pertinent. Enfin, en prenant en compte le chiffre d’affaires supplémentaire, la marge brute sous déduction des charges de matériel, se monte à 71 %, ce qui n’est pas irréaliste.

Les recourants ne peuvent être suivis. En effet, l’AFC-GE a effectué des reprises en se fondant sur la taxation de la société consécutive au rappel d’impôt, laquelle est entrée en force. En tant qu’unique associé et seul détenteur des parts sociales, il incombe au contribuable de contester dans les détails la nature et le montant des prestations appréciables que l’AFC-GE a intégrées dans son revenu. Or, puisque la présente procédure concerne un rappel d’impôt, les précités ne peuvent contester leurs taxations que sur les points faisant l’objet du rappel d’impôt. Ils ne sont dès lors pas recevables à tenter de démontrer que les reprises excèdent le chiffre d’affaires annuel réalisable par un parqueteur. Alors que le fardeau de la preuve leur incombe, ils ne justifient pas pour quelle raison il conviendrait de tenir compte des factures non comptabilisées et des paiements effectués en espèces à des fournisseurs, que l’AFC-GE a refusé de prendre en considération dans le cadre de la décision sur réclamation de la société. Ils ne démontrent pas non plus que le montant des recettes rajouté à leur revenu serait inexact.

10.         Les recourants demandent que le montant des prestations appréciables en argent soit réduit des dettes de TVA dont la société est redevable consécutivement à la procédure de contrôle menée par l’AFC-CH. Ils font valoir que l’AFC-GE ne peut se prévaloir de la dualité de sujets fiscaux – à savoir eux-mêmes et la société – puisque le bénéfice repris au niveau de cette dernière aurait dû être diminué du montant de la TVA, qui a été payée par le débit du compte non déclaré. Ils sollicitent également la déduction des charges fiscales reprises au niveau de la société, lors de la détermination des prestations appréciables en argent.

De son côté, l’AFC-GE considère que les dettes résultant du contrôle mené par l’AFC-CH constituent une charge pour la société, mais ne modifient pas les montants bruts des prestations appréciables en argent reçues par les recourants sur leurs comptes privés, qui correspondent au chiffre d’affaires de la société.

S’agissant de la déduction des charges fiscales, l’AFC-GE s’y oppose, pour les mêmes motifs que ceux relatifs à la déduction de la TVA.

11.         Les recourants ne peuvent être suivis une nouvelle fois.

En effet, le fait que la société, dans le cadre de la procédure de contrôle menée à son encontre, n’ait pas fait valoir en déduction ses dettes de TVA au titre de charges justifiées par l’usage commercial, comme la loi l’autorise (art. 62 al. 1 let. a LIFD ; art. 13 al. 1 let. a de la loi sur l’imposition des personnes morales du 23 septembre 1994 - LIPM - D 3 15) n’influence en rien le montant des prestations appréciables en argent perçues par les recourants et qu’ils n’ont pas déclarées. Le même raisonnement s’applique à la prise en compte des charges fiscales de la société, dans le calcul des prestations appréciables en argent imputables aux recourants.

12.         Les recourants demandent que le montant des amendes infligées à la société soient déduites des prestations appréciables en argent. Si tel n’était pas le cas, ils devraient payer des impôts sur le revenu, ainsi que des amendes, calculés sur un rendement de participation correspondant à une amende de la société, ce qui enfreindrait le principe ne bis in idem.

13.         Pour une personne physique exerçant une activité dépendante, les amendes constituent des dépenses d'utilisation du revenu qui ne sauraient être déductibles de celui-ci. S'agissant des personnes physiques exerçant une activité indépendante ou des personnes morales, la déduction d'amendes du revenu, respectivement du bénéfice est exclue car cette déduction n'est pas justifiée par l'usage commercial (arrêt du Tribunal fédéral 2C_874/2018 du 17 avril 2019 consid. 12.2).

14.         Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même État en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet État. Ce principe, exprimé par l'adage ne bis in idem, est garanti par l'art. 4 § 1 du Protocole n° 7 à la Convention du 22 novembre 1984 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (RS 0.101.07) ainsi que par l'art. 14 § 7 du Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (RS 0.103.2). La règle découle en outre implicitement de la Constitution fédérale (ATF 144 IV 136 consid. 10.1).

15.         Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (RDAF 1996, p. 172), le principe ne bis in idem ne s'applique que lorsqu'une seconde poursuite est intentée pour les mêmes faits envers la même personne, Tel n'est pas le cas en revanche lorsqu’une amende pour soustraction d’impôt est infligée tant à la société qu’à son actionnaire. En effet, en droit fiscal suisse, en particulier en matière d'impôt fédéral direct, les sociétés sont soumises à un impôt sur le bénéfice indépendamment des contributions dues par leurs actionnaires et du nombre de ceux-ci. Même s'il existe une certaine communauté économique entre l'actionnaire unique et la société, on ne peut pas parler de confusion de leurs personnes, sur le plan fiscal comme sur le plan civil. Dès lors, les procédures ouvertes à la fois contre l'actionnaire et la société le sont contre des personnes différentes ; elles ne violent ainsi pas le principe ne bis in idem.

16.         En l’espèce, l’argumentation des recourants tombe à faux. En effet, il découle de la jurisprudence rappelée ci-dessus que les amendes infligées à la société ne peuvent être déduites de son bénéfice, étant donné qu’elles ne constituent pas des charges justifiées par l’usage commercial. Elles ne sauraient, dès lors, être portées en réduction des prestations appréciables en argent réintégrées au niveau de leur revenu. Au surplus, le fait que l’AFC-GE ait infligé une amende au contribuable en sus de la société n’enfreint pas le principe ne bis in idem.

17.         Dans leur acte de recours, les contribuables sollicitent la déduction, sur le plan de leur revenu, des intérêts moratoires résultant des rappels d’impôts pour chaque année sur laquelle le rappel d’impôt a porté. Selon eux, les intérêts sur rappel d’impôt 2009 doivent être déduits en 2010, non seulement à hauteur de l’intérêt couru en 2010, mais également à hauteur de l’intérêt non déduit par l’AFC-GE lors des taxations ultérieures 2014 à 2019. Dans sa réponse, l’AFC-GE a admis ce grief, sauf pour ce qui est des intérêts relatifs aux années 2014 à 2019, qui doivent être pris en compte dans le cadre de la procédure de taxation 2020.

Au stade de sa réplique, les recourants demandent que ces intérêts soient défalqués intégralement pour chacune des années considérées. S’agissant des années 2014 à 2019, l’AFC-GE rejette cette conclusion, notamment parce qu’un rappel d’impôt et les intérêts y relatifs ne constituent pas un motif de révision permettant de rouvrir une taxation afin d’en réduire les intérêts sur rappel d’impôt.

18.         Dans l’arrêt du Tribunal fédéral 2C_258/2017 du 2 juillet 2018 cité par les parties, le contribuable en cause sollicitait la déduction de son revenu des intérêts liés aux rappels d’impôt (consid. 6, non publié aux ATF 144 II 359), qui concernait les périodes 2004 à 2011. L’AFC-GE s’y opposait, considérant que, pour pouvoir déduire du revenu des intérêts moratoires, il fallait que ceux-ci fussent échus. Les intérêts litigieux n’étaient déductibles que pour l’année fiscale au cours de l’année les décisions de rappels d’impôt avaient été notifiées, soit en 2014.

Le Tribunal fédéral a retenu que les intérêts relatifs aux rappels d'impôt, même s'ils constituent une catégorie d'intérêts passifs particulière, ont pour but de compenser le fait que la somme due au titre de rappels d'impôt n'a pas été payée au moment où elle aurait dû l'être, faute de taxation complète à l'époque, mais seulement plus tard, dans le cadre de la procédure de rappel en question. Pour chacune de ces périodes fiscales, le contribuable doit s'acquitter d'une somme au titre de rappels d'impôt et des intérêts moratoires y relatifs. Ces intérêts, qui commencent à courir trente jours après le terme initial d'échéance de l'impôt pour l'IFD, respectivement « dès le terme général d'échéance de l'année ou de la période fiscale concernée » pour l'ICC, sont donc directement liés au montant du rappels d'impôt dû par l’intéressé pour chaque période fiscale en cause. Partant, sous l'angle de l'étanchéité des exercices fiscaux, il n'est pas insoutenable d'admettre que le contribuable peut les déduire de son revenu dans chacune des années fiscales sur lesquelles portent les rappels d'impôt. Contrairement à ce que soutenait l’AFC-GE dans cette affaire, le fait que les intérêts litigieux n'aient été exigés qu'au moment de procéder aux rappels d'impôt en 2014 n'y changeait rien.

19.         En l’espèce, il résulte de la jurisprudence rappelée ci-dessus que les intérêts sur rappel d’impôt sont déductibles du revenu des recourants pour toutes les années fiscales litigieuses – à savoir de 2009 à 2013 – et non dès 2010 comme le soutient l’autorité intimée. La déduction s’effectue conformément au principe de périodicité. En d’autres termes, les intérêts relatifs au rappel d’impôt 2009 sont déductibles en 2009 (uniquement) et ainsi de suite.

Les taxations 2014 à 2020 n’étant pas litigieuses, il n’y a pas lieu de se prononcer sur la déductibilité des intérêts lors de ces périodes fiscales.

Le recours doit dès lors être admis partiellement sur ce point.

20.         Les recourants demandent que la société soit évaluée comme une société en liquidation, à savoir sur la base de son excédent de liquidation présumé.

L’AFC-GE s’y oppose, considérant qu’au moment de l’estimation des parts sociales, à savoir à la fin des années 2012 et 2013, la société n’était ni en liquidation, ni proche de l’être.

21.         La circulaire n° 28 de la conférence suisse des impôts intitulée « instructions concernant l'estimation des titres non cotés en vue de l'impôt sur la fortune » (ci-après : la circulaire), a pour objectif l'estimation uniforme, en Suisse, pour l'impôt sur la fortune, des titres nationaux et étrangers qui ne sont négociés dans aucune bourse (p. 1, ch. 1 al. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_328/2019 du 16 septembre 2019 consid. 4.5 et les arrêts cités).

22.         La méthode d'estimation générale des titres non cotés - qui n'ont pas fait l'objet d'un transfert substantiel entre tiers indépendants - s'effectue en principe par la moyenne pondérée entre la valeur de rendement doublée et la valeur intrinsèque. Cette méthode est généralement appelée « méthode des praticiens » (arrêt du Tribunal fédéral 2C_328/2019 du 16 septembre 2019 consid. 4.5 et les arrêts cités). L'activité effective d'une société détermine son mode d'estimation (ch. 6). Pour les sociétés commerciales, industrielles et de services, la valeur de l'entreprise résulte de la moyenne pondérée entre la valeur de rendement, qui est doublée, d'une part, et la valeur substantielle déterminée selon le principe de continuation de l'exploitation, d'autre part (ch. 34). Selon la circulaire, il peut être dérogé à cette méthode d’estimation. En particulier, si la société est en liquidation, sa valeur est déterminée par l'excédent de liquidation présumé (ch. 48). Une société est considérée comme étant en liquidation lorsque, le jour déterminant pour l'estimation, elle ne poursuit plus son but social statutaire, mais procède à la réalisation de ses actifs et exécute ses engagements, indépendamment de l'inscription de la liquidation au RC (ch. 47).

Le Tribunal fédéral a jugé qu'il n'était pas arbitraire, en application de la circulaire, de se fonder sur la valeur substantielle pour évaluer la valeur d'une société qui, certes, semblait toujours poursuivre son but d'origine au regard de ses statuts, mais qui se limitait en réalité depuis deux ans à recouvrer et à liquider ses prétentions et ses valeurs mobilières, ainsi qu'à administrer ses biens immobiliers. Comme la reprise de l'activité statutaire de la société n'était pas prévisible, il apparaissait pertinent d'évaluer l'entreprise comme une société de gérance de fortune et non sur la base de la méthode des praticiens habituellement employée pour les sociétés d'exploitation (arrêts 2C_328/2019 du 16 septembre 2019 consid. 6.1 ; 2C_800/2008 du 12 juin 2009). 

23.         En l’espèce, les recourants n’ont pas prouvé qu’au 31 décembre 2012 et 2013 – dates déterminantes pour l’évaluation des titres de la société – celle-ci se trouvait en liquidation. En particulier, il n’est pas établi qu’à ces dates, celle-ci réalisait ses actifs et exécutait ses engagements. Ils n’ont pas non plus pas démontré qu’étaient réalisées les conditions d’une dissolution, laquelle précède la liquidation (art. 736 et 738 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse – CO, Code des obligations - RS 220). Ces dispositions s’appliquent à la société anonyme, mais également à la société à responsabilité limitée, par renvoi de l’art. 826 al. 2 CO.

Ils soutiennent que la société se trouve « en faillite », mais aucun jugement de faillite n’a été rendu à son encontre, de sorte que la condition de l’art. 736 ch. 3 n’est pas réalisée. En outre, ils font valoir que ses dettes excèdent largement son actif circulant. Certes, une société qui n’exerce plus d’activités et ne dispose plus d’actifs réalisables peut être radiée d’office du RC (art. 736 ch. 5 CO, art. 938 aCO et art. 155 de l’ordonnance du 17 octobre 2007 sur le registre du commerce – aORC – RS 221.411). Toutefois, encore faut-il que le préposé du RC ait procédé à une triple sommation publique demeurée infructueuse, un associé ou un créancier pouvant alors faire valoir un intérêt à ce que la société soit maintenue, auquel cas la décision de la dissoudre ou de la maintenir sera prise par le juge civil (Pascal MONTAVON, abrégé de droit commercial, 6ème édition, 2017, p. 771). Or, en l’espèce, indépendamment de la question de savoir si la société disposait encore d’actifs circulants au 31 décembre 2012 et 2013, il n’apparaît que le préposé du RC ait procédé aux sommations prescrites. Partant, la société ne se trouve pas non plus dans le cas de dissolution prévu par l’art. 736 ch. 5 CO.

Partant, le grief doit être rejeté.

24.         Subsidiairement, les recourants demandent que la valeur de rendement soit réduite du montant des amendes, des intérêts sur rappel d’impôt et de la TVA, ce que l’AFC-GE n’avait pas fait.

25.         L’art. 58 al. 1 let. a LIFD qui prévoit que le bénéfice net imposable comprend le solde du compte de résultats, compte tenu du solde reporté de l’exercice précédent, énonce le principe de l’autorité du bilan commercial (ou principe de déterminance), selon lequel les comptes, et notamment le compte de résultats, établis conformément aux règles du droit commercial (ou comptable) lient les autorités fiscales à moins que le droit fiscal ne prévoie des règles correctrices particulières (ATF 137 II 353 consid. 6.2). L’autorité du bilan commercial tombe en revanche lorsque des normes impératives du droit commercial sont violées ou que des normes fiscales correctrices l’exigent (ATF 141 II 83 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_484/2019 du 6 novembre 2019 consid. 7.1). Le principe d’autorité du bilan lie non seulement l’autorité fiscale, mais aussi le contribuable lui-même, qui est tenu par sa comptabilité (autorité formelle du droit comptable ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_455/2017 du 17 septembre 2018 consid. 6.1 ; ATA/969/2020 du 29 septembre 2020 consid. 8c).

26.         Ce grief ne saurait être accueilli. En effet, les recourants doivent se laisser opposer le bénéfice de la société ressortant de ses comptes, qui, conformément au principe de déterminance, lie les autorités fiscales et la société elle-même.

27.         Les recourants concluent à la réduction au tiers des impôts éludés de la quotité des amendes infligées au contribuable, au motif qu’elles portent sur des chiffres d’affaires purement théoriques et qu’elles ne répondent à aucun objectif de prévention, puisqu’elles le conduisent à la faillite. De son côté, l’AFC-GE, s’y oppose, considérant qu’elle a déjà pris en compte sa bonne collaboration en tenant compte de l’impact économique des pénalités.

28.         Est notamment puni d'une amende le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu'une taxation ne soit pas effectuée, alors qu'elle devrait l'être, ou qu'une taxation entrée en force soit incomplète (art. 175 al. 1 LIFD et 69 al. 1 LPFisc). En règle générale, l'amende est fixée au montant de l'impôt soustrait ; si la faute est légère, l'amende peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD et 69 al. 2 LPFisc).

29.         En cas de faute grave, l'amende doit en principe être supérieure à une fois l'impôt soustrait et peut être au plus triplée (art. 175 al. 2 LIFD et 69 al. 2 LPFisc ; ATF 144 IV 136 consid. 7.2.1 et les références citées). Par faute grave, il faut comprendre entre autres la récidive, de même que l’attitude continuellement récalcitrante du contribuable vis-à-vis des autorités fiscales. Il y a en particulier circonstance aggravante lorsque la soustraction d’impôt s’étend sur plusieurs années et s’effectue selon différents procédés, en cas d’existence d’un compte bancaire non déclaré ou, par exemple, en cas de présentation planifiée et erronée de bilans, par une personne morale sur plusieurs exercices (Pietro SANSONETTI, Danielle HOSTETTLER, in Yves NOËL, Florence AUBRY GIRARDIN, Commentaire romand de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct, 2ème édition, 2017, art. 175, § 54, p. 1998).

Conformément à l'art. 106 al. 3 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), l'amende doit être fixée en tenant compte de la situation de l'auteur, afin que la peine corresponde à la faute commise. Les principes régissant la fixation de la peine prévus à l'art. 47 CP s'appliquent. En droit pénal fiscal, les éléments principaux à prendre en considération sont le montant de l'impôt éludé, la manière de procéder, les motivations, ainsi que les circonstances personnelles et économiques de l'auteur (ATF 144 IV 136 consid. 7.2.2). La bonne collaboration du contribuable dans la procédure en soustraction d’impôt constitue l'un des éléments permettant de réduire la peine (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1007/2012 du 15 mars 2013).

30.         En l’espèce, le recourant ne remet pas en cause le caractère intentionnel des soustractions, retenu par l’AFC-GE. Par ailleurs, celles-ci se sont déroulées durant cinq années fiscales, si bien que sa faute doit être qualifiée de grave. Cela étant, il convient de tenir compte, avec l’autorité intimée, de la bonne collaboration du recourant, ainsi que de la péjoration de la situation économique du couple induite par les pénalités.

Quoi qu’en dise le précité, les amendes n’ont pas été fixées de manière schématique, d’après un chiffre d’affaires théorique. L’AFC-GE s’est au contraire fondée sur des recettes échéant à la société, mais qu’il a effectivement encaissé. Elle a par ailleurs tenu compte des charges qui étaient justifiées par pièces.

Le caractère grave de la faute commise par le recourant et celui, intentionnel, des soustractions, empêche de ramener la quotité des amendes au tiers des droits soustraits. Seule une faute légère aurait permis de retenir une tel quantum de peine (art. 175 al. 2 LIFD et art. 69 al. 2 LPFisc),

En conséquence, la quotité des amendes telle qu’arrêtée par l’autorité intimée sera confirmée. Le montant des pénalités devra néanmoins être réduit pour tenir compte de l’admission partielle du recours (cf. consid. 19 supra).

31.         En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui obtiennent partiellement gain de cause, sont condamnés au paiement d’un émolument réduit s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 500.-, à la charge de l'État de Genève, soit pour lui l’administration fiscale cantonale, sera allouée aux recourants (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 13 août 2020 par Madame A______ et Monsieur B______ contre la décision sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 13 juillet 2020 ;

2.             l’admet partiellement ;

3.             renvoie le dossier à l’administration fiscale cantonale pour nouveaux bordereaux de rappel d’impôt et d’amendes dans le sens des considérants ;

4.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

5.             condamne l'État de Genève, soit pour lui l’administration fiscale cantonale, à verser aux recourants une indemnité de procédure de CHF 500.- ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Sophie CORNIOLEY BERGER, présidente, Caroline GOETTE et Stéphane TANNER, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière