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Décisions | Chambre de surveillance

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C/24631/2014

DAS/270/2023 du 31.10.2023 sur DTAE/4980/2023 ( PAE ) , REJETE

Normes : Cst.29.al2; CPC.53; CC.602; CC.297.al1; CC.304.al1; CC.306.al2
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/24631/2014-CS DAS/270/2023

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MARDI 31 OCTOBRE 2023

 

Recours (C/24631/2014-CS) formé en date du 7 août 2023 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), et par Madame B______, domiciliée ______ (Genève), toutes deux représentées par Mes Agrippino RENDA et Pietro FOLINO, avocats.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 8 novembre 2023 à :

- Madame A______
Madame B______
c/o Mes Agrippino RENDA et Pietro FOLINO, avocats
Route des Acacias 6, case postale 588, 1211 Genève 4.

- Madame C______
c/o Me François MEMBREZ, avocat
Rue Verdaine 12, case postale 3647, 1211 Genève 3.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A.              a. Le ______ 2007, C______, de nationalité polonaise, a donné naissance à Genève à un garçon prénommé D______, lequel a été reconnu par E______, de nationalité suisse.

E______ était par ailleurs le père de B______ et de A______, issues de son union avec F______, née F______ [nom de jeune fille], de laquelle il était divorcé.

b. E______ est décédé à G______ (Genève) le ______ 2022, sans laisser de testament.

Le certificat d’héritiers établi par H______, notaire à Genève, le 9 novembre 2022, mentionne le fait que le défunt avait laissé pour seuls héritiers légaux ses trois enfants.

c. Par courrier du 14 octobre 2022, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après: le Tribunal de protection) a fixé à C______ un délai au 14 novembre 2022 pour lui indiquer si l’enfant D______ devait recevoir un héritage d’un montant supérieur à 35'000 fr. ou/et un immeuble en Suisse ou à l’étranger.

d. Par courrier du 3 novembre 2022, le conseil de C______ a informé le Tribunal de protection de ce que le mineur D______ recevrait un héritage d’un montant supérieur à 35'000 fr. Il n’y avait pas de conflit d’intérêts avec sa mère, laquelle n’était pas héritière du défunt dans la mesure où elle n’était pas mariée avec celui-ci. C______ a produit un extrait du compte bancaire du mineur D______ ouvert auprès de [la banque] I______, en précisant qu’elle veillerait à ce que les liquidités héritées par son fils soient placées sur ledit compte.

Selon la déclaration de succession préparée par le conseil de C______, l’actif net imposable s’élevait à 4'394'210 fr.

e.

e.a Par courrier du 7 février 2023, B______ et A______ ont sollicité la nomination d’un curateur en faveur de leur frère D______.

Elles ont exposé que selon les informations en leur possession, les actifs successoraux étaient les suivants: un bien immobilier sis à G______, occupé par C______ et l’enfant D______, d’une valeur approximative de 4'000'000 fr.; plusieurs comptes en banques ouverts auprès de I______, les avoirs devant s’élever à plusieurs centaines de milliers de francs; une entreprise individuelle et une société à responsabilité limitée, dont les actifs connus étaient notamment deux voitures de marque J______ et K______, un fourgon [de marque] L______ et une utilitaire M______/1______ [marque, modèle]; un bien immobilier sis dans la province de N______ (Italie), d’une valeur approximative de 200'000 fr.; une part de copropriété (50%) d’un immeuble sis rue 2______ à Genève d’une valeur approximative de 4'500'000 fr., avec un rendement locatif variant de 9'000 fr. à 12'000 fr. par mois. B______ et A______ ont allégué être confrontées à de très importantes difficultés de communication avec C______ et elles craignaient que celle-ci n’agisse pas dans l’intérêt de leur frère D______, ce d’autant plus que l’intéressée n’exerçait aucune activité lucrative. Elles avaient tenté, sans succès, d’organiser des rencontres pour procéder de concert aux différentes démarches administratives.

e.b D______, représenté par sa mère, s’est déterminé le 5 avril 2023 sur cette requête, concluant à son rejet.

Il ne ressort pas de la procédure que cette écriture aurait été transmise à B______ et A______.

f. Par requête du 9 mars 2023, le mineur D______, représenté par sa mère, a sollicité de la Justice de paix la désignation d’un représentant officiel de la communauté héréditaire, aux fins notamment de gérer la déclaration de succession, de liquider l’entreprise individuelle « E______ » et de restructurer l’entreprise à responsabilité limitée « O______ Sàrl », démarches qui étaient mises à mal par les difficultés de communication rencontrées par les héritiers.

g. Par décision DJP/209/2023 du 15 juin 2023, la Justice de paix a désigné P______, avocat, aux fonctions de représentant de la communauté héréditaire de E______ et lui a conféré le pouvoir général de représenter la succession, de l’administrer et de préparer le partage. La Justice de paix a retenu l’existence d’une mésentente importante au sein de l’hoirie, qui ne permettait pas la prise de décisions unanimes et de régler les affaires courantes, alors même que le patrimoine successoral était d’importance et qu’il commandait des actions concrètes.

B______ et A______ ont formé appel auprès de la Cour de justice contre cette décision; la procédure est actuellement pendante.

B. a. Le 29 juin 2023, le Tribunal de protection a rendu la décision suivante (DTAE/4980/2023), adressées à B______ et A______: «Concerne : mineur D______, né le ______ 2007Mesdames, Compte tenu de la récente désignation d’un représentant de la communauté héréditaire de feu Monsieur E______, nous ne traiterons pas davantage votre requête en nomination d’un curateur de représentation au mineur susnommé, aux fins de le représenter dans la succession. En tant que de besoin, la présente vaut refus de dite nomination ».

C. a. Le 7 août 2023, B______ et A______ ont formé recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (ci-après: la Chambre de surveillance) contre cette décision, reçue le 6 juillet 2023, concluant à son annulation et à la nomination d’un curateur de représentation en faveur de D______ dans le cadre de la succession ouverte après le décès de son père, E______, les frais et dépens devant être mis à la charge du mineur. Subsidiairement, les recourantes ont conclu au renvoi de la cause au Tribunal de protection afin qu’il procède à la nomination du curateur.

Les recourantes ont notamment allégué que C______ s’était montrée hostile et ambiguë dans ses comportements à leur égard. Elle avait par ailleurs multiplié les agissements contraires à l’intérêt de son fils D______, notamment en prélevant indument plusieurs montants sur l’un des comptes du défunt. Une plainte pénale avait été déposée auprès du Ministère public. C______ avait en outre autorisé délibérément des tiers à s’immiscer dans les affaires de la succession, faisant ainsi obstacle au partage serein de celle-ci. La « survie financière » de C______, sans activité lucrative depuis de nombreuses années et qui avait vécu « aux crochets » de E______, dépendait désormais et exclusivement de l’héritage potentiel de son fils, qu’elle tentait d’ores et déjà de capter au détriment de celui-ci. Il convenait par conséquent de distinguer les intérêts du mineur de ceux de sa mère.

Les recourantes ont fait grief au Tribunal de protection d’avoir violé leur droit d’être entendues et de s’être rendu coupable de déni de justice, au motif qu’il ne leur avait pas communiqué la réponse à leur requête que le mineur D______, représenté par sa mère, avait déposée et qu’il avait rendu une décision ne contenant aucune motivation. En outre, C______ agissait manifestement dans son propre intérêt et non dans celui de son fils, de sorte qu’elle ne pouvait pas être considérée comme une interlocutrice objective et neutre, y compris à l’égard du représentant de la communauté héréditaire désigné par la justice. Pour cette raison également, la décision attaquée devait être annulée.

Les recourantes ont produit un chargé de pièces, soit des échanges de correspondances intervenus entre les mois de décembre 2022 et mai 2023, ainsi qu’une plainte pénale déposée le 6 juillet 2023 (pièces 1 à 18). Certaines de ces pièces figurent déjà dans la procédure de première instance, les recourantes n’ayant toutefois pas pris la peine de les distinguer des pièces nouvellement produites.

b. Le Tribunal de protection n’a pas souhaité reconsidérer sa décision.

c. Le mineur D______, représenté par sa mère, a conclu au rejet du recours, comme étant sans objet, subsidiairement infondé.

Il n’existait aucun conflit d’intérêts entre le mineur et sa mère, celle-ci n’ayant pas été mariée avec le défunt et la succession étant liquidée ab intestat. Le but des recourantes apparaissait chicanier et contrairement à ce qu’elles soutenaient, la décision attaquée était motivée, dès lors que la désignation d’un représentant de la communauté avait rendu sans objet la demande de nomination d’un curateur.

Des pièces nouvelles ont été produites, soit des courriers du représentant de l’hoirie adressés aux parties entre le 7 juillet et le 15 septembre 2023 (pièces 1 à 11), ainsi qu’un échange de correspondance intervenu entre ce même représentant et l’un des conseils des recourantes le 20 septembre 2023 (pièce 12).

d. La cause a été gardée à juger au terme de ces échanges.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (450 al. 1 CC; art.  53 al. 1 LaCC; art. 126 al. 1 let. b LOJ). Ont qualité pour recourir les personnes parties à la procédure (art. 450 al. 2 ch. 1 CC). Le délai de recours est de trente jours à compter de la notification de la décision (art. 450b al. 1 CC; art. 53 al. 2 LaCC applicable par renvoi de l'art. 314 al. 1 CC). Si le dernier jour est un samedi, un dimanche ou un jour férié reconnu par le droit fédéral ou le droit cantonal du siège du tribunal, le délai expire le premier jour ouvrable qui suit (art. 142 al. 3 CPC).

En l'espèce, le recours a été formé par des parties à procédure, dans le délai utile de trente jours et devant l'autorité compétente, il est donc recevable à la forme.

1.2 La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC). Elle établit les faits d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 al. 1 et 3 CC).

1.3 Les pièces nouvelles produites par les parties à l'appui de leurs écritures sont recevables, l'art. 53 LaCC ne prévoyant aucune limitation au dépôt en procédure de recours de pièces nouvelles.

2. Les recourantes font grief au Tribunal de protection de s’être rendu coupable de déni de justice et d’avoir violé leur droit d’être entendues.

2.1.1 Garanti aux art. 29 al. 2 Cst et 53 CPC, le droit d'être entendu comprend en particulier le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur sujet (ATF 135 II 286 consid. 5.1; 135 I 187 consid. 2.20; 129 II 497 consid. 2.2).

Le droit d'être entendu est une garantie de nature formelle, dont la violation entraîne l'annulation de la décision attaquée, sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2). Ce moyen doit être examiné avec un plein pouvoir d'examen (arrêt du Tribunal fédéral 5A_540/2013 du 3 décembre 2013 consid. 3.3.1; ATF 127 III 193 consid. 3).

Toutefois, le droit d'être entendu n'est pas une fin en soi. Il constitue un moyen d'éviter qu'une procédure judiciaire ne débouche sur un jugement vicié en raison de la violation du droit des parties de participer à la procédure. Lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1; arrêt du Tribunal fédéral 1C_229/2020 du 27 août 2020 consid. 2.1).

Par ailleurs, une violation du droit d'être entendu en instance inférieure est réparée, pour autant qu'elle ne soit pas d'une gravité particulière, lorsque l'intéressé a eu la faculté de se faire entendre en instance supérieure par une autorité disposant d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (ATF
130 II 530 consid. 7.3; 127 V 431 consid. 3d/aa; 126 V 130 consid. 2b). L'appelant ne peut alors pas se contenter de se plaindre de cette violation, mais doit exercer son droit d'être entendu (arrêt du Tribunal fédéral 5A_925/2015 du 4 mars 2016 consid. 2.3.3.2 non publié aux ATF
142 III 195). Pour le surplus, même en présence d'un vice grave, une réparation de la violation du droit d'être entendu peut également se justifier lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure, ce qui serait incompatible avec l'intérêt de la partie concernée à ce que sa cause soit tranchée dans un délai raisonnable (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1).

2.1.2 La jurisprudence a également déduit de l'art. 29 al. 2 Cst. le devoir pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Il n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, apparaissent pertinents (ATF 142 III 433 consid. 4.3.2;
141 IV 249 consid. 1.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_19/2020 du 18 mai 2020 consid. 6). Il n'y a violation du droit d'être entendu que si l'autorité n'a pas satisfait à son devoir minimum d'examiner et de traiter les problèmes pertinents (ATF 135 III 670 consid. 3.3.1; 133 III 235 consid. 5.2 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 5A_609/2012 du 12 septembre 2012 consid. 3.1). L'essentiel est que la décision indique clairement les faits qui sont établis et les déductions juridiques qui sont tirées de l'état de fait déterminant (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 135 II 145 consid. 8.2). En revanche, l'autorité se rend coupable d'un déni de justice formel si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 142 III 433 consid 4.3 et les références citées).

2.2.1 En l’espèce, il semble résulter de la procédure que l’écriture du mineur du 5 avril 2023 n’a pas été transmise aux recourantes, alors que tel aurait dû être le cas. Le contenu de cette écriture n’a toutefois eu aucune influence sur la décision du 29 juin 2023, objet de la présente procédure, de sorte que l’annulation de celle-ci et le renvoi de la cause au premier juge pour ce motif serait constitutif de formalisme excessif, ce d’autant plus que les recourantes, qui n’ont pas demandé à consulter le dossier, ont pu faire valoir tous leurs griefs devant l’autorité de seconde instance, laquelle revoit la cause en fait, en droit et sous l’angle de l’opportunité.

Ce premier grief est dès lors infondé.

2.2.2 Contrairement à ce que soutiennent les recourantes, la décision litigieuse contient une motivation, certes sommaire, mais néanmoins suffisante. Le Tribunal de protection a en effet refusé de nommer un curateur de représentation au mineur D______ au motif que la requête en ce sens était devenue sans objet du fait de la désignation, intervenue le 15 juin 2023, d’un représentant de la communauté héréditaire.

Ainsi, les recourantes, représentées par deux conseils, sont en mesure de comprendre la raison pour laquelle leur requête a été rejetée.

Au vu de ce qui précède, le premier juge ne s’est rendu coupable, à l’égard des recourantes, ni de déni de justice, ni de violation de leur droit d’être entendues.

Savoir si, conformément à ce qu’a retenu le Tribunal de protection, la désignation d’un représentant de la communauté héréditaire rend sans objet la requête de nomination d’un curateur de représentation en faveur du mineur D______ relève du fond; cette question fera l’objet d’un examen ci-après.

3. 3.1.1 Selon l'art. 602 al. 1 CC s'il y a plusieurs héritiers, tous les droits et obligations compris dans la succession restent indivis jusqu'au partage. Les héritiers sont propriétaires et disposent en commun des biens qui dépendent de la succession (art. 602 al. 2 CC). A la demande de l'un des héritiers, l'autorité compétente peut désigner un représentant de la communauté héréditaire jusqu'au moment du partage (art. 602 al. 3 CC).

L'autorité de nomination, à Genève le juge de paix (art. 3 al. 1 let. J LaCC), exerce la surveillance sur le représentant de la succession (art. 3 al. 2 LaCC) et arrête sa rémunération (Spahr, in Commentaire romand CC II, 2016, n. 68 ad art. 602 CC).

3.1.2 Les pouvoirs du représentant d'hoirie dépendent de la mission définie par l'autorité. Le représentant peut être désigné pour certains actes isolés sur lesquels les héritiers ne parviennent pas à s'entendre. L'autorité peut aussi donner au représentant un mandat général et lui confier toute l'administration de la succession, auquel cas son statut juridique se rapproche de celui de l'administrateur officiel de la succession, sans toutefois que ses fonctions ne portent sur le partage de la succession (arrêts du Tribunal fédéral 5A_416/2013 du 26 juillet 2013 consid. 3.1; 5P_83/2003 du 8 juillet 2003 consid. 1; Steinauer, Le droit des successions, 2ème éd., 2015, n. 1224).

Le représentant de l'hoirie indivise est nommé pour la communauté des héritiers, non comme le représentant et dans l'intérêt d'un unique héritier (arrêts du Tribunal fédéral 5A_781/2017 du 20 décembre 2017 consid. 2.3; 5A_241/2014 du 28 mai 2014 consid. 2.1). Il s'ensuit que l'instauration d'une mesure de représentation de la communauté héréditaire déploie ses effets pour tous les membres de l'hoirie (arrêts du Tribunal fédéral 5A_796/2014 du 3 mars 2015 consid. 5.2; 5D_133/2010 du 12 janvier 2011 consid. 1.4 in fine).

La représentation de la succession est une institution de droit privé sui generis. Le représentant de la succession agit comme un mandataire au sens des art 398 ss CO. Il est soumis aux règles du mandat quant à sa responsabilité et à son droit de mettre fin au mandat en tout temps. Il exerce une activité de droit privé. Le fait que le représentant soit désigné par l'autorité n'y change rien (Wolf, in Berner Kommentar ZGB, 2014, n. 154 et 165 ad art. 602 CC; Staufelberger/Keller Lüscher, in, Basler Kommentar ZGB II, 2019, n. 48 ad art. 602 CC; Spahr, op. cit., n. 77 et 85 ad art. 602 CC).

Il doit ainsi périodiquement renseigner les héritiers sur l'évolution de son activité. Il est tenu de rendre des comptes, conformément aux exigences de l'art. 400 CO et répond envers les héritiers de la bonne et fidèle exécution de sa tâche (Spahr, op. cit. n. 77 et 78 ad art. 602 CC; Staufelberger/Keller Lüscher, op.cit., n. 47-48 ad art. 602 CC et les références citées).

En revanche, la mission du représentant d'hoirie ne comprend pas la liquidation ni le partage d'une succession. Elle exclut également les actions propres des héritiers pour la succession (arrêt du Tribunal fédéral 5A_416/2013 du 26 juillet 2013 consid. 3.1 et 3.2; Steinauer, op. cit., n. 1241a; Spahr, op. cit. n. 7 ad art. 604 CC; Eigenmann/Landert, Actions successorales, n. 18).

3.1.3 En cas de décès de l’un des détenteurs de l’autorité parentale conjointe, l’autorité parentale revient au survivant (art. 297 al. 1 CC).

Les père et mère sont, dans les limites de leur autorité parentale, les représentants légaux de leurs enfants à l’égard des tiers (art. 304 al. 1 CC). Si les père et mère sont empêchés d’agir ou si, dans une affaire, leurs intérêts entrent en conflit avec ceux de l’enfant, l’autorité de protection de l’enfant nomme un curateur ou prend elle-même les mesures nécessaires (art. 306 al. 2 CC).

Les père et mère administrent les biens de l’enfant aussi longtemps qu’ils ont l’autorité parentale (art. 318 al. 1 CC). En cas de décès de l’un des parents, le parent survivant est tenu de remettre un inventaire des biens de l’enfant à l’autorité de protection de l’enfant (art. 318 al. 2 CC). Lorsque l’autorité de protection de l’enfant le juge opportun au vu du genre ou de l’importance des biens de l’enfant et de la situation personnelle des père et mère, elle ordonne l’établissement d’un inventaire ou la remise périodique de comptes et de rapports (art. 318 al. 3 CC).

Les père et mère peuvent utiliser les revenus des biens de l’enfant pour son entretien, son éducation et sa formation et, dans la mesure où cela est équitable, pour les besoins du ménage (art. 319 al. 1 CC).

Les versements en capital, dommages-intérêts et autres prestations semblables peuvent être utilisés par tranches pour l’entretien de l’enfant, autant que les besoins courants l’exigent (art. 320 al. 1 CC). Lorsque cela est nécessaire pour subvenir à l’entretien, à l’éducation ou à la formation de l’enfant, l’autorité de protection de l’enfant peut permettre aux père et mère de prélever sur les autres biens de l’enfant la contribution qu’elle fixera (art. 320 al. 2 CC).

Si une administration diligente n’est pas suffisamment assurée, l’autorité de protection de l’enfant prend les mesures nécessaires pour protéger les biens de l’enfant (art. 324 al. 1 CC). Elle peut, en particulier, donner des instructions concernant l’administration et, lorsque les comptes et le rapport périodiques ne suffisent pas, exiger une consignation ou des sûretés (art. 324 al. 2 CC).

S’il n’y a pas d’autre façon d’empêcher que les biens de l’enfant soient mis en péril, l’autorité de protection de l’enfant en confie l’administration à un curateur (art. 325 al. 1 CC). S’il est à craindre que les revenus des biens de l’enfant ou les montants prélevés sur ces biens ne soient pas utilisés conformément à la loi, l’autorité de protection de l’enfant peut également en confier l’administration à un curateur (art. 325 al. 3 CC).

Les père et mère répondent, de la même manière qu’un mandataire, de la restitution des biens de l’enfant (art. 327 al. 1 CC). Ils ne sont tenus à aucune indemnité pour les prélèvements qu’ils étaient en droit de faire pour l’enfant ou pour le ménage (art. 327 al. 3 CC).

3.2 Quand bien même la désignation d’un représentant de la communauté héréditaire n’est, en elle-même, pas incompatible avec l’instauration d’une curatelle de représentation en faveur d’un enfant mineur, cette dernière mesure n’apparaît pas nécessaire en l’espèce.

Il sera tout d’abord relevé que la mère du mineur D______ n’est pas héritière du défunt, avec lequel elle n’était pas mariée et qui n’a pas laissé de testament en sa faveur. Dès lors et dans le cadre de la succession de feu E______, les intérêts de C______ n’entrent pas en conflit avec ceux de son fils, qu’elle représente, conformément à l’art. 304 al. 1 CC.

Les recourantes, à bien les comprendre, font en réalité grief à C______ sinon de vouloir spolier le mineur D______ de sa part d’héritage, à tout le moins de vouloir profiter de celle-ci pour ses propres besoins, de sorte que la désignation d’un curateur à l’enfant serait nécessaire afin de sauvegarder ses intérêts.

D’une part et conformément à l’art. 602 CC, tous les droits compris dans la succession demeurent indivis jusqu’au partage; les héritiers sont propriétaires et disposent en commun des biens qui en dépendent. Dès lors, le risque que C______ retire de l’argent sur les comptes du défunt pour ses propres besoins ou dispose d’autres biens de la succession sans l’accord des recourantes et au détriment des intérêts de son propre fils est désormais nul.

D’autre part, la Justice de paix a désigné, le 15 juin 2023, Me P______ aux fonctions de représentant de la communauté héréditaire de E______, avec pouvoir de représenter la succession, de l’administrer et de préparer le partage. Il résulte des pièces produites devant la Chambre de surveillance par D______ que le représentant de l’hoirie a débuté son activité sans attendre le résultat de l’appel pendant devant la Cour de justice contre sa nomination. En l’état, la succession est par conséquent administrée par un représentant neutre, lequel agit dans l’intérêt de l’ensemble des héritiers.

Les craintes exprimées par les recourantes que C______ puisse porter atteinte aux intérêts financiers de son fils ne sont ainsi pas fondées pour la double raison exposée ci-dessus.

Il sera en outre rappelé aux recourantes que selon le système voulu par le législateur, les parents, détenteurs de l’autorité parentale, représentent d’une part leurs enfants mineurs et administrent d’autre part leurs biens, avec la possibilité de les utiliser dans une certaine mesure pour leur l’entretien, leur éducation ou leur formation, voire, dans certains cas, pour les besoins du ménage. Le législateur a par ailleurs prévu certains garde-fous visant à s’assurer que les parents administrent les biens de leurs enfants de façon correcte et dans l’intérêt de ces derniers (inventaire, remise périodique de comptes et de rapports, instructions données par l’autorité de protection). La nomination d’un curateur chargé d’administrer les biens d’un mineur représente dès lors l’ultima ratio, lorsqu’il n’y a pas d’autre façon d’empêcher que les biens de l’enfant soient mis en péril. En l’espèce, l’enfant D______ n’a pas encore reçu sa part d’héritage de sorte que les craintes exprimées par les recourantes qu’elle n’utilise les biens de son fils dans son propre intérêt apparaissent pour le moins prématurées.

Infondé, le recours sera rejeté.

4. La procédure portant sur des mesures de protection d'un mineur, elle est gratuite (art. 81 al. 1 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ et B______ contre la décision DTAE/4980/2023 rendue le 29 juin 2023 par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant dans la cause C/24631/2014.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.