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Décisions | Chambre de surveillance

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C/13317/2023

DAS/268/2023 du 31.10.2023 ( CLAH ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/13317/2023 DAS/268/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 31 OCTOBRE 2023

 

Requête (C/13317/2023) en retour de l'enfant A______, née le ______ 2020, formée en date du 28 juin 2023 par Monsieur B______, domicilié ______ (France), représenté par Me Vanessa GREEN, avocate.

* * * * *

Arrêt communiqué par plis recommandés du greffier
du 2 novembre 2023 à :

- Monsieur B______

c/o Me Vanessa GREEN, avocate

Rue Ferdinand-Hodler 9, 1207 Genève.

- Madame C______
c/o Me Guillaume CHOFFAT, avocat
Rue Marignac 9, Case postale 324, 1211 Genève 12.

- SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Route des Jeunes 1E, case postale 75,1211 Genève 8.

- AUTORITÉ CENTRALE FÉDÉRALE
Office fédéral de la justice
Bundesrain 20, 3003 Berne.


EN FAIT

A. a) B______, né le ______ 1990 à D______ (France), de nationalité française, et C______, née le ______ 1989 à E______ [NE], de nationalité suisse, sont les parents non mariés de l'enfant A______, née le ______ 2020 à F______ (France).

B______ a reconnu l'enfant à sa naissance.

b) C______ a vécu à E______ jusqu'au 27 septembre 2019, date à laquelle, enceinte, elle a rejoint B______ en France et s'est installée avec lui à G______ (France), puis à H______ (France).

c) C______ et B______ se sont séparés le 24 avril 2022. Après avoir vécu chez la sœur de ce dernier à I______ (France), C______ a pris en location un appartement à H______, qu’elle a résilié par courrier du 7 février 2023 pour le 31 mars 2023. Elle indique avoir toujours travaillé en France jusqu’en février 2023, mois durant lequel elle a démissionné de son emploi.

B______ est responsable d’agence auprès de la société J______ en France depuis 2017. La mineure A______ a fréquenté la Crèche collective K______ à G______ jusqu’à fin mars 2023, période à laquelle C______ a informé oralement la responsable de celle-ci de l’absence de la mineure pour une période de vacances.

d) La garde de la mineure A______ n'a fait l'objet d'aucune décision judiciaire, suite à la séparation de ses parents.

e) Le 1er avril 2023, C______ est venue à Genève, où résident ses parents, avec la mineure A______.

B______ expose que C______ lui avait expliqué qu'elle voulait passer des vacances en famille avec la mineure pour une période de 7 à 10 jours, ce pour quoi il avait donné son accord.

Le 14 avril 2023, elle lui a adressé un message lui indiquant qu'elle avait décidé de prolonger son séjour à Genève jusqu’au vendredi suivant, ce à quoi il s’est immédiatement opposé, expliquant être déjà séparé de sa fille depuis deux semaines, ce qui n’était pas prévu initialement, et a informé qu’il se rendrait le lendemain à Genève pour rechercher la mineure.

f) Le 15 avril 2023, B______ est venu à Genève mais n’a pas pu récupérer l’enfant. Il allègue que C______ s’est cependant engagée auprès du Commissariat de police de l’aéroport, qu’il avait contacté, de lui remettre la mineure le 21 avril 2023.

g) Par courriel du 20 avril 2023, C______ a informé B______ qu'elle ne rentrerait pas en France avec A______, mais qu'elle s'installait à Genève avec l'enfant. Elle lui demandait de lui adresser une autorisation écrite afin d'entreprendre les démarches administratives pour la domiciliation de la mineure à Genève. B______ s'y est opposé, par retour de courriel.

h) B______ a encore adressé deux courriers datés du 20 avril 2023 à C______ pour lui signifier qu'il s'opposait fermement à tout déplacement de la mineure A______ en Suisse. Il réclamait son retour en France afin de pouvoir exercer la garde partagée qu’ils avaient mise en place suite à leur séparation. Il a également déposé le même jour une plainte pénale auprès de la police française pour non-présentation d'enfant et enlèvement international de mineur.

i) le 27 avril 2023, C______ a déposé une requête au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : le Tribunal de protection) en fixation des droits parentaux, assorties de mesures superpovisionnelles et provisionnelles. Elle sollicitait l’attribution en sa faveur de l’autorité parentale et de la garde de la mineure, avec réserve d’un droit de visite médiatisé en faveur du père. Elle expliquait que les droits parentaux n’avaient jamais été fixés, qu’elle craignait que le père n’emmène l’enfant au Cap-Vert, pays dont il était également ressortissant et dans lequel résidaient ses parents une partie de l’année, tout en exposant qu’elle avait été contrainte plusieurs fois de changer de logement au gré de la volonté du père, de sorte qu’elle avait trouvé refuge avec sa fille auprès de ses propres parents à Genève.

j) Le 1er mai 2023, C______ a adressé un courrier au Tribunal de protection afin de lui signaler que le dimanche 30 avril 2023, alors qu’elle se rendait au parc avec sa fille, une voiture s’était subitement arrêtée à sa hauteur. B______ en était surgi et lui avait arraché l’enfant des bras, en la faisant tomber, avant de s’enfuir avec leur fille dans la voiture qui était repartie en trombe. Elle avait appelé la police, laquelle avait pu intercepter rapidement le véhicule. Elle avait déposé une plainte pénale contre le père pour tentative/délit manqué d’enlèvement de mineur et pour voies de faits. Elle exposait que B______ et elle-même s’étaient engagés devant le Commissaire de police à ce que l’enfant reste auprès de sa mère jusqu’à l’issue de la procédure en attribution des droits parentaux. Elle sollicitait que le Tribunal de protection statue sans délai sur sa requête de mesures superprovisionnelles.

C______ a également déposé une plainte pénale à l’encontre de B______ pour ces faits.

k) Suite à l’interpellation du Tribunal de protection sur le domicile de la mineure, C______ a exposé, par courrier du 2 mai 2023, que l’enfant n’était pas domiciliée à Genève, suite au refus du père de signer l’autorisation nécessaire, celui-ci s’opposant fermement à ce que leur fille reste à Genève.

l) Par ordonnance du 3 mai 2023 (DTAE/3421/2023), le Tribunal de protection, statuant sur mesures superprovisionnelles, admettant sa compétence compte tenu de l’urgence de la situation, a maintenu la garde de la mineure auprès de sa mère, réservé au père un droit de visite avec la mineure à raison d’une heure par quinzaine au Point rencontre à Genève, selon modalité un pour un, donné instruction à C______ et B______ de ne pas quitter le territoire suisse avec la mineure, ordonné l’inscription dans le registre de police informatisé RIPOL (N-SIS), instauré une curatelle d’organisation et de surveillance des relations personnelles, désigné deux intervenantes en protection de l’enfant en qualité de curatrices de la mineure, laissé les frais à la charge de l’Etat et, sur le fond, a suspendu la procédure, jusqu’à décision des autorités compétentes pour statuer au fond sur les droits parentaux concernant la mineure ou pour ordonner le retour de celle-ci, mais au plus tard jusqu'au 6 juillet 2023.

m) Le 3 mai 2023, B______ a saisi le Juge aux affaires familiales de M______ (France) d’une requête en fixation des droits parentaux sur la mineure, concluant, en substance, au maintien de l’autorité parentale conjointe et à l’instauration d’un droit de garde partagée, dans l’hypothèse où la mère reviendrait habiter en France ou, si elle devait rester en Suisse, à l’octroi de la garde exclusive de l’enfant en sa faveur à lui, avec fixation d’un droit de visite à la mère.

n) Par courrier du 13 juin 2023, l’Office fédéral de la justice (OFJ) a invité, suite à l'accord de B______, C______ à une tentative de médiation. Il informait les parents de la mineure que, dans l’attente de la fin de la procédure (soit par une médiation ou une décision judiciaire), les autorités suisses ne pourraient statuer sur le fond du droit de garde ou du droit de déterminer le lieu de résidence de la mineure (art. 16 CLaH80), ce dont il informait le Tribunal de protection.

o) Le 25 mai 2023, le Juge aux affaires familiales de M______ a informé les parties du "désistement de l’instance", compte tenu de l’assignation irrégulière de C______.

p) Le 2 août 2023, B______ a déposé une nouvelle requête en fixation des droits parentaux auprès du Juge aux affaires familiales de M______.

B. a) Par acte du 28 juin 2023, B______, domicilié allée 1______ no. ______, [code postal] H______ (France), a expédié au greffe de la Cour une requête en retour de l'enfant A______, au sens de la Convention de la Haye du 15 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants et la Loi fédérale sur l'enlèvement international d'enfants et les Conventions de La Haye sur la protection des enfants et des adultes (LF-EEA), à l'encontre de C______, domiciliée route 2______ no. ______, [code postal] L______ (Genève).

Il a conclu au retour immédiat de l'enfant A______ auprès de lui en France, et en cas d'inexécution, à ce qu'il soit ordonné au Service de protection des mineurs (ci-après : SPMi) de ramener l'enfant A______ en France et de la placer auprès de son père, cas échéant avec le concours des agents de la force publique, sous suite de frais et dépens.

Il exposait que l'enfant A______, qui avait sa résidence habituelle à H______ en France avant le déplacement illicite, n'y était pas revenue à l'issue des vacances passées avec sa mère à Genève en avril 2023, que les parents exerçaient l'autorité parentale en commun et que la mère, qui avait enlevé l'enfant, s'était installée en Suisse avec la mineure, sans son consentement.

Il alléguait également que, suite à leur séparation, les parents avaient mis en place une garde partagée sur la mineure, à raison d'un jour sur deux durant la semaine, les week-ends étant répartis en alternance entre eux.

b) Selon l'attestation établie le 17 juillet 2023, le Département de l'entraide, du droit international privé et européen du Ministère de la Justice de France a indiqué que B______ et C______, parents non mariés de l’enfant A______, exerçaient conjointement, en vertu du droit français, l'autorité parentale sur leur fille, laquelle comprenait le droit de déterminer le lieu de résidence de leur enfant, que leur séparation était sans incidence sur les règles de dévolution de l'autorité parentale, qu'aucune décision judiciaire privant le père de l'autorité parentale n'avait été rendue, que le père n'avait pas consenti au départ de sa fille en Suisse, de sorte que le déplacement de la mineure en Suisse par sa mère apparaissait illicite au sens de l'art. 3 CLaH80, au regard des informations qui lui avaient été transmises par le père et sans préjuger de la décision du juge saisi de la demande de retour.

c) Dans sa réponse du 31 juillet 2023, C______ a conclu, préalablement, à la suspension de la procédure dans l'attente de l'issue de la médiation qui allait débuter entre les parties par le biais de l'Office fédéral de la Justice (OFJ), à ce que la Cour ordonne au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant de désigner un curateur de représentation (art. 299 CC) des intérêts de la mineure A______ dans la procédure en retour de la mineure et de la procédure C/3______/2023 pendante devant le Tribunal de protection, ordonne à B______ de produire tout document attestant qu'il serait effectivement détenteur d'une autorité parentale conjointe sur l'enfant A______, ordonne en tant que de besoin une expertise de droit français aux fins de déterminer le contenu de l’autorité parentale pour les parents non mariés, confie au SPMi la mission de dresser un rapport d'évaluation sociale dans le but de déterminer ce que le bien de l'enfant commande dans les circonstances du cas d'espèce et faire toute proposition quant à la répartition des droits parentaux sur l'enfant, au mieux des intérêts de celle-ci et ordonne une expertise du groupe familial à cette fin, procède à l'audition des parties, ordonne l'apport de la procédure du Tribunal de protection référencée C/3______/2023, ainsi que la procédure pénale ouverte à la suite du dépôt de la plainte pénale de C______ en date du 30 avril 2023 et ordonne à la Police cantonale genevoise ou au Ministère public de Genève de produire une copie de la plainte pénale déposée par C______ en lien avec les événements du 30 avril 2023.

Principalement, elle a conclu au rejet de la requête en retour immédiat de l'enfant A______ auprès de son père, au rejet de la conclusion alternative en placement de l'enfant auprès de son père en France par le SPMi et au déboutement de B______ des autres conclusions de sa requête du 28 juin 2023. Cela fait, et statuant à nouveau, elle a conclu à ce que la Cour fixe la résidence habituelle de la mineure A______ au domicile de sa mère, sise route 2______ no. ______, [code postal] L______ (Genève), instaure une autorité parentale conjointe en faveur des parties sur leur fille A______, attribue à C______ la garde exclusive sur la mineure A______, réserve à B______ un droit de visite sur la mineure qui sera fixé à dire de justice et réserve à C______ la faculté de déposer une requête au Tribunal civil de première instance en fixation de la contribution d'entretien due par B______ en faveur de la mineure A______.

Subsidiairement, elle a conclu à ce que la Cour ordonne au Tribunal de protection la reprise de la procédure C/3______/2023 en fixation des droits parentaux sur la mineure A______ et à ce qu'il désigne un curateur de représentation (art. 299 CPC) des intérêts de la mineure A______ dans la procédure en retour de la mineure et la procédure C/3______/2023.

En tout état, les frais de la procédure devaient être mis à la charge des parties par moitié chacune, aucun dépens ne devant être alloué et B______ devant être débouté de toutes autres conclusions.

C______ exposait les raisons pour lesquelles la garde de la mineure devait lui être confiée, relevant en substance qu’elle s’en était toujours occupée depuis sa naissance, le père n’ayant fait ménage commun que peu de temps avec elles, dès lors qu’il continuait à habiter avec ses parents malgré leur domicile commun, et aucune garde partagée n’ayant été mise en place après leur séparation, contrairement à ce qu’il prétendait, les droits parentaux n’ayant jamais été fixés judiciairement. L’enfant avait besoin de la présence de sa mère, indispensable à son développement et son équilibre. Elle était inscrite à la crèche à Genève et bénéficiait d’une assurance-maladie suisse. Le père disposait d’un droit de visite. Les perspectives de l’intimée de retrouver une vie plus équilibrée à Genève étaient meilleures, ce qui était dans l’intérêt de la mineure.

Si certes, sur le fond, une application stricte de la CLaH80 voudrait que l’enfant soit renvoyée en France, pour autant qu’un droit de garde au sens de l’art. 3 CLaH80 soit violé, ce qui était contesté, l’intérêt de l’enfant commandait qu’elle reste à Genève. La mineure était trop jeune pour avoir tissé des liens étroits avec la France ; la mère et l’enfant étaient de nationalité suisse, pays dans lequel la mère avait toujours vécu et n’avait décidé de quitter que lorsqu’elle avait découvert qu’elle était enceinte du requérant, le projet familial qu’elle souhaitait n’ayant cependant jamais abouti. Elle s’était retrouvée prisonnière d’une relation toxique, néfaste au bon développement de la mineure. Compte tenu du jeune âge de l’enfant et de l’organisation mise en place depuis son arrivée à Genève (crèche, assurance-maladie), il pouvait être admis qu’une résidence habituelle s’y était créée et il se justifiait pour cette raison de ne pas renvoyer l’enfant en France.

C______ invoquait par ailleurs des exceptions au retour, alléguant qu’il ne pouvait être admis que le père aurait exercé de manière effective son droit de garde sur l’enfant (art. 13 al. 1 let a CLaH80). De même, l’exception de l’art. 13 al. 1 let. b CLaH80 était réalisée, compte tenu du jeune âge de l’enfant et du fait que son renvoi en France la priverait de son parent référent, le père n’offrant pas les garanties suffisantes pour s’occuper de l’enfant.

d) Compte tenu de la médiation annoncée, la Cour a sollicité des parties qu’elles se déterminent sur la suspension de la procédure sollicitée par C______.

e) Dans ses déterminations du 9 août 2023, C______ a indiqué que les médiatrices, qui avaient effectué une première séance en juillet 2023, l’avaient informée que le requérant ne souhaitait plus cette médiation, les positions des parents étant trop opposées. Elle persistait ainsi dans ses conclusions au fond.

B______ a, quant à lui, conclu le 17 août 2023 au rejet de la demande de suspension de la procédure, la médiation ayant pris fin, et a persisté dans toutes ses conclusions sur le fond.

f) Le juge délégué de la Chambre civile a tenu une audience le 20 septembre 2023.

Il a tenté une conciliation entre les parties, qui n'a pas abouti.

B______ a persisté dans sa requête en retour de l'enfant.

C______ a persisté dans ses conclusions en rejet de cette demande.

B______ a indiqué que sa fille, née en France le ______ 2020, avait toujours habité ce pays. Il avait vécu avec la mère de l’enfant, qui était arrivée en France en septembre 2019, durant deux ans et demi dans un appartement, puis ils avaient intégré le domicile de ses parents, ceux-ci habitant au Cap-Vert et ne revenant que tous les cinq à six mois en France. A______ avait débuté la crèche en France en septembre 2020. Il avait mis fin à la relation avec la mère de sa fille en avril 2022, en raison de son comportement instable et de ses mensonges. Suite à la rupture, elle était allée vivre chez sa sœur durant plusieurs mois puis avait trouvé un appartement. Ils avaient mis en place une garde alternée sur leur fille, chacun la gardant un jour sur deux et un week-end sur deux. Un calendrier avait été établi pour fixer cette garde et s’il y avait des changements, ils se mettaient d’accord. La mère de l’enfant ne l’avait jamais informé de son souhait de venir habiter à Genève. Elle lui avait simplement demandé si elle pouvait se rendre à Genève avec l’enfant deux semaines en avril 2023 et il avait donné son accord. Elle lui avait ensuite demandé de prolonger ses vacances, ce qu’il avait refusé. De même, il avait immédiatement refusé lorsqu’elle lui avait dit qu’elle voulait rester à Genève avec l’enfant. Il avait déposé plainte pénale en France.

C______ a précisé qu'elle avait rejoint B______ alors qu’elle était enceinte. Ils avaient loué un appartement, mais le père de l’enfant n’habitait pas en permanence avec elles ; il était souvent chez ses parents où il dormait assez régulièrement. Elle pensait vivre une vie de famille, ce qui n’avait pas été le cas. B______ avait ensuite résilié unilatéralement le bail et ils étaient allés vivre chez les parents de celui-ci, qui étaient présents lors de leur emménagement, et étaient restés six mois avant de partir au Cap-Vert. En avril 2022, B______ l’avait mise à la porte violemment, alors qu’elle revenait d’une soirée ; il avait jeté ses affaires dehors et elle était allée vivre quelques temps chez la sœur de celui-ci avec l’enfant. Ils ne s’étaient jamais mis d’accord sur une garde partagée. B______ venait chez sa sœur comme il le souhaitait et voyait à ce moment-là leur fille ; il la prenait avec lui, allait manger ensemble et la redéposait. Sa sœur avait ensuite proposé que l’enfant puisse dormir chez son père. Elle avait été d’accord, pour autant qu’une organisation soit trouvée. Elle avait elle-même proposé un calendrier de prise en charge sur deux mois : chacun des parents devait prendre l’enfant un jour sur deux et un week-end sur deux mais ce calendrier n’avait toutefois jamais été respecté par le père de l’enfant, notamment lors de son week-end de garde. Il devait normalement prendre l’enfant le vendredi soir et la déposer le lundi matin directement à la crèche ; elle préparait sa fille mais il ne venait pas malgré les nombreux messages qu’elle lui envoyait ; finalement, il passait le samedi après-midi prendre l’enfant et la ramenait le lundi matin à la crèche. Elle avait établi un calendrier de prise en charge pour les mois de décembre 2022 et janvier 2023. Ce calendrier était destiné à être pérenne s’il fonctionnait, mais il n’avait pas fonctionné. Elle n’avait pas fait de nouveau calendrier pour la suite de l’année 2023. Elle avait parlé dès janvier 2023 à B______ de son intention de venir vivre à Genève au mois de juillet 2023, dès lors qu’elle n’avait pas d’attaches en France. Il était d’accord. En février/mars 2023, elle lui avait indiqué que, pour des raisons administratives, elle souhaitait partir plus tôt. B______ avait refusé puisque la date convenue était juillet 2023. Il lui avait proposé de partir seule et de venir chercher l’enfant ensuite, ce qu’elle avait refusé. Elle avait résilié son bail et son contrat de travail. Elle savait que B______ n’était pas d’accord qu’elle parte avec l’enfant mais elle était partie quand même. Sur remarques de la Cour, elle a indiqué qu’elle avait conscience que ce qu’elle exposait ne ressortait pas de son mémoire-réponse mais elle avait vécu de nombreuses choses qu’elle n’avait pas précisées. Elle s’opposait au retour de l’enfant en France mais si ce retour devait être ordonné elle s’y conformerait et retournerait avec sa fille en France.

Les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions respectives, la citée ne contestant cependant plus l'autorité parentale conjointe sur la mineure, ni le contenu de celle-ci, compte tenu de la teneur de l'attestation établie par le Ministère de la Justice française.

Sur quoi la Cour a gardé la cause à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Selon l'art. 7 de la loi fédérale sur l'enlèvement international d'enfant et les conventions de La Haye sur la protection des enfants et des adultes (LF-EEA, RS 211.222.32), le Tribunal supérieur du canton où l'enfant résidait au moment du dépôt de la demande connaît en instance unique des demandes portant sur le retour d'enfant.

A Genève, le Tribunal supérieur du canton est la Cour de justice (art. 120 al. 1 LOJ).

1.2 Dans la mesure où l'enfant se trouve sur le territoire genevois depuis le 1er avril 2023, la requête déposée par-devant la Cour est recevable.

2. Le tribunal statue selon une procédure sommaire (art. 8 al. 2 LF‑EEA).

3. D'emblée les conclusions au fond formées par la citée concernant l'attribution des droits parentaux sur la mineure seront déclarées irrecevables, la Cour n'étant pas compétente pour en connaître. Il en ira de même des conclusions préalables en établissement d'un rapport d'évaluation sociale et d'une expertise familiale afin de préaviser cette question.

Les requêtes préalables formées par la citée en apport des procédures pendantes devant le Tribunal de protection ou le Ministère public seront rejetées, celles-ci n'étant pas de nature à pouvoir influer le résultat de la présente procédure. La requête d'expertise en vue de déterminer le droit français applicable le sera également; en effet, outre le fait que la Cour applique le droit étranger d'office, la citée ne conteste plus l'autorité parentale conjointe sur la mineure, ni le contenu de la notion d'autorité parentale française. La requête de suspension de la procédure n'est plus sollicitée par la citée, compte tenu de l'échec de la tentative de médiation, et est donc devenue sans objet. La désignation d'un curateur de représentation de l'enfant dans la procédure de retour n'est, quant à elle, pas nécessaire, compte tenu du jeune âge de la mineure, la cause étant par ailleurs en état d'être jugée.

4. 4.1 La France et la Suisse ont ratifié la Convention sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants conclue à La Haye le 25 octobre 1980 (CLaH80, RS 0.211.230.02).

Elle s'applique à tout enfant qui avait sa résidence habituelle dans un Etat contractant immédiatement avant l'atteinte aux droits de garde ou de visite (art. 4 CLaH80).

La notion de résidence habituelle, qui n'est pas définie par la CLaH80, doit être déterminée de manière autonome.

Selon la définition qu'en donne en règle générale la jurisprudence, la résidence habituelle est basée sur une situation de fait et implique la présence physique dans un lieu donné; la résidence habituelle de l'enfant se détermine ainsi d'après le centre effectif de sa propre vie et de ses attaches (ATF 110 II 119 consid. 3; arrêts du Tribunal fédéral 5A_933/2020 du 14 avril 2021 consid. 1.1 et les références; 5A_846/2018 du 6 novembre 2018 consid. 4). En conséquence, outre la présence physique de l'enfant, doivent être retenus d'autres facteurs susceptibles de faire apparaître que cette présence n'a nullement un caractère temporaire ou occasionnel et que la résidence de l'enfant traduit une certaine intégration dans un environnement social et familial; sont notamment déterminants la durée, la régularité, les conditions et les raisons du séjour sur le territoire et du déménagement de la famille, la nationalité de l'enfant, le lieu et les conditions de scolarisation, les connaissances linguistiques ainsi que les rapports familiaux et sociaux de l'enfant (arrêt du Tribunal fédéral 5A_933/2020 précité ibid. et les références). La résidence habituelle doit être définie pour chaque personne séparément; cependant celle d'un enfant coïncide le plus souvent avec le centre de vie d'un des parents, les relations familiales du très jeune enfant avec le parent en ayant la charge étant en règle générale déterminantes (ATF 129 III 288 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 933/2020 précité ibid. et les références). Un séjour de six mois crée en principe une résidence habituelle, mais celle-ci peut exister également sitôt après le changement du lieu de séjour, si, en raison d'autres facteurs, elle est destinée à être durable et à remplacer le précédent centre d'intérêts (arrêt du Tribunal fédéral 5A_329/2022 du 2 novembre 2022 et les références citées).

4.2 L'enfant A______ résidait en France avant d'être déplacée en Suisse, de sorte qu'elle y avait sa résidence habituelle et que la Convention est ainsi applicable au cas d'espèce, ce qui n'est pas contesté par la citée. Celle-ci ne peut cependant être suivie lorsqu'elle soutient que l'enfant aurait créé une résidence en Suisse, l'écoulement du temps entre le déplacement illicite et le dépôt de la requête de retour n'étant que de trois mois et le requérant ayant manifesté son désaccord à l'installation de l'enfant à Genève dès que la citée a formulé l'intention de ne pas la ramener en France, soit dans les jours ayant suivi son départ. Le simple fait que la citée ait inscrit l'enfant dans une crèche genevoise et ait souscrit une assurance-maladie suisse en faveur de cette dernière n'est pas déterminant, la citée ne pouvant tirer aucun avantage de la situation qu'elle a elle-même créée.

5. Le requérant sollicite le retour de la mineure auprès de lui en France, tandis que la citée s'y oppose.

5.1.1 L'autorité judiciaire ou administrative de l'Etat contractant où se trouve l'enfant ordonne le retour immédiat de l'enfant lorsque ce dernier a été déplacé ou retenu illicitement au sens de l'art. 3 et qu'une période de moins d'un an s'est écoulée à partir du déplacement ou du non-retour au moment de l'introduction de la demande (art. 12 al. 1 CLaH80).

Le déplacement ou le non-retour d'un enfant est considéré comme illicite lorsqu'il a lieu en violation d'un droit de garde attribué à une personne, seul ou conjointement, par le droit de l'Etat dans lequel l'enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non-retour et que ce droit était exercé de façon effective seul ou conjointement, au moment du déplacement ou du non-retour, ou l'eût été si de tels événements n'étaient survenus (art. 3 al. 1 let. a et b CLaH80)

Le droit de garde comprend, au sens de cette convention, le droit portant sur les soins de la personne de l'enfant, et en particulier celui de décider de son lieu de résidence (art. 5 let. a CLaH80). Il peut notamment résulter d'une attribution de plein droit, d'une décision judiciaire ou administrative ou d'un accord en vigueur selon le droit de cet Etat (art. 3 al. 2 CLaH80). Pour déterminer le ou les parents titulaires du droit de garde, qui comprend en particulier celui de décider du lieu de résidence de l'enfant (art. 5 let. a CLaH80), il y a lieu de se référer à l'ordre juridique de l'Etat de la résidence habituelle de l'enfant immédiatement avant le déplacement. Ce moment est également déterminant pour juger de l'illicéité du déplacement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_884/2013 c. 4.2.1 et réf. cit.).

5.1.2 En droit français, les père et mère exercent en commun l'autorité parentale. Lorsque la filiation est établie à l'égard de l'un d'entre eux plus d'un an après la naissance de l'enfant dont la filiation est déjà établie à l'égard de l'autre, celui-ci reste seul investi de l'exercice de l'autorité parentale (art. 372-1 du Code civil français, ci-après: CCF). La séparation des parents est sans incidence sur les règles de dévolution de l'exercice de l'autorité parentale (art. 372.2 CCF).

L'exercice de l'autorité parentale comporte la faculté de décider du logement de l'enfant (art. 372-3 CCF). Tout changement de résidence de l'un des parents, dès lors qu'il modifie les modalités d'exercice de l'autorité parentale, doit faire l'objet d'une information préalable et en temps utile de l'autre parent. En cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales qui statue selon ce qu'exige l'intérêt de l'enfant. Le juge répartit les frais de déplacement et ajuste en conséquence le montant de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant (art. 373-2 al. 4 CCF).

5.2.1 En l'espèce, les parties ont habité ensemble avec leur fille à H______ (France), dès la naissance de celle-ci et ce, jusqu'à leur séparation en avril 2022, sans qu'il soit déterminant de savoir si le requérant passait du temps, voire des nuits, chez ses propres parents, comme le plaide avec insistance la citée. Depuis cette dernière date, les parties ont vécu séparément toujours dans cette même commune française ou à proximité immédiate. Le requérant a reconnu sa fille à la naissance de celle-ci en ______ 2020 et aucune décision judiciaire ne l'a privé de l'autorité parentale depuis lors. Les parties détiennent ainsi en commun l'autorité parentale, qui comprend le droit de décider du lieu de résidence de l'enfant, en vertu du droit français applicable au regard du domicile français de l'enfant depuis sa naissance jusqu'à son déplacement en Suisse, le 1er avril 2023, comme l'atteste par ailleurs le courrier du Ministère de la Justice français du 17 juillet 2023, et ce indépendamment du droit de garde exercé par le requérant sur la mineure avant son déplacement, examiné ci-dessous sous 5.2.2.

5.2.2 En avril 2023, la citée a quitté le logement qu’elle occupait en France pour s'installer à Genève avec la mineure, sans que le requérant n'ait donné son accord à ce changement de résidence, ce qu'elle reconnaît.

Contrairement à ce que soutient la citée, le fait que le requérant n’ait pas toujours vécu avec elle et l’enfant pendant leur concubinage, ou qu’il n'ait pas toujours respecté l’organisation mise en place dans la prise en charge de la mineure après leur séparation, ce qu'il conteste, ne conduit pas à retenir qu'il a renoncé à exercer son droit de garde au sens de l'art 3 al. 1 let. b CLaH80. Il ressort au contraire de l’interrogatoire de la citée que, contrairement à ce qu’elle a allégué dans ses écritures, une garde partagée avait été convenue entre les parents, comme l’a toujours soutenu le père, à raison d’un jour sur deux et d’un week-end sur deux. Le fait que le calendrier, qu'elle avait elle-même établi, ait subi des modifications le plus souvent à la demande du père, n’est pas relevant. La citée a exposé en audience que le père prenait l’enfant durant ses week-ends de prise en charge, à tout le moins dès le samedi après-midi et ce, jusqu’au lundi matin, de sorte qu’il exerçait pleinement ses droits parentaux sur l’enfant. Elle n'a par ailleurs pas soutenu qu'il ne la prenait pas en charge un jour sur deux durant la semaine, comme convenu entre eux. Les droits parentaux du requérant étaient donc exercés de manière effective avant le déplacement, sans qu'il n'y ait jamais renoncé. En témoignent également tous les messages et courriers du requérant indiquant qu’il souhaitait voir sa fille, la plainte pénale qu’il a déposée en France pour non présentation d’enfant et enlèvement international de mineur le 20 avril 2023, les requêtes des 3 mai et 2 août 2023 en fixation des droits parentaux sur la mineure formées en France, ainsi que les autres démarches qu'il a entreprises devant les autorités françaises, puis en vue du retour de l'enfant en Suisse, lesquelles établissent sa volonté de continuer à exercer ses droits parentaux sur sa fille.

L'on ne saurait par ailleurs suivre la citée lorsqu'elle explique qu'elle a été obligée de fuir la France pour trouver refuge à Genève chez ses parents, en raison du comportement du requérant à son égard, lequel imposait sa volonté, sans tenir compte de l’intérêt de la mineure. En premier lieu, la citée, qui disposait d’un logement et d’un travail, tandis que la mineure fréquentait la crèche, était indépendante et ne se trouvait ainsi pas dans une situation contraignante. En second lieu, si elle éprouvait des difficultés avec le père de l'enfant dans la prise en charge de cette dernière, ou souhaitait revenir habiter en Suisse avec la mineure, elle devait, dans un cas, comme dans l'autre, saisir les tribunaux compétents de son pays de domicile, pour fixer les droits parentaux sur la mineure et/ou solliciter son changement de lieu de résidence, ce qu'elle n'a pas fait.

Il s'ensuit que le déplacement de la mineure de France en Suisse, effectué sans l'accord des deux parents détenteurs de l'autorité parentale, et alors que celle-ci était effectivement exercée en commun, est illicite au sens de l'art. 3 al. 1 CLaH80.

5.2.3 Enfin, le requérant a déposé sa demande en retour de l'enfant le 28 juin 2023, soit moins d'une année après le déplacement de la mineure en Suisse le 1er avril 2023, de sorte que le retour de la mineure doit en principe être ordonné, sous réserve des exceptions prévues par l'art. 13 CLaH80 examinées ci-après.

6. La citée se prévaut de l'exception prévue par l'art. 13 CLaH80, arguant de ce que le retour de sa fille la placerait dans une situation intolérable.

6.1.1 Lorsqu'un enfant a été déplacé ou retenu illicitement, l'autorité saisie ordonne en principe son retour immédiat (art. 12 CLaH80), à moins qu'une exception prévue à l'art. 13 CLaH80 ne soit réalisée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_930/2014 c.6.1).

L'autorité judiciaire de l'Etat requis n'est pas tenue d'ordonner le retour de l'enfant, lorsque la personne qui s'oppose à son retour établit que la personne qui avait le soin de la personne de l'enfant n'exerçait pas effectivement le droit de garde à l'époque du déplacement ou du non-retour, ou avait consenti ou acquiescé postérieurement à ce déplacement ou à ce non-retour (art. 13 al. 1 let. a CLaH80) ou qu'il existe un risque grave que le retour de l'enfant ne l'expose à un danger physique ou psychique, ou de toute autre manière ne le place dans une situation intolérable (art. 13 al. 1 let. b CLaH80).

6.1.2 L'enfant est placé dans une situation intolérable au sens de cette dernière disposition notamment lorsque le placement auprès du parent requérant n'est manifestement pas dans l'intérêt de l'enfant, que le parent ravisseur, compte tenu des circonstances, n'est pas en mesure de prendre soin de l'enfant dans l'Etat dans lequel l'enfant avait sa résidence habituellement au moment de l'enlèvement ou que l'on ne peut manifestement pas l'exiger de lui, et que le placement de l'enfant n'est manifestement pas dans l'intérêt de l'enfant (art. 5 let. a-c LF-EEA).

Le critère du retour intolérable dans le pays d'origine concerne l'enfant lui-même et non les parents, de sorte que le retour peut entraîner, selon les circonstances, une séparation entre l'enfant et sa personne de référence, qui ne constitue pas encore à elle seule une cause de refus du retour. Il en va autrement pour les nourrissons et les enfants en très bas âge, la séparation d'avec la mère constituant alors dans tous les cas une situation intolérable. Néanmoins, quel que soit l'âge de l'enfant, si le placement de celui-ci auprès du parent requérant ne correspond pas à son intérêt, il convient de vérifier s'il n'est pas possible d'imposer au parent ravisseur qu'il raccompagne lui-même l'enfant (arrêt du Tribunal fédéral 5A_637/2013 du 1er octobre 2013 consid. 5.1.2.). En ce qui concerne la séparation de l'enfant et du parent de référence, celui qui crée lui-même une situation intolérable pour l'enfant en refusant de raccompagner celui-ci, alors qu'on peut l'exiger de lui, ne peut pas invoquer la mise en danger de l'enfant à titre d'exception au retour. Sinon, le parent ravisseur pourrait décider librement de l'issue de la procédure de retour (ATF 130 III 535 consid. 2). Un retour du parent ravisseur avec l'enfant, au sens de l'art. 5 let. b LF-EEA, ne peut, par exemple, pas être exigé si ce parent s'expose à une mise en détention, ou s'il a noué en Suisse des relations familiales très solides, notamment après un nouveau mariage, ou lorsqu'un accueil sûr et financièrement supportable ne peut être garanti au parent ravisseur ou que le parent requérant est incapable d'assumer la prise en charge de l'enfant. Il doit s'agir toutefois de situations exceptionnelles, dans lesquelles il ne peut être raisonnablement exigé du parent ravisseur qu'il retourne dans le pays de dernière résidence de l'enfant aux fins d'y attendre qu'il soit jugé définitivement sur les droits parentaux. Le caractère intolérable du retour de l'enfant doit, dans tous les cas, être établi clairement, à défaut de quoi le retour doit être ordonné (arrêt 5A_583/2009 du 10 novembre 2009 consid. 4).

6.1.3 Les exceptions au retour prévues à l'art. 13 CLaH80 doivent être interprétées de manière restrictive : le parent ravisseur ne doit tirer aucun avantage de son comportement illégal (arrêt de la Cour EDH du 22 juillet 2014, Rouiller contre Suisse, n° 3592/08, § 67; arrêt du Tribunal fédéral 5A_617/2022 du 28 septembre 2022, consid. 5.1.1.2). C'est au parent ravisseur qui s'oppose au retour de l'enfant qu'il appartient de rendre objectivement vraisemblable le motif de refus qu'il invoque (arrêt du Tribunal fédéral 5A_617/2022 précité, consid. 5.1.1.2).

6.2.1 En l'espèce, la première exception visée par l'art. 13 al. 1 let. a CLaH80 n'est pas réalisée, le requérant ayant effectivement exercé ses droits parentaux avant le déplacement de la mineure en Suisse, comme déjà examiné au consid. 5.2.2 ci-avant.

6.2.2 Il en va de même de l'exception prévue par l'art. 13 al. 1 let. b CLaH80, dans la mesure où les éléments au dossier ne permettent pas de retenir que la mineure risquerait de se trouver dans une situation intolérable si son retour en France devait être ordonné à l'issue de la présente procédure. En effet, le requérant dispose d'un logement à H______ et s’occupait de l’enfant dans le cadre d’un mode de garde alternée mis en place par les parents, de sorte qu’il semble parfaitement capable de s’occuper de son enfant, la mère n'ayant émis aucune réserve à lui confier avant le déplacement illicite. Le requérant dispose d’un travail, étant directeur d’une agence de location de matériel en France, et peut bénéficier de l’aide de sa famille pour la prise en charge de la mineure, laquelle est par ailleurs toujours inscrite dans une crèche en France. La citée n’évoque aucun fait de violence physique ou psychologique du père sur l’enfant, qui pourrait constituer un empêchement au retour de la mineure en France, pays dans lequel le requérant a introduit une procédure en fixation des droits parentaux et revendique une garde alternée sur l’enfant, si la mère retourne vivre en France, ou à défaut, la garde exclusive de la mineure, si la mère devait rester en Suisse. Les photos versées à la procédure démontrent par ailleurs l’attachement de la mineure à son père.

La citée n'a par ailleurs pas établi être elle-même dans l'impossibilité de retourner en France. Au contraire, elle a clairement indiqué lors de son audition par la Cour qu’elle irait vivre en France si le retour de son enfant était ordonné à l'issue de la procédure. Elle ne saurait ainsi se prévaloir de la séparation d'un enfant en bas-âge d'avec sa mère comme motif de situation intolérable pour s'opposer au retour de l'enfant en France. Elle avait précédemment exposé dans ses écritures qu'elle disposait de meilleures conditions de vie et était mieux insérée à Genève, ce qu'elle considérait être une situation favorable à la mineure. C'était ainsi plus par confort et envie personnelle, qu'en raison d'une situation intolérable, que la citée avait décidé de s'établir à Genève et émis le souhait de ne pas retourner en France.

6.2.3 Au vu de ce qui précède, aucune des exceptions de l'art. 13 ClaH80 n'apparaît être réalisée en l'espèce. Partant, le retour immédiat de la mineure sera ordonné.

Un délai de dix jours dès la notification du présent arrêt sera imparti à la citée pour assurer le retour de la mineure en France ou laisser le requérant l'y emmener. A défaut d'exécution à l'issue du délai fixé, il appartiendra au Service de protection des mineurs d'organiser la remise de l'enfant au requérant, cas échéant avec le concours de la force publique (art. 29 de la loi sur l'enfance et la jeunesse (RS/GE J 6 01; art. 34 du règlement d'application de la loi sur l'enfance et la jeunesse (RS/GE J 6 01.01).

7. 7.1 Les art. 26 CLaH80 et 14 LF-EEA prévoient la gratuité de la procédure; toutefois conformément aux dispositions de l'art. 42 CLaH80 et par application de l'art. 26 al. 3 CLaH80, la France a déclaré qu'elle ne prendrait en charge les frais visés à l'al. 2 de l'art. 26 que dans la mesure où les coûts peuvent être couverts par son système d'assistance judiciaire. La Suisse applique dans ce cas le principe de la réciprocité (art. 21 al. 1 let. b de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités (RS 0.111), de sorte que la procédure n'est pas gratuite (arrêts du Tribunal fédéral 5A_930/2014 consid. 7; 5A_584/2014 consid. 9).

Les frais, qui comprennent les frais judiciaires et les dépens (art. 95 al. 1 CPC), sont mis à la charge de la partie succombante (art. 106 al. 1 CPC).

L'assistance judiciaire comprend l'exonération d'avances et de sûretés, l'exonération des frais judiciaires et la commission d'office d'un conseil juridique (art. 118 al. 1 CPC).

8.2 En l'espèce, les frais judiciaires seront arrêtés à 2'000 fr. Ils seront mis à la charge de la citée qui succombe et provisoirement supportés par l'Etat, celle-ci plaidant au bénéfice de l'assistance judiciaire.

Il ne sera pas alloué de dépens, vu la nature familiale du litige (art. 107 al. 1 let. c CPC).

9. Le présent arrêt sera notifié, outre aux parties, à l'autorité centrale fédérale, conformément à l'art. 8 al. 3 LF-EEA, à charge pour celle-ci d'en informer les autorités compétentes.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable la requête en retour de l’enfant A______, née le ______ 2020, formée par B______ le 28 juin 2023.

Au fond :

Ordonne le retour de l’enfant A______, née le ______ 2020, en France.

Ordonne à C______ d’assurer le retour de l’enfant A______ dans les dix jours dès la notification du présent arrêt, ou de laisser B______ l’y emmener.

Ordonne, à défaut d’exécution, au Service de protection des mineurs d’organiser la remise de l’enfant A______ à B______, le cas échéant avec le concours des agents de la force publique, ce immédiatement après l’échéance du délai de dix jours.

Arrête les frais judiciaires de la procédure à 2'000 fr., les met à la charge de C______ et dit qu’ils sont provisoirement supportés par l’Etat de Genève.

Dit qu’il n’est pas alloué de dépens.

Déboute les parties de toutes autres conclusions, dans la mesure de leur recevabilité.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 2 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.