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Décisions | Chambre de surveillance

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C/27656/2020

DAS/174/2023 du 17.07.2023 sur DJP/279/2023 ( AJP )

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/27656/2020 DAS/174/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU LUNDI 17 JUILLET 2023

Appel (C/27656/2020) avec requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles, formé le 7 juillet 2023 par Madame A______, domiciliée ______ (France) et Monsieur B______, domicilié ______ (France), comparant tous deux par Me Marc BALAVOINE, avocat, en l'Etude duquel ils élisent domicile.

* * * * *

Arrêt communiqué par plis recommandés du greffier
du 18 juillet 2023 à :

- Madame A______
Monsieur B______

c/o Me Marc BALAVOINE, avocat,
Rue François-Bellot 2, 1206 Genève.

- JUSTICE DE PAIX.

Le présent arrêt n’est pas communiqué, ce jour, aux parties ci-dessous :

-       Madame C______
______
______, Thaïlande.

-       D______ LTD
______, Iles Vierges Britanniques.

-       E______ LTD
c/o F______,
______, Iles Vierges Britanniques.


EN FAIT

A.           a) Le 22 juin 2023, A______ et B______ ont saisi la Justice de paix d’une requête de mesures de sûretés, avec mesures superprovisionnelles et provisionnelles, dirigée contre D______ LTD, E______ LTD et C______.

Les requérants, domiciliés respectivement à G______ (France) et à H______ (France) ont exposé être la sœur et le frère, ainsi que les héritiers légaux de feu I______, décédé en Thaïlande le ______ 2020. Ce dernier était le seul actionnaire et le seul administrateur de D______ LTD et de E______ LTD, sociétés incorporée aux Iles Vierges Britanniques, lesquelles avaient pour seuls actifs des avoirs déposés auprès de la succursale de Genève de J______, dont le montant s’élevait, à la fin du mois d’avril 2022, à 9'395'319 fr. 68. Ils étaient en litige devant les tribunaux thaïlandais avec C______, domiciliée à K______ (Thaïlande), laquelle avait épousé, en France, I______, le mariage n’ayant pas été enregistré à l’état civil thaïlandais du vivant de I______, mais postérieurement à son décès ; le couple vivait séparé depuis plusieurs années. C______ se prévalait d’un testament du défunt que les requérants considéraient être un faux. La procédure thaïlandaise, après le prononcé d’un jugement de première instance, était pendante devant la Cour d’appel. Selon les requérants, C______ ne pouvait pas prétendre, sur la base du droit thaïlandais, aux avoirs de la succession. Cette dernière avait toutefois entrepris « secrètement », le 8 juin 2022, des démarches devant les autorités des Iles Vierges Britanniques afin de se faire reconnaître comme administratrice unique de la succession. Les requérants n’avaient pas été informés de cette procédure et n’avaient pas pu faire valoir leurs droits. Sur la base de documents obtenus le 23 septembre 2022 des autorités des Iles Vierges Britanniques, C______ avait été inscrite comme unique actionnaire des deux sociétés, ainsi que comme unique administratrice (depuis le 4 novembre 2022) et détentrice (à compter du 13 décembre 2022) de la signature individuelle des comptes détenus auprès de la succursale de Genève de la J______.

Les requérants ont en outre exposé que le 3 janvier 2023, C______ s’était adressée à J______ afin d’obtenir que celle-ci la reconnaisse comme seule personne habilitée à représenter les deux sociétés. La banque avait accepté, dans un premier temps, de surseoir à tout acte de disposition jusqu’à droit connu sur le fond du litige opposant les parties devant les tribunaux thaïlandais. Dans un deuxième temps, elle avait toutefois indiqué qu’elle souhaitait, pour maintenir le statu quo, recevoir une décision judiciaire.

Les requérants ont conclu à ce que la Justice de paix, statuant d’urgence à titre superprovisionnel, puis sur mesures provisionnelles et sur le fond, ordonne le blocage des avoirs déposés sur tout compte, compte de dépôt de titres et/ou coffre-fort détenu par D______ LTD et E______ LTD auprès de J______, nomme un administrateur de la succession de feu I______ en Suisse et dise que lesdites mesures sont immédiatement exécutoires ; les requérants ont également conclu à la condamnation de C______ en tous les frais judiciaires et dépens de l’instance.

b) Par décision DJP/279/2023 du 23 juin 2023, la Justice de paix a débouté B______ et A______ de toutes leurs conclusions, les frais judiciaires et un émolument de 500 fr. étant mis à leur charge.

En substance, la Justice de paix a relevé que ni le for de domicile, ni celui d’origine, ne permettaient d’admettre sa compétence, puisque le défunt, né à L______ (France), était de nationalité française et domicilié en Thaïlande au moment de son décès. S’agissant du for du lieu de situation, les avoirs bancaires détenus par les sociétés D______ LTD et E______ LTD auprès de J______, visés par la requête, ne constituaient pas des biens de la succession dont il y avait lieu d’assurer la dévolution par des mesures de sûreté au sens des art. 551 et ss CC. Enfin, la compétence donnée par l’art. 89 LDIP aux autorités suisses du lieu de situation des biens du défunt pour le prononcé de mesures de sûreté ne concernait pas la juridiction gracieuse, mais le juge civil ordinaire.

A.           a) Le 7 juillet 2023, A______ et B______ ont formé un appel contre la décision de la Justice de paix du 23 juin 2023, reçue le 27 juin 2023, concluant à son annulation et cela fait, à ce que le blocage des avoirs déposés sur tout compte, compte de dépôt de titres et/ou coffre-fort détenu par D______ LTD et E______ LTD auprès de J______ soit ordonné et à ce qu’un administrateur de la succession de feu I______ en Suisse soit nommé, les frais devant être mis à la charge de C______. Les appelants ont pris les mêmes conclusions sur mesures superprovisionnelles et provisionnelles.

Les appelants ont fait grief à la Justice de paix d’avoir nié sa compétence pour ordonner des mesures conservatoires en application des art. 89 LDIP et 551 CC et d’avoir considéré que les avoirs déposés auprès de J______ n’appartenaient pas au défunt, méconnaissant, ce faisant, le principe de la transparence.

Sans motiver de manière spécifique leur requête de mesures superprovisionnelles, ils se sont contentés d’alléguer que les deux sociétés intimées risquaient, « d’un jour à l’autre », de disposer des actifs déposés auprès de J______, cette dernière ayant indiqué, le 1er juin 2023, qu’elle ne pouvait garantir le maintien indéfini des fonds en l’absence d’une décision de justice.

B.            a) Il ressort en outre de la procédure que le 16 juin 2023, les requérants ont saisi le Tribunal de première instance d’une requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles, visant à obtenir le blocage des avoirs déposés auprès de J______ au nom des deux sociétés intimées.

Par ordonnance du même jour, le Tribunal de première instance a rejeté la requête de mesures superprovisionnelles, réservé le sort des frais, ainsi que la suite de la procédure. Le Tribunal a relevé que les requérants rendaient vraisemblables leurs prétentions sur la succession de feu I______. Invités toutefois par J______, le 24 avril 2023 déjà, à agir en justice en Suisse, ils avaient attendu presque deux mois pour déposer une requête. Compte tenu de l’écoulement du temps et en l’absence d’éléments précis permettant d’imputer aux parties citées une intention immédiate de procéder au retrait des avoirs détenus auprès de J______, les conditions de l’urgence et du risque de préjudice difficilement réparable faisaient défaut.

b) Par ordonnance du 11 juillet 2023, qui faisait suite à une nouvelle requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles formée le même jour par A______ et B______, le Tribunal de première instance a fait interdiction à J______ de donner suite à toute instruction de transfert, d’investissement, de retrait ou d’exécuter tout autre acte de disposition relatif aux avoirs déposés sur tout compte, compte de dépôt de titres et/ou coffre-fort détenu par D______ LTD et E______ LTD, ladite ordonnance déployant ses effets jusqu’à l’exécution de la nouvelle décision devant être rendue après l’audition des parties.

Les appelants n’ont pas informé la Cour du prononcé de cette ordonnance.

EN DROIT

1.1.1 Le tribunal ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu’une prétention dont il est titulaire est l’objet d’une atteinte ou risque de l’être, ladite atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (art. 261 al. 1 let. a et b CPC).

L'art. 265 al. 1 CPC prévoit qu'en cas d'urgence particulière, notamment s'il y a risque d'entrave à leur exécution, le tribunal peut ordonner des mesures provisionnelles immédiatement, sans entendre la partie adverse.

1.1.2 Selon l'art. 59 al. 1 CPC, le tribunal n'entre en matière que sur les demandes et les requêtes qui satisfont aux conditions de recevabilité de l'action. Il faut notamment que le demandeur ait un intérêt digne de protection (art. 59 al. 1 et al. 2 let. a CPC) et ait la qualité pour agir. L'absence d'intérêt digne de protection doit être relevée d'office, à tous les stades de la procédure (art. 60 CPC; ATF 130 III 430 consid. 3.1).

L'intérêt à agir au sens de cette disposition consiste en un intérêt personnel et actuel à voir le juge statuer sur ses conclusions. Comme toute condition de recevabilité, cet intérêt doit exister non seulement lors de la litispendance, mais également au moment du jugement (arrêts du Tribunal fédéral 5A_717/2020 du 2 juin 2021 consid. 4.1.1.3; 5A_1035/2019 du 12 mars 2020 consid. 7.2; 5A_2/2019 du 1er juillet 2019 consid. 3.2).

L'intérêt à agir fait en principe défaut lorsqu'une demande tend à obtenir un jugement n'aboutissant qu'à la confirmation d'une décision déjà rendue, dans le cas d'une demande en constatation d'un fait, tout comme des conclusions en réserve d'un droit qui sont "inutiles si le droit existe et inopérantes s'il n'existe pas". De même, l'intérêt n'est pas réalisé si le demandeur cherche à faire trancher une question de droit abstraite ou à recevoir une consultation juridique (Bohnet, in Commentaire romand CPC, 2ème éd. 2019, n. 90 ad art. 59 CPC et les références citées).

1.2 En l'occurrence, quoi qu'il en soit de la recevabilité des conclusions superprovisionnelles ainsi que de la réalisation des conditions de l'art. 261 CPC, il apparaît que les appelants n’ont aucun intérêt à persister à solliciter devant la Cour, sur mesures superprovisionnelles, le blocage des avoirs détenus par les deux sociétés intimées auprès de J______, dans la mesure où, par ordonnance du 11 juillet 2023, ils ont obtenu du Tribunal de première instance cette mesure de blocage.

Au vu de ce qui précède, la requête de mesures superprovisionnelles sera déclarée sans objet.

2. Il sera statué sur les frais relatifs à la présente décision dans la décision au fond (art. 104 al. 3 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Statuant sur mesures superprovisionnelles :

Constate que la requête de mesures superprovisionnelles formée par A______ et B______ dans l’appel du 7 juillet 2023 dirigé contre la décision DJP/279/2023 du 23 juin 2023 dans la cause C/27656/2020 est devenue sans objet.

Les déboute en conséquence de leurs conclusions.

Renvoie la question des frais judiciaires relatifs à la présente décision à la décision au fond.

Siégeant :

Madame Paola CAMPOMAGNANI, présidente ad interim ; Monsieur Laurent RIEBEN et Madame Nathalie RAPP, juges ; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

S'agissant de mesures superprovisionnelles, il n'y a pas de voie de recours au Tribunal fédéral (ATF 137 III 417 consid. 1.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_37/2013 du 1er février 2013 consid. 1.2).