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Décisions | Chambre de surveillance

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C/16406/2017

DAS/173/2023 du 13.07.2023 sur DTAE/4990/2023 ( PAE )

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16406/2017-CS DAS/173/2023

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU JEUDI 13 JUILLET 2023

 

Recours (C/16406/2017-CS) formé en date du 5 juillet 2023 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), comparant par Me Carole REVELO, avocate, en l'Etude de laquelle elle élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 13 juillet 2023 à :

- Madame A______
c/o Me Carole REVELO, avocate.
Rue des Glacis-de-Rive 23, 1207 Genève.

- Monsieur B______
c/o Me Bernard NUZZO, avocat.
Rue Leschot 2, 1205 Genève.

- Maître C______
______, ______.

- Madame D______
Monsieur E______

SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Route des Jeunes 1E, case postale 75,1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.


Attendu, EN FAIT, que la mineure F______, née le ______ 2017, est issue de la relation hors mariage entretenue par A______ et B______ ; les parties sont titulaires de l’autorité parentale conjointe sur leur fille ;

Que par acte du 4 avril 2018, B______ a saisi le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : le Tribunal de protection) d’une demande portant notamment sur la fixation d’un droit de visite sur sa fille, en expliquant qu'il n'avait plus eu accès à celle-ci depuis le mois de février 2018 ;

Que par ordonnance du 17 décembre 2018, le Tribunal de protection a accordé au père un droit de visite sur l’enfant F______ devant s’exercer durant deux mois à raison de 1h30 par semaine au sein du Point rencontre en prestation accueil, puis, sauf contre-indication des curatrices, à partir du 3ème mois, un après-midi par semaine de 14h00 à 18h00 avec passage de l’enfant au Point rencontre et enfin, sauf contre-indication des curatrices, à partir du 5ème mois, une journée par semaine, avec passage de l’enfant au Point rencontre ; qu’une curatelle d’organisation et de surveillance du droit de visite a été instaurée ;

Que par ordonnance du 21 novembre 2019, les modalités du droit de visite du père sur sa fille F______ ont été modifiées, pour devenir progressives et être fixées, dès le 1er mars 2020, à un week-end à quinzaine, du samedi à 14h00 au dimanche à 18h00 ; qu’une partie des vacances scolaires a également été attribuée au père ;

Que par décision du 8 septembre 2021, statuant d'entente entre les parents, le Tribunal de protection a fixé le droit de visite du père sur l'enfant du mardi à la sortie de l'école jusqu'au mercredi à 18h00, ainsi qu'à raison d'un week-end sur deux du vendredi à la sortie de l'école jusqu'au lundi matin à la reprise de l'école et durant la moitié des vacances scolaires, les passages de l'enfant par le biais du Point rencontre étant en outre supprimés ;

Que le 17 décembre 2021, les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) ont adressé au Service de protection des mineurs (ci-après : SPMi) et au Tribunal de protection un signalement faisant état de ce que la mineure avait déclaré que son père avait commis à son encontre des abus sexuels durant le week-end du 7-8 décembre 2021 et qu'en outre, il l'avait frappée durant les vacances d'octobre 2021 ;

Que le Tribunal de protection, statuant sur mesures superprovisionnelles et sur préavis des curateurs, a, par ordonnance du 22 décembre 2021, instauré une curatelle d'assistance éducative en faveur de l'enfant et exhorté la mère à respecter les modalités du droit de visite en vigueur, ce sous la menace de la peine prévue par l'art. 292 du Code pénal, dont la teneur a été rappelée ; que le Tribunal de protection a également ordonné une expertise familiale ;

Que le 3 février 2022, le Tribunal de protection a désigné C______, avocat, aux fonctions de curateur d'office de l'enfant, son mandat étant limité à la représentation de celle-ci dans la procédure pendante devant le Tribunal de protection ;

Que par nouvelle décision superprovisionnelle du 4 février 2022, le Tribunal de protection a limité le droit de visite de B______ à 1h30 à quinzaine au sein du Point rencontre et pris acte de l'accord de ce dernier de suspendre son droit de visite dans l'attente de la mise en place de ces visites en milieu protégé ;

Que le 23 février 2022, le mandat de C______ a été étendu aux fins d'assurer la représentation de l'enfant dans le cadre de la procédure en cours par-devant le Ministère public ;

Que par décision superprovisionnelle du 8 avril 2022, statuant sur préavis des curateurs, le Tribunal de protection a instauré un temps de battement pour les relations personnelles entre l'enfant et son père, a ordonné à la mère de quitter le Point rencontre et ses environs une fois l'enfant confiée aux intervenants de cette institution, a fait interdiction à l'intéressée d'être présente au Point rencontre en même temps que le père et, enfin, lui a rappelé son devoir de préserver l'enfant de tout propos ou personnes pouvant placer la mineure dans un conflit de loyauté vis-à-vis de son père ;

Que dans son rapport d'expertise du 21 juillet 2022, le Centre universitaire romand de médecine légale a recommandé que l'enfant puisse vivre auprès de son père, la mère devant bénéficier d'un droit de visite, dans un premier temps dans un lieu médiatisé, le passage à un droit de visite usuel pouvant être envisagé une fois que l'intéressée serait parvenue à se dégager de ses angoisses ; que si toutefois elle venait à élaborer des accusations ou des allégations portant sur des maltraitances sexuelles ou physiques, son droit de visite devrait à nouveau être médiatisé ;

Que les expertes ont été entendues par le Tribunal de protection le 27 septembre 2022 en présence des parties ; qu'elles ont confirmé la teneur et les conclusions du rapport précité ; qu'elles ont notamment précisé que selon leurs constats, l'opposition manifestée par l'enfant vis-à-vis de son père était à mettre en lien avec l'impact de A______ sur sa fille et que tant que la fillette resterait sous l'emprise de celle-ci, elle ne pourrait pas se libérer des projections maternelles et de l'image paternelle négative que celle-ci véhicule ;

Que par décision superprovisionnelle du 14 octobre 2022, statuant sur préavis du SPMi, le Tribunal de protection a fait interdiction à A______ d'emmener ou de faire emmener sa fille hors de Suisse, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP et, cela fait, a ordonné l'inscription de l'enfant dans les registres RIPOL-SIS, de même que le dépôt des documents d'identité de celle-ci auprès des curateurs ;

Que dans son rapport du même jour, le SPMi a préavisé, sur mesures provisionnelles, l'instauration d'une curatelle d'assistance éducative, le maintien d'un suivi thérapeutique de l'enfant, ainsi que la fixation d'un droit de visite entre l'enfant et son père au Point rencontre à raison d'une heure une fois par semaine jusqu'à la fin de la procédure pénale ; que, sur le fond, les curateurs ont recommandé, à l'issue de l'enquête pénale et sous réserve des conclusions de celle-ci, le retrait à la mère de la garde de l'enfant, le placement de celle-ci auprès de son père, la fixation d'un droit de visite médiatisé mère-fille dans une structure thérapeutique et, enfin, la mise en place d'une guidance parentale en faveur des père et mère ;

Que par ordonnance du 6 décembre 2022, le Tribunal de protection, statuant à titre provisionnel, a notamment confirmé le droit de visite accordé au père sur sa fille F______, devant s’exercer, jusqu’à l’issue de la procédure pénale en cours devant le Ministère public, à raison d’une heure par semaine au sein du Point rencontre, avec un temps de battement avant et après chaque visite ; que l’interdiction faite à la mère d’emmener ou de faire emmener sa fille hors de Suisse a été confirmée ; que la mise en place d’un suivi thérapeutique de l’enfant au sein d’une consultation pédopsychiatrique de type institutionnel a été ordonnée, les curateurs devant veiller à sa mise en œuvre effective ;

Que dans son rapport du 6 mars 2023, le SPMi a préavisé l'attribution de la garde de l'enfant à son père, la fixation d’un droit de visite médiatisé en faveur de la mère dans une structure thérapeutique, tout en confirmant ses précédentes recommandations ; que ce préavis a été confirmé par le SPMi le 23 juin 2023 ;

Que le 27 juin 2023, le Tribunal a procédé à l'audition des différents professionnels en charge de la situation ;

Que les parties se sont ensuite déterminées ;

Que par ordonnance DTAE/4990/2023 du 29 juin 2023, le Tribunal de protection a notamment accordé à B______ la garde exclusive de sa fille F______ (ch. 1 du dispositif), retiré à A______ le droit de déterminer le lieu de résidence de la mineure, l'interdiction faite à son endroit d'emmener l'enfant hors de Suisse étant confirmée (ch. 2), autorisé le père à effectuer seul toutes démarches requises s’agissant des aspects administratifs, scolaires et extrascolaires liées à l’enfant, ainsi que de son suivi médical et thérapeutique, l’autorité parentale de la mère étant limitée en conséquence (ch. 3), réservé à A______ un droit de visite médiatisé sur sa fille, devant s’exercer à raison d'une heure à quinzaine, puis, dès que possible, par semaine, en milieu thérapeutique (ch. 4), pris acte de la prochaine mise en place d’une mesure AEMO au domicile paternel (ch. 5), fait interdiction à la mère d’approcher l’enfant à moins de 300 mètres, de même que son école, son lieu de vie et tout autre endroit que celle-ci sera appelée à fréquenter, sous la menace de la peine de l’art. 292 CP, dont la teneur a été rappelée (ch. 6), ordonné la poursuite du suivi individuel de l’enfant, ainsi que des suivis de guidance parentale à l’intention de ses père et mère (ch. 7), exhorté la mère à entreprendre un suivi thérapeutique personnel auprès d’un lieu de consultation approprié (ch. 8), invité les curateurs à restituer les documents d’identité de l’enfant au père (ch. 9), confirmé la curatelle d’assistance éducative existante (ch. 10), prononcé la mainlevée de la curatelle d’organisation et de surveillance des relations personnelles entre l’enfant et son père (ch. 11), instauré une curatelle d’organisation et de surveillance du droit de visite entre l’enfant et sa mère (ch. 12), invité pour le surplus les curateurs à saisir sans délai le Tribunal en cas de nécessité d’adapter le dispositif sus-décrit (ch. 13) ; que l'ordonnance a été déclarée immédiatement exécutoire (ch. 14), les parties étant déboutées de toutes autres conclusions (ch. 15) ;

Que le Tribunal de protection a notamment retenu que la situation de la mineure concernée n'était pas conforme à ses besoins, ni à son intérêt ; que les compétences parentales de A______ étaient grandement entravées par son fonctionnement personnel et relationnel, et qu'en dépit du travail éducatif soutenu dont elle avait bénéficié durant une année entière, l'intéressée était certes parvenue à accomplir des progrès notables dans la prise en charge de sa fille au quotidien, mais sans réussir à modifier en profondeur ledit fonctionnement et à préserver l'enfant de ses propres projections et angoisses ; que la mère avait également entretenu chez la mineure une image menaçante de son père, y compris alors que les visites avaient lieu en milieu protégé; que la mère n'était pas en mesure de favoriser le lien père-fille ;

Que le 5 juillet 2023, A______ a interjeté recours contre cette ordonnance auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice, sollicitant l'annulation des chiffres 1 à 6, 9 et 11 à 14 de son dispositif ;

Qu'elle a conclu, sur mesures superprovisionnelles et provisionnelles, à la restitution de l'effet suspensif s'agissant des chiffres 1 à 6 du dispositif de la décision querellée ;

Que par décision rendue le 5 juillet 2023 sur mesures superprovisionnelles, la Présidente ad interim de la Chambre de surveillance a restitué l’effet suspensif au recours formé par A______ ; qu’un délai a par ailleurs été fixé à B______, au curateur d’office de l’enfant, ainsi qu’au Service de protection des mineurs pour se prononcer sur la requête d’effet suspensif ;

Que le 7 juillet 2023, B______ a conclu au rejet de la requête, relevant le fait que l’enfant se trouvait chez lui depuis une semaine et que la transition s’était parfaitement déroulée ;

Que le curateur d’office de l’enfant a relevé, dans ses écritures du 10 juillet 2023, que la mineure était placée chez son père depuis le 29 juin 2023 ; que ce placement avait été assorti d’une mesure AEMO de crise afin d’assurer, de manière optimale, la transition de la mineure entre sa mère et son père ; qu’il convenait, dans l’intérêt de l’enfant, qu’elle puisse vivre dans un environnement stable, auprès de son père, à tout le moins pendant la durée de la procédure ; qu’il a conclu au rejet de la requête d’effet suspensif ;

Que le Service de protection des mineurs a conclu, dans ses observations reçues le 11 juillet 2023 au greffe de la Chambre de surveillance, au rejet de la requête d’effet suspensif ; qu’il a confirmé que l’enfant était prise en charge par son père depuis le 29 juin 2023 et qu’une mesure AEMO avait été mise en place aussitôt, avec pour objectif de rassurer la mineure dans cette transition et de soutenir le père dans son quotidien avec elle ; que l’éducatrice AEMO confirmait que le père se montrait adéquat et que F______, pour le moment, s’adaptait très bien au changement et ne réclamait pas sa mère ; qu’il était essentiel que le lieu de vie de l’enfant ne soit pas modifié à nouveau ;

Qu’il ressort toutefois des dernières informations reçues par la Chambre de surveillance qu’à la suite du prononcé de la décision rendue sur mesures superprovisionnelles, la mineure est retournée chez sa mère, où elle se trouve actuellement ;

Considérant EN DROIT, que selon l'art. 450 CC, les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour (art. 53 al.1 LaCC) ;

Que le recours est suspensif, à moins que l’autorité de protection de l’adulte ou l’instance judiciaire de recours n’en décide autrement (art. 450c CC) ;

Que tel a été le cas en l'espèce, l'ordonnance attaquée étant immédiatement exécutoire ;

Que l'effet suspensif peut être restitué au recours en cas de risque d'un dommage difficilement réparable (art. 315 al. 5 CPC) ;

Que si, de manière générale en matière de garde et de droit aux relations personnelles, la situation prévalant au moment du prononcé de la décision querellée doit être maintenue, en matière de mesures de protection, la règle de base est celle de l'intérêt de l'enfant (ATF 138 III 565 ; DAS/172/2017) ;

Que des changements trop fréquents peuvent être préjudiciables à l'intérêt du mineur (ATF 144 III 469 et 138 III 565) ;

Qu’en l’espèce, il appert que dès le prononcé de l’ordonnance litigieuse, l’enfant a été confiée à son père et une mesure AEMO mise en œuvre ;

Que toutefois, à la suite du prononcé de la décision du 5 juillet 2023 sur mesures superprovisionnelles, la mineure est retournée chez sa mère, où elle se trouve actuellement ;

Que la question de l’attribution de la garde de l’enfant sera examinée dans le cadre de la décision au fond ;

Que dans l’intérêt de la mineure, il convient de lui éviter des déplacements successifs, de nature à perturber son équilibre, étant relevé qu’elle a déjà été soumise, en quelques jours, à un aller-retour entre sa mère et son père ;

Qu’il convient dès lors de lui en éviter un nouveau, si la recourante devait obtenir, in fine, gain de cause sur son recours ;

Qu’il sera relevé pour le surplus que la procédure dure depuis plusieurs années, années durant lesquelles la recourante est demeurée titulaire de la garde de sa fille ;

Que le rapport d’expertise, qui préconise l’octroi de la garde de l’enfant au père, a été rendu il y a une année désormais ;

Qu’il n’existe dès lors pas une urgence manifeste à la mise en œuvre de la décision attaquée ;

Qu’au vu de ce qui précède, l’effet suspensif sera restitué au recours relativement aux chiffres 1, 2 première phrase, 3, 4, 5 et 6 du dispositif de l’ordonnance attaquée ;

Que dans un souci de clarté, il sera précisé que la restitution de l’effet suspensif ne porte pas sur le chiffre 2 deuxième phrase du dispositif de l’ordonnance attaquée, l’interdiction faite à la mère d’emmener ou de faire emmener l’enfant hors de Suisse demeurant en vigueur ;

Que dans un souci de cohérence, l’effet suspensif sera également restitué s’agissant des chiffres 11 et 12 du même dispositif ;

Que la question des éventuels frais judiciaires sera examinée dans la décision au fond.

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Présidente ad interim de la Chambre de surveillance :

Statuant sur requête de restitution de l’effet suspensif :

Restitue l’effet suspensif au recours formé par A______ contre l’ordonnance DTAE/4990/2023 rendue le 29 juin 2023 par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant dans la cause C/16406/2017, relativement aux chiffres 1, 2 première phrase, 3, 4, 5, 6, 11 et 12 du dispositif de ladite ordonnance.

Précise en tant que de besoin que la restitution de l’effet suspensif ne porte pas sur le chiffre 2 deuxième phrase du dispositif de l’ordonnance attaquée, l’interdiction faite à A______ d’emmener ou de faire emmener l’enfant hors de Suisse demeurant en vigueur.

Réserve la suite de la procédure au fond.

Renvoie la question des éventuels frais judiciaires à la décision au fond.

Siégeant :

Madame Paola CAMPOMAGNANI, présidente ad interim ; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (137 III 475 cons. 1) est susceptible d'un recours en matière civile, les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 à 119 et 90 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.