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Décisions | Chambre Constitutionnelle

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A/234/2023

ACST/17/2023 du 26.04.2023 ( ABST ) , REJETE

Recours TF déposé le 30.05.2023, rendu le 12.01.2024, REJETE, 8C_367/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/234/2023-ABST ACST/17/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre constitutionnelle

Arrêt du 26 avril 2023

 

dans la cause

 

A______
et
B______
et
C______
et
D______
représentés par Me Romain JORDAN, avocat recourants

contre

CONSEIL D’ÉTAT intimé


EN FAIT

A. a. Le C______ (ci-après : C______) est une association au sens des art. 60 ss du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) qui a son siège à Genève et dont le but statutaire est notamment la défense professionnelle de ses membres. Il a pour membres des inspecteurs et gradés de la police judiciaire, de l’état-major de la police et du commissariat de police. B______, qui en est le vice-président, est domicilié à Genève, où il exerce la profession d’agent de police au sein de la police judiciaire.

b. Le D______ (ci-après : D______) est une association au sens des art. 60 ss CC qui a son siège à Genève et dont le but statutaire est de veiller au respect des droits syndicaux de ses membres par une couverture en assurance juridique et à la défense de leurs conditions de travail et salariales. Il a pour membres les fonctionnaires du corps de la police, l’inspectorat de l’office cantonal des véhicules, les agents de détention, ainsi que leurs retraités. A______, qui est domicilié à Genève et exerce la profession d’agent de police au sein de la police de proximité, en est le président.

B. a. Lors de sa séance du 3 novembre 2022, le Grand Conseil a adopté la loi 12'521 modifiant la loi sur la police du 9 septembre 2014 (LPol - F 1 05), promulguée par arrêté publié dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 23 décembre 2022 et entrée en vigueur le lendemain. La loi 12'521 contient notamment les dispositions suivantes :

« Section 2 Subordination, organisation générale, équipement

Art. 4 Organisation et hiérarchie

1 La hiérarchie policière est pyramidale.

2 La police est dirigée par une commandante ou un commandant de la police, nommé par le Conseil d’État.

[ ]

Section 3 Organisation structurelle

Art. 6 Composition de la police

1 La police, dirigée par une commandante ou un commandant, est formée des deux corps suivants :

a) la gendarmerie ; et

b) la police judiciaire.

2 Les services d’appuis, placés sous l’autorité du chef d’état-major, facilitent l’action de la police et sont composés de :

a) la direction des services d’état-major ;

b) la direction de la stratégie ;

c) la direction des ressources humaines ;

d) la direction du support et de la logistique ;

e) la direction des finances.

3 Les commissaires de police forment un service transversal.

4 L’état-major appuie la commandante ou le commandant dans la conduite de l’action de la police.

 

Art. 7 Commandement

La commandante ou le commandant dispose d’un état-major composé des cheffes ou des chefs de la gendarmerie et de la police judiciaire, ainsi que d’une représentante ou d’un représentant des services d’appui.

[ ]

Art. 10 Gendarmerie

1 La gendarmerie assure auprès de la population une présence effective et préventive, et assume les prérogatives répressives prévues par la loi, notamment dans les domaines de la circulation, du secours d’urgence et de la proximité.

2 Elle assure en outre la sécurité des personnes, des biens et des lieux en lien avec les activités diplomatiques, consulaires et plus généralement internationales de Genève, ainsi que celle du site aéroportuaire.

3 Les postes de police concrétisent l’ancrage territorial de la gendarmerie.

4 Les gendarmes accomplissent en principe leurs missions en uniforme. »

b. Selon l’exposé des motifs relatif au projet de loi (ci-après : PL) 12'521 déposé par plusieurs députés, il était apparu que la nouvelle organisation des services prévue par la LPol dans sa version de 2014 (ci-après : LPol 2014) était la cause de leur perte d’efficacité, rendant la police incapable de répondre correctement à sa mission. Il convenait de revenir à une organisation mieux maîtrisée, la gendarmerie devant demeurer un corps de police aux missions diverses, sans comporter des « états-majors pléthoriques ». La conception classique devait être rétablie, soit d’une part la police administrative et de sécurité, qui agissait pour le maintien de l’ordre et dépendait du pouvoir exécutif, et, d’autre part, la police judiciaire, qui avait pour mission la recherche des auteurs d’infractions et était placée sous les ordres du Ministère public. Cette distinction s’imposait en particulier pour éviter au pouvoir exécutif d’intervenir de manière inappropriée dans les actions de la police judiciaire, sur lesquelles il ne devait avoir aucune maîtrise. Les missions opérationnelles, avant tout au service du citoyen, devaient être priorisées. La gendarmerie constituait le corps intégrant les missions de la police de secours, de proximité, routière et internationale, lesquelles ne devaient plus être des services, avec la lourdeur administrative qui en découlait, mais des missions.

c. Il est ressorti des débats de la commission judiciaire et de la police (ci-après : la commission parlementaire) au sujet du PL 12'521 ce qui suit :

c.a. Les auteurs du PL ont expliqué que l’idée était de rétablir la gendarmerie comme un ensemble dont les différents « silos » actuels constitueraient des missions et non plus des services séparés, tout en conservant la police internationale, la police de proximité, la police-secours et la police routière. La police judiciaire devait être séparée de la gendarmerie, étant donné qu’il s’agissait d’un corps différent répondant au Ministère public. Il s’agissait de trouver une solution à une crise qui durait depuis longtemps et avait provoqué des souffrances parmi les fonctionnaires concernés et des inquiétudes au sein de la population. L’essentiel de la modification structurelle était contenu à l’art. 6 du PL, puisque les quatre « silos » étaient réunis dans le même corps pour n’avoir plus qu’une seule direction, alors que dans la LPol 2014 il y avait quatre services séparés avec une hiérarchie séparée. La gendarmerie devait avoir une organisation qui lui était propre, les gendarmes devant pouvoir en assumer toutes les missions, pour permettre une transversalité, où chaque gendarme devait pouvoir être affecté, selon les besoins du service, à l’une ou l’autre de ces missions.

c.b. Selon les représentants du Conseil d’État et du département de la sécurité, de la population et de la santé (ci-après : le département), la LPol 2014 était critiquée de manière récurrente au motif qu’elle aurait créé des « silos ». Or, chaque service s’était vu fixer des effectifs, mais aucun n’avait atteint le nombre de personnes requises car chaque major avait le sentiment de ne pas avoir assez de gendarmes pour effectuer les tâches demandées, de sorte qu’il n’était pas enclin à mettre les membres de son personnel à disposition d’autres services, ce qui créait un malaise au niveau du terrain. Des règlements d’application pouvaient permettre de corriger les biais constatés. Si, dans l’ancienne gendarmerie, les tâches étaient déjà réparties, il n’en demeurait pas moins que l’interchangeabilité était probablement meilleure. Cette interchangeabilité ne provenait toutefois pas de la structure de la loi, mais du commandement. Rétablir l’ancienne gendarmerie serait une erreur et reviendrait à réhabiliter une structure grande et opaque, à la place de structures plus lisibles. Il convenait bien plus de cibler les carences et de créer de la transversalité, tout en renforçant les spécialisations, qui faisaient la force de la police. Le retour de la gendarmerie était néanmoins envisageable, pour autant qu’il serve de signe de reconnaissance et améliore la transversalité entre les services.

Les états-majors, qui existaient déjà avant l’entrée en vigueur de la LPol 2014, devaient être conservés, puisque dans l’organisation qui l’avait précédée, la gendarmerie était constituée d’unités, soit notamment la brigade urbaine et suburbaine (devenue police-secours), la police de proximité et la brigade de la navigation et de prévention (devenue la police routière). Ces unités avaient à leur tête des capitaines et autres officiers supérieurs pour conduire le dispositif. L’organisation de la police selon la LPol 2014 était ainsi issue de la loi l’ayant précédée, dont le contenu avait été transposé dans la LPol 2014, dans un modèle organisationnel différent.

c.c. Les représentants du C______ et du D______, soit respectivement B______ et A______, ont indiqué que, sous l’ancien droit, le commandant de la gendarmerie avait un lien avec l’ensemble des postes, ses ordres étant suivis d’effets, alors que sous la LPol 2014, il y avait des commandants pour des services différents, qui avaient chacun des officiers supérieurs sous leurs ordres, ce qui créait des lourdeurs et parfois des ordres contradictoires. L’entrée en vigueur de la LPol 2014 n’avait pas changé les missions de la police et seuls des états-majors séparés avaient été ajoutés. La LPol 2014 avait voulu en finir avec les trois corps de la police qu’étaient la gendarmerie, la police internationale et la police judiciaire, pour n’en faire plus qu’un, ce qui s’était révélé un échec. L’essence du métier de policier était d’être confronté à des situations imprévues, l’institution devant fournir aux policiers le bagage nécessaire pour être à même d’intervenir au mieux dans l’intérêt public. Avec la division de la gendarmerie en « silos », des missions importantes n’étaient pas remplies par manque d’effectifs, alors que, par le passé, les missions étaient non seulement remplies, mais aussi variées et différentes pour un même gendarme. Jadis, tout gendarme était ainsi capable de rédiger un rapport d’accident avec blessé, alors qu’actuellement, avec la police routière, c’était devenu un enjeu de spécialiste. De même, il revenait à la police de proximité de parler avec les gens, alors que tout policier devait pouvoir dialoguer avec les citoyens. La structure actuelle était présentée comme permettant une spécialisation, ce qui n’était toutefois pas le cas. Tant la LPol 2014 que le fonctionnement de la police devaient être modifiés. Les syndicats étaient ainsi favorables au PL, à l’élaboration duquel ils avaient participé en donnant leurs avis sur de nombreux points.

c.d. Les représentants de la commission du personnel de la police ont indiqué que le regroupement des différents services, soit la police-secours, la police routière, la police de proximité ou la police internationale, sous un seul commandement, soit le chef de la gendarmerie, serait une mesure efficace. Si un commandant de la gendarmerie avait tous les services « uniformés » à sa disposition, il serait capable de gérer de grands événements nécessitant la mobilisation de nombreux policiers, étant précisé qu’il pourrait, au besoin, faire appel à son « alter ego », le chef de la police judiciaire, pour le surplus. Tant que cela restait cloisonné, il fallait « quelqu’un en-dessus », ce qui n’était plus nécessaire en cas de décloisonnement.

c.e. Durant les discussions des commissaires, un député a indiqué que si les « silos » étaient réunis, il faudrait dans tous les cas prévoir des responsables de secteur d’activité. Un autre s’est interrogé sur le maintien de corps séparés, tout en améliorant la transversalité, principale préoccupation des auditionnés, en évitant de revenir à un corps unique qui ne pourrait accomplir toutes les tâches de la police. Selon un autre député, les auditionnés avaient expliqué qu’il y avait bien une spécialisation et une manière de faire certaines tâches.

C. a. Le 21 décembre 2022, le Conseil d’État a adopté le règlement sur l’organisation de la police (ROPol - F 1 05.01), publié dans la FAO du 23 décembre 2022, qui contient notamment les dispositions suivantes :

« Chapitre I Organisation générale

Art. 1 Suppléance de la commandante ou du commandant de la police

1 La commandante adjointe ou le commandant adjoint supplée la commandante ou le commandant de la police (ci-après : commandante ou commandant) lorsque celle-ci ou celui-ci est absent.

2 Elle ou il assume les tâches déléguées par la commandante ou le commandant afin de garantir la coordination et la transversalité, en particulier le pilotage et la coordination de la politique criminelle commune.

3 Dans ce but, elle ou il dispose des moyens nécessaires.

4 Le service des commissaires de police ainsi que le service du renseignement lui sont notamment subordonnés.

 

 

Art. 2 État-major

1 La commandante ou le commandant dispose d’un état-major mentionné à l’article 7 de la loi, auquel participe la commandante adjointe ou le commandant adjoint.

2 La représentante ou le représentant des services d’appui mentionné à l’article 7 de la loi est la cheffe ou le chef d’état-major indiqué à l’article 6, alinéa 2, de la loi.

3 L’état-major conseille la commandante ou le commandant, fait des propositions et élabore les dossiers confiés par la commandante ou le commandant.

4 La commandante ou le commandant fixe le rythme de conduite, les types de rapports, ainsi que les participantes et participants auxdits rapports. Elle ou il invite à participer à titre consultatif à l’état-major toute personne qui lui est subordonnée et qu’elle ou il juge utile à l’éclairage des points portés à l’ordre du jour.

[ ]

Art. 9 Organisation opérationnelle

1 La gendarmerie, assure les prérogatives répressives tout en déployant une action préventive et dissuasive par une présence visible pour répondre aux missions énoncées à l’article 10 de la loi.

2 Pour assurer ses missions, la gendarmerie est organisée en 4 unités opérationnelles :

a) l’unité routière veille à la sécurité de la mobilité, assure la sécurité des usagères et usagers, surveille le trafic et contribue à la fluidité de celui-ci ;

b) l’unité de secours d’urgence garantit la sécurité publique, notamment par la réponse aux réquisitions, et pourvoit à la protection des personnes et des biens ;

c) l’unité de proximité déploie son action au profit de la sécurité de proximité, par sa visibilité et ses partenariats durables avec la population et l’ensemble des institutions publiques et privées, notamment les communes. Elle assure en outre la récolte du renseignement et agit dans le judiciaire de proximité et de voie publique. Pour répondre à sa mission de sécurité de proximité au sens de l’article 10, alinéa 1, de la loi, elle intègre des unités judiciaires de voie publique ;

d) l’unité diplomatique et aéroportuaire assure la sécurité des personnes, des biens et des lieux et accomplit les missions qui lui sont déléguées par la Confédération, notamment en matière de migration.

3 La police judiciaire, selon l’article 11 de la loi, est un corps d’enquête et d’investigation, notamment compétent en matière de mesures préalables au sens de la section 9 du chapitre III de la loi.

a) Elle traite les affaires transmises par les autres services de la police, répondant aux critères de l’article 11, alinéa 1, de la loi.

b) Elle contribue aux dispositifs lors de grands événements ou d’événements particuliers, dans ses domaines de compétence.

c) Elle participe au dispositif général de prévention dans les thématiques propres à son activité.

[ ]

Chapitre V Dispositions finales et transitoires

Art. 23 Entrée en vigueur

Le présent règlement entre en vigueur le lendemain de sa publication dans la Feuille d’avis officielle. »

b. Dans un communiqué de presse du 22 décembre 2022, le Conseil d’État a indiqué qu’il avait modifié le ROPol pour le mettre en conformité avec les nouvelles dispositions de la LPol. En effet, ces dernières supprimaient la direction des opérations et donc le poste de chef des opérations, dont les tâches seraient reportées sur la commandante de la police (ci-après : la commandante). Au vu de ce surcroît de charges opérationnelles et de la nécessité de mettre en œuvre notamment au quotidien les priorités de la politique criminelle commune définies conjointement par le Ministère public et le Conseil d’État, un poste de commandant adjoint était créé, à l’instar de ce que connaissaient de nombreux cantons. Cette personne aurait pour missions de remplacer la commandante en cas d’absence, de diriger les services transversaux, tels que le service des commissaires, le service du renseignent et la centrale d’alarme, ainsi que de mettre en place les réponses sécuritaires adaptées aux défis quotidiens et aux grands événements. Elle pourrait également se voir déléguer d’autres tâches et missions par la commandante.

D. a. Par acte expédié le 23 janvier 2023, A______ et B______ ainsi que le C______ et le D______ ont interjeté recours auprès de la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle) contre le ROPol, concluant préalablement à l’octroi de l’effet suspensif au recours et principalement à l’annulation du règlement entrepris ainsi qu’à l’octroi d’une indemnité de procédure.

Ils faisaient grief au Conseil d’État d’avoir adopté le ROPol sans consultation préalable des syndicats. Les art. 1, 2 et 9 ROPol étaient contraires au principe de la séparation des pouvoirs et l’art. 9 ROPol violait le principe de la bonne foi.

b. Le 1er mars 2023, la chambre constitutionnelle a refusé d’octroyer l’effet suspensif au recours et a réservé le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond.

c. Le 3 mars 2023, le Conseil d’État a conclu à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.

d. Le 28 mars 2023, les recourants ont persisté dans leur recours et produit les statuts du D______.

e. Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

f. Les arguments des parties seront repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1) 1.1 La chambre constitutionnelle est l’autorité compétente pour contrôler, sur requête, la conformité des normes cantonales au droit supérieur (art. 124 let. a de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - Cst-GE - A 2 00). Selon la législation d’application de cette disposition, il s’agit des lois constitutionnelles, des lois et des règlements du Conseil d’État (art. 130B al. 1 let. a de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

1.2 Le recours est formellement dirigé contre un règlement cantonal, à savoir le ROPol, et ce en l’absence de cas d’application (ACST/10/2023 du 6 mars 2023 consid. 1.2). Il a été interjeté dans le délai légal à compter de la publication dudit règlement dans la FAO du 23 décembre 2022 (art. 62 al. 1 let. d et al. 3 et art. 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10) et satisfait également aux réquisits de forme et de contenu prévus aux art. 64 al. 1 et 65 al. 1 à 3 LPA.

2) L’autorité intimée conteste la qualité pour recourir des recourants.

2.1 A qualité pour recourir toute personne touchée directement par une loi constitutionnelle, une loi, un règlement du Conseil d’État ou une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce que l’acte soit annulé ou modifié (art. 60 al. 1 let. b LPA). L’art. 60 al. 1 let. b LPA formule de la même manière la qualité pour recourir contre un acte normatif et en matière de recours ordinaire. Cette disposition ouvre ainsi largement la qualité pour recourir, tout en évitant l’action populaire, dès lors que le recourant doit démontrer qu’il est susceptible de tomber sous le coup de la loi constitutionnelle, de la loi ou du règlement attaqué (ACST/3/2023 du 16 février 2023 consid. 2a).

2.1.1 Lorsque le recours est dirigé contre un acte normatif, la qualité pour recourir est conçue de manière plus souple et il n’est pas exigé que le recourant soit particulièrement atteint par l’acte entrepris. Ainsi, toute personne dont les intérêts sont effectivement touchés directement par l’acte attaqué ou pourront l’être un jour a qualité pour recourir ; une simple atteinte virtuelle suffit, à condition toutefois qu’il existe un minimum de vraisemblance que le recourant puisse un jour se voir appliquer les dispositions contestées (ATF 147 I 308 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_357/2021 du 19 mai 2022 consid. 2.2). La qualité pour recourir suppose en outre un intérêt actuel à obtenir l’annulation de l’acte entrepris, cet intérêt devant exister tant au moment du dépôt du recours qu’au moment où l’arrêt est rendu (ATF 147 I 478 consid. 2.2).

2.1.2 Une association ayant la personnalité juridique est habilitée à recourir en son nom propre lorsqu’elle est intéressée elle-même à l’issue de la procédure. De même, sans être touchée dans ses intérêts dignes de protection, cette possibilité lui est reconnue pour autant qu’elle ait pour but statutaire la défense des intérêts de ses membres, que ces intérêts soient communs à la majorité ou au moins à un grand nombre d’entre eux et que chacun de ceux-ci ait qualité pour s’en prévaloir à titre individuel (ATF 145 V 128 consid. 2.2 ; ACST/14/2023 du 27 mars 2023 consid. 2.1.2). En revanche, elle ne peut prendre fait et cause pour l’un de ses membres ou pour une minorité d’entre eux (arrêt du Tribunal fédéral 2C_749/2021 du 16 mars 2022 consid. 1.2.1).

2.2 En l’espèce, selon l’autorité intimée, les syndicats recourants n’auraient pas, en leur sein, une majorité de membres concernés par les dispositions attaquées et les personnes physiques recourantes, bien que membres du personnel de la police, ne seraient pas directement touchées par l’acte entrepris. Les recourants contestent cette approche, considérant que le règlement entrepris les toucherait directement, à tout le moins virtuellement, la réforme de la LPol, que l’autorité intimée cherchait à ne pas appliquer par le biais du ROPol, ayant un effet sur leurs conditions quotidiennes de travail. Ils précisaient en outre que le D______ regroupait 1'082 membres actifs « police », 346 membres actifs « agents de détention », 21 membres actifs de l’office cantonal des véhicules et 607 membres retraités issus de ces trois corps de métier.

Les modifications litigieuses du ROPol portent sur l’organisation générale de la police, plus précisément sur son organisation opérationnelle en unités et sur la création d’un poste de commandant adjoint, lequel est appelé à suppléer le commandant de la police, en l’occurrence la commandante. Il s’agit de mesures d’organisation interne – en particulier celles prévues par les art. 1 et 2 ROPol –, qui n’ont pas d’effet direct sur les droits et conditions de travail des personnes physiques recourantes ni sur l’exercice de leur fonction. L’on ne saurait toutefois d’emblée exclure que A______, qui exerce la profession d’agent de police au sein de la police de proximité, laquelle fait partie du corps de la gendarmerie selon l’art. 6 al. 1 let. a LPol et constitue l’une de ses unités selon l’art. 9 al. 2 let. c ROPol qu’il conteste, puisse à tout le moins être virtuellement affecté par cette dernière disposition dans l’exercice de ses fonctions, contrairement à B______, lequel exerce ses fonctions au sein de la police judiciaire (art. 6 al 1 let. b LPol) et dont la démarche vise davantage à poursuivre un intérêt général. La question de la qualité pour recourir de A______ et de B______, de même que celle des syndicats recourants dans le cadre du recours corporatif et de la possibilité de leurs membres à pouvoir recourir à titre individuel, pourra toutefois souffrir de rester indécise, au regard de ce qui suit.

3) La chambre constitutionnelle, lorsqu’elle se prononce dans le cadre d’un contrôle abstrait des normes, s’impose une certaine retenue et n’annule les dispositions attaquées que si elles ne se prêtent à aucune interprétation conforme au droit ou si, en raison des circonstances, leur teneur fait craindre avec une certaine vraisemblance qu’elles soient interprétées ou appliquées de façon contraire au droit supérieur. Pour en juger, il lui faut notamment tenir compte de la portée de l’atteinte aux droits en cause, de la possibilité d’obtenir ultérieurement, par un contrôle concret de la norme, une protection juridique suffisante et des circonstances dans lesquelles ladite norme serait appliquée. Le juge constitutionnel doit prendre en compte dans son analyse la vraisemblance d’une application conforme – ou non – au droit supérieur. Les explications de l’autorité sur la manière dont elle applique ou envisage d’appliquer la disposition mise en cause doivent également être prises en considération. Si une réglementation de portée générale apparaît comme défendable au regard du droit supérieur dans des situations normales, telles que le législateur pouvait les prévoir, l’éventualité que, dans certains cas, elle puisse se révéler inconstitutionnelle ne saurait en principe justifier une intervention du juge au stade du contrôle abstrait (ATF 148 I 198 consid. 2.2 ; 147 I 308 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_983/2020 du 15 juin 2022 consid. 3.1 ; ACST/4/2023 du 16 février 2023 consid. 3 et les références citées).

4) Dans un grief de nature formelle qu’il sied d’examiner en premier lieu, les recourants se plaignent d’une violation de la liberté syndicale sous l’angle du droit d’être entendu.

4.1 De manière générale, les citoyens ne disposent pas du droit d’être entendus dans une procédure législative (ATF 137 I 305 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_636/2020 du 24 août 2022 consid. 3.1). Une exception n’est admise que lorsque certaines personnes (destinataires dits « spéciaux ») sont touchées de façon sensiblement plus grave que le plus grand nombre des destinataires « ordinaires », par exemple lorsqu’un décret de portée générale ne touche qu’un très petit nombre de propriétaires (ATF 145 I 167 consid. 4.1). Un droit d’être entendu dans une procédure législative peut cependant découler de certaines normes constitutionnelles particulières (ATF 137 I 305 consid. 2.4). Le Tribunal fédéral a notamment admis que la liberté syndicale (art. 28 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101), si elle ne confère pas aux organisations syndicales de la fonction publique le droit de participer au processus législatif portant sur le statut du personnel, leur accorde néanmoins celui d’être entendues sous une forme appropriée en cas de modifications législatives ou réglementaires touchant de manière significative les conditions de travail de leurs membres (ATF 144 I 50 consid. 5.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_789/2020 du 4 novembre 2021 consid. 3.1).

4.2 En l’espèce, selon les recourants, les syndicats n’auraient pas été consultés alors que, par l’adoption du ROPol, le Conseil d’État aurait voulu passer outre une réforme significative de la LPol. L’autorité intimée soutient, pour sa part, qu’une telle consultation n’était pas requise en l’absence d’effet du ROPol sur le statut des membres desdits syndicats.

C’est à juste titre que les recourants ne considèrent pas être des destinataires dits « spéciaux » des dispositions qu’ils contestent pour se prévaloir du droit d’être entendu durant la procédure ayant conduit à l’adoption du ROPol. Les syndicats recourants ne peuvent pas davantage se prévaloir du droit d’être entendus que leur confère la liberté syndicale, en l’absence de modification touchant de manière significative les conditions de travail de leurs membres, contrairement à ce qu’ils prétendent. En effet, le ROPol, en particulier les dispositions qu’ils contestent, ont trait à l’organisation générale de la police, à savoir la création d’un poste de commandant adjoint et l’organisation opérationnelle de la gendarmerie, soit des éléments relevant de l’organisation interne de la police qui n’affectent pas les droits et obligation des fonctionnaires de police en tant que sujets de droit (arrêt du Tribunal fédéral 8D_5/2022 du 22 février 2023 consid. 6.2.4). Rien n’indique en outre que, comme le soutiennent les recourants, l’autorité intimée, en adoptant le ROPol, aurait fait fi des réformes introduites dans la LPol par la loi 12'521. Le grief doit par conséquent être écarté.

5) Les recourants font grief aux art. 1, 2 et 9 ROPol d’être contraires au principe de la séparation des pouvoirs.

5.1 Le principe de la légalité s’applique de façon générale à l’activité de l’État régi par le droit (art. 5 al. 1 Cst.). En droit constitutionnel genevois, le principe de la légalité se trouve ancré, dès les premières dispositions de la Cst-GE, par l’affirmation que les structures et l’autorité de l’État sont fondées sur le principe de la séparation des pouvoirs (art. 2 al. 2 Cst-GE) et par l’exigence que l’activité publique se fonde sur le droit (art. 9 al. 2 Cst-GE).

5.2 Le principe de la séparation des pouvoirs impose en particulier le respect des compétences établies par la constitution et vise à empêcher un organe de l’État d’empiéter sur les compétences d’un autre organe. Il interdit ainsi au pouvoir exécutif d’édicter des dispositions qui devraient figurer dans une loi, si ce n’est dans le cadre d’une délégation valablement conférée par le législateur (ATF 142 I 26 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_38/2021 du 3 mars 2021 consid. 3.2.1). Les règlements d’exécution doivent dès lors se limiter à préciser certaines dispositions légales au moyen de normes secondaires, à en combler le cas échéant les véritables lacunes et à fixer si nécessaire des points de procédure (ATF 139 II 460 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_660/2021 du 28 juin 2022 consid. 5.2).

5.2.1 À Genève, le Grand Conseil exerce le pouvoir législatif (art. 80 Cst-GE) et adopte les lois (art. 91 al. 1 Cst-GE), tandis que le Conseil d’État, détenteur du pouvoir exécutif (art. 101 Cst-GE), joue un rôle important dans la phase préparatoire de la procédure législative (art. 109 al. 1 à 3 et 5 Cst-GE), promulgue les lois et est chargé de leur exécution et d’adopter à cet effet les règlements et arrêtés nécessaires (art. 109 al. 4 Cst-GE).

5.2.2 Le Conseil d’État peut ainsi adopter des normes d’exécution, soit des normes secondaires, sans qu’une clause spécifique dans la loi soit nécessaire. Lesdites normes secondaires peuvent établir des règles complémentaires de procédure, préciser et détailler certaines dispositions de la loi, éventuellement combler de véritables lacunes. Elles ne peuvent en revanche pas, à moins d’une délégation expresse, poser des règles nouvelles qui restreindraient les droits des administrés ou leur imposeraient des obligations, même si ces règles sont conformes au but de la loi (ATF 147 V 328 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_776/2020 du 7 juillet 2022 consid. 7.2). Pour que le Conseil d’État puisse édicter des normes de substitution, ou normes primaires, il faut qu’une clause de délégation législative l’y habilite, pour autant que la constitution cantonale ne l’interdise pas dans le domaine considéré et que la délégation figure dans une loi au sens formel, se limite à une matière déterminée et indique le contenu essentiel de la réglementation si elle touche les droits et obligations des particuliers (ATF 133 II 331 consid. 7.2.1 ; ACST/14/2023 précité consid. 5.2.2).

5.3.1 En l’espèce, selon les recourants, en maintenant quatre unités opérationnelles, à savoir la police-secours, la police routière, la police de proximité et la police internationale, que le parlement aurait voulu supprimer, l’art. 9 ROPol serait contraire à l’art. 6 LPol. L’autorité intimée conteste ce point de vue au motif que l’art. 9 ROPol traiterait le volet opérationnel de la gendarmerie, en l’organisant en quatre unités, à l’instar de tout service de l’État organisé selon des ramifications permettant de structurer et encadrer les missions des collaborateurs.

Contrairement à l’ancienne teneur de l’art. 6 LPol 2014, selon lequel la police comprenait les services d’appui (let. a), les services opérationnels (soit la direction des opérations, la police-secours, la police judiciaire, la police de proximité, la police internationale et la police routière ; let. b), et les commissaires de police (let. c), l’actuel art. 6 al. 1 LPol se limite à organiser la police en deux corps que sont la gendarmerie (let. a) et la police judiciaire (let. b), les commissaires de police formant un service transversal (al. 3). Le ROPol ne remet pas en cause cette organisation structurelle, que l’art. 9 ROPol reprend pour régler l’organisation opérationnelle de la gendarmerie (al. 2) et de la police judiciaire (al. 3), après s’être référé aux missions de la gendarmerie (al. 1), telles que prévues à l’art. 10 LPol.

En effet, ces missions sont décrites à l’art. 10 LPol et consistent à assurer auprès de la population une présence effective et préventive, ainsi qu’à assumer les prérogatives répressives prévues par la loi, notamment dans les domaines de la circulation, du secours d’urgence et de la proximité (al. 1). La police assure en outre la sécurité des personnes, des biens et des lieux en lien avec les activités diplomatiques, consulaires et internationales de Genève, ainsi que celle du site aéroportuaire (al. 2).

En prévoyant que pour assurer ces missions la gendarmerie est organisée en quatre unités opérationnelles, l’art. 9 al. 2 ROPol ne contrevient pas à l’art. 6 al. 1 LPol et ne remet pas en cause la (re)constitution de la gendarmerie sous un seul corps, conformément à la volonté du législateur. Telles que décrites à l’art. 10 LPol, les missions de la gendarmerie justifient la constitution d’unités correspondantes en son sein, au vu de leurs spécificités, ce qui ne revient pas à réintroduire, comme le soutiennent les recourants, une organisation en « silos ». En effet, la constitution de ces unités est inhérente à la description des missions de la police résultant de la LPol, l’autorité intimée n’ayant, dans ce contexte, pas créé des unités ne correspondant pas auxdites missions mais ayant strictement transposé celles figurant à l’art. 10 LPol à l’art. 9 al. 2 ROPol. Comme il ressort des discussions en commission parlementaire, il n’aurait pas été envisageable de créer un unique corps de gendarmerie sans aucune subdivision correspondant aux missions qui lui sont confiées. À l’instar de toute administration, la gendarmerie, comptant quelque 1'200 policiers selon l’autorité intimée, doit ainsi être structurée, ce qui n’implique pas pour autant qu’elle soit constituée en « silos » ni que les agents concernés ne pourraient pas changer d’affectation comme l’indiquent les recourants, étant précisé que les différentes missions de la gendarmeries impliquent déjà une certaine spécialisation de ses agents. En outre, contrairement à ce qui était le cas avant la modification de la LPol issue du PL 12'521, ces unités sont désormais placées sous la hiérarchie commune du chef de la gendarmerie (art. 7 LPol), en mesure d’avoir une vue d’ensemble desdites unités et de leurs besoins en termes d’effectifs. Ce nouveau système n’exclut pas non plus une certaine transversalité.

En adoptant l’art. 9 al. 2 ROPol contesté, le Conseil d’État a fait usage de ses prérogatives constitutionnelles en matière d’organisation et de direction de l’administration (art. 106 al. 1 Cst-GE), pour laquelle il dispose au demeurant d’une certaine marge de manœuvre, sans contredire la LPol et conformément au principe de la séparation des pouvoirs. Le fait que certains députés aient manifesté leur mécontentement à l’égard du ROPol ou que le Conseiller d’État en charge du département se serait montré récalcitrant à cet aspect du PL 12'521 lors des travaux en commission parlementaire, comme l’indiquent les recourants, ne permet pas encore de conclure que l’art. 9 al. 2 ROPol contrevient au principe de la légalité, s’agissant de considérations d’ordre politiques, et non juridiques. Le grief sera écarté.

5.3.2 Selon les recourants, la création d’un poste de commandant adjoint ne pourrait pas se fonder sur les art. 4 al. 2, 6 al. 1 et 7 LPol, le législateur ayant voulu limiter les échelons hiérarchiques. L’autorité intimée soutient, au contraire, qu’en raison du nombre de collaborateurs de la police, de la suppression du poste de chef des opérations et des structures transversales de la police, la commandante ne pourrait pas assurer seule la gouvernance stratégique et opérationnelle permanente de l’institution, d’où la nécessaire création du poste litigieux, la structure de l’état-major, telle que décrite de manière non exhaustive par la LPol, ne privant pas l’exécutif de la possibilité de créer un tel poste.

Comme l’indiquent les recourants, la LPol ne fait pas mention d’un poste de commandant adjoint, les art. 4 al. 2, 6 al. 1 et 7 LPol ne se référant qu’au commandant, chargé de diriger la police. Il n’en résulte pas pour autant une violation du principe de la séparation des pouvoirs, ledit poste s’inscrivant dans les compétences exécutives du Conseil d’État. En effet, il ressort de l’art. 1 ROPol que le commandant adjoint est chargé de la suppléance du commandant en son absence (al. 1) et qu’il assume les tâches déléguées par le commandant (al. 2). En cette qualité, il participe à l’état-major dont dispose le commandant selon l’art. 7 LPol (art. 2 al. 1 ROPol). Contrairement à ce que soutiennent les recourants, le poste de commandant adjoint ne crée pas un échelon hiérarchique supplémentaire, mais vise, par ce soutien, à absorber le report des charges sur la commandante du fait de la suppression de la direction des opérations, et donc du poste de chef de celle-ci, par l’adoption de la loi 12'521. Le fait que le service des commissaires de police et le service du renseignement soient subordonnés au commandant adjoint (art. 1 al. 4 ROPol) n’y change rien et s’inscrit dans le même contexte. Le grief sera également écarté.

6) Les recourants se plaignent d’une violation du principe de la bonne foi.

6.1 En droit public, le principe de la bonne foi est explicitement consacré par l’art. 5 al. 3 Cst., en vertu duquel les organes de l’État et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. Il y a fraude à la loi – forme particulière d’abus de droit – lorsqu’un justiciable évite l’application d’une norme imposant ou interdisant un certain résultat par le biais d’une autre norme permettant d’aboutir à ce résultat de manière apparemment conforme au droit. La norme éludée doit alors être appliquée nonobstant la construction juridique destinée à la contourner. Pour être sanctionné, un abus de droit doit apparaître manifeste. L’autorité qui entend faire appliquer la norme éludée doit établir l’existence d’une fraude à la loi, ou du moins démontrer l’existence de soupçons sérieux dans ce sens. Cette appréciation doit se faire au cas par cas, en fonction des circonstances d’espèce (ATF 144 II 49 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_132/2022 du 20 mars 2023 consid. 4.1).

6.2 En l’espèce, selon les recourants, l’adoption de l’art. 9 ROPol serait constitutive d’un abus de droit et viserait à mettre en échec la réforme de la LPol, à laquelle le Conseil d’État s’était opposé. L’autorité intimée le conteste, précisant que la volonté du législateur, qui consistait à créer deux corps de police, aurait été suivie car les missions de la police, réparties en unités, étaient spécifiquement ancrées à l’art. 10 LPol.

Comme précédemment relevé, l’organisation opérationnelle de la gendarmerie prévue à l’art. 9 al. 2 ROPol s’inscrit dans la continuité des art. 6 al. 1 let. a et 10 al. 1 et 2 LPol et n’est ainsi pas critiquable d’un point de vue juridique. Le désaccord politique du conseiller d’État en charge du département mentionné par les recourants lors des travaux en commission parlementaire sur le PL 12'521 ne change rien à cette situation et l’on ne saurait ainsi parler d’une « fraude à la loi » du fait de l’adoption, par l’autorité intimée, de l’art. 9 ROPol. Le grief doit être écarté.

Entièrement ma fondé, le recours sera par conséquent rejeté, en tant qu’il est recevable.

7) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'500.-, qui comprend la décision sur effet suspensif, sera mis à la charge solidaire des recourants, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE CONSTITUTIONNELLE

rejette, en tant qu’il est recevable, le recours interjeté conjointement le 23 janvier 2023 par A______, B______, le C______ et le D______ contre le règlement sur l’organisation de la police du 21 décembre 2022 (ROPol - F 1 05.01), publié dans la FAO du 23 décembre 2022 ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge solidaire de A______, B______, du C______ et du D______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain JORDAN, avocat des recourants, ainsi qu’au Conseil d’État.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, Président, Blaise PAGAN, Valérie LAUBER, Philippe KNUPFER, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre constitutionnelle :

la greffière-juriste :

 

 

C. GUTZWILLER

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :