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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/9447/2021

CAPH/91/2024 du 12.11.2024 sur JTPH/419/2023 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/9447/2021 CAPH/91/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU MARDI 12 NOVEMBRE 2024

 

Entre

A______, sise ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 21 décembre 2023 (JTPH/419/2023), représentée par Me Oliver CIRIC, avocat, TA ADVISORY SA, rue de Rive 3, 1204 Genève,

et

Monsieur B______, domicilié ______ (Libye), intimé, représenté par
Me Hervé CRAUSAZ, avocat, CHABRIER AVOCATS SARL, rue du Rhône 40, case postale 1363, 1211 Genève 1.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/419/2023 du 21 décembre 2023, reçu le 27 décembre 2023 par [l'organisation internationale] A______ (ci-après: A______ ou l'organisation), le Tribunal des prud'hommes (ci-après: le Tribunal) a déclaré recevables la demande formée le 29 octobre 2021 par B______ à l'encontre de la précitée (chiffre 1 du dispositif), ainsi que la demande reconventionnelle formée par celle-ci (ch. 2), déclaré irrecevables les conclusions reconventionnelles formées par B______ dans son mémoire réponse sur demande reconventionnelle (ch. 3), condamné A______ à verser à celui-ci la somme brute de 63'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 22 octobre 2020, sous déduction de la somme nette de 5'454 fr. 10 (ch. 4), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 5), ainsi que la somme nette de 54'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 22 octobre 2020 (ch. 6), condamné A______ à remettre à B______ un certificat de travail conforme au considérant du jugement (ch. 7) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 8).

Le Tribunal a arrêté les frais judiciaires à 3'380 fr. (ch. 9), mis à la charge de A______ (ch. 10) et partiellement compensés avec l'avance de frais de 1'194 fr. effectuée par B______, acquise à l'État de Genève (ch. 11), condamné en conséquence A______ à verser le solde de 2'186 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 12) et à rembourser la somme de 1'194 fr. à B______ (ch. 13), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 14) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 15).

B.            a. Par acte expédié le 1er février 2024 au greffe de la Cour de Justice, A______ a formé appel de ce jugement, sollicitant l'annulation des chiffres 4 à 15 de son dispositif. Cela fait, elle a conclu à ce que la Cour constate que B______ avait abandonné son emploi, sans justes motifs, dès le 13 octobre 2020, que la résiliation immédiate du contrat de travail du précité le 19 octobre 2020 était justifiée, qu'aucune indemnité au sens de l'art. 337c al. 3 CO n'était donc due à celui-ci, subsidiairement que celle-ci devait être fixée à un mois de salaire, que les rapports de travail entre les parties étaient terminés depuis la date précitée pour faute grave et qu'aucune indemnité de départ n'était due à B______. Elle a également conclu à la condamnation de ce dernier à lui verser 2'310 fr. 40, avec intérêts à 5% dès le 13 octobre 2020, à titre d'indemnité pour abandon de poste, ainsi que 7'450 fr., avec intérêts à 5% dès le 13 octobre 2020, à titre de dommage-intérêt en raison des frais causés par son abandon de poste, et à ce que la Cour prenne acte de son engagement à remettre à B______ un certificat de travail complet et conforme à la vérité, sous suite de frais judiciaires et dépens.

Elle a produit des pièces figurant déjà au dossier.

b. Dans sa réponse, B______ a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions et à la confirmation du jugement entrepris, sous suite de frais judiciaires et dépens.

c. Dans sa réplique, A______ a persisté dans ses conclusions et a produit une pièce nouvelle, soit un extrait du rapport de renseignements du 4 décembre 2023 établi dans le cadre de la procédure pénale P/1______/2020 et, transmis par le Ministère public le 22 février 2024, mentionnant que B______ n'avait pas pu être auditionné par la police genevoise, ce dernier ayant invoqué être domicilié en Lybie, ne pas avoir d'autorisation pour voyager en Suisse et que sa situation financière était compliquée.

d. B______ n'a pas dupliqué dans le délai imparti.

e. Par avis du greffe de la Cour du 21 août 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure:

a. A______ est une organisation intergouvernementale, sise à Genève, dont le fonctionnement est assuré par trois organes, soit l'assemblée générale, le conseil exécutif et le secrétariat permanent.

L'organisation et le fonctionnement de A______ sont définis par une constitution et un règlement intérieur.

L'assemblée générale, organe suprême de l'organisation, est composée de délégués représentant les États membres et se réunit tous les deux ans. Elle a notamment pour fonction principale de nominer le secrétaire général (art. 14 let. c de la constitution).

Le conseil exécutif met en œuvre les décisions prises par l'assemblée générale et dirige les activités de l'organisation. Il est composé des représentants de ______ États membres et se réunit une fois par année.

Le secrétariat permanent exécute les travaux de l'organisation sur les plans technique et administratif. Il est composé d'un secrétaire général, d'un secrétaire général adjoint et du personnel nécessaire à l'accomplissement de sa mission.

Le secrétaire général, qui est le plus haut fonctionnaire technique et administratif de l'organisation, est nommé par l'assemblée générale, sur proposition du conseil exécutif et suivants les conditions que l'assemblée générale pourrait fixer (art. 27 de la constitution).

Par résolution 2______ du 17 décembre 2012, l'assemblée générale a fixé les indemnités de départ des membres du personnel du secrétariat permanent, lesquelles étaient calculées sur la base du dernier salaire mensuel multiplié par le nombre d'année de service, plafonné à cinq ans. Les périodes de plus de six mois devaient compter pour une année complète.

Par déclaration du 7 décembre 2015, A______ a formellement renoncé à l'immunité de juridiction et d'exécution pour tous litiges découlant des rapports de service de ses fonctionnaires ou anciens fonctionnaires.

b. A compter du 7 février 2016, A______ a engagé B______ en qualité d'international coordinator, pour une durée déterminée d'un an.

Ce contrat a été reconduit à plusieurs reprises.

c. Lors de la ______ème session de l'assemblée générale de A______ du 27 mars 2018, C______ et D______ ont été reconduits aux postes de secrétaire général, respectivement de secrétaire général adjoint, pour un mandat de six ans.

Le 18 octobre 2018, C______ a démissionné de son poste de secrétaire général. D______ devait alors assurer l'intérim jusqu'à la prochaine session du conseil exécutif, conformément à l'art. 80 du règlement intérieur de A______.

d. Lors de la ______ème session du conseil exécutif de A______ des 8 et 9 avril 2019, D______ a été nommé secrétaire général ad interim jusqu'à la prochaine assemblée générale et E______ a été élu au poste de secrétaire général adjoint pour une période de six ans.

e. Par contrat de travail du 1er juin 2019, signé le 13 juin 2019, A______ a engagé B______ en qualité d'international cooperation advisor, pour une durée d'un an, renouvelable automatiquement chaque année, et pour un revenu mensuel de 9'000 fr.

Selon l'art. 1 de ce contrat, B______ avait pour mission de coordonner les activités de coopération internationale et assister le secrétariat permanent sur instructions du secrétaire général. Ce contrat pouvait être résilié de manière anticipée par le secrétaire général, moyennant un préavis d'un mois, respectivement de trois mois pour les employés engagés depuis plus de trois ans (art. 9). En cas de cessation des rapports de travail, les parties ont convenu que B______ pouvait recevoir un montant équivalent à un mois de salaire, conformément à la résolution 2______ du 17 décembre 2012 (art. 8.4). Toute absence de plus de deux jours devait être justifiée par un certificat médical (art. 4a).

Ce contrat a été reconduit le 1er juin 2020.

f. Par courrier du 7 juillet 2020, E______ a rapporté au président du conseil exécutif plusieurs "irrégularités financières" constatées au sein de A______, notamment l'utilisation abusive du statut diplomatique et d'autres privilèges en lien avec l'acquisition d'un véhicule de la marque F______. Ce véhicule avait été acquis en 2017 avec les fonds de B______ et immatriculé au nom de A______ sur décision de C______.

E______ avait déjà informé D______ de ce qui précède par courrier du 3 septembre 2019.

g. Par décision de fin de service ("Decision of End of Service") datée du 12 octobre 2020, A______, soit pour elle D______, a indiqué à B______ que son contrat prendrait fin le 30 novembre 2020. Cette décision était prise conformément à l'art. 9 de son contrat de travail, qui prévoyait que le secrétaire général pouvait mettre fin audit contrat pour des raisons de réorganisation du personnel. Compte tenu de son solde de vacances, le dernier jour de travail de B______ était fixé au 15 octobre 2020.

Il était convenu que le précité percevrait, d'ici au 25 octobre 2020, la somme totale de 62'223 fr. 40, soit 17'223 fr. 40 à titre de salaire pour les mois d'octobre et novembre 2020 et 45'000 fr. à tire d'indemnité de licenciement (9'000 fr. x 5 mois).

En signant cette décision, B______ déclarait que tous ses droits avaient été respectés, que toutes ses créances avaient été réglées et qu'il n'avait plus de revendication ou de droit à l'encontre de A______.

h. Le même jour, G______, également employé au sein du secrétariat permanent de A______, et celle-ci, soit pour elle D______, ont signé une décision de fin de service au contenu similaire.

i. La ______ème session du conseil exécutif de A______ s'est tenue les 12 et 13 octobre 2020.

Le 13 octobre 2020, le conseil exécutif a démis D______ de ses fonctions de secrétaire général ad interim avec effet immédiat et a nommé E______ à ce poste.

Le 13 octobre 2020, les présidents du conseil exécutif et de l'assemblée générale, ainsi que E______, en ses qualités de secrétaire général ad interim et de secrétaire général adjoint, ont signé un courrier destiné à l'ensemble des États membres de A______, confirmant la destitution de D______, avec effet au 13 octobre 2020 à 11h00, ainsi que la nomination de E______ au poste de secrétaire général ad interim, avec pouvoir de signature individuelle.

j. Dans la soirée du 13 octobre 2020, A______ a scellé le bureau de B______ et lui a retiré ses accès informatiques.

k. Lors de la ______ème session de l'assemblée générale de A______ du 14 octobre 2020, H______ a été nommée secrétaire générale pour une période de six ans.

l. Par message WhatsApp du 14 octobre 2020 à 7h18, B______ a informé I______, assistante de direction au sein du secrétariat permanent, de son absence pour cause de maladie.

m. Par courrier recommandé du 19 octobre 2020, A______, soit pour elle E______, a résilié avec effet immédiat le contrat de travail de B______, au motif qu'il avait abandonné son poste de manière injustifiée lors des sessions du conseil exécutif et de l'assemblée générale des 12 au 14 octobre 2020.

A______ indiquait que B______ avait décidé, pour des raisons inexpliquées, de quitter la réunion en même temps que D______, qu'il ne s'était plus présenté aux sessions des 13 et 14 octobre 2020 - alors qu'il devait en assurer le bon déroulement -, qu'il ne s'était pas rendu sur son lieu de travail et qu'il n'avait présenté aucune explication pour justifier son absence. Il avait donc abandonné son poste, ce qui constituait une faute professionnelle particulièrement grave et avait entrainé de sérieux problèmes de réorganisation desdites sessions, rompant définitivement et irrémédiablement le lien de confiance.

n. Par courrier du 13 novembre 2020, B______ a mis A______ en demeure de s'acquitter des sommes convenues dans la décision de fin de service du 12 octobre 2020.

o. Par courrier du 18 novembre 2020, A______ a requis de B______ qu'il lui restitue le véhicule de la marque F______ qu'il détenait, selon elle, sans droit.

Par courrier du 30 novembre 2020, B______ a répondu que ledit véhicule lui appartenait et qu'il l'avait entièrement financé. Les plaques diplomatiques avaient, en outre, été restituées.

p. Par courriel du 4 décembre 2020, la Mission permanente de la Suisse auprès de l'Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève a informé B______ de ce qu'il disposait d'un délai de deux mois dès la date de la fin de ses fonctions pour restituer sa carte de légitimation.

D. a. Par acte du 29 octobre 2021, après l'échec de la tentative de conciliation, B______ a assigné A______ en paiement de la somme totale de 119'424 fr., avec intérêts à 5% dès le 26 octobre 2020, due à titre de salaire pour le mois d'octobre 2020 (8'611 fr. 70 nets), pour le mois de novembre 2020 (8'611 fr. 70), d'indemnité de départ prévue contractuellement (45'000 fr. bruts), d'indemnité pour licenciement immédiat injustifié (51'600 fr. nets) et d'indemnité pour tort moral (5'600 fr. nets). Il a également conclu à la remise d'un certificat de travail, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP.

Il a allégué avoir toujours fourni un travail de qualité et rempli ses tâches avec efficacité. Depuis 2019, il existait d'importantes tensions entre D______ et E______, lesquelles avaient impacté toute l'organisation, ainsi que son travail, dans la mesure où il avait été prié de choisir un camp. Son supérieur hiérarchique était D______. Ne supportant plus cette ambiance délétère, il avait signé, le 12 octobre 2020, un accord portant sur la fin de son contrat, à teneur duquel il devait travailler jusqu'au 15 octobre 2020, puis était libéré de cette obligation. Cet accord avait été préparé par G______, après discussions avec D______, puis signé par celui-ci. Ce dernier avait été destitué, lors de la session du conseil exécutif du 13 octobre 2020, au terme d'un processus de vote qui ne semblait pas conforme aux règlements de l'organisation. D______ avait alors quitté ladite session pour rejoindre son poste de travail et invité ses collaborateurs à le suivre. Estimant que cette destitution n'était pas valable, il l'avait suivi, ce dernier demeurant son supérieur hiérarchique. Il avait donc regagné son poste de travail, étant précisé qu'il n'avait aucune tâche à réaliser lors des sessions. Sous le choc de ce qui s'était passé, il avait informé I______ être souffrant. Il n'était pas revenu travailler le lendemain, ni le surlendemain. Au préalable, il avait essayé d'accéder à sa messagerie électronique professionnelle pour informer sa direction de son absence, mais ses accès avaient été bloqués. Durant son absence, aucun membre du secrétariat permanent n'avait essayé de le contacter. Son licenciement immédiat ne reposait ainsi sur aucun motif, mais constituait une mesure de rétorsion, compte tenu de son refus de prendre position contre D______. Il avait été contraint de quitter la Suisse pour retourner précipitamment en Lybie, après un délai de seulement deux mois. Il n'avait bénéficié d'aucune couverture sociale, ni perçu son salaire d'octobre 2020.

b. Dans sa réponse, A______ a conclu au déboutement de B______ de toutes ses conclusions, précisant s'en rapporter à justice quant à la délivrance d'un certificat de travail.

Sur demande reconventionnelle, elle a conclu à la condamnation du précité à lui verser la somme totale de 57'735 fr. 40 due à titre d'indemnité pour abandon de poste (2'310 fr. 40, avec intérêt à 5% dès le 13 octobre 2020), de dommage occasionné par l'abandon de poste (7'450 fr., avec intérêts à 5% dès le 13 octobre 2020) et à titre de remboursement de la valeur du véhicule de la marque F______ (47'975 fr.), dont la restitution était réclamée sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP.

Elle a allégué que D______ avait favorisé G______ et B______ pour s'assurer de leur loyauté. Celui-ci avait ainsi bénéficié, pour son usage personnel, d'un véhicule muni de plaques diplomatiques et immatriculé au nom de A______, alors qu'il n'avait pas le statut de diplomate. D______ avait également augmenté son salaire, sans raison valable, tout en réduisant celui d'autres collaborateurs, notamment de J______, et avait signé de fausses conventions de départ pour protéger B______ et G______.

Lors des sessions des 12 au 14 octobre 2020, B______ avait la charge d'en assurer le bon déroulement et d'établir le procès-verbal. Après la destitution de D______, B______ avait exprimé son désaccord en criant et en quittant la réunion de "manière démonstrative". A______ avait donc dû mandater un prestataire externe pour assurer la prise du procès-verbal, soit une prestation facturée à hauteur de 7'450 fr. Après cette destitution, G______ avait "senti" son poste menacé et avait quitté la session sans autorisation. Il s'était rendu au siège de l'organisation et, accompagné de D______, avait détruit et soustrait des documents, ainsi que vandalisé le bureau du précité. Il avait ainsi abandonné son poste.

Les conventions de départ du 12 octobre 2020 étaient antidatées. Elles avaient prétendument été signées la veille de la destitution du secrétaire général ad interim, ce qui était impossible puisque ce jour-là la session du conseil exécutif avait duré toute la journée. A cela s'ajoutait que ces conventions n'avaient pas été enregistrées dans le livre de la correspondance sortante de A______ et aucun numéro de référence ne leur avait été attribué. A cet égard, elle a produit un extrait du livre de sa correspondance sortante arrêté au 19 octobre 2020 (pièce n° 35). Par ailleurs, aucun licenciement n'avait été discuté au préalable. Ces conventions avaient donc été rédigées et conclues le 13 octobre 2020 après la destitution de D______, alors qu'il n'avait plus les pouvoirs de l'engager. De plus, celles-ci étaient différentes de celle conclues quelques jours avant, soit le 7 octobre 2020, avec un autre employé, K______, qui comportait un numéro de référence et prévoyait le versement des salaires d'octobre et novembre 2020, ainsi qu'une indemnité d'un mois de salaire, "taking into account that he received already a Termination indemnity of 4 months".

c. Dans sa réplique et réponse sur demande reconventionnelle, B______ a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions et a, pour le surplus, persisté dans ses conclusions. Il a également conclu à la constatation de la validité du transfert de propriété du véhicule de la marque F______, subsidiairement au versement en sa faveur de 47'975 fr., avec intérêts à 5% dès le 5 avril 2017.

B______ a réaffirmé que l'ambiance au sein de A______ était délétère, produisant à cet égard divers articles de presse, confirmant ses allégués. E______ était désagréable avec lui et ce, sans raison. A plusieurs reprises, il l'avait accusé d'avoir conspiré contre J______ et souhaitait "se débarrasser" de lui, ainsi que des autres employés qui suivaient les instructions de D______. Fatigué par ces luttes internes, il avait fait part à ce dernier, en août 2020, de son intention de quitter l'organisation. En raison de l'importante charge de travail et de l'organisation des sessions d'octobre 2020, D______ lui avait demandé de rester jusqu'à la fin de celles-ci, soit jusqu'au 15 octobre 2020. Peu avant le début desdites sessions, il avait réitéré son intention de quitter l'organisation et, dans ce contexte, la décision de fin de service avait été conclue le 12 octobre 2020. Il avait été pris d'un profond malaise à l'idée de travailler pour E______ les 14 et 15 octobre 2020. La décision de fin de service le libérant de l'obligation de travailler dès le 15 octobre 2020 au soir, il n'avait pas jugé nécessaire de consulter un médecin, puisque son absence n'excédait pas deux jours. Il n'avait pas participé à la destruction ou au vol de documents, ni "vandalisé" le bureau de D______.

d. Dans sa duplique et réplique sur demande reconventionnelle, A______ a persisté dans ses conclusions.

Elle a réaffirmé que la décision de fin de service avait été rédigée dans la précipitation le 13 octobre 2020, après la destitution de D______. De plus, cette décision n'avait fait l'objet d'aucune discussion préalable et n'emportait pas de concessions réciproques.

e. Dans sa duplique sur demande reconventionnelle, B______ a persisté dans ses conclusions et contesté l'argumentation susvisée.

f. Lors de l'audience du Tribunal du 17 janvier 2023, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

B______ a confirmé ne pas avoir perçu de revenu pour la période du 1er au 19 octobre 2020.

A______, soit pour elle E______, a déclaré avoir déposé une plainte pénale à l'encontre de B______, notamment pour faux dans les titres s'agissant de la convention de fin de service du 12 octobre 2020 (P/1______/2020). Aucune audience n'avait encore été convoquée. Elle s'est engagée à verser le revenu susvisé sur le compte du précité.

g. Le 31 mars 2023, B______ a produit un projet de certificat de travail, dont la teneur est la suivante:

"Par la présente, nous certifions que Monsieur B______, détenteur de la nationalité libyenne, né le ______ 1989, a été employé du 7 février 2016 au 30 novembre 2020 au sein Secrétariat permanent de A______ en tant que Conseiller en coopération internationale, chargé de la formation et des relations avec les pays L______, à temps plein.

Ses tâches principales étaient: Maintenir et développer les relations avec les pays L______; Développer et mettre en œuvre le plan de formation; Développer les relations avec les pays potentiellement appelés à devenir membres.

Durant toute sa période d'activité, M. B______ nous a donné entière satisfaction avec des résultats probants tant dans la gestion des relations avec les pays membres que dans l'établissement et le suivi du programme de formation de A______. M. B______ a toujours été un employé modèle, tant dans ses relations avec ses collègues, sa hiérarchie qu'avec les États membres grâce à son dévouement, son engagement sans faille et ses qualités relationnelles. Nous tenons à le remercier chaleureusement et lui souhaitons de trouver un nouveau poste à la hauteur de ses compétences. Nous lui exprimons ici notre plein soutien et nos vives recommandations à tout futur employeur potentiel."

h. Lors de l'audience du Tribunal du 18 avril 2023, B______ a déclaré ne pas avoir retrouvé d'activité professionnelle. Le 13 octobre 2020, il se sentait bien jusqu'à la destitution de D______, puis, après celle-ci, il se sentait mal. Il avait averti I______ de son absence, car il avait constaté que ses accès informatiques avaient été bloqués dans la soirée du 13 octobre 2020. Après sa destitution, D______ avait quitté la session et il l'avait suivi, avec G______, dans les locaux de A______. Il avait alors vérifié s'il y avait des notifications ou des courriels concernant la session de l'assemblée général du lendemain, sur instructions de D______. C'était M______, employée de A______, qui était en charge de rédiger le procès-verbal des sessions.

E______, représentant de A______, a déclaré que les accès informatiques de B______ avaient été immédiatement coupés et qu'il n'était plus intéressé à travailler avec lui. Il n'avait jamais été informé de la maladie de B______. S'agissant du projet de certificat de travail produit, le précité était effectivement en charge des deux premières tâches listées, mais la troisième était du ressort de J______.

Entendue en qualité de témoin, I______ a déclaré avoir travaillé auprès de A______ d'octobre 2019 à mai 2021. Il existait des tensions au sein de celle-ci, principalement entre D______ et E______. Ce dernier n'acceptait pas de ne pas être le secrétaire général. B______ et le précité avaient des mentalités différentes. Ils étaient polis l'un avec l'autre, avec certains hauts et bas. Il y avait en plus la barrière de la langue. E______ avait accusé à tort B______ d'avoir empiété sur les tâches de J______. En 2020, le climat de travail était tendu en raison de l'élection du nouveau secrétaire général. B______ avait été surpris et choqué de la destitution de D______; personne ne s'y attendait. Elle ignorait si B______ avait des tâches précises à effectuer lors des sessions d'octobre 2020. Elle se souvenait avoir reçu, le 14 octobre 2020, un message de B______ l'informant être absent pour cause de maladie. Elle ne pensait pas en avoir informé E______, ce dernier étant occupé ce jour-là. Toute correspondance de l'organisation, sortante ou entrante, se voyait attribuer un numéro et était inscrite dans un livre de correspondance de manière manuscrite. En revanche, les contrats de travail, les certificats médicaux et les décisions de fin de service n'étaient pas inscrits dans ce registre. Le travail de B______ était de qualité et donnait satisfaction.

i. Le 20 avril 2023, A______ a crédité le compte bancaire de B______ d'un montant de 5'454 fr. 10.

j. Lors des audiences du Tribunal des 20 et 24 avril 2023, A______ a indiqué que le versement susvisé concernait le salaire de B______ pour la période du 1er au 19 octobre 2020.

Entendu en qualité de témoin, D______ a déclaré être actuellement en litige avec A______ concernant la fin de son contrat de travail. Il était le supérieur hiérarchique de B______, dont le travail était excellent. Ce dernier était en charge de la gestion des pays L______, de la formation et de la coordination de certains fonds internationaux. Il pouvait également lui confier des tâches supplémentaires, comme l'organisation de conférence. B______ était très engagé dans son travail et ne comptait pas ses heures. Lorsqu'il avait pris ses fonctions de secrétaire général ad interim, il avait constaté de grandes disparités salariales entre les employés. Il avait alors décidé de rééquilibrer les salaires, après avoir reçu l'accord des présidents et vice-présidents du conseil exécutif et de l'assemblée générale, ainsi que des directeurs de A______, dont E______. L'augmentation de salaire de B______ était, en outre, justifiée par les tâches supplémentaires qui lui avaient été confiées. Il existait beaucoup de tensions au sein de A______ en 2019; deux clans s'étaient formés. E______ était agressif à l'encontre de B______ et l'avait accusé, à tort, d'avoir conspiré contre J______. E______ lui avait proposé, à quatre reprises, de licencier G______ et B______. Ces derniers s'étaient souvent plaints de cette situation, au point de ne plus adresser la parole à E______. Lorsqu'il avait annoncé à G______ et B______, en août 2020, ne pas être candidat au poste de secrétaire général, ces derniers avaient demandé à mettre fin à leur contrat de travail. Au vu de l'imminence des sessions d'octobre 2020, il avait proposé à B______ de le libérer après l'élection du nouveau secrétaire général. Il avait signé la décision de fin de service le 12 octobre 2020, laquelle avait été rédigée en amont par G______ et soumise à un conseiller juridique. Le déroulement de la session du conseil exécutif du 13 octobre 2020 n'était conforme ni à la constitution, ni au règlement intérieur de l'organisation. La décision de le destituer était un "putsch". Après avoir quitté ladite session, il avait regagné son bureau avec G______ et B______, dans le but de préparer la séance de l'assemblée générale du lendemain. B______ était choqué. Le procès-verbal des sessions était rédigé par M______ et, en cas d'absence, par I______.

J______, entendue en qualité de témoin et employée au sein de A______ depuis 2010, a déclaré que D______ était proche de B______; il le soutenait beaucoup. Ce dernier avait été augmenté en raison des relations personnelles qu'il entretenait avec le secrétaire général ad intérim. Elle n'avait pas constaté que de nouvelles tâches avaient été confiées à B______. Lors de cette augmentation de salaire, le sien avait diminué. Le précité entretenait également de bonnes relations avec E______; il venait régulièrement lui demander des conseils. Après la destitution de D______, B______ avait réagi fortement; il s'était levé et avait crié. Lors des sessions d'octobre 2020, le précité était responsable de la communication en ligne avec les membres en visioconférence. Personne n'était informé de ce que D______ et B______ avaient signé un accord de licenciement le 12 octobre 2020. Le précité n'avait jamais dit vouloir quitter A______.

Entendu en qualité de témoin, K______, actuellement employé au sein de A______, a déclaré avoir été licencié quelques jours avant les sessions d'octobre 2020, puis réengagé le 13 octobre 2020, après la destitution de D______. Dans la soirée du 13 octobre 2020, il avait bloqué tous les accès informatiques des employés ayant quitté la session du conseil exécutif, en raison de ce départ et non de l'état dans lequel le bureau de D______ avait été retrouvé.

Entendu en qualité de témoin, G______ a déclaré être actuellement en litige avec A______ concernant la fin de son contrat de travail. Des tensions s'étaient fait sentir dès la nomination de E______, en 2019, au poste de secrétaire général adjoint. Celles-ci étaient dues à la lutte de pouvoir que se livraient le précité et le secrétaire général ad interim. Il fallait obéir à l'un ou à l'autre et chacun donnait des instructions contradictoires. Au fil du temps, les relations entre B______ et E______ étaient devenues très compliquées. Ce dernier avait accusé B______, de manière infondée, d'avoir conspiré contre J______, ce qui avait encore aggravé leurs relations. B______ avait souffert de cette situation. Lui-même avait quitté la session du 13 octobre 2020 immédiatement après la destitution de D______. B______ était sorti peu après lui. Il avait constaté qu'il était remonté, mais n'avait pas entendu de cri. Il avait préparé la décision de fin de service du 12 octobre 2020 sur la base d'un document standard de l'organisation, qui contenait toujours les mêmes rubriques, à savoir le salaire, les vacances et l'indemnité de fin des rapports de service. Cela faisait partie de son cahier des charges depuis 2014. Il avait oublié d'indiquer un numéro de référence sur cette décision, étant souffrant le 12 octobre 2020. La décision de fin de rapports de service de K______ contenait un numéro de référence, car elle lui avait été envoyée et non remise en mains propres comme pour B______. Lui-même et ce dernier parlaient de quitter A______ depuis l'été 2020. La pièce n° 35 produite par celle-ci consignait la correspondance sortante, alors que cette décision de fin de service constituait une correspondance entrante. En effet, tous les documents des ressources humaines et les documents administratifs étaient inscrits dans le registre de la correspondance entrante. Le travail de B______ "était impeccable", raison pour laquelle le secrétaire général lui avait confié des tâches supplémentaires, ce qui avait justifié une augmentation de salaire. Ce dernier n'avait pas été favorisé.

A l'issue de l'audience du 24 avril 2023, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions, étant précisé que A______ a renoncé à sa conclusion reconventionnelle en restitution du véhicule de la marque F______ et que B______ a réduit sa conclusion en paiement de son salaire d'octobre 2020, afin de tenir compte du versement de 5'454 fr. 10 du 20 avril 2023, sur quoi le Tribunal a gardé la cause à juger.

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré que licenciement immédiat de B______ était injustifié, ce dernier n'ayant pas abandonné son poste. Il ressortait des témoignages de I______, G______ et D______ que celui-ci et E______ se livraient, depuis 2019, à une lutte de pouvoir, laquelle créait d'importantes tensions au sein de l'organisation et que deux clans s'étaient formés. De plus, E______ entretenait de mauvaises relations avec B______. Celui-ci avait donc suivi D______ après sa destitution du 13 octobre 2020, qu'il pensait toujours être son supérieur hiérarchique, afin de réaliser les tâches qui lui étaient confiées. E______ avait d'ailleurs affirmé avoir immédiatement bloqué les accès informatiques de B______ et ne plus être intéressé à travailler avec lui. Le licenciement immédiat de ce dernier constituait donc une mesure de rétorsion. A______ n'avait d'ailleurs pas tenté de le joindre ni requis d'explication concernant son absence. Dans ces circonstances, B______ n'avait pas abandonné son poste.

Il était vraisemblable, au vu des tensions et des témoignages, que B______ avait manifesté son intention de quitter A______ en août 2020. Aucun élément du dossier ne permettait de retenir que la décision de fin de service du 12 octobre 2020 était antidatée. Cette décision devait être qualifiée de convention de résiliation, les parties ayant conclu un accord de séparation et de libération, pour solde de tous comptes et prétentions. Celle-ci devait donc être respectée et A______ devait verser les montants convenus, sous réserve des montants afférents à son salaire qui devaient être bruts et de la déduction de la somme de 5'454 fr. 10 déjà versée. Ainsi, A______ devait verser à B______ 63'000 fr. bruts (18'000 fr. à titre de salaire et 45'000 fr. à titre d'indemnité de départ), sous déduction dudit montant.

En outre, A______ devait verser à B______ une indemnité pour licenciement immédiat injustifié, correspondant à six mois de salaire, soit la somme nette de 54'000 fr., sa faute étant particulièrement grave. En effet, la fin des rapports de travail sans préavis ne se justifiait pas, aucune faute du précité n'ayant été démontrée. Par ailleurs, au jour de son licenciement immédiat, B______ ne devait plus retourner sur son lieu de travail et la durée du contrat qui restait à courir était inférieure à six semaines. A______ n'avait pas pris contact avec ce dernier, afin de le mettre en demeure de reprendre son activité. En réalité, c'était par pure convenance personnelle que E______ avait licencié B______ avec effet immédiat. A cela s'ajoutait que celui-ci était dans sa cinquième année de service, avait toujours donné satisfaction à son employeur et avait été contraint de quitter le territoire suisse.

Les témoins entendus avaient confirmé que le travail de B______ était irréprochable, mais il n'était pas établi qu'il avait pour tâche de développer les relations avec les pays potentiellement appelés à devenir membre de l'organisation. Sous réserve de ce qui précède, le Tribunal, en se fondant sur le projet de certificat de travail produit, a quelque peu reformulé celui-ci et condamné A______ à le lui remettre.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

En l'espèce, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Déposé dans le délai utile et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 131, 145 al. 1 let. c et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.3 Les parties ne contestent pas, à juste titre, la compétence des juridictions genevoises pour connaître du présent litige, dans la mesure où l'appelante a, par déclaration du 7 décembre 2015, formellement renoncé à l'immunité de juridiction pour tous litiges découlant des rapports de service de ses fonctionnaires ou anciens fonctionnaires.

De plus, l'intimé accomplissait habituellement son travail à Genève et le siège de l'appelante s'y trouve également (art. 34 CPC).

2.             La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs motivés qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l’art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

La valeur litigieuse étant supérieure à 30'000 fr., la procédure ordinaire s'applique et le procès est régi par la maxime des débats, qui prévoit que les parties allèguent les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions et produisent les preuves qui s'y rapportent (art. 55 al. 1 CPC, art. 243 et art. 247 al. 2 CPC a contrario).

3.             L'appelante a produit une pièce nouvelle devant la Cour.

3.1 La Cour examine d'office la recevabilité des pièces produites en appel (Reetz/Hilber, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2013, n° 26 ad art. 317 CPC).

Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

3.2 En l'occurrence, la pièce nouvelle produite par l'appelante est postérieure à la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger et a également été reçue par celle-ci après le dépôt de son appel, de sorte qu'elle est recevable, de même que les faits s'y rapportant, étant relevé que ceux-ci ne sont pas pertinents pour l'issue du litige.

4.             L'appelante fait grief au Tribunal de ne pas avoir considéré que l'intimé avait abandonné son poste le 13 octobre 2020 et que son licenciement immédiat était ainsi justifié.

4.1.1 L'abandon de poste, au sens de l'art. 337d CO, entraîne l'expiration immédiate du contrat. Il est réalisé lorsque le travailleur refuse consciemment, intentionnellement et définitivement de continuer à fournir le travail convenu (ATF 121 V 277 consid. 3a). Dans ce cas, le contrat de travail prend fin immédiatement, sans que l'employeur doive adresser au salarié une résiliation immédiate de son contrat (ATF 121 V 277 consid. 3a; 112 II 41 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 4C.303/2005 du 1er décembre 2005 consid. 2.2 et 4C.370/2001 du 14 mars 2002 consid. 2a).

La décision du travailleur d'abandonner son emploi doit apparaître nettement. Lorsque celle-ci ne ressort pas d'une déclaration explicite du travailleur, le juge doit examiner si l'employeur a pu de bonne foi, en considération de l'ensemble des circonstances, comprendre son attitude comme un abandon de poste; le principe de la confiance, relatif à l'interprétation des déclarations et autres manifestations de volonté entre cocontractants (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; 135 III 410 consid. 3.2) est déterminant (arrêts du Tribunal fédéral 4A_337/2013 du 12 novembre 2013 consid. 3 et 4C.339/2006 du 21 décembre 2006 consid. 2.1). Lorsque l'attitude du travailleur est équivoque, il appartient à l'employeur de le mettre en demeure de reprendre son activité (arrêt du Tribunal fédéral 4A_91/2021 du 9 juillet 2021 consid. 3.1).

Selon la jurisprudence, lorsque l'absence injustifiée du travailleur est de courte durée, soit quelques jours, l'employeur ne peut pas déduire des circonstances que le travailleur a abandonné son emploi; il peut seulement lui reprocher un manquement de nature à justifier une résiliation immédiate des rapports de travail, au besoin après avertissement, soit en le mettant en demeure de reprendre le travail ou, le cas échéant, de présenter un certificat médical (arrêt du Tribunal fédéral 4C.370/2001 précité consid. 2a).

Il n'y a pas d'abandon d'emploi lorsque le travailleur malade ou accidenté tarde à faire parvenir à l'employeur un certificat médical. Si l'absence est motivée par, ou pourrait être due à une incapacité de travail, et si l'employeur nourrit des doutes à ce propos, il ne saurait conclure de suite à un abandon d'emploi, ni encore procéder à un licenciement immédiat; il doit d'abord sommer le salarié de reprendre son travail ou de produire un certificat médical; ce n'est que si ces démarches sont restées vaines, ou d'emblée inutiles, qu'un abandon d'emploi peut être retenu (Gloor, Commentaire du contrat de travail, 2022, n° 9 ad art. 337d CO; Wyler/Heinzer, Droit du travail, 2019, p. 770). Ne constitue pas non plus un abandon d'emploi le fait pour le travailleur de partir sur un mouvement d'humeur (Gloor, op. cit., n° 10 ad art. 337d CO).

Il incombe à l'employeur de prouver les faits propres à dénoter un abandon de poste (arrêt du Tribunal fédéral 4A_91/2021 précité consid. 3.1).

A teneur de l'art. 337d al. 1 CO, lorsque le travailleur n'entre pas en service ou abandonne son emploi abruptement sans justes motifs, l'employeur a droit à une indemnité égale au quart du salaire mensuel; il a en outre droit à la réparation du dommage supplémentaire.

4.1.2 L'employeur et le travailleur peuvent résilier immédiatement le contrat en tout temps pour de justes motifs (art. 337 al. 1 CO). Sont notamment considérés comme de justes motifs, toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d'exiger de celui qui a donné le congé la continuation des rapports de travail (art. 337 al. 2 CO).

Mesure exceptionnelle, la résiliation immédiate pour justes motifs doit être admise de manière restrictive (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; 130 III 28 consid. 4.1). Les faits invoqués à l'appui d'un renvoi immédiat doivent avoir entraîné la perte du rapport de confiance qui constitue le fondement du contrat de travail (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_395/2018 du 10 décembre 2019 consid. 5.1). Seul un manquement particulièrement grave du travailleur justifie son licenciement immédiat (ATF 142 III 579 consid. 4.2). Si le manquement est moins grave, il ne peut entraîner une résiliation immédiate que s'il a été répété en dépit d'un ou de plusieurs avertissements (ATF 142 III 579 consid. 4.2; 130 III 213 consid. 3.1; 130 III 28 consid. 4.1). L'employeur peut toutefois s'en abstenir lorsqu'il ressort de l'attitude de l'employé qu'une telle démarche serait inutile (ATF 127 III 153 consid. 1b).

Le juge apprécie librement s'il existe de justes motifs (art. 337 al. 3 CO); il applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC) et il dispose d'un large pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 4A_105/2018 du 10 octobre 2018 consid. 3.2.2). Savoir si le comportement incriminé atteint la gravité nécessaire dépend des circonstances du cas concret (ATF 142 III 579 consid. 4.2). Dans son appréciation, le juge doit notamment tenir compte de la position du travailleur au sein de l'entreprise, du type et de la durée des rapports contractuels, de la nature et de l'importance des manquements (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; 130 III 28 consid. 4.1; 127 III 351 consid. 4a).

L'absence injustifiée d'un travailleur - moyennant avertissement selon les circonstances - peut constituer un juste motif de résiliation immédiate du contrat de travail par l'employeur (arrêt du Tribunal fédéral 8C_468/2019 du 28 février 2020 consid. 4.1). Il résulte, en effet, du devoir de fidélité que le travailleur doit notamment informer immédiatement l'employeur de ses absences imprévisibles, comme par exemple une maladie (arrêt du Tribunal fédéral 4A_521/2016 du 1er décembre 2016 consid. 3.4 et 3.5).

Cela étant, ne permet pas un licenciement immédiat une absence injustifiée de courte durée (un à deux jours) et ne constituant pas un cas de récidive. Une absence pour cause de maladie, sans production immédiate d'un certificat médical attestant de l'incapacité de travail, ne justifie pas non plus la résiliation immédiate du contrat; l'employeur doit d'abord mettre le travailleur en demeure de lui en fournir un. Par ailleurs, un brusque départ de la place de travail par suite d'une perturbation psychique (énervement) ne justifie pas un licenciement immédiat (Gloor, op. cit., n° 29 ad art. 337 CO).

Il appartient à la partie qui se prévaut de justes motifs de résiliation immédiate d'en établir l'existence (art. 8 CC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2010 du 13 avril 2010 consid. 4.1).

4.1.3 Aux termes de l'art. 337c al. 1 CO, lorsque la résiliation immédiate du contrat est injustifiée, le travailleur a droit à ce qu'il aurait gagné si les rapports de travail avaient pris fin à l’expiration du délai de congé ou à la cessation du contrat conclu pour une durée déterminée.

Selon l'art. 341 al. 1 CO, le travailleur ne peut pas renoncer, pendant la durée du contrat et durant le mois qui suit la fin de celui-ci, aux créances résultant de dispositions impératives de la loi ou d'une convention collective. Selon la jurisprudence, cette norme prohibe la renonciation unilatérale du travailleur, mais elle n'interdit pas aux parties de rompre en tout temps le contrat d'un commun accord, pour autant qu'elles ne cherchent pas, par ce biais, à détourner une disposition impérative de la loi (ATF 119 II 449 consid. 2a; 118 II 58 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_362/2015 du 1er décembre 2015 consid. 3.2).

Pour être valable, un accord de résiliation doit être librement consenti. La résiliation conventionnelle n'est soumise à aucune exigence de forme (cf. art. 115 CO) et peut donc être donnée par écrit, oralement ou même tacitement. Les règles usuelles d'interprétation des conventions sont applicables (ATF 133 III 675 consid. 3.3; arrêts du Tribunal fédéral 4A_474/2008 du 13 février 2009 consid. 3.1 et 4A_362/2015 précité consid. 3.2; Wyler/Heinzer, op. cit.,
p. 648-649). La validité d'une transaction entre les parties est subordonnée à une équivalence appropriée de leurs concessions réciproques (136 III 467 consid. 4.5).

4.1.4 Lorsque l'employeur résilie immédiatement le contrat de travail sans justes motifs, le juge peut condamner celui-ci à verser au travailleur une indemnité dont il fixera librement le montant, compte tenu de toutes les circonstances; cette indemnité ne peut toutefois dépasser le montant correspondant à six mois de salaire du travailleur (art. 337c al. 3 CO).

En principe, cette indemnité couvre le tort moral subi par le travailleur (ATF 135 III 405 consid. 3.1). Sauf cas exceptionnel, elle doit être versée pour tout licenciement immédiat dénué de justes motifs (ATF 133 III 657 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_173/2018 du 29 janvier 2019 consid. 5.1).

Cette indemnité, qui s'ajoute aux droits découlant de l'art. 337c al. 1 CO, revêt une double finalité, à la fois réparatrice et punitive, quand bien même elle ne consiste pas en des dommages-intérêts au sens classique, car elle est due même si la victime ne subit ou ne prouve aucun dommage; revêtant un caractère sui generis, elle s'apparente à la peine conventionnelle (ATF 135 III 405 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_173/2018 précité consid. 5.1).

L'indemnité est fixée d'après la gravité de la faute de l'employeur, la mesure de l'atteinte portée aux droits de la personnalité du travailleur et la manière dont la résiliation a été annoncée. D'autres critères tels que la durée des rapports de travail, l'âge du lésé, sa situation sociale et les effets économiques du licenciement entrent aussi en considération (arrêt du Tribunal fédéral 4A_161/2016 du 13 décembre 2016 consid. 3.1).

L'indemnité consécutive à une faute grave de l'employeur se situe le plus souvent entre quatre et six mois de salaire. Une éventuelle faute concomitante du travailleur est prise en considération et peut donner lieu à une réduction, voire à une suppression de l'indemnité lorsque la faute du travailleur est grave, mais insuffisante pour justifier le licenciement avec effet immédiat, ou encore lorsque tout manquement de l'employeur ou tout reproche d'un autre ordre est exclu (Wyler/Heinzer, op. cit., p. 765).

4.2.1 En l'espèce, il est établi que l'intimé a quitté la ______ème session du conseil exécutif de l'appelante du mardi 13 octobre 2020, après la destitution de D______, et ne s'est pas présenté à son travail les jours suivants, soit jusqu'au lundi 19 octobre 2020, date à laquelle l'appelante l'a licencié de manière immédiate.

Compte tenu de cette courte durée d'absence, soit seulement quelques jours ouvrables, l'appelante ne pouvait pas déduire des circonstances que celui-ci avait abandonné son emploi.

L'appelante n'a d'ailleurs aucunement démontré une intention ferme et définitive de l'intimé de ne plus continuer à fournir sa prestation de travail. En effet, après son départ de la session susvisée, l'intimé est retourné dans les locaux de l'appelante, ce qui n'est pas contesté. A cet égard, l'intimé a déclaré avoir exécuté des tâches en lien avec la session de l'assemblée générale du lendemain, ce que le témoin D______ a corroboré. En tous les cas, contrairement à ce que soutient l'appelante, le fait que l'intimé ait quitté son poste lors de ladite session, sur un mouvement d'humeur, ne constitue pas un abandon de poste au sens de la loi.

Le 14 octobre 2020 au matin, l'intimé a envoyé un message à I______ pour prévenir de son absence pour cause de maladie. Cette dernière, entendue en qualité de témoin, a confirmé avoir reçu ce message, précisant ne pas avoir averti E______ de cette absence, ce qui ne saurait être reproché à l'intimé. Sur les raisons de cette absence, ce dernier a allégué avoir été pris d'un profond malaise à l'idée de travailler dorénavant pour E______. Les témoins I______ et D______ ont tous deux confirmé que l'intimé avait été "choqué" par la destitution du précité. Le témoin G______ a, quant à lui, relevé que l'intimé était "remonté". Les témoins D______ et G______ ont également confirmé que l'intimé et E______ n'entretenaient pas de bonnes relations, ce dernier l'ayant notamment accusé, à tort, d'avoir conspiré contre J______, ce que le témoin I______ a confirmé. Le témoin D______ a également précisé que E______ était agressif envers l'intimé. Il s'ensuit que les allégations de l'intimé sur les raisons de son absence dès le 14 octobre 2020 sont crédibles, comme retenu par les premiers juges. Le seul témoignage de J______, à teneur duquel l'intimé entretenait de bonnes relations avec E______, ne permet pas de mettre en doute ce qui précède et n'est ainsi pas convainquant.

Le fait que l'intimé n'ait pas directement informé E______ de son absence pour cause de maladie n'est pas déterminant. En effet, le soir du 13 octobre 2020, ce dernier a déclaré avoir décidé de bloquer immédiatement les accès informatiques de l'intimé, de sorte que ce dernier ne pouvait pas le prévenir, le lendemain, de son absence. Comme retenu par les premiers juges, un tel blocage n'est d'ailleurs pas compatible avec la thèse d'un abandon de poste. A cet égard, le témoin K______ a déclaré que les accès informatiques de l'intimé avaient été bloqués, car il avait quitté la session du 13 octobre 2020 et non en raison de la prétendue dégradation du bureau de D______, comme soutenu par l'appelante.

A cela s'ajoute que l'appelante n'a aucunement mis l'intimé en demeure de reprendre son activité, ni requis de celui-ci un certificat médical ou des explications concernant son absence, ce qui lui incombait si elle suspectait un abandon de poste. En effet, l'appelante n'a pas allégué, ni a fortiori établi, avoir tenté de joindre l'intimé le 14 octobre 2020, ni les jours suivants. Par ailleurs, à teneur du contrat de travail de l'intimé, ce dernier n'avait pas l'obligation de fournir un certificat médical pour deux jours d'absence.

Compte tenu de l'ensemble de ce qui précède, l'appelante ne pouvait pas, de bonne foi, comprendre le comportement de l'intimé comme un refus conscient, intentionnel et définitif de poursuivre l'exécution de son travail. Elle n'a donc pas établi que l'intimé avait abandonné son poste au sens des principes rappelés supra.

Il s'ensuit que les conclusions de l'appelante en constatation d'un abandon de poste, en versement d'une indemnité fondée sur l'art. 337d CO (3'320 fr.) et en réparation d'un quelconque dommage engendré par l'absence de l'intimé lors de la session du 13 octobre 2020 (7'450 fr.) ne sont pas fondées et ont été, à juste titre, rejetées par les premiers juges. A cet égard, il sera également relevé que l'appelante n'a pas établi que l'intimé aurait eu pour tâche d'établir le procès-verbal de ladite session.

4.2.2 Un abandon de poste ne pouvant pas être retenu, reste à déterminer si l'absence de l'intimé constitue ou non un juste motif de résiliation immédiate.

Comme retenu ci-dessus, le départ de l'intimé de la session du 13 octobre 2020, après la destitution de D______, ne constitue pas un juste motif de résiliation. En effet, il a suivi ce dernier, qu'il considérait encore comme son supérieur hiérarchique, dans les locaux de l'appelante et, sur instructions de celui-ci, a exécuté des tâches en vue de la session du lendemain. En tous les cas, un brusque départ de la place de travail, par suite d'un énervement, ne justifie pas un licenciement immédiat de l'employé. Ainsi, le départ de l'intimé de ladite session ne constitue pas un juste motif de licenciement immédiat, d'autant plus sans avertissement préalable.

L'appelante n'a pas allégué, ni a fortiori démontré, que l'intimé aurait souvent été absent depuis son engagement. Il s'ensuit que l'absence de l'intimé durant quelques jours ouvrables, soit du 14 au 16 octobre 2020, sans présentation d'un certificat médical, ne justifie pas non plus la résiliation immédiate de son contrat de travail le lundi 19 octobre 2020, étant rappelé que l'appelante ne l'a pas mis en demeure de lui en fournir un, ni de justifier de son absence.

Par ailleurs, à teneur de la convention de résiliation du 12 octobre 2020 - cette qualification n'est pas remise en cause en appel ni l'équivalence de concessions réciproques - l'appelante, soit pour elle D______, et l'intimé ont convenu de mettre un terme au contrat de travail de celui-ci pour le 30 novembre 2020. Compte tenu de son solde de vacances restant, son dernier jour de travail a été fixé au jeudi 15 octobre 2020. L'intimé était ainsi libéré de son obligation de se présenter à son travail dès le vendredi 16 octobre 2020 et n'a donc pas "abandonné son poste", comme soutenu par l'appelante.

Celle-ci soutient toutefois que cette convention ne serait pas valable, car elle aurait, en réalité, été signée le 13 octobre 2020, alors que D______ n'avait plus les pouvoirs de l'engager. Cela étant, le simple fait que cette convention ait été signée la veille de la destitution du précité n'est pas apte à démontrer qu'elle aurait été antidatée. A cet égard, le témoin D______ a confirmé les allégations de l'intimé, selon lesquelles la fin des rapports de travail avait déjà été évoquée entre eux à la fin de l'été 2020. Ledit témoin a précisé avoir demandé à l'intimé de rester jusqu'aux sessions d'octobre 2020. Le départ de l'intimé a donc été discuté en amont entre les deux signataires de la convention, ce qui a été confirmé par le témoin G______.

Par ailleurs, compte tenu des tensions et des luttes de pouvoir émaillant le secrétariat permanent - établis par les articles de presse produits et confirmés par les témoins I______, D______ et G______ -, ainsi que l'accusation infondée de conspiration, il apparaît crédible que l'intimé ait manifesté son intention de quitter l'appelante, comme retenu par les premiers juges. Le fait que le témoin J______ ait déclaré qu'à sa connaissance l'intimé ne voulait pas quitter l'appelante n'est ainsi pas convainquant, ni suffisant à mettre en doute la validité de la convention de résiliation du 12 octobre 2020.

L'absence de démarches visant à repourvoir le poste de l'intimé n'est pas non plus déterminante s'agissant de cette validité, étant rappelé que la fin de son contrat était prévue pour le 30 novembre 2020.

Le fait que D______ n'ait pas informé E______ - qui avait requis à plusieurs reprises la démission de l'intimé - de la volonté de ce dernier de quitter l'organisation n'est pas non plus pertinent et s'explique par les luttes de pouvoir les opposant. Par ailleurs, il n'est pas contesté que les questions relatives au personnel du secrétariat permanent étaient du ressort exclusif du secrétaire général ad interim, soit D______. Il n'est donc pas déterminant que la convention de résiliation de l'intimé n'ait pas été discutée avec d'autres membres de l'appelante.

De plus, contrairement à ce que soutient l'appelante, le fait que ladite convention ne soit pas mentionnée dans son registre de correspondance sortante n'est pas pertinent. En effet, le témoin G______ a expliqué qu'une telle décision constituait un document interne à l'organisation, de sorte qu'il avait dû être enregistré dans le registre des documents entrants et non dans celui des documents sortants. Or, la pièce n° 35 produite par l'appelante consigne le courrier sortant, ce qui n'est pas contesté, et celle-ci n'a pas produit d'extrait du registre des courriers entrants. Pour sa part, le témoin I______ a déclaré que les décisions de fin de service n'étaient pas inscrites dans les registres.

Le fait qu'aucun numéro de référence ne soit mentionné sur la convention de résiliation litigieuse ne saurait suffire à mettre en doute sa validité. En effet, le témoin G______, auteur de ladite convention, a expliqué à cet égard qu'il s'agissait d'un oubli de sa part, étant relevé qu'il a précisé être souffrant le 12 octobre 2020. Ce dernier a également indiqué avoir préparé ladite convention sur la base d'un document standard de l'appelante, qui contenait toujours les mêmes rubriques, soit le salaire, les vacances et l'indemnité de fin des rapports de service. Contrairement à ce que soutient l'appelante, la convention de départ de K______ n'est pas différente de celle de l'intimé. Elle contient lesdites rubriques et K______ a également bénéficié d'une indemnité de départ équivalant à cinq mois de salaire au total, comme l'intimé et prévu par la résolution 2______ du 17 décembre 2012. Le témoin G______ a expliqué que la convention de départ de K______ contenait un numéro de référence, car elle lui avait été envoyée, contrairement à celle de l'intimé qui lui avait été remise en mains propres, ce qui semble crédible. Les circonstances entourant le licenciement de K______ ne sont, en outre, pas connues et ce dernier a été immédiatement réengagé après la nomination de E______. En tous les cas, une convention de résiliation n'est soumise à aucune forme, conformément aux principes rappelés supra.

L'appelante se prévaut encore du fait que l'intimé aurait fréquemment été avantagé par D______. Or, de prétendus avantages ne sont pas déterminants pour l'examen de la validité de la convention de résiliation litigieuse, celle-ci étant basée sur un modèle de document standard. En tous les cas, l'intimé a soutenu avoir payé le véhicule de la marque F______ et cet avantage a été octroyé par l'ancien secrétaire général, soit C______, ce qui n'est pas contesté. S'agissant de ses augmentations de salaire, D______, entendu en qualité de témoin, a expliqué qu'il souhaitait rééquilibrer les salaires des différents employés et avait modifié ceux-ci en conséquence, avec l'aval des présidents du conseil exécutif et de l'assemblée générale, ainsi que des directeurs de l'organisation, dont E______, ce que l'appelante n'a pas contesté. Celle-ci n'a donc pas établi que l'intimé aurait bénéficié de la part D______ d'avantages injustifiés.

Il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient l'appelante, aucun élément probant du dossier, ni même un faisceau d'indices suffisant, ne permettent de retenir que la convention de résiliation du 12 octobre 2020 ne serait pas valable. Le fait que l'appelante ait déposé une plainte pénale à l'encontre de l'intimé notamment pour faux dans les titres n'est pas non plus déterminant. L'intimé était ainsi fondé à ne pas se présenter à son travail dès le 15 octobre 2020 et ce, indépendamment de son état de santé psychique.

Comme relevé supra, l'appelante n'a pas mis l'intimé en demeure de reprendre son travail durant son absence, soit entre le 14 et le 19 octobre 2020 - correspondant à seulement quatre jours ouvrables -, ni averti celui-ci des éventuelles conséquences s'il ne reprenait pas son activité. Elle n'a pas non plus requis de lui un certificat médical, ni d'explications concernant son état de santé.

Il s'ensuit que l'absence de l'intimé était justifiée par son état de santé - étant rappelé que deux jours d'absence sans certificat médical étaient autorisés par son contrat de travail, soit les 14 et 15 octobre 2020 -, ainsi que par les termes de la convention de résiliation du 12 octobre 2020 - qui le libérait de l'obligation de venir travailler dès le 15 octobre au soir -, de sorte qu'il n'a pas violé son devoir de fidélité à l'égard de l'appelante.

L'appelante soutient également que, lors de la destitution de D______ durant la session du 13 octobre 2020, l'intimé avait protesté en vociférant et que cette "manifestation haineuse" - en soutien au précité - était suffisante à rompre le lien de confiance entre les parties. A nouveau, un mouvement d'humeur ne saurait à lui seul justifier un licenciement immédiat, d'autant plus sans avertissement préalable.

L'appelante fait encore valoir, qu'après avoir quitté ladite session, l'intimé, G______ et D______, auraient "saccagé" le bureau de celui-ci, volé et détruit des documents. L'appelante n'a toutefois pas établi ce qui précède. En tous les cas, un seul soupçon en ce sens ne saurait justifier un licenciement immédiat. L'appelante n'a d'ailleurs pas motivé le licenciement litigieux par les éléments précités dans son courrier de résiliation du 19 octobre 2020, qui fait uniquement mention d'un prétendu abandon de poste.

Compte tenu de l'ensemble de ce qui précède, le comportement de l'intimé ne constitue pas un manquement grave à ses devoirs justifiant son licenciement immédiat. Il a donc droit aux prétentions convenues dans la convention de résiliation du 12 octobre 2020 à titre de salaire et d'indemnité de départ. Les premiers juges étaient ainsi fondés à condamner l'appelante à verser à ce titre à l'intimé 63'000 fr. bruts, sous déduction de 5'454 fr. 10 nets, étant relevé que ces montants ne sont pas contestés en appel.

4.2.3 Le licenciement immédiat de l'intimé étant injustifié, les premiers juges ont, à bon droit, accordé à ce dernier une indemnité au sens de l'art. art. 337c al. 3 CO. L'appelante soutient toutefois que le montant de celle-ci, correspondant à six mois de salaire, serait disproportionné.

Or, il est suffisamment établi que le licenciement litigieux était, en réalité, motivé par le soutien de l'intimé à D______ et le souhait de E______ de le licencier. En effet, les témoins I______, G______ et D______ ont tous expliqué que le précité et E______ se livraient, depuis 2019, à une lutte de pouvoir, laquelle créait d'importantes tensions au sein du secrétariat permanent. Le témoin G______ a précisé que les employés devaient obéir à l'un ou à l'autre et le témoin D______ a confirmé que deux clans s'étaient créés. De plus, comme déjà relevé, l'intimé et E______ entretenaient de mauvaises relations, ce qui ressort de témoignages de G______ et D______, ce dernier précisant que E______ faisait preuve d'agressivité à l'égard de l'intimé. E______ avait également accusé à tort ce dernier d'avoir conspiré contre J______, ce qui avait, selon les déclarations du témoin G______, définitivement aggravé la relation entre les précités. E______ a d'ailleurs déclaré en audience avoir requis le blocage des accès informatiques de l'intimé, dès son accession au poste de secrétaire général ad intérim, et ne plus être intéressé à travailler avec ce dernier.

Les premiers juges étaient ainsi fondés à retenir que l'appelante, soit pour elle E______, avait licencié l'intimé avec effet immédiat par pure convenance personnelle et ce, en utilisant le motif prétexte d'un abandon de poste, alors même qu'elle ne l'a aucunement enjoint à reprendre son activité ou à justifier son absence.

Par ailleurs, le contrat de travail de l'intimé était déjà résilié au moment de son licenciement immédiat. Ce dernier avait été libéré de son obligation de travailler et son contrat prenait fin le 30 novembre 2020, soit seulement un mois et demi plus tard. Ces circonstances justifiaient d'autant moins de mettre fin aux rapports de travail avant cette date.

De plus, lors du licenciement immédiat de l'intimé, celui-ci était dans sa cinquième année de service et ce, à l'entière satisfaction de l'appelante, ce qui ressort des témoignages de I______, D______ et G______. L'intimé a, en outre, dû attendre le 20 avril 2023 pour percevoir une partie de son salaire d'octobre 2020, alors que son licenciement immédiat a été prononcé le 19 octobre 2020 et qu'il n'est pas contesté qu'il a travaillé jusqu'au 12 octobre 2020 à tout le moins. Enfin, en raison de son licenciement immédiat, l'intimé a dû rendre sa carte de légitimation et a été contraint de quitter le territoire suisse dans un délai de seulement deux mois.

Dans ces circonstances, il n'est pas critiquable d'avoir alloué à l'intimé l'indemnité maximale pour un licenciement immédiat injustifié correspondant à six mois de salaire, soit le montant non contesté de 54'000 fr. nets, la faute de l'appelante étant importante.

4.2.4 Par conséquent, les chiffres 4 à 6 du dispositif du jugement entrepris seront confirmés.

5.             L'appelante reproche au Tribunal la teneur du certificat de travail établi. Elle soutient qu'elle devrait "édulcorer les faits, voire même manquer de transparence", alors que l'intimé avait, selon elle, fait preuve "d'une négligence flagrante" en abandonnant son poste, d'autant plus qu'elle le soupçonnait d'être impliqué dans la dégradation d'un bureau et la destruction de documents.

5.1 A teneur de l'art. 330a al. 1 CO, le travailleur peut demander en tout temps à l'employeur un certificat portant sur la nature et la durée des rapports de travail, ainsi que sur la qualité de son travail et sa conduite. On parle de certificat de travail complet ou qualifié (ATF 136 III 510 consid. 4.1).

Le contenu du certificat de travail doit être exact. Toutes informations erronées, trompeuses ou imprécises doivent en être exclues (Aubert, Commentaire romand CO I, 2012, n° 19 ad art. 330a CO).

Il doit être établi selon les règles de l'objectivité. Ainsi, il ne doit pas contenir de termes ambigus, péjoratifs ou mensongers. Eu égard à son but, le certificat de travail doit être formulé de manière bienveillante. Il appartient à l'employeur de choisir une formulation qui favorise l'avenir économique du travailleur et ne déprécie pas inutilement ce dernier. Cependant, pour donner à un futur employeur une image aussi fidèle que possible de l’activité, des prestations et du comportement du travailleur, le certificat doit être conforme à la réalité et complet. L'employeur ne doit pas cacher des éléments importants pour un futur employeur, pour autant qu'ils soient pertinents et fondés, même s'ils peuvent nuire au travailleur (Ordolli, Commentaire romand COI, 2021, n° 10 et 11 ad art. 330a CO)

Le certificat de travail ne doit pas faire état des absences, y compris pour des motifs de santé, sauf si celles-ci sont significativement importantes par rapport à la durée totale des rapports de travail (Wyler/Heinzer, op. cit., p. 523; Antipas, Les certificats dans les relations de travail, 2018, p. 16).

5.2 En l'occurrence, l'appelante s'engage à remettre un certificat de travail à l'intimé complet et conforme à la vérité. Cela étant, elle ne requiert pas de rectifications précises, ni de suppressions de certains passages, du certificat de travail établi par les premiers juges.

En outre, contrairement à ce que soutient l'appelante, l'intimé n'a pas abandonné son poste et elle n'a démontré aucune violation de son devoir de fidélité à son égard. Elle n'a pas non plus établi, à satisfaction de droit, que l'intimé serait impliqué dans la dégradation du bureau de D______ ou la destruction de documents, dont elle ne précise d'ailleurs pas la nature.

Par ailleurs, les témoins I______, D______ et G______ ont tous confirmé que l'intimé avait toujours donné entière satisfaction à son employeur. Ses contrats de travail, conclus en 2016 et 2019, ont d'ailleurs été reconduits à plusieurs reprises, ce qui atteste encore de la qualité de son travail.

Dans ces circonstances, il ne se justifie pas de rectifier la teneur du certificat de travail établi par les premiers juges, qui est objectivement complet et conforme à la vérité.

Partant, le chiffre 7 du dispositif du jugement entrepris sera confirmé.

6. 6.1 L'appel étant infondé, il n'y a pas lieu de revoir les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC a contrario). Les chiffres du dispositif du jugement attaqué y afférents seront donc également confirmés.

6.2 La valeur litigieuse étant supérieure à 50'000 fr., il y a lieu de percevoir des frais judiciaires pour la procédure d'appel (art. 114 let. c cum 116 al. 1 CPC; art. 19 al. 3 let. c LaCC; art. 71 RTFMC). Ceux-ci seront arrêtés à 1'500 fr., mis à la charge de l'appelante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC), et entièrement compensés avec l'avance de même montant versée par celle-ci, qui reste acquise à l'État de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

La procédure d'appel ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :


A la forme
:

Déclare recevable l'appel interjeté le 1er février 2024 par A______ contre le jugement JTPH/419/2023 rendu le 21 décembre 2023 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/9447/2021.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'500 fr., les met à la charge de A______ et les compense entièrement avec l'avance déjà versée par celle-ci, qui demeure acquise à l'État de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Monsieur Pierre-Alain L'HÔTE, Madame Filipa CHINARRO, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.