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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/4389/2021

ACJC/1266/2023 du 02.10.2023 sur JTBL/466/2022 ( OBL ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/4389/2021 ACJC/1266/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 2 OCTOBRE 2023

 

Entre

A______ SARL, sise ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 15 juin 2022, comparant d'abord par Me Guy ZWAHLEN, avocat, puis en personne,

et

Madame B______, C______, ______, Genève, intimée, comparant par Me Yama SANGIN, avocat, rue Rodolphe-Töpffer 8, 1206 Genève, en l'étude duquel elles font élection de domicile.

Le présent arrêt est communiqué aux parties par plis recommandés du 03.10.2023.

 

 

 

 

 

 

 

 

 



EN FAIT

A. Par jugement JTBL/466/2022 du 15 juin 2022, communiqué aux parties par pli du même jour, le Tribunal des baux et loyers a ordonné la jonction des causes C/4389/2021 et C/8921/2021 sous le numéro C/4389/2021 (ch. 1 du dispositif), a limité la demande reconventionnelle formée par "B______ et C______" à l'encontre de A______ SARL aux conclusions en évacuation et exécution directe et l'a déclarée irrecevable pour le surplus (ch. 2), a déclaré efficace et valable le congé notifié le 7 avril 2021 pour le 31 mai 2021 par "B______ et C______" à A______ SARL portant sur l'arcade commerciale d'environ 69 m2 au rez-de-chaussée de l'immeuble sis à la rue 1______ no. ______ à Genève (ch. 3), a condamné A______ SARL à évacuer immédiatement de sa personne, de tout tiers dont elle était responsable et de ses biens l'arcade susmentionnée (ch. 4), a déclaré transmettre la cause, à l'expiration du délai d'appel contre le jugement, au Tribunal, siégeant dans la composition prévue à l'article 30 LaCC, pour statuer sur les mesures d'exécution sollicitées (ch. 5), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 7).

B. a. Par acte expédié le 15 juillet 2022 au greffe de la Cour de justice, A______ SARL (ci-après également : la locataire) forme appel contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation.

Elle conclut, principalement, à la nullité subsidiairement à l'annulation de la résiliation du 7 avril 2021 pour le 31 mai 2021 et à ce qu'il soit ordonné à B______ de lui transférer le bail à loyer dont elle est bénéficiaire et, subsidiairement, à l'annulation de la résiliation de bail du 8 février 2021 pour le 15 avril 2022 et subsidiairement à l'octroi d'une prolongation de bail de 6 ans jusqu'au 15 avril 2028.

b. Dans sa réponse du 26 juillet 2022, B______ (ci-après également : la bailleresse) conclut au rejet de l'appel.

c. Par réplique du 22 août 2022, A______ SARL a persisté dans ses conclusions.

d. B______ ayant renoncé à dupliquer, les parties ont été avisées le 21 septembre 2022 par le greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Il résulte du dossier les faits pertinents suivants :

a. B______ est titulaire d'un commerce à l'enseigne « C______ », sis dans une arcade commerciale d'environ 69 m2 qu'elle loue au rez-de-chaussée de l'immeuble rue 1______ no. ______ à Genève pour un loyer mensuel de 2'528 fr.

b. Le 12 avril 2017, B______ a remis son commerce en gérance libre à A______ SARL.

c. La négociation du contrat de mise en gérance et sa rédaction ont été confiées par la propriétaire à son conseil et par A______ SARL à la fiduciaire D______ SARL, représentée par E______.

d. Le contrat a été conclu pour une durée initiale d'une année, du 16 avril 2017 au 15 avril 2018, renouvelable tacitement d'année en année, sauf résiliation respectant un préavis de trois mois.

e. Le loyer mensuel a été fixé à 2'600 fr. et la redevance de gérance à 2'500 fr. par mois.

f. L'article 7 du contrat prévoit que celui-ci ne saurait être interprété comme une convention de remise de commerce et que la bailleresse reste l'unique propriétaire de l'établissement, de ses équipements et de ses meubles, dont le gérant ne peut disposer autrement que selon le contrat.

g. Le 21 octobre 2020, B______ a fait parvenir à A______ SARL une attestation à teneur de laquelle, dans l'hypothèse où elle souhaiterait vendre son fonds de commerce, elle s'engagerait à le proposer en premier lieu à celle-ci, pour un montant de 150'000 fr.

h. Par courrier recommandé du 11 janvier 2021, B______ a résilié le contrat de gérance pour le 15 avril 2021, sans préciser de motif et sans formule officielle.

i. Le 18 janvier 2021, le conseil de A______ SARL a fait valoir la nullité de la résiliation et a affirmé que celle-ci était en tout état contraire à l'accord conclu entre les parties. Selon elle, il était prévu que la bailleresse lui vende le fonds de commerce pour une somme de 100'000 fr. aussitôt que la redevance de gérance de 2'500 fr. par mois aurait été payée à concurrence de cette somme.

j. Par courrier du 2 février 2021, B______ a contesté s'être engagée à vendre le fonds de commerce. Selon elle, F______, représentant de la locataire, aurait souhaité mettre un terme au contrat en septembre 2020 avant de changer d'avis. Dans ce contexte, ce dernier aurait demandé à la bailleresse une garantie que si le fonds de commerce était vendu, il pourrait l'acquérir, d'où l'attestation rédigée en ce sens par la bailleresse le 21 octobre 2020. Le congé avait été donné en raison des hésitations de la locataire de poursuivre le bail. La locataire était mise en demeure de verser la somme de 5'000 fr. représentant les fermages de décembre 2020 et de janvier 2021 dans un délai de 60 jours suivant la réception du courrier, sous peine de résiliation du bail.

k. Par avis officiel du 8 février 2021, le contrat de bail a été résilié de manière ordinaire pour le 15 avril 2022.

l. Par déclaration « à qui de droit » du 9 février 2021, E______, associé gérant du 19 novembre 2015 au 5 mars 2018 puis gérant du 14 juillet 2021 au 14 novembre 2022 de A______ SARL, a attesté qu'il avait été témoin de l'achat du fonds de commerce de C______ pour un montant de 100'000 fr.

m. Par avis officiel du 7 avril 2021, le contrat de bail a été résilié de manière anticipée pour le 31 mai 2021, pour défaut de paiement.

n. A______ SARL a contesté devant le Commission de conciliation en matière de baux et loyers le congé ordinaire (C/4389/2021) et le congé extraordinaire (C/8921/2021) par requêtes déposées le 5 mars 2021, respectivement le 21 juin 2021.

o. Non conciliées à l'audience devant la Commission du 21 mai 2021, les deux affaires ont été portées devant le Tribunal le 21 juin 2021 par A______ SARL.

S'agissant du congé extraordinaire, elle a conclu principalement à ce que le congé soit déclaré nul, subsidiairement à ce qu'il soit mis à néant et à ce qu'il soit ordonné à la bailleresse de lui transférer le bail.

Concernant le congé ordinaire, elle a conclu principalement à ce qu'il soit mis à néant et subsidiairement à ce qu'une prolongation de bail de six ans lui soit accordée.

p. Le 23 juin 2021, un commandement de payer, poursuite n° 2______, a été notifié à A______ SARL par la bailleresse à hauteur de 7'800 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 15 avril 2021 à titre des loyers de mars à mai 2021 et à concurrence de 15'000 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 1er mars 2021 à titre des redevances de gérance du 1er décembre 2020 au 31 mai 2021, contre lequel opposition a été formée.

q. Par mémoire réponse et demande reconventionnelle du 27 août 2021, B______ a conclu, sur demande principale, a ce que le Tribunal constate la validité des congés, condamne la locataire à libérer les locaux et lui remettre les clés et permette à l'autorité chargée de l'exécution de procéder, avec l'assistance de la police, à l'expulsion de la locataire.

Sur demande reconventionnelle, elle a conclu à ce que la locataire soit condamnée à lui verser avec intérêts la somme de 22'500 fr. à titre de redevances de gérance pour les mois de décembre 2020 à août 2021 et de 5'100 fr. par mois dès le 1er septembre 2021 jusqu'à la restitution des locaux à titre de fermage. Elle a également conclu au prononcé de la mainlevée de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 2______, à concurrence de 15'000 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 1er mars 2021.

r. Par mémoire de réponse sur demande reconventionnelle du 27 septembre 2021, la locataire a conclu au déboutement de la bailleresse de ses conclusions.

s. Aux audiences du Tribunal du 9 décembre 2021 et du 24 mars 2022, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

F______, gérant de A______ SARL, a déclaré qu'un accord avait été conclu avec B______ et E______ concernant la vente du fonds de commerce pour 100'000 fr., payable par déduction du montant prévu pour la gérance dans le contrat, ainsi que par le paiement de 26'000 fr. pour le rachat du stock. Cet accord ne figurait pas dans le contrat du fait qu'il avait été convenu qu'une fois la somme de 100'000 fr. payée, un contrat de vente du fonds de commerce serait signé. Dans sa culture afghane, les affaires étaient basées sur la confiance et la parole donnée. B______ avait, selon lui, déjà souhaité vendre son commerce à son ancien employé et avait mandaté une agence pour trouver un acheteur.

B______ a déclaré que le contrat avait été rédigé par E______. Elle ne savait plus pourquoi deux montants séparés étaient prévus, l'un pour le loyer, l'autres pour la gérance. Elle n'avait jamais eu la volonté de vendre son fonds de commerce, car il constituait son unique source de revenu. Le congé ordinaire avait été donné non seulement en raison du défaut de paiement mais également car F______ avait changé d'avis plusieurs fois au sujet de la poursuite de l'exploitation du commerce. Elle avait cherché un nouveau gérant en novembre 2020 car F______ avait dit qu'il souhaitait partir.

t. E______, entendu en qualité de partie, a déclaré que le contrat signé était un contrat de gérance avec option d'achat, ce dont les parties avaient parlé oralement, étant précisé que pour F______, la parole donnée avait une grande importance dans sa culture. Il ne se souvenait pas avoir lui-même rédigé le contrat, ni la raison pour laquelle cette option d'achat avec la déduction du prix de gérance ne figurait pas dans le contrat. Il avait lui-même proposé d'acheter le fonds de commerce pour 70'000 fr., mais son offre n'avait pas été retenue car F______ avait proposé 100'000 fr. Il a confirmé la teneur de l'attestation qu'il avait rédigée le 9 février 2021, à teneur de laquelle F______ devait acheter le fonds de commerce pour 100'000 fr.

Entendu comme témoin, G______, ancien employé de B______, a confirmé avoir voulu acheter le fonds de commerce, mais ne pas avoir été en possession des documents nécessaires pour ce faire, ni de garanties financières suffisantes. Il ne savait pas si B______ souhaitait vendre son commerce, ni si elle aurait accepté son offre s'il avait eu tous les documents nécessaires.

Les parties ont ensuite plaidé et persisté dans leurs conclusions, ensuite de quoi la cause a été gardée à juger.

u. Le 6 avril 2022, la locataire a fait parvenir au Tribunal une nouvelle pièce, à savoir un contrat de gérance signé entre F______ et un tiers de nationalité afghane.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

1.2 En l'espèce, en considérant seulement les conclusions en nullité des congés, la valeur litigieuse s'élève à 93'600 fr. (31'200 fr. x 3 ans). Elle est donc supérieure à 10'000 fr.

La voie de l'appel est ainsi ouverte.

1.3 Selon l'art. 311 al. 1 et 2 CPC, l'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision, laquelle doit être jointe au dossier.

L'appel a été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., 2010, n. 2314 et 2416; Rétornaz in : Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, Neuchâtel, 2010, p. 349 ss, n. 121).

Il sera relevé que la procédure oppose l'appelante à une seule intimée, l'entreprise individuelle à l'enseigne C______ n'ayant pas de personnalité juridique.

2. L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir violé l'art. 247 al. 2 let. b ch. 1 CPC et d'avoir constaté inexactement les faits. Elle soutient que l'accord entre les parties prévoyait la vente du fonds de commerce, de sorte que le congé extraordinaire contreviendrait aux règles de la bonne foi et serait donc inefficace. De ce fait, le Tribunal devait examiner la question de la validité du congé ordinaire et celle de la prolongation de bail et débouter l'intimée de ses conclusions en évacuation.

2.1 Aux termes de l'art. 18 al. 1 CO, pour apprécier la forme et les clauses d'un contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention.

Le juge doit donc rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices. Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes. L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait. Si sa recherche aboutit à un résultat positif, le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_643/2020 du 22 octobre 2021 consid. 4.2.1; 4A_498/2018 du 11 avril 2019 consid. 5.1.1).

2.2 A teneur de l'art. 243 al. 2 let. c CPC, la procédure simplifiée s'applique aux litiges, quelle que soit la valeur litigieuse, portant sur des baux à loyer ou à ferme d'habitations et de locaux commerciaux et sur des baux à ferme agricoles en ce qui concerne la consignation du loyer ou du fermage, la protection contre les loyers ou les fermages abusifs, la protection contre les congés ou la prolongation du bail à loyer ou à ferme.

Selon l'art. 247 al. 2 let. a CPC, le tribunal établit les faits d'office dans les affaires visées à l'art. 243, al. 2 CPC.

A teneur de l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit. L'art. 8 CC consacre un droit des parties, dans les matières réglées par le droit civil fédéral, à l'administration des preuves sur les faits pertinents (ATF 133 III 295 consid. 7.1).

La maxime inquisitoire sociale n'oblige pas le juge à instruire d'office le litige lorsqu'un plaideur renonce à expliquer sa position; en revanche, elle le contraint à interroger les parties et à les informer de leur devoir de collaborer à l'instruction et de fournir des preuves (arrêts du Tribunal fédéral 4A_79/2012 du 27 août 2012 consid. 4.3 et 4A_360/2015 du 12 novembre 2015 consid. 4.2). Si des motifs objectifs conduisent le juge à soupçonner que les allégations et offres de preuve d'une partie sont lacunaires, il n'est pas lié par l'offre de preuve en question et a le devoir de rechercher lui-même des preuves pour autant qu'il ait connaissance, sur la base des déclarations des parties et/ou du dossier, de l'existence de moyens probatoires pertinents. Le juge peut de même inviter cette partie à compléter ses moyens, par exemple si les documents produits sont insuffisants (ATF 139 III 13 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_484/2011 du 2 novembre 2011 consid. 2.2, rés. JdT 2012 II 114; ATF 136 III 74 consid. 3.1).

Le but de la maxime inquisitoire sociale est de protéger la partie réputée la plus faible et d'assurer l'égalité des parties, ainsi que d'accélérer la procédure. Cette maxime ne doit toutefois pas être comprise comme un commode oreiller de paresse autorisant les parties à rejeter sur les épaules du juge l'ensemble des devoirs procéduraux leur incombant (ATF 125 III 231 consid. 4a).

2.3 En l'espèce, c'est à juste titre que le Tribunal a admis que le congé extraordinaire ne contrevenait pas aux règles de la bonne foi, du fait que l'appelante était en demeure de verser les montants réclamés.

Alors qu'elle supportait le fardeau de la preuve, l'appelante a échoué à démontrer que les parties avaient convenu qu'elle devait payer la gérance jusqu'à concurrence de 100'000 fr., ensuite de quoi le commerce lui serait vendu, allégations contestées par l'intimée.

En effet, comme l'ont retenu les premiers juges, le contrat conclu entre les parties était de durée indéterminée et ne prévoyait pas qu'il devait prendre fin à une date déterminée sans résiliation. Il ne comportait pas de clause selon laquelle l'intimée aurait eu la volonté de vendre son fonds de commerce; au contraire il était expressément stipulé qu'il ne constituait pas une vente de fonds de commerce.

Selon l'interprétation de la volonté des parties, il n'était donc pas question de la vente du fonds de commerce.

Ces éléments sont corroborés par le fait que, quatre ans après la signature et le début du contrat, l'intimée a fait référence dans une attestation à une potentielle vente future du commerce à l'appelante, et non à une telle vente convenue initialement.

En outre, bien que l'appelante se soit acquittée d'un montant supérieur à 100'000 fr., elle n'a pas cessé ses paiements relatifs à la redevance pour la gérance.

Enfin, en novembre 2020, l'intimée a cherché un repreneur et non pas un acheteur pour son commerce, craignant le départ de l'appelante.

Au vu des éléments ci-dessus, c'est à raison que les premiers juges ont retenu que la volonté des parties n'était pas de procéder à une vente du fonds de commerce, en faisant cesser l'obligation de payer la redevance de gérance une fois la somme de 100'000 fr. atteinte. Le congé querellé n'est donc pas contraire à la bonne foi.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, l'attestation rédigée par E______ et la déclaration de celui-ci au Tribunal, n'est pas de nature à remettre en cause ce qui précède. Il n'est en effet pas décisif que les parties aient, cas échéant, évoqué une option d'achat, sans qu'un accord sur ce point n'ait été acté dans le contrat; E______ n'a d'ailleurs donné aucune explication sur une éventuelle raison qui aurait conduit les parties, dans l'hypothèse où elles se seraient accordées sur ce point, à conclure un contrat écrit muet à cet égard.

Au vu de la validité du congé extraordinaire, il n'y a pas lieu, à l'instar du Tribunal, d'examiner celle du congé ordinaire, ni la prolongation de bail sollicitée.

Enfin, l'appelante ne disposant plus de titre juridique l'autorisant à rester dans les locaux, violant ainsi son obligation de restituer les locaux loués à la fin du bail, les premiers juges ne pouvaient que faire droit aux conclusions en évacuation de l'intimée.

Partant, le jugement entrepris sera confirmé.

3. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers, étant rappelé que l'art. 116 al. 1 CPC autorise les cantons à prévoir des dispenses de frais dans d'autres litiges que ceux visés à l'art. 114 CPC (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 15 juillet 2022 par A______ SARL contre le jugement JTBL/466/2022 rendu le 15 juin 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/4389/2021.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Laurence MIZRAHI et Monsieur Nicolas DAUDIN, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr. cf. consid. 1.2