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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/9036/2022

ACJC/160/2023 du 06.02.2023 sur JTBL/550/2022 ( SBL ) , CONFIRME

Normes : Cst.29.al2; CPC.257; CO.257d; LaCC.30
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/9036/2022 ACJC/160/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 6 FEVRIER 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant et recourant d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 6 juillet 2022, comparant en personne,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, comparant par Me Yves MABILLARD, avocat, avenue de Champel 29, case postale, 1211 Genève 12, en l'étude duquel il fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/550/2022 du 6 juillet 2022, le Tribunal des baux et loyers a condamné A______ à évacuer immédiatement de sa personne et de ses biens ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec lui l'appartement n° 2______ de 4 pièces situé au 4ème étage de l'immeuble sis avenue 1______ no. ______, à Genève (ch. 1 du dispositif), autorisé B______ à requérir l'évacuation par la force publique de A______ dès le 30ème jour après l'entrée en force de son jugement (ch. 2), condamné A______ à verser à B______ la somme de 15'200 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 1er avril 2022 (ch. 3), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4) et dit que la procédure était gratuite (ch. 5).

B. a. Par acte expédié le 25 juillet 2022 à la Cour de justice, A______ a formé appel contre ce jugement. Il a conclu, sur appel, à l'annulation des chiffres 1 à 4 de son dispositif et, cela fait, à ce que la requête en évacuation, en exécution de l'évacuation et en paiement formée par B______ soit déclarée irrecevable, subsidiairement, au renvoi de la cause au Tribunal. Sur recours, il a conclu à l'annulation du chiffre 2 du dispositif du jugement attaqué et à ce qu'il soit dit que le bailleur ne serait autorisé à faire exécuter le jugement par la force publique qu'après douze mois suivant l'entrée en force du jugement.

b. Dans sa réponse du 12 août 2022, B______ a conclu au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions respectives.

d. Les parties ont été avisées le 10 octobre 2022 par le greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Le 11 décembre 2017, les parties ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la sous-location d'un appartement n° 2______ de 4 pièces situé au 4ème étage de l'immeuble sis avenue 1______ no. ______, à Genève.

Le montant du loyer a été fixé en dernier lieu à 2'200 fr. par mois.

b. Par avis comminatoire du 22 décembre 2021, le bailleur a mis en demeure le locataire de lui régler dans les 30 jours le montant de 10'800 fr. à titre d'arriéré de loyer selon le décompte annexé à l'avis et l'a informé de son intention, à défaut du paiement intégral de la somme réclamée dans le délai imparti, de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO.

c. Considérant que la somme susmentionnée n'avait pas été intégralement réglée dans le délai imparti, le bailleur a, par avis officiel du 24 février 2022, résilié le bail pour le 31 mars 2022.

d. Le 11 mai 2022, le bailleur a introduit une requête en cas clair devant le Tribunal des baux et loyers, sollicitant l'évacuation avec exécution directe du locataire et le paiement de 15'200 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2021 et de 2'200 fr. pour chaque mois d'occupation illicite dès le dépôt de la requête.

e. A l'audience du Tribunal du 6 juillet 2022, le bailleur a persisté dans ses conclusions, en précisant que l'arriéré s'élevait à 15'200 fr. et a produit un décompte actualisé.

Le locataire s'est opposé à la requête et a sollicité un délai pour l'exécution de l'évacuation. Il a proposé de verser 500 fr. par mois pour rattraper l'arriéré, proposition refusée par le bailleur. Le locataire a exposé vivre dans l'appartement avec sa compagne et leurs enfants respectifs âgés de 15 et 16 ans et ne pas avoir encore cherché de nouveau logement. Son revenu mensuel net s'élevait à 4'250 fr. et celui de sa compagne à 2'100 fr.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

f. Dans son jugement du 6 juillet 2022, le Tribunal a considéré que les conditions d'une résiliation du bail selon l'art. 257d al. 1 CO étaient réunies. Le bailleur était ainsi fondé à donner congé, ce qu'il avait fait en respectant les conditions de l'art. 257d al. 2 CO. Il s'ensuivait que, depuis l'expiration du terme fixé, le locataire ne disposait plus d'aucun titre juridique l'autorisant à rester dans les locaux loués et qu'il violait ainsi l'art. 267 al. 1 CO. Dès lors, l'évacuation de ce dernier devait être prononcée. Le bailleur avait par ailleurs requis l'exécution de l'évacuation, ce à quoi, siégeant dans la composition prévue à l'article 30 LaCC, le Tribunal a fait droit. Il a prononcé l'exécution forcée de son jugement 30 jours après son entrée en force afin de permettre au locataire de prendre ses dispositions pour restituer les locaux, tenant ainsi compte du montant de l'arriéré et du fait que le logement est occupé par une famille de quatre personnes. De plus, au vu des pièces produites, le locataire restait devoir un montant de 15'200 fr., à titre d'arriéré au 6 juillet 2022, montant qu'il était condamné à verser au bailleur avec intérêts à 5% l'an dès le 1er avril 2022 (date moyenne). En revanche, les conclusions en paiement d'une indemnité pour occupation illicite jusqu'à reddition des locaux ont été déclarées irrecevables car une telle condamnation prononcée pour la durée de l'occupation illicite équivaudrait à un jugement conditionnel, qui ne saurait être admis en matière de prétentions fondées sur l'art. 267 CO.

EN DROIT

1. 1.1 La voie de l'appel est ouverte contre les décisions d'évacuation, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), alors que la voie du recours est ouverte contre les décisions du Tribunal de l'exécution (art. 309 let. a CPC; art. 319 let. a CPC).

Pour calculer la valeur litigieuse dans les actions en expulsion initiées selon la procédure de l'art. 257 CPC, il faut distinguer les cas où seule est litigieuse l'expulsion en tant que telle, de ceux où la résiliation l'est également à titre de question préjudicielle.

S'il ne s'agit que de la question de l'expulsion, l'intérêt économique des parties réside dans la valeur que représente l'usage des locaux pendant la période de prolongation résultant de la procédure sommaire elle-même, laquelle est estimée à six mois. Si en revanche la résiliation des rapports de bail est également contestée, la valeur litigieuse est égale au loyer pour la période minimale pendant laquelle le contrat subsiste si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle une nouvelle résiliation peut être signifiée; comme il faut prendre en considération la période de protection de trois ans prévue à l'art. 271a al. 1 let. e CO, la valeur litigieuse correspondra en principe au montant du loyer brut (charges et frais accessoires compris) pendant trois ans (ATF 144 III 346 consid. 1.2.1 et 1.2.2.3, JdT 2019 II 235; arrêt du Tribunal fédéral 4A_376/2021 du 7 janvier 2022 consid.1; Lachat, Procédure civile en matière de baux et loyers, 2019, pp. 69-70).

1.2 Il ressort des explications du locataire qu'il conteste le fait qu'il pouvait être mis en demeure pour le paiement du loyer, et donc la validité du congé. La valeur litigieuse est dès lors supérieure à 10'000 fr. et la voie de l'appel est ouverte.

L'appel a par ailleurs été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi (art. 311 al. 1 et 314 al. 1 CPC), de sorte qu'il est recevable.

1.3 Le recours contre l'exécution de l'évacuation a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits, de sorte qu'il recevable (art. 321 al. 1 CPC).

1.4 Pour des questions de clarté et de simplification, le locataire sera désigné ci-après uniquement comme l'appelant.

2. L'appelant invoque une violation de son droit d'être entendu au motif qu'il avait attiré l'attention du Tribunal sur le fait que le loyer initial n'avait pas été notifié sur une formule officielle et que le loyer n'était pas de 2'200 fr, mais que celui-ci ne l'avait pas laissé s'exprimer. Il avait par ailleurs voulu produire des pièces qui n'avaient pas été acceptées par le Tribunal.

2.1 La jurisprudence a déduit de l'art. 29 al. 2 Cst. le droit des parties d'être informées et de s'exprimer sur les éléments pertinents du litige avant qu'une décision touchant leur situation juridique ne soit prise, d'obtenir l'administration des preuves pertinentes et valablement offertes, de participer à l'administration des preuves essentielles et de se déterminer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1, 167 consid. 4.1);

Le droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. comprend également le principe général de procédure selon lequel les faits et les éléments pertinents pour l'issue du litige doivent être consignés par écrit. Le procès-verbal est un acte authentique. L'art. 9 CC s'applique par analogie : le contenu du procès-verbal est donc présumé exact, sauf preuve du contraire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_639/2014 du 8 septembre 2015, consid. 3.2.1).

Selon l'art. 235 al. 3 CPC, le tribunal statue sur les requêtes de rectification du procès-verbal.

2.2 En l'espèce, il ne ressort pas du procès-verbal de l'audience devant le Tribunal du 6 juillet 2022 que l'appelant aurait allégué que la formule officielle n'aurait pas été utilisée pour fixer le loyer et aucun élément ne permet de penser que cette problématique aurait été abordée. Si le Tribunal avait empêché l'appelant de s'exprimer lors de l'audience, celui-ci aurait dû lui demander de faire figurer une note au procès-verbal à cet égard, ce qui n'est pas le cas. L'appelant n'a par ailleurs pas allégué qu'il aurait requis du Tribunal la rectification du procès-verbal qui n'aurait pas été complet, comme le veut l'art. 235 al. 3 CPC.

De plus, l'appelant soutient que "l'arriéré de 2020 est moins important que celui allégué par l'intimé". Il ne ressort toutefois pas du procès-verbal de l'audience devant le Tribunal qu'il aurait contesté le montant en souffrance, mais au contraire qu'il a proposé de verser 500 fr. par mois pour résorber l'arriéré que l'intimé venait de chiffrer à 15'200 fr.

Quant aux récépissés de paiements du loyer que le Tribunal aurait refusé d'accepter, il apparaît que figurent à la procédure des pièces produites par l'appelant, de sorte qu'il est peu vraisemblable que le Tribunal ait opéré un tri des pièces produites et qu'il en ait admis certaines et refusé d'autres sans en faire aucune mention. Il n'apparaît d'ailleurs pas, à nouveau, que l'appelant s'en soit plaint avant son appel, ce que le principe de la bonne foi lui imposait de faire, cas échéant.

Dès lors, le procès-verbal de l'audience est présumé être complet; aucune violation du droit d'être entendu de l'appelant ne peut être retenue.

3. L'appelant conteste que le cas soit clair.

3.1 La procédure de protection dans les cas clairs prévue par l'art. 257 CPC permet à la partie demanderesse d'obtenir rapidement une décision ayant l'autorité de la chose jugée et la force exécutoire, lorsque la situation de fait et de droit n'est pas équivoque (ATF 141 III 23 consid. 3.2 et la référence citée). En vertu de l'art. 257 al. 1 CPC, le tribunal admet l'application de cette procédure lorsque l'état de fait n'est pas litigieux ou est susceptible d'être immédiatement prouvé (let. a) et que la situation juridique est claire (let. b). Le tribunal n'entre pas en matière sur la requête lorsque cette procédure ne peut pas être appliquée (art. 257 al. 3 CPC).

La procédure de protection dans les cas clairs est soumise à la procédure sommaire des art. 248 ss CPC, plus particulièrement aux art. 252 à 256 CPC. La maxime des débats est applicable (art. 55 al. 1 CPC), sauf dans les deux cas prévus par l'art. 255 CPC (lequel est réservé par l'art. 55 al. 2 CPC), qui ne sont pas pertinents en l'espèce (ATF 144 III 462 consid. 3.2).

3.1.1 Selon la jurisprudence, l'état de fait n'est pas litigieux lorsqu'il n'est pas contesté par le défendeur. Il est susceptible d'être immédiatement prouvé lorsque les faits peuvent être établis sans retard et sans trop de frais.

Si le défendeur fait valoir des objections et exceptions motivées et concluantes, qui ne peuvent être écartées immédiatement et qui sont de nature à ébranler la conviction du juge, la procédure du cas clair est irrecevable (ATF 144 III 462 consid. 3.1; 141 III 23 consid. 3.2; 138 III 620 consid. 5.1.1 et les arrêts cités). Il faut alors et il suffit qu'elle parvienne à ébranler la conviction du juge quant au bien-fondé de la requête (arrêt 4A_142/2020 du 3 septembre 2020 consid. 3.1). A l'inverse, le cas clair doit être retenu lorsque sont émises des objections manifestement mal fondées ou inconsistantes sur lesquelles il peut être statué immédiatement (ATF 138 III 620 consid. 5.1.1; arrêt 4A_350/2014 du 16 septembre 2014 consid. 2.1).

La situation juridique est claire lorsque l'application de la norme au cas concret s'impose de façon évidente au regard du texte légal ou sur la base d'une doctrine et d'une jurisprudence éprouvées (ATF 144 III 462 consid. 3.1 et les arrêts cités).

3.1.2 Selon l'art. 257d CO, lorsque le locataire a reçu la chose louée et qu'il tarde à s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail; ce délai doit être d'au moins trente jours pour les baux d'habitations ou de locaux commerciaux (al. 1). A défaut de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d'habitations ou de locaux commerciaux peuvent être résiliés avec un délai de congé minimum de trente jours pour la fin d'un mois (al. 2).

3.1.3 L'action en expulsion pour défaut de paiement du loyer au sens de l'art. 257d CO selon la procédure de protection dans les cas clairs (art. 257 CPC) présuppose que le bail ait valablement pris fin, puisque l'extinction du bail est une condition du droit à la restitution des locaux (art. 267 al. 1 CO). Le tribunal doit donc trancher à titre préjudiciel la question de la validité de la résiliation, laquelle ne doit être ni inefficace, ni nulle, ni annulable (une prolongation du bail n'entrant pas en ligne de compte lorsque la résiliation est signifiée pour demeure conformément aux art. 257d ou 282 CO). Les conditions de l'art. 257 al. 1 CPC s'appliquent également à cette question préjudicielle (ATF 141 III 262 consid. 3.2 in fine; ATF 142 III 515 consid. 2.2.4 in fine).

Il incombe au bailleur, conformément à l'art. 8 CC, d'alléguer et de prouver les conditions de l'art. 257d CO (faits générateurs de droit; rechtserhebende Tatsachen). Il appartient, en revanche, au locataire d'invoquer les faits dirimants (rechtshindernde Tatsachen) ou destructeurs (rechtsvernichtende Tatsachen), en invoquant des objections ou des exceptions (Einwendungen oder Einreden) (arrêt du Tribunal fédéral, 4A_376/2021 du 7 janvier 2022, consid. 4.2.1).

Le tribunal est lié par les faits allégués par le demandeur (art. 55 al. 1 CPC), comme par les faits non contestés par le défendeur (arrêt du Tribunal fédéral 4A_431/2015 du 19 avril 2016 consid. 5.1.3).

Le locataire doit invoquer ses contestations et objections en temps utile, conformément au principe de la simultanéité des moyens d'attaque et de défense (maxime éventuelle ou maxime de concentration), qui vaut aussi bien en procédure ordinaire (art. 219 ss, art. 229 al. 1 et art. 317 al. 1 CPC), qu'en procédure simplifiée, même si elle est soumise à la maxime inquisitoire sociale (art. 243 al. 2 let. c, art. 247 al. 2 let. a et art. 229 al. 3 CPC, cette dernière disposition n'étant pas applicable en appel; cf. ATF 138 III 625 consid. 2.2) ou qu'en procédure sommaire de protection dans les cas clairs soumise à la maxime des débats (cf. ATF 142 III 462 consid. 4.3).

La formule selon laquelle "la nullité peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office" ne s'applique pas dans le domaine des contrats et de leur résiliation lorsque la maxime des débats est applicable (ATF
144 III 462, consid. 3.3.2).

3.2 Il découle du consid. 2.2 supra que l'appelant n'a pas allégué que la formule officielle n'aurait pas été utilisée pour la fixation du loyer. Son allégation devant la Cour à cet égard est dès lors nouvelle et irrecevable en vertu de l'art. 317 al. 1 CPC de sorte qu'il ne saurait en être tenu compte. La question de la nullité du loyer convenu n'est donc pas litigieuse. L'appelant ne saurait être suivi lorsqu'il soutient que le congé serait inefficace pour ce motif.

Il en va de même du fait que le loyer ne serait pas de 2'200 fr. L'appelant a certes produit devant le Tribunal une copie du contrat de bail dans lequel le montant précité n'était pas indiqué, ce qui ne signifie pas encore qu'un loyer inférieur aurait été convenu. L'appelant n'indique d'ailleurs pas quel aurait été le montant du loyer s'il n'était pas de 2'200 fr. Il ne s'est pas non plus manifesté à réception de l'avis comminatoire pour contester le montant réclamé. Il ressort en outre des pièces produites par l'intimé devant le Tribunal que l'appelant s'est acquitté à réitérées reprises d'un montant de 2'200 fr. Il doit donc être retenu que le loyer convenu était d'un tel montant. Enfin, les récépissés produits devant la Cour, que l'appelant aurait prétendument été empêché de produire devant le Tribunal, même recevables, ne lui seraient d'aucun secours et tendraient plutôt à accréditer le fait que les montants versés par l'appelant étaient très aléatoires.

Enfin, comme déjà indiqué, l'appelant n'a pas valablement contesté le montant de l'arriéré (cf. supa consid. 2.2) ni ne conteste pas ne pas s'être acquitté du montant réclamé dans l'avis comminatoire dans le délai imparti.

C'est dès lors à bon droit que le Tribunal a considéré que le cas était clair, qu'il a ainsi prononcé l'évacuation de l'appelant et condamné celui-ci au paiement des montants réclamés.

4. L'appelant considère que le sursis de 30 jours qui lui a été octroyé serait trop court et en sollicite un de douze mois. Il fait valoir qu'il vit avec sa femme et deux enfants, qu'il a offert de rattraper l'arriéré, ce qui avait été refusé par l'intimé et que les revenus du couple de 6'350 fr. rendent difficiles leurs recherches de logement. La scolarité des enfants pourrait par ailleurs être perturbée par l'évacuation rapide en cours d'année scolaire.

4.1 En vertu de l'art. 337 al. 1 CPC, la décision peut être exécutée directement si le Tribunal qui la rend ordonne les mesures d'exécution nécessaires. Le Tribunal peut d'ores et déjà, sur requête de l'une des parties, ordonner l'exécution de sa décision.

En procédant à l'exécution forcée d'une décision judiciaire, l'autorité doit tenir compte du principe de la proportionnalité. Lorsque l'évacuation d'une habitation est en jeu, il s'agit d'éviter que des personnes concernées ne soient soudainement privées de tout abri. L'expulsion ne saurait être conduite sans ménagement, notamment si des motifs humanitaires exigent un sursis, ou lorsque des indices sérieux et concrets font prévoir que l'occupant se soumettra spontanément au jugement d'évacuation dans un délai raisonnable. En tout état de cause, l'ajournement ne peut être que relativement bref et ne doit pas équivaloir en fait à une nouvelle prolongation de bail (ATF 117 Ia 336 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_207/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.1).

L'art. 30 al. 4 LaCC concrétise le principe de la proportionnalité en cas d'évacuation d'un logement, en prévoyant que le Tribunal des baux et loyers peut, pour des motifs humanitaires, surseoir à l'exécution du jugement dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire ou du fermier lorsqu'il est appelé à statuer sur l'exécution d'un jugement d'évacuation d'un logement, après audition des représentants du département chargé du logement et des représentants des services sociaux ainsi que des parties.

S'agissant des motifs de sursis, différents de cas en cas, ils doivent être dictés par des "raisons élémentaires d'humanité"; sont notamment des motifs de ce genre la maladie grave ou le décès de l'expulsé ou d'un membre de sa famille, le grand âge ou la situation modeste de l'expulsé; en revanche, la pénurie de logements ou le fait que l'expulsé entretient de bons rapports avec ses voisins ne sont pas des motifs d'octroi d'un sursis (ACJC/422/2014 du 7 avril 2014 consid. 4.2; ACJC/187/2014 du 10 février 2014 consid. 5.2.1; arrêt du Tribunal fédéral du 20 septembre 1990, in Droit du bail 3/1990 p. 30 et réf. cit.).

4.2 En l'espèce, le Tribunal a déjà retenu, pour arrêter la durée du sursis octroyé, le fait que le logement de l'appelant était occupé par une famille de quatre personnes dont deux enfants, lesquels sont adolescents.

Il convient également de tenir compte du fait que l'appelant occupe sans droit l'appartement depuis le 31 mars 2022, soit plus de neuf mois, et sait depuis cette date à tout le moins qu'il doit quitter son logement, n'ayant pas contesté le congé. Il ne ressort pourtant pas de ses explications qu'il aurait sérieusement recherché, en vain, un nouvel appartement. Sa simple affirmation selon laquelle les revenus du couple de 6'350 fr., qui ne sont pourtant pas négligeables, compliquent les recherches ne permet pas encore de retenir que tel est le cas.

Il ne ressort par ailleurs pas de ses explications qu'il rembourserait l'arriéré de loyer. En outre, le délai de douze mois suivant l'entrée en force du jugement requis, soit près de seize mois depuis la résiliation du bail, s'apparente à une prolongation de bail à laquelle l'appelant ne peut pas prétendre conformément à l'art. 272a al. 1 let. a CO.

Pour le surplus, l'appelant se borne à citer des références d'arrêts dans lesquels des sursis d'un délai supérieur à 30 jours ont été octroyés, sans expliquer en quoi ces précédents devraient en l'espèce conduire la Cour à réformer le jugement entrepris, étant relevé que sa situation personnelle ne présente pas de particularité justifiant un sursis particulièrement long.

En définitive, le Tribunal a tenu compte des éléments pertinents pour fixer le sursis à l'exécution de l'évacuation et il n'a pas mésusé du pouvoir d'appréciation dont il disposait en la matière.

Le recours n'est dès lors pas fondé.

5. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevables l'appel et le recours interjetés le 25 juillet 2022 par A______ contre le jugement JTBL/550/2022 rendu le 6 juillet 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/9036/2022.

Au fond :

Les rejette et confirme le jugement attaqué.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Serge PATEK, Madame Nevena PULJIC, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.