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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/26556/2019

ACJC/1468/2022 du 14.11.2022 sur JTBL/548/2022 ( SBL ) , IRRECEVABLE

Normes : CPC.311.al1; CO.257d; LaCC.30.al4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/26556/2019 ACJC/1468/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 14 NOVEMBRE 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 6 juillet 2022, comparant en personne,

et

FONDATION DE PREVOYANCE B______, sise ______, intimée, représentée par C______ SA, ______, en les bureaux de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/548/2022 du 6 juillet 2022, le Tribunal des baux et loyers, statuant par voie de procédure sommaire en protection de cas clair, a condamné A______ à évacuer immédiatement de sa personne et de ses biens ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec lui l'appartement n° 1______ de 2 pièces situé au 5ème étage de l'immeuble sis boulevard 2______ no. ______, à Genève (ch. 1 du dispositif), a autorisé la FONDATION DE PREVOYANCE B______ à requérir l'évacuation par la force publique de A______ dès l'entrée en force du jugement (ch. 2), a condamné A______ à verser à la FONDATION DE PREVOYANCE B______ la somme de 10'447 fr. 65 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er février 2022 (ch. 3), a autorisé la libération de la garantie de loyer constituée auprès de D______ SA en date du 13 décembre 2018 (police n° 2018.3______) en faveur de la FONDATION DE PREVOYANCE B______, le montant ainsi libéré venant en déduction de la somme due figurant sous chiffre 3 du dispositif (ch. 4), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5) et a rappelé que la procédure était gratuite (ch. 6).

Le Tribunal a considéré que les conditions d'une résiliation selon l'article 257d al. 1 CO étaient réunies, A______ n'ayant pas rendu vraisemblable que l'une ou l'autre d'entre elles ferait défaut. Depuis l'expiration du terme fixé, le précité ne disposait plus d'aucun titre juridique l'autorisant à rester dans les locaux, de sorte que son évacuation devait être prononcée. Il ne se justifiait pas d'accorder à l'intéressé un sursis humanitaire, au vu de l'importance du montant de la dette, de l'absence de proposition concrète de remboursement de celle-ci et du fait que A______ occupait seul le logement en cause.

B. a. Par acte déposé le 22 juillet 2022 à la Cour de justice, A______, comparant en personne, a formé "recours" contre ce jugement. Sans prendre de conclusions formelles, il a expliqué souhaiter régulariser "la situation au plus vite et surtout ne pas devoir quitter" l'appartement. Il réglait régulièrement le "loyer" depuis un an et la dette s'élevait à 9'524 fr., somme qu'il était disposé à rembourser par des mensualités de 250 fr. par mois. Il a sollicité une conciliation ou "une autre audience et surtout une décision qui [lui] laisse la possibilité de régulariser cette situation".

b. Dans sa réponse du 3 août 2022, la FONDATION DE PREVOYANCE B______ a conclu à la confirmation du jugement entrepris.

c. En l'absence de réplique, les parties ont été avisées par plis du greffe du 30 août 2022 de ce que la cause était gardée à juger.


 

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure de première instance :

  a. Le 10 décembre 2018, les parties ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement n° 1______ de 2 pièces situé au 5ème étage de l'immeuble sis boulevard 2______ no. ______, à Genève.

Le montant du loyer et des charges a été fixé en dernier lieu à 1'000 fr. par mois.

b. Une garantie de loyer a été constituée auprès de D______ SA le 13 décembre 2018 (police n° 2018.3______).

c. Par avis comminatoire du 15 avril 2019, la FONDATION DE PREVOYANCE B______ a mis en demeure A______ de lui régler dans les 30 jours le montant de 2'063 fr. à titre d'arriéré de loyer et de charges pour la période du 1er mars au 30 avril 2019 ainsi que de frais de rappel de 21 fr. et de frais de mise en demeure de 42 fr. et l'a informé de son intention, à défaut du paiement intégral de la somme réclamée dans le délai imparti, de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO.

d. Considérant que la somme susmentionnée n'avait pas été intégralement réglée dans le délai imparti, la FONDATION DE PREVOYANCE B______ a, par avis officiel du 9 septembre 2019, résilié le bail pour le 31 octobre 2019.

e. Le 25 novembre 2019, la FONDATION DE PREVOYANCE B______ a saisi le Tribunal d'une requête en cas clair, sollicitant l'évacuation de A______ avec exécution directe du jugement d'évacuation et le paiement par le précité de 5'701 fr. 55 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er septembre 2019, à titre d'arriérés de loyer et d'indemnités pour occupation illicite, sous déduction d'un solde de décompte de chauffage. Elle a également conclu à la libération en sa faveur de la garantie de loyer constituée auprès de D______ SA.

f. Les parties ont été convoquées à cinq audiences. A l'audience du 6 juillet 2022, la FONDATION DE PREVOYANCE B______ a persisté dans ses conclusions, amplifiant celles en paiement à hauteur de 10'477 fr. 65 après avoir produit un décompte actualisé. A______ s'est opposé à la requête et a sollicité un délai à l'exécution de l'évacuation. Il a déclaré vivre seul dans l'appartement, réaliser un revenu mensuel net de 6'500 fr. et faire l'objet d'actes de défaut de biens.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience du 6 juillet 2022.

EN DROIT

1. 1.1 La voie de l'appel est ouverte contre les décisions d'évacuation, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), alors que la voie du recours est ouverte contre les décisions du Tribunal de l'exécution (art. 309 let. a CPC; art. 319 let. a CPC).

En l'espèce, il doit être compris des explications du locataire qu'il conteste non seulement l'exécution de son évacuation, mais cette évacuation elle-même.

1.2 Selon l'art. 311 al. 1 CPC, il incombe à l'appelant de motiver son appel, c'est-à-dire de démontrer le caractère erroné de la motivation attaquée. Pour satisfaire à cette exigence, il ne lui suffit pas de renvoyer à une écriture antérieure, ni de se livrer à des critiques toutes générales de la décision attaquée; que sa motivation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre aisément, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision que l'appelant attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1). La motivation de l'appel constitue une condition de recevabilité, qui doit être examinée d'office. Lorsque l'appel est insuffisamment motivé, l'autorité n'entre pas en matière (arrêts du Tribunal fédéral 5A_247/2013 du 15 octobre 2013 consid. 3.1; 4A_651/2012 du 7 février 2013 consid. 4.2). La motivation du recours doit, à tout le moins, satisfaire aux exigences qui sont posées pour un acte d'appel (arrêt du Tribunal fédéral 5A_488/2015 du 21 août 2015 consid. 3.2.1 et les arrêts cités);

En l'espèce, l'appelant se limite à soutenir qu'il souhaite régulariser sa situation et ne pas quitter son logement. Il ne critique pas de manière motivée le jugement attaqué en tant qu'il a, d'une part, ordonné son évacuation, considérant que les conditions d'une résiliation pour défaut de paiement étaient réunies et que l'appelant ne disposait plus d'aucun titre juridique l'autorisant à rester dans l'appartement, et, d'autre part, refusé de lui accorder un sursis humanitaire.

Le recours, qu'il s'agisse d'un recours au sens strict selon les art. 319 ss CPC ou d'un appel, ne comporte dès lors aucune motivation répondant aux exigences en la matière, même en faisant preuve d'indulgence, s'agissant d'une partie comparant en personne, de sorte qu'il sera déclaré irrecevable.

2. Même si l'appel ou le recours avait été recevable, il aurait été infondé.

2.1 Selon l'art. 257d CO, lorsque le locataire a reçu la chose louée et qu'il tarde à s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail; ce délai doit être d'au moins trente jours pour les baux d'habitations ou de locaux commerciaux (al. 1). A défaut de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d'habitations ou de locaux commerciaux peuvent être résiliés avec un délai de congé minimum de trente jours pour la fin d'un mois (al. 2).

2.2 En l'espèce, l'intimée a mis en demeure l'appelant de régler l'arriéré de loyer et de charges dans un délai de 30 jours, sous menace de résiliation du bail. Aucun versement n'étant intervenu dans le délai comminatoire, le bail a été résilié moyennant un délai de 30 jours pour la fin d'un mois, de sorte que les conditions d'une résiliation anticipée fondée sur l'art. 257d CO étaient réunies, ce que l'appelant ne conteste au demeurant pas. C'est ainsi à bon droit que les premiers juges ont prononcé l'évacuation de l'intéressé.

2.3
2.3.1
 En procédant à l'exécution forcée d'une décision judiciaire, l'autorité doit tenir compte du principe de la proportionnalité. Lorsque l'évacuation d'une habitation est en jeu, il s'agit d'éviter que des personnes concernées ne soient soudainement privées de tout abri. L'expulsion ne saurait être conduite sans ménagement, notamment si des motifs humanitaires exigent un sursis, ou lorsque des indices sérieux et concrets font prévoir que l'occupant se soumettra spontanément au jugement d'évacuation dans un délai raisonnable. En tout état de cause, l'ajournement ne peut être que relativement bref et ne doit pas équivaloir en fait à une nouvelle prolongation de bail (ATF 117 Ia 336 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_207/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.1).

L'art. 30 al. 4 de la loi genevoise d'application du code civil suisse et d'autres lois fédérales en matière civile (LaCC - E 1 05) concrétise le principe de la proportionnalité en cas d'évacuation d'un logement, en prévoyant que le Tribunal des baux et loyers peut, pour des motifs humanitaires, surseoir à l'exécution du jugement dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire ou du fermier lorsqu'il est appelé à statuer sur l'exécution d'un jugement d'évacuation d'un logement, après audition des représentants du département chargé du logement et des représentants des services sociaux ainsi que des parties.

S'agissant des motifs de sursis, différents de cas en cas, ils doivent être dictés par des "raisons élémentaires d'humanité"; sont notamment des motifs de ce genre la maladie grave ou le décès de l'expulsé ou d'un membre de sa famille, le grand âge ou la situation modeste de l'expulsé; en revanche, la pénurie de logements ou le fait que l'expulsé entretient de bons rapports avec ses voisins ne sont pas des motifs d'octroi d'un sursis (ACJC/422/2014 du 7 avril 2014 consid. 4.2; ACJC/187/2014 du 10 février 2014 consid. 5.2.1; arrêt du Tribunal fédéral du 20 septembre 1990, in Droit du bail 3/1990 p. 30 et réf. cit.).

2.3.2 Dans le présent cas, le recourant admet devoir encore une somme de l'ordre de 10'000 fr. à l'intimée. Il n'a pas rendu vraisemblable avoir entrepris des démarches en vue de trouver une solution de relogement. Il a par ailleurs, de fait, depuis la résiliation au 31 octobre 2019, bénéficié de près de trois ans d'occupation de l'appartement.

3. La procédure est gratuite (ATF 139 III 186 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


Déclare irrecevable l'appel interjeté le 22 juillet 2022 par A______ contre le jugement
JTBL/548/2022 rendu le 6 juillet 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/26556/2019-23-SE.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Jean-Philippe ANTHONIOZ et Monsieur Grégoire CHAMBAZ, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.