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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/4662/2021

ACJC/133/2022 du 31.01.2022 sur JTBL/375/2021 ( SBL ) , MODIFIE

Recours TF déposé le 03.03.2022, rendu le 18.03.2022, IRRECEVABLE, 4A_109/22, 4A_109/2022
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/4662/2021 ACJC/133/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 31 JANVIER 2022

 

Entre

Monsieur A______ et Madame B______, domiciliés chemin ______, appelants d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 29 avril 2021, comparant tous deux en personne,

et

Monsieur C______ et Madame D______, domiciliés avenue ______ Genève, intimés, tous deux représentés par I______, ______, en les bureaux de laquelle ils font élection de domicile.

 


EN FAIT

A. a. Le 26 mars 2019, C______ et D______, bailleurs, ont conclu avec A______ et B______, locataires, un contrat de bail portant sur maison mitoyenne de 7 pièces, sise 1______ à E______ (Genève).

Le bail était conclu du 15 avril 2019 au 30 avril 2020, renouvelable d'année en année, sauf résiliation trois mois avant la fin du contrat.

Le loyer mensuel, y compris les charges (de 450 fr.), était de 5'250 fr.

b. Le 2 mai 2020, C______ et A______, avec la précision que ce dernier était seul locataire, ont signé un document intitulé "Renouvellement du contrat de bail à loyer du 26 mars 2019". Le bail était ainsi prolongé pour une durée ferme de douze mois, du 1er mai 2020 au 30 avril 2021, les conditions pour le renouvellement demeurant inchangées. L'acompte pour charges était porté à 700 fr. par mois, soit un loyer mensuel total de 5'500 fr.

c. Par courriers séparés du 26 novembre 2020, C______ et D______ ont mis les locataires en demeure de leur payer immédiatement la somme totale de 7'500 fr., correspondant au loyer et charges du mois de novembre 2020 ainsi qu'au solde du décompte de charges arrêté au 3 mai 2020. "Les dispositions de l'art. 257d CO [étaient] applicables". Les bailleurs rappelaient en outre aux locataires leur engagement de verser la somme de 14'400 fr. à titre de garantie de loyer.

Le pli destiné à A______ a été distribué le 1er décembre 2020 à ce dernier, alors que celui destiné à B______ a été retourné à l'expéditeur, car non réclamé, la destinataire ayant été avisée pour retrait le 27 novembre 2020.

d. Considérant que les montants réclamés n'avaient pas été payés, les bailleurs, par avis séparés du 6 janvier 2021, ont résilié le contrat avec effet au 28 février 2021.

Le pli destiné à A______ a été distribué le 14 janvier 2021 à ce dernier, alors que celui destiné à B______ a été retourné à l'expéditeur.

e. Par courriers recommandés du 15 janvier 2021 aux locataires, les bailleurs ont également résilié le bail pour sa prochaine échéance contractuelle, soit le 30 avril 2021.

f. Par requête en protection du cas clair du 15 mars 2021, les bailleurs ont conclu à la condamnation des locataires à leur restituer immédiatement la maison mitoyenne sise 1______ à E______, à être autorisés à requérir immédiatement leur évacuation par la force publique, à leur condamnation au paiement de 22'000 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 1er janvier 2021, à titre d'arriérés de loyer, de 5'500 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 1er mars 2021 au titre d'indemnité pour occupation illicite et de 2'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 3 mai 2020, au titre d'arriéré de charges.

g. Les parties ont été citées à comparaître, par courriers recommandés du 31 mars 2021, à une audience du Tribunal devant se tenir le 29 avril 2021.

Les plis destinés aux locataires ont été retirés le 29 avril 2021, ceux-ci ayant demandé une prolongation du délai de garde.

h. Lors de l'audience du 29 avril 2021, les bailleurs ont persisté dans leurs conclusions, exposant que le montant dû s'élevait à 33'000 fr. et que le dernier versement de 5'500 fr. avait été effectué le 26 novembre 2020.

Les locataires n'étaient ni présents ni représentés.

i. Par jugement non motivé JTBL/375/2021 du 29 avril 2021, le Tribunal a condamné B______ et A______ à évacuer immédiatement de leur personne, de leurs biens ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec eux la maison mitoyenne sise 1______ à E______ (ch. 1), autorisé D______ et C______ à requérir l'évacuation par la force publique de B______ et A______ ainsi que toute personne faisant ménage commun avec eux dès l'entrée en force du jugement (ch. 2), condamné B______ et A______ à verser à D______ et C______ les sommes de 22'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 1er janvier 2021 et de 11'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 15 mars 2021 (date moyenne) (ch. 3), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4) et dit que la procédure était gratuite.

Ce jugement a été notifié à B______ et A______ par huissier judiciaire. Celui destiné à A______ a été remis en mains de Monsieur F______ le 6 mai 2021, et celui destiné à B______ déposé le même jour dans la boîte aux lettres de celle-ci, 2______, G______.

j. Par courrier du 13 mai 2021, expédié le 14 mai 2021 au Tribunal, au nom de B______ et A______, "2______, G______", mais signé seulement par A______ pour les deux locataires, ceux-ci ont notamment sollicité la motivation du jugement, "qui [leur] avait été notifié le 9 mai 2021".

Ledit courrier contenait également une demande de reconvocation (voir C. ci-dessous).

B. a. Par jugement JTBL/375/2021 motivé le 17 mai 2021, le Tribunal, statuant par voie de procédure sommaire, sur demande de motivation, a déclaré irrecevable la demande de motivation en ce qu'elle concernait B______ (ch. 1), au fond, a condamné B______ et A______ à évacuer immédiatement de leur personne, de leurs biens ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec eux la maison mitoyenne sise 1______ à E______ (ch. 2), autorisé D______ et C______ à requérir l'évacuation par la force publique de B______ et A______ ainsi que de toute personne faisant ménage commun avec eux dès l'entrée en force du jugement (ch. 3), condamné B______ et A______ à verser à D______ et à C______ les sommes de 22'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2021 et de 11'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 15 mars 2021 (date moyenne) (ch. 4), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5) et dit que la procédure était gratuite (ch. 6).

Le jugement destiné à A______ lui a été notifié par huissier le 26 mai 2021, par remise dans sa boîte aux lettres, 1______ à E______, et celui destiné à B______ l'a également été par huissier le 26 mai 2021 par remise dans sa boîte aux lettres 2______ à G______.

b. Par courrier du 3 juin 2021 reçu par le Tribunal le lendemain,B______ et A______, sous la seule signature du second, ont, notamment, sollicité "un délai pour vous fournir plus de preuve quant au présent recours", et contesté "en intégralité l'acte introduit le 12 mars 2021 auprès du Tribunal des baux et loyers".

Ils ont notamment fait valoir que le loyer mensuel n'avait pas été fixé en bonne et due forme, qu'aucune explication n'avait été fournie relativement à la répartition des charges, que l'avenant au contrat de bail avait libéré B______, et que les deux avis de résiliation (respectivement pour les 28 février et 30 avril 2021) avaient été contestés par devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers.

c. Ce courrier a été transmis par le Tribunal aux époux C/D______ pour information.

d. Dans une lettre du 14 juin 2021 au Tribunal, transmise aux locataires, les époux C/D______ ont contesté les allégations contenues dans celui du 3 juin 2021, et exposé que le montant dû était de 56'000 fr.

e. Par pli recommandé daté du 2 juillet mais expédié le 6 juillet 2021 au Tribunal, les locataires, sous la seule signature de A______, faisant référence à leur lettre du 3 juin 2021, "insist[aient] sur les termes et les conclusions de [leur] dernier courrier" et demandaient l'annulation du jugement du 29 avril 2021 en précisant que "une demande d'effet suspensif et d'assistance judiciaire [étaient] jointes au présent recours".

Ils faisaient à nouveau notamment valoir qu'aucun avis de fixation de loyer n'avait été communiqué au Tribunal, en contestaient en conséquence le montant et demandaient au juge de le fixer, persistaient à demander des explications quant aux charges, rappelaient que les résiliations avaient été contestées dans le délai par devant la Commission de conciliation, qu'opposition avait été faite au commandement de payer, affirmaient ne pas avoir reçu l'état des lieux, avoir communiqué au Tribunal le 25 avril 2021 une procuration signée par B______, et être en retard dans le paiement du loyer à cause de la crise du COVID.

Cet acte a été transmis par le Tribunal à la Cour par courrier interne des 12 et 20 juillet 2021, "comme semblant relever de [sa] compétence".

f. Par arrêt préparatoire ACJC/1167/2021 du 16 septembre 2021, la Cour a transmis à C______ et D______ l'acte expédié au Tribunal par B______ et A______ le 6 juillet 2021, ainsi que le courrier recommandé de ces derniers du 3 juin 2021 au Tribunal dans la cause C/4662/2021, transmis à la Cour, leur a imparti un délai de trois jours dès réception pour se déterminer sur la requête d'effet suspensif contenue dans l'acte du 7 juillet 2021, et un délai de dix jours pour se déterminer sur l'acte du 7 juillet 2021 et le courrier du 3 juin 2021 précités.

g. Par courrier du 20 septembre 2021, C______ et D______ ont d'abord relevé que seul le courrier du 3 juin 2021 avait été envoyé par les locataires dans le délai pour former appel ou recours contre le jugement motivé transmis aux parties le 25 mai 2021, lequel ne contenait aucune conclusion pertinente. La demande d'effet suspensif avait été formulée dans le courrier du 2 juillet 2021, soit bien après l'échéance du délai de dix jours pour former appel ou recours contre le jugement JTBL/375/2021, ce qui rendait sa recevabilité douteuse. Si l'acte déposé par les locataires devait ne pas être considéré comme irrecevable, il devrait l'être comme un recours car portant sur une question d'exécution. L'effet suspensif ne devait pas être accordé, au motif du peu de chances de succès du recours. De plus aucun loyer n'était payé.

h. Par arrêt présidentiel du 21 septembre 2021, la Cour a constaté la suspension de la force jugée du caractère exécutoire du jugement JTBL/375/2021 rendu le 29 avril 2021 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/4662/2021-7 et motivé le 17 mai 2021, et dit que la requête d'effet suspensif était sans objet. Elle a retenu qu'il ressortait des courriers des 3 juin et 6 juillet 2021 que les locataires contestaient le jugement du 29 avril 2021 ordonnant leur évacuation, et sollicitaient son annulation, de sorte que cet acte devait, à tout le moins prima facie, être considéré comme un appel.

i. Par réponse au "recours/appel" du 24 septembre 2021, C______ et D______ ont conclu à l'irrecevabilité du recours/appel, à la confirmation du jugement du 29 avril 2021, au rejet du recours/appel et au déboutement de A______ et B______ de toutes leurs conclusions.

Ils ont produit des pièces nouvelles, soit une copie de l'avis de fixation du loyer du 21 mars 2019 (pièce 16), un relevé de compte loyer locataires au 17 septembre 2021 (pièce 17), et des photographies de l'extérieur de la maison (pièce 18).

j. Par courrier du 11 octobre 2021, A______ et B______, sous la seule signature de A______, ont "contesté intégralement la réponse au recours/appel formée par I______ en fond et en forme" et "insisté sur les termes et les conclusions de [leurs] courriers précédents notamment celui du 06 et 27 août 2021" (voir C.j et l. ci-dessous).

Ils ont produit une pièce nouvelle, soit une facture de H______ du 9 octobre 2021.

k. Les bailleurs ayant renoncé à dupliquer par courrier du 21 octobre 2021, les parties ont été informées par courrier du greffe de la Cour du 22 octobre 2021 de ce que la cause était gardée à juger.

C. a. Dans leur courrier du 13 mai 2021 au Tribunal (cf. A.j ci-dessus), A______ et B______ ont également exposé qu'ils n'avaient reçu la citation à comparaître qu'après l'audience et demandaient à être reconvoqués. Ils sollicitaient enfin l'octroi d'un sursis humanitaire de neuf mois.

b. Par ordonnance du 17 mai 2021, le Tribunal a imparti aux bailleurs un délai au 4 juin 2021 pour se déterminer sur la requête de restitution.

c. Les bailleurs se sont opposés à la demande de restitution par courrier du 27 mai 2021.

d. Dans leur courrier du 3 juin 2021 reçu le lendemain par le Tribunal (voir B.b ci-dessus),B______ et A______ ont, notamment, à nouveau demandé à être reconvoqués pour être entendus. Ils n'avaient été informés de l'audience du 29 avril 2021 qu'après l'heure où celle-ci avait eu lieu et "le contexte familial était et est extrêmement compliqué". A______ précisait qu'il représentait et représenterait sa compagne, B______, "pour la protéger contre les crises d'angoisse importantes que l'époux C/D______ lui a infligées durant ces derniers mois".

e. Par jugement JTBL/514/2021 du 11 juin 2021, le Tribunal des baux et loyers a déclaré irrecevable la requête en restitution [du 13 mai 2021] en tant que formée au nom de B______ (ch. 1 du dispositif), déclaré irrecevables les écritures formées le 4 juin 2021 par A______ (ch. 2), rejeté la requête en restitution formée par A______ (ch. 3), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4) et dit que la procédure était gratuite.

f. Par courrier recommandé du 18 juillet 2021 au Tribunal, transmis à la Cour le 21 juillet 2021, les locataires, sous la seule signature de A______, ont demandé "la révision du jugement du 11 juin 2021".

Y était notamment jointe une procuration de B______ en faveur de A______, datée du 24 avril 2021, autorisant celui-ci "à participer aux audiences du Tribunal des baux et loyers et celles de la commission de conciliation, pour une durée de un an et pour toutes les causes [la] concernant".

g. Par acte expédié le même jour à la Cour de justice, A______ et B______ (ci-après : les locataires ou les appelants) ont formé recours contre le jugement du 11 juin 2021, reçu le 22 juin 2021, concluant en substance à ce qu'il soit fait droit à leur requête de restitution.

Ils ont produit une pièce nouvelle.

h. Dans leur réponse du 23 juillet 2021, C______ et D______ ont conclu à l'irrecevabilité des pièces et faits nouveaux, et à la confirmation du jugement entrepris.

i. Par arrêt présidentiel du 27 juillet 2021, la Cour a constaté la suspension de la force jugée et le caractère exécutoire du jugement querellé et dit que la requête d'effet suspensif était sans objet.

j. Par réplique déposée à la Cour le 9 août 2021 (datée du 6 août 2021), les locataires ont conclu à l'annulation du jugement de 29 avril 2021, à celle du jugement du 11 juin 2021, à l'octroi de l'effet suspensif au recours, à la confirmation de la prolongation du contrat de bail, à l'octroi d'un sursis humanitaire de six mois en raison de la détresse du locataire, à ce que A______ soit reconnu comme seul locataire depuis le 2 mai 2020, à l'octroi d'une réparation à ce dernier pour l'atteinte à son intégrité physique et psychique ainsi que professionnelle, et à la mise en place d'une mesure protectrice contre les infractions des bailleurs.

Ils ont produit de nombreuses pièces nouvelles.

k. Dans une duplique du 13 août 2021, les bailleurs ont conclu à l'irrecevabilité des pièces produites avec la réplique, ainsi qu'à celles des conclusions nouvelles. Ils ont persisté pour le surplus.

l. Dans un courrier du 27 août 2021 à la Cour, les locataires ont persisté dans leurs conclusions du 6 août 2021 et produit de nouvelles pièces.

m. Les parties ont été informées par courrier du greffe de la Cour du 31 août 2021 de ce que la cause était gardée à juger.

n. Le recours formé contre le jugement du 11 juin 2021 fait l'objet d'un arrêt séparé rendu ce jour.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

Lorsque le litige porte sur une décision prise dans le cadre d'une procédure en cas clair portant sur une requête en expulsion, la valeur litigieuse correspond à la valeur du loyer pour la chose louée pour six mois (ATF 144 III 346 consid. 1.2.1).

En l'espèce, le prononcé, par le Tribunal, de l'évacuation des locataires est contesté, de sorte que la voie de l'appel est ouverte, la valeur litigieuse étant supérieure à 10'000 fr. au vu du loyer des locaux loués de 5'500 fr. par mois, sans compter la demande en paiement de 22'000 fr.

2. 2.1
2.1.1
L'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision motivée. Si la décision a été rendue en procédure sommaire, le délai pour l'introduction de l'appel et le dépôt de la réponse est de dix jours (art. 314 al. 1 CPC). La procédure en protection du cas clair est soumise à la procédure sommaire (art. 257 al. 1 CPC).

L'appel doit être signé et le tribunal fixe un délai pour la rectification des vices de forme telle que l'absence de signature ou de procuration. A défaut, l'acte n'est pas pris en considération (art. 221 al. 1 let. f et 132 al. 1 CPC).

Pour satisfaire à l'exigence de motivation posée à l'art. 311 al. 1 CPC, il ne suffit pas de renvoyer aux moyens soulevés en première instance, ni de se livrer à des critiques toutes générales de la décision attaquée. La motivation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre aisément, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision que le recourant attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

Le recours doit par ailleurs comporter des conclusions, lesquelles doivent indiquer sur quels points la partie appelante demande la modification ou l'annulation de la décision attaquée; en principe, ces conclusions doivent être libellées de telle manière que l'autorité d'appel puisse, s'il y a lieu, les incorporer sans modification au dispositif de sa propre décision. En règle générale, les conclusions portant sur des prestations en argent doivent être chiffrées (ATF 137 III 617 consid. 4.2 et 4.3).

2.1.2 La demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC, sont remplies (art. 317 al. 2 let. a CPC).

2.1.3 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

Le défaillant ne peut faire valoir, dans un appel, que des griefs liés aux prescriptions sur les conséquences du défaut, aux citations et convocations (Willisegger, Commentaire bâlois, 2ème éd. 2013, n. 30 ad art. 234 CPC).

Le contrôle de l'application du droit matériel (resp. du droit de procédure) doit pouvoir être effectué, sur la base du seul dossier soumis au premier juge, par l'autorité de recours saisie d'un appel d'un jugement rendu par défaut, sauf à priver le défaillant de toute voie de recours; ses conclusions en appel ne doivent pas être qualifiées de conclusions nouvelles en tant qu'elles ne concluent qu'au déboutement. En effet, le principe de la bonne foi implique de considérer que celui qui ne prend aucune conclusion en première instance n'acquiesce pas à la demande, mais est présumé s'y opposer. De la sorte, des conclusions en déboutement prises en appel ne sont que les conclusions implicites de première instance formalisées. Des conclusions différenciées ou comportant des objections ou exceptions ne pourraient par contre pas être reçues (Tappy, Les décisions par défaut, in Procédure civile suisse - Les grands thèmes pour les praticiens, 2010, p. 438 et 439, n. 99; ACJC/190/2016).

2.2 En l'occurrence, l'acte du 3 juin 2021, rédigé par un justiciable agissant en personne, doit être interprété avec indulgence. La Cour comprend que l'appelant, même s'il ne prend pas de conclusions formelles, sollicite l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la requête en protection de cas clair des bailleurs, en soutenant l'absence d'avis de fixation du loyer initial, ainsi que de décompte de charges, et la saisine de la Commission suite aux résiliations reçues. Implicitement, il fait ainsi valoir que le Tribunal ne pouvait, sur la base des éléments en sa possession, considérer que le cas était clair, sans violer le droit (art. 234 al. 1 CPC).

Les conclusions en ce qu'elles visent à s'opposer au prononcé de l'évacuation sont admissibles, de sorte que le courrier du 3 juin 2021, transmis tardivement à la Cour par le Tribunal, puis par la Cour aux intimés, doit être considéré comme un appel recevable. En revanche, l'acte ne contient aucun grief ni conclusion valable relatifs au chiffre 3 du dispositif, concernant l'exécution de l'évacuation.

Quand bien même l'acte n'est signé que par A______, le Tribunal ne l'a pas interpellé comme il aurait dû le faire. Comme il sera vu ci-après, le point de savoir qui est titulaire du bail n'est pas clair, de sorte que l'appel ne saurait être déclaré irrecevable au motif qu'il n'est signé que par une partie. Enfin, figure au dossier une procuration signée par B______, du 24 avril 2021, autorisant A______ à la représenter dans tout ce qui a trait au bail litigieux.

Ainsi, A______ et B______ seront désignés ci-après comme les appelants, sans autre précision.

3. Les parties ont produit de nouvelles pièces et fait valoir de nouveaux faits.

3.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b). Les deux conditions sont cumulatives (Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 6 ad art. 317 CPC).

Les exigences posées par l'art. 257 al. 1 CPC doivent être satisfaites en première instance déjà et le juge d'appel ne saurait contrôler l'appréciation du tribunal sur la base de pièces différentes, fussent-elles recevables au regard de l'art. 317 al. 1 CPC (arrêts du Tribunal fédéral 4A_420/2012 du 7 novembre 2012 consid. 5; 4A_312/2013 du 17 octobre 2013 consid. 3.2).

3.2 Ainsi, les allégations et les pièces nouvelles ne sont pas recevables.

4. Les appelants font grief au Tribunal d'avoir considéré que le cas était clair.

4.1
4.1.1 Aux termes de l'art. 257 al. 1 et 3 CPC, relatif à la procédure de protection dans les cas clairs, le tribunal admet l'application de la procédure sommaire lorsque les conditions suivantes sont remplies : (a) l'état de fait n'est pas litigieux ou est susceptible d'être immédiatement prouvé et (b) la situation juridique est claire (al. 1); le tribunal n'entre pas en matière sur la requête lorsque cette procédure ne peut pas être appliquée (al. 3).

Selon la jurisprudence, l'état de fait n'est pas litigieux lorsqu'il n'est pas contesté par le défendeur; il est susceptible d'être immédiatement prouvé lorsque les faits peuvent être établis sans retard et sans trop de frais. En règle générale, la preuve est rapportée par la production de titres, conformément à l'art. 254 al. 1 CPC. La preuve n'est pas facilitée : le demandeur doit ainsi apporter la preuve certaine des faits justifiant sa prétention; la simple vraisemblance ne suffit pas. Si le défendeur fait valoir des objections et exceptions motivées et concluantes, qui ne peuvent être écartées immédiatement et qui sont de nature à ébranler la conviction du juge, la procédure du cas clair est irrecevable (ATF 144 III 462 consid. 3.1; 141 III 23 consid. 3.2; 138 III 620 consid. 5.1.1 et les arrêts cités).

La situation juridique est claire lorsque l'application de la norme au cas concret s'impose de façon évidente au regard du texte légal ou sur la base d'une doctrine et d'une jurisprudence éprouvées (ATF 144 III 462 consid. 3.1; 138 III 123 consid. 2.1.2, 620 consid. 5.1.1, 728 consid. 3.3). En règle générale, la situation juridique n'est pas claire si l'application d'une norme nécessite l'exercice d'un certain pouvoir d'appréciation de la part du juge ou que celui-ci doit rendre une décision en équité, en tenant compte des circonstances concrètes de l'espèce (ATF 144 III 462 consid. 3.1 et les arrêts cités). Si le juge parvient à la conclusion que ces conditions sont remplies, le demandeur obtient gain de cause par une décision ayant l'autorité de la chose jugée et la force exécutoire (ATF 138 III 620 consid. 5.1.1). Si elles ne sont pas remplies et que le demandeur ne peut donc obtenir gain de cause, le juge ne peut que prononcer l'irrecevabilité de la demande. Il est en effet exclu que la procédure puisse aboutir au rejet de la prétention du demandeur avec autorité de la chose jugée (ATF 144 III 462 consid. 3.1; 140 III 315 consid. 5; arrêt du Tribunal fédéral 4A_600/2017 du 7 janvier 2019 consid. 3.3).

Il est admis que l'art. 234 CPC s'applique par analogie à la procédure sommaire y compris pour les cas clairs (arrêt du Tribunal fédéral 4A_218/2017 du 14 juillet 2017 consid. 3.1.1). Selon l'alinéa 1 de cette disposition, en cas de défaut d'une partie, le tribunal statue sur la base des actes qui ont, le cas échéant, été accomplis conformément aux dispositions de la loi. Il se base au surplus, sous réserve de l'art. 153 CPC, sur les actes de la partie comparante et sur le dossier.

4.1.2 L'action en expulsion pour défaut de paiement du loyer au sens de
l'art. 257d CO, comme celle pour défaut de paiement du fermage au sens de l'art. 282 CO, selon la procédure de protection dans les cas clairs (art. 257 CPC), présuppose que le bail ait valablement pris fin, puisque l'extinction du bail est une condition du droit à la restitution des locaux (art. 267 al. 1 CO, respectivement art. 299 al. 1 CO). Le tribunal doit donc trancher à titre préjudiciel la question de la validité de la résiliation, laquelle ne doit être ni inefficace, ni nulle, ni annulable (une prolongation du bail n'entrant pas en ligne de compte lorsque la résiliation est signifiée pour demeure conformément aux art. 257d ou 282 CO). Les conditions de l'art. 257 al. 1 CPC s'appliquent également à cette question préjudicielle (ATF 144 III 462 consid. 3; 142 III 515 consid. 2.2.4 in fine; 141 III 262 consid. 3.2 in fine).

Selon l'art. 257d CO, lorsque le locataire a reçu la chose louée et qu'il tarde à s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail; ce délai doit être d'au moins trente jours pour les baux d'habitations ou de locaux commerciaux (al. 1). A défaut de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d'habitations ou de locaux commerciaux peuvent être résiliés avec un délai de congé minimum de trente jours pour la fin d'un mois (al. 2).

Le délai comminatoire doit être de 30 jours au moins pour les baux à loyer d'habitation. Lorsque le bailleur impartit au locataire un délai trop court, les auteurs et les tribunaux hésitent. Certains considèrent que le délai ainsi fixé et nul; le bailleur ne pourra résilier le bail que moyennant la fixation d'un nouveau délai correct. D'autres estiment que le délai trop court doit être prolongé; le bail ne peut pas être résilié si le locataire s'est acquitté de son dû dans le délai légal. La fixation par le bailleur d'un délai comminatoire inférieur à 30 jours n'entraîne pas la nullité du congé si le locataire n'entendait de toute manière pas payer son dû dans le délai légal et si le bailleur a résilié le bail en respectant ce dernier. La contestation du congé est, dans ces conditions, contraire à la bonne foi (LACHAT, Le bail à loyer, 2019, p. 872 et 873).

La sommation doit être claire et mentionner l'invitation à payer l'arriéré d'une part, et le montant de l'arriéré lui-même (pas nécessairement chiffré, mais déterminable de manière certaine, par exemple en indiquant les mois impayés d'autre part (LACHAT, op. cit., p. 873 et 874). Le bailleur peut mettre un terme anticipé au contrat lorsque le locataire ne s'est pas acquitté du solde de son décompte de frais accessoires.

L'avis comminatoire doit expressément indiquer qu'à défaut de paiement dans le délai imparti le bail sera résilié; renvoyer à la loi ou à une clause du contrat prévoyant la possibilité de résilier de manière anticipée ne suffit pas. Le locataire doit clairement comprendre que le bailleur se réserve la faculté de mettre un terme au bail, si le montant n'est pas payé à temps. A défaut d'une telle menace de congé, le bailleur ne pourra pas valablement résilier le contrat (LACHAT, op. cit., p. 874).

4.2 En l'espèce, il ressort des pièces produites par l'intimée à l'appui de sa requête en évacuation devant le Tribunal, en particulier du renouvellement du contrat du 2 mai 2020, que seul l'appelant était locataire dès cette date. Le décompte de loyer produit, arrêté en février 2021, mentionne pourtant A______ et B______ comme locataires. Les avis comminatoires et de résiliation ont été adressés tant à A______ qu'à B______, à l'adresse des locaux loués. Il existe ainsi un doute quant à la titularité du bail. Le Tribunal a retenu, sans explication particulière, que A______ et B______ étaient colocataires.

Les avis comminatoires du 26 novembre 2020 mentionnent que le locataire doit payer "immédiatement" la somme de 7'500 fr., soit 5'500 fr. pour le loyer de novembre 2020 et 2'000 fr. au titre du solde des charges arrêté au 3 mai 2020. Il n'est pas allégué que les locataires n'auraient de toute façon pas payé le loyer, un paiement étant d'ailleurs intervenu le 26 novembre 2020.

Les avis comminatoires ne contiennent aucune menace de résiliation, en cas de défaut de paiement. Seule figure la mention que "les dispositions de l'art. 257d CO sont applicables", ce qui est insuffisant au regard des principes susmentionnés.

Il résulte de ce qui précède que les avis comminatoires n'étaient pas conformes aux exigences légales et qu'en conséquence les résiliations qui les ont suivis n'étaient pas valables, ce que le juge aurait dû constater à la lecture des pièces produites.

Le cas n'était pas clair et c'est en violation de l'art. 234 CPC que le Tribunal a retenu qu'il l'était et qu'il a prononcé l'évacuation des appelants. Les chiffres 1 et 2 du dispositif du jugement entrepris seront donc annulés.

5. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 3 juin 2021 par A______ et B______ contre le jugement JTBL/375/2021 rendu par le Tribunal des baux et loyers le 29 avril 2021 et motivé le 17 mai 2021 dans la cause C/4662/2021-7-SE.

Au fond :

Annule les chiffres 1, 2 et 3 du dispositif de ce jugement et, statuant à nouveau sur ces points :

Déclare irrecevable la requête en évacuation et en exécution formée par C______ et D______ le 15 mars 2021 à l'encontre de A______ et B______.

Confirme le jugement attaqué pour le surplus.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Pauline ERARD, Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Laurence CRUCHON, Monsieur Stéphane PENET, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

Le président :

Ivo BUETTI

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.