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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/22564/2019

ACJC/1102/2021 du 06.09.2021 sur JTBL/149/2021 ( OBL ) , CONFIRME

Normes : CPC.243.al2.letc; Cst.29.al2; CO.257d
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/22564/2019 ACJC/1102/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 6 SEPTEMBRE 2021

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 1er mars 2021, représenté par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6, en les bureaux de laquelle il fait élection de domicile,

 

et

VILLE DE GENEVE, représentée par la GERANCE IMMOBILIERE MUNICIPALE, rue de l'Hôtel-de-Ville 5, case postale 3983, 1211 Genève 3, intimée, en les bureaux de laquelle elle fait élection de domicile.

 

 

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/149/2021 du 1er mars 2021, reçu par les parties le 2 mars 2021, le Tribunal des baux et loyers a déclaré efficace et valable le congé notifié le 17 septembre 2019 pour le 30 novembre 2019 par la VILLE DE GENEVE à A______, concernant l'appartement de deux pièces au 5ème étage de l'immeuble sis 1______, à Genève (ch. 1 du dispositif), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 2) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 3).

B. a. Par acte expédié le 16 avril 2021 à la Cour de justice, A______ forme appel contre ce jugement, dont il sollicite l'annulation. Il conclut cela fait à l'inefficacité du congé et, subsidiairement, à ce que celui-ci soit annulé.

b. Dans sa réponse du 20 mai 2021, la VILLE DE GENEVE conclut à la confirmation du jugement entrepris.

c. A______ n'a pas fait usage de son droit de réplique.

d. Les parties ont été avisées le 14 juin 2021 par plis du greffe de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Par contrat du 24 mai 2007, A______, locataire, a pris à bail un appartement de deux pièces au 5ème étage de l'immeuble sis 1______, à Genève, propriété de la VILLE DE GENEVE, bailleresse.

Le contrat a été conclu pour une durée initiale d'un an, à compter du 1er juin 2007, renouvelable ensuite tacitement d'année en année, sauf résiliation respectant un préavis de trois mois.

Le loyer a été fixé en dernier lieu à 475 fr. 95 par mois, charges comprises, dès le 1er juin 2013.

b. Par avenant du 15 février 2013, le bail a été soumis au Règlement fixant les conditions de location des logements à caractère social de la Ville de Genève du 18 février 2009.

c. Depuis le début du bail, le locataire a fait l'objet de plusieurs mises en demeure en lien avec des retards de paiement de loyers, notamment les 20 avril 2011, 13 octobre 2014, 2 décembre 2014, 21 juin 2016, 25 octobre 2016, 14 novembre 2017 et 22 février 2019.

d. Le 15 juin 2011, la bailleresse a résilié le bail en raison de loyers impayés, avant de remettre celui-ci en vigueur à une date indéterminée.

e. Le 10 février 2017, la bailleresse a résilié le bail du locataire pour le 31 mars 2017. Elle a motivé le congé en raison d'une sous-location non autorisée de l'appartement.

f. Le locataire a contesté ce congé et les parties ont trouvé un accord le 7 juillet 2017, aux termes duquel le locataire s'est engagé à ne pas sous-louer l'appartement et à l'occuper personnellement. La bailleresse s'est engagée à remettre le bail en vigueur, après un délai d'épreuve jusqu'au 7 janvier 2019.

g. Le 13 février 2019, la bailleresse a informé le Tribunal des baux et loyers que l'accord du 7 juillet 2017 avait été respecté, que le bail avait ainsi été remis en vigueur et que, dès lors, la cause pouvait être rayée du rôle.

h. Le 22 février 2019, la bailleresse a informé le locataire qu'un montant de de 1'048 fr. 45 à titre de loyers demeurait impayé et lui a fixé un délai pour s'en acquitter.

i. Par courrier recommandé du 17 juillet 2019, la bailleresse a mis en demeure le locataire de lui verser la somme de 3'428 fr. 20 dans un délai de trente jours dès réception du courrier, faute de quoi le bail serait résilié. Cette somme représentait les loyers des mois d'août 2018 et de janvier à juillet 2019, déduction faite de 379 fr. 40, résultant d'un trop-perçu de la saison 2017-2018 de chauffage.

j. Cette mise en demeure a été réceptionnée par le locataire le 24 juillet 2019.

k. Le 1er septembre 2019, le locataire a versé la somme de 3'428 fr. 90, laquelle a été créditée sur le compte de la bailleresse le 3 septembre 2019.

l. Le 17 septembre 2019, usant de la formule officielle, la bailleresse a résilié le bail pour le 30 novembre 2019, au motif que le versement était intervenu après l'échéance du délai comminatoire.

m. Le 30 septembre 2019, le locataire a indiqué à la bailleresse que le retard était dû à des dépenses extraordinaires, liées à son état de santé.

n. Le 3 octobre 2019, la bailleresse a confirmé la réception de la somme de 3'428 fr. 90, indiquant toutefois que la résiliation était intervenue antérieurement au versement.

o. Le 7 novembre 2019, le locataire a fait remarquer à la bailleresse que la résiliation effectuée le 17 septembre 2019 était postérieure à son versement, effectué le 1er septembre 2019.

p. Le 25 novembre 2019, la bailleresse a confirmé le maintien de la résiliation et indiqué qu'il demeurait encore un arriéré de loyer de 475 fr. 35.

q. Le 28 novembre 2019, le locataire a fait part à la bailleresse de son étonnement, dans la mesure où il s'était acquitté du loyer avec peu de retard, où la résiliation était intervenue après le versement et où qu'il était désormais à jour dans ses loyers.

r. Le 29 novembre 2019, la bailleresse a confirmé une nouvelle fois la résiliation, relevant encore que la situation du locataire posait « d'autres problèmes ».

s. Parallèlement à ces échanges épistolaires, le locataire a contesté le congé le 3 octobre 2019 devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers. Faute d'accord, l'autorisation de procéder a été délivrée le 28 novembre 2019 et le locataire a porté l'affaire devant le Tribunal le 3 janvier 2020, concluant à l'inefficacité du congé.

t. Dans sa réponse du 26 février 2020, la bailleresse a allégué que malgré le versement de 3'428 fr. 90 après l'échéance du délai comminatoire, le locataire n'était toujours pas à jour dans son loyer, son compte n'ayant été soldé que le 10 octobre 2019. Elle a produit un rapport d'enquête d'une agence privée de renseignement, daté du 11 décembre 2019, lequel affirmait que le locataire n'occupait en réalité pas le logement mais habitait chez son épouse, de laquelle il était officiellement séparé, à une autre adresse.

u. Lors de l'audience du Tribunal du 3 septembre 2020, le locataire a contesté ne pas vivre dans le logement litigieux. Il a déclaré que les retards de loyers étaient dus à des frais médicaux en lien avec des opérations chirurgicales à son poignet droit, au fait qu'il n'avait pas de travail fixe durant cette période et qu'il percevait l'aide de l'Hospice général, dans l'attente d'une décision de rente de l'Office de l'assurance-invalidité. Il avait demandé l'aide de sa fille pour résorber l'arriéré de loyer et était désormais à jour. Il avait négocié avec la bailleresse un arrangement de paiement, qu'il n'avait pas réussi à respecter.

La représentante de la bailleresse a déclaré que le motif du congé était le non-paiement du loyer et que la résiliation était maintenue, malgré le paiement de l'arriéré, en raison des circonstances du cas concret. Le locataire avait déjà eu des retards de loyers en 2017 et 2018. Lors de la remise en vigueur du bail en février 2019, le locataire avait cessé de payer son loyer, ce qui constituait pour la bailleresse un manque de respect relatif à l'accord intervenu, même si celui-ci portait sur la question de la sous-location du logement et non des retards de loyers. La bailleresse a confirmé que le locataire avait sollicité un arrangement de paiement en avril 2019, mais ne l'avait pas respecté, raison pour laquelle une mise en demeure avait été envoyée. Le congé n'avait été adressé que le 17 septembre 2019, en raison de retards internes du fait d'une période particulièrement chargée en août et septembre 2019.

v. Les parties ont plaidé le 17 décembre 2020, sur quoi le Tribunal a gardé la cause à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

1.2 En l'espèce, le loyer annuel du logement s'élève à 5'711 fr. 40. En prenant en compte une période de protection de trois ans, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (5'711 fr. 40 × 3 ans = 17'134 fr. 20).

1.3 L'appel a été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi, en tenant compte de la suspension des délais durant les féries pascales (art. 130, 131, 145 al. 1 let. 1, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.4 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

2.             Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, l'appelant reproche au Tribunal de n'avoir pas instruit suffisamment la question du motif du congé, qui serait en réalité une présumée sous-location non autorisée de l'appartement. Le droit d'être entendu de l'appelant aurait ainsi été violé, faute pour le Tribunal de l'avoir interrogé à ce propos.

2.1 Selon l'article 243 al. 2 let. c CPC, la procédure simplifiée s'applique notamment aux litiges portant sur des baux à loyer d'habitations et de locaux commerciaux en ce qui concerne la protection contre les congés ou la prolongation du bail. La maxime inquisitoire sociale régit la procédure (art. 247 al. 2 let. a CPC). Il s'agit là de la maxime inquisitoire simple et non de la maxime inquisitoire illimitée de l'art. 296 al. 3 CPC. Elle a pour but de protéger la partie faible au contrat, de garantir l'égalité entre les parties au procès et d'accélérer la procédure (ATF 125 III 231 consid. 4a).

Selon la volonté du législateur, le tribunal n'est soumis qu'à une obligation d'interpellation accrue. Comme sous l'empire de la maxime des débats, applicable en procédure ordinaire, les parties doivent recueillir elles-mêmes les éléments du procès. Le tribunal ne leur vient en aide que par des questions adéquates afin que les allégations nécessaires et les moyens de preuve correspondants soient précisément énumérés. Mais il ne se livre à aucune investigation de sa propre initiative. Lorsque les parties sont représentées par un avocat, le tribunal peut et doit faire preuve de retenue(ATF 141 III 569 consid 2.3.1).

Le droit d'être entendu garanti par les art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH comprend en particulier le droit, pour une partie à un procès, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos (ACJC/195/2021 du 15 février 2021 consid. 3.1).

2.2 En l'espèce, le locataire est représenté depuis le début de son litige à l'encontre de la bailleresse par un mandataire professionnellement qualifié, titulaire du brevet d'avocat, ce qui implique un devoir de retenue du Tribunal, comme il l'a déjà été jugé dans d'autres affaires impliquant une représentation par un tel représentant (ACJC/345/2021 du 22 mars 2021 consid. 3). Il appartenait ainsi au locataire, aidé de son mandataire, d'alléguer les faits qu'il estimait pertinents pour la résolution du litige, étant relevé qu'il supportait le fardeau de la preuve du congé contraire à la bonne foi (cf. infra point 4.1 in fine). Il ressort du procès-verbal de l'audience du 3 septembre 2020 que la question de la sous-location de l'appartement a été abordée par les premiers juges et que les deux parties ont eu l'occasion de se déterminer, en particulier lors des plaidoiries tenues ultérieurement à ce propos, de sorte que l'on ne décèle ni une violation du droit d'être entendu, ni un manque d'instruction du Tribunal à ce propos.

Quoi qu'il en soit, la question de la sous-location de l'appartement n'est d'aucune pertinence pour la résolution du cas, comme il le sera vu ci-après (cf. infra point 4.2).

Le grief de la violation de la maxime inquisitoire sociale et du droit d'être entendu sera en conséquence rejeté.

3.             L'appelant fait grief au Tribunal d'avoir violé l'art. 257d CO. Selon lui, en donnant le congé 25 jours après l'échéance du délai comminatoire, celui-ci a été effectué tardivement, dans la mesure où il pouvait croire de bonne foi que la bailleresse avait renoncé à la résiliation extraordinaire du contrat.Il convenait en outre de tenir compte qu'il bénéficiait de l'aide sociale et qu'il devait faire face à des frais médicaux importants, de sorte qu'il lui était difficile de réunir la somme demandée avant l'échéance du délai comminatoire. Enfin, l'intimée avait pour pratique notoire de retirer le congé, une fois l'arriéré résorbé.

3.1 3.1.1 A teneur de l'art. 257d al. 1 CO, lorsque, après réception de la chose, le locataire a du retard pour s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail. Le délai doit être d'au moins trente jours pour les baux d'habitations ou de locaux commerciaux. L'art. 257d al. 2 CO dispose qu'à défaut de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d'habitations ou de locaux commerciaux peuvent être résiliés moyennant un délai de congé minimum de trente jours pour la fin d'un mois.

La validité d'une résiliation fondée sur l'art. 257d al. 2 CO suppose, entre autres conditions, que le locataire se soit effectivement trouvé en retard dans le paiement du loyer ou de frais accessoires lorsque la sommation prévue à l'art. 257d al. 1 CO lui a été adressée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_366/2008 du 25 novembre 2008 consid. 3).

Le montant de l'arriéré doit être crédité sur le compte du bailleur au plus tard à l'échéance du délai comminatoire ou être payé à la poste le dernier jour du délai. Il appartient au locataire de s'organiser en conséquence pour que la somme soit payée en temps utile (ATF 124 III 145; arrêt du Tribunal fédéral 4A_366/2008 du 25 novembre 2008, consid. 4; Lachat in CR-CO I, 2e éd., 2012, n. 7; Tercier/Favre, Les contrats spéciaux, 4e éd., 2009, n. 2398).

3.1.1 Selon la jurisprudence, on ne saurait admettre trop facilement une renonciation tacite à un droit (arrêt du Tribunal fédéral 4A_545/2011 du 11 janvier 2012 consid. 4.5). Le bailleur n'est en particulier pas tenu de résilier immédiatement le bail, sitôt le délai comminatoire expiré. Il n'est pas réputé avoir renoncé à donner le congé s'il attend quelque peu, en particulier s'il a une raison fondée d'attendre. Mais il ne saurait trop tarder : une résiliation qui interviendrait de nombreux mois après l'expiration du délai comminatoire peut, selon les circonstances, apparaître abusive ou contraire à la bonne foi, dans la mesure où le locataire pourrait déduire de l'inaction du bailleur, sauf circonstance particulière, une volonté de renoncer à la résiliation du contrat (arrêts du Tribunal fédéral 4A_641/2011 du 27 janvier 2012, consid. 8; 4A_366/2008 du 25 novembre 2008, consid. 4; Wessner, CPra Droit du bail à loyer et à ferme, 2e éd., 2017, n. 31 ad art. 257d CO; Lachat, Le bail à loyer, 2019 p. 878).

Il ressort de la jurisprudence qu'une résiliation extraordinaire intervenue 21 jours après l'échéance du délai comminatoire et 18 jours après le paiement tardif de l'arriéré a été considérée comme à la limite de l'admissible (arrêt du Tribunal fédéral 4A_366/2008 du 25 novembre 2008).

En l'absence de versement avant la résiliation, a été considérée comme admissible une résiliation extraordinaire intervenue 34 jours (arrêt du Tribunal fédéral 4A_641/2011 du 27 janvier 2012) ou même 38 jours (ACJC/1016/2018 du 2 août 2019 consid. 5.5) après l'échéance du délai comminatoire.

Le fait pour le bailleur d'accepter le paiement intervenu après l'échéance du délai comminatoire ne permet pas de retenir, à lui seul, qu'il ait renoncé tacitement à la résiliation (ACJC/508/2013 du 22 avril 2013 consid. 5.3), étant réservé le cas où le bailleur accepte sans restriction le paiement de loyers et sans solliciter la restitution de la chose louée, pendant un temps assez long (Commentaire SVIT, Le droit suisse du bail à loyer, 2011, n. 34 in fine et 46 ad art. 257d CO; Lachat, op. cit., p. 878; contra Tercier/Favre, Les contrats spéciaux, op. cit., n. 2400).

Selon la jurisprudence, les faits notoires, qu'il n'est pas nécessaire d'alléguer ni de prouver (ATF 130 III 113 consid. 3.4 et les arrêts cités), sont ceux dont l'existence est certaine au point d'emporter la conviction du juge, qu'il s'agisse de faits connus de manière générale du public ou seulement du juge ou qu'ils puissent être contrôlés par des publications accessibles à chacun (ATF 135 III 88 consid. 4.1), ces dernières devant émaner de sources non controversées, bénéficiant d'une empreinte officielle (ATF 143 IV 380 consid. 1.2).

3.2 En l'espèce, la mise en demeure a été réceptionnée le 24 juillet 2019 par l'appelant, de sorte que le délai comminatoire de trente jours est arrivé à échéance le 23 août 2019. L'appelant a effectué le paiement de l'arriéré le 1er septembre 2019, lequel été réceptionné le 3 septembre 2019 par l'intimée. Cette dernière a résilié le bail le 17 septembre 2019, soit 25 jours après l'échéance du délai comminatoire et 14 jours après la réception du paiement.

3.3 Il n'est pas contesté que l'appelant s'est acquitté tardivement de l'arriéré de loyer, de sorte que l'intimée était a priori en droit de procéder à la résiliation extraordinaire du bail, conformément à l'art. 257d al. 1 CO. Reste à déterminer si, comme le prétend l'appelant, l'intimée aurait renoncé tacitement à la résiliation extraordinaire du contrat.

Ni la loi, ni la jurisprudence ne fixent de délai précis dans lequel le bailleur peut faire usage de son droit de résilier de manière extraordinaire le contrat. Il ressort plutôt de la jurisprudence qu'il convient de se référer aux circonstances du cas concret pour déterminer si, de bonne foi, le locataire pouvait comprendre du bailleur une volonté de renoncer à la résiliation extraordinaire du contrat. Parmi ces circonstances, il convient de prendre en compte le comportement des parties, notamment les éventuelles discussions entre elles, ainsi que l'écoulement du temps, respectivement depuis la fin du délai comminatoire et de l'éventuel paiement de l'arriéré effectué par le locataire. En cas de paiement de l'arriéré après l'expiration du délai comminatoire, le bailleur ne saurait trop tarder à résilier de manière extraordinaire le contrat, faute de quoi le locataire pourrait considérer, de bonne foi et selon les circonstances du cas, que celui-ci a renoncé à faire usage de son droit.

3.4 L'intimée a procédé à la résiliation du bail 14 jours après la réception (tardive) du paiement de l'arriéré, soit dans un délai plus court que ce qui avait été jugé comme admissible dans le cadre de la jurisprudence précitée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_366/2008 déjà cité). Le fait que la résiliation intervienne 25 jours après l'échéance du délai comminatoire reste, ici également, dans la limite fixée par la jurisprudence, même s'il convient, à l'instar du Tribunal, de considérer ce délai de réaction à la limite de l'admissible, au regard du paiement intervenu de l'arriéré.

3.5 En ce qui concerne les difficultés financières allégués de l'appelant, comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges, ce dernier n'a pas démontré les éventuels frais extraordinaires médicaux qu'il invoque pour justifier les arriérés de loyers, de sorte qu'on ne saurait en tenir compte. Le fait d'être au bénéfice de l'aide sociale n'y change rien, car l'aide financière qu'il perçoit à ce titre doit, précisément, lui permettre de s'acquitter régulièrement de son loyer, qui fait partie des charges élémentaires, ce qu'il n'a pas fait durant plusieurs mois, sans l'expliquer de manière plausible dans le cadre de la procédure. Enfin, comme il le sera ci-après, la situation financière des parties n'est pas un critère déterminant pour l'appréciation du cas (cf. infra consid. 4.1).

3.6 Quant à l'éventuelle pratique qu'aurait l'intimée de retirer le congé en cas de paiement de l'arriéré, ce fait n'a pas été démontré par l'appelant. La circonstance que l'intimée, à une reprise en 2011, ait remis le bail résilié en vigueur après le paiement de l'arriéré ne suffit pas à conclure à une pratique généralisée ou une garantie en ce sens. Par ailleurs, on ne peut admettre qu'une telle pratique de la bailleresse serait notoire, au sens de la jurisprudence précitée, comme l'affirme l'appelant.

3.7 Il ne ressort par ailleurs pas des discussions entre les parties, en particulier du comportement de l'intimée, que cette dernière se serait engagée à retirer le congé en cas de paiement de l'arriéré après l'expiration le délai comminatoire. Au contraire, dans les discussions qui ont eu cours après l'échéance du délai comminatoire et après le paiement, l'intimé a manifesté sans équivoque sa volonté de résilier le contrat. Elle a procédé deux semaines après le paiement (tardif) de l'arriéré à la résiliation du bail, de sorte qu'on ne saurait ici admettre, comme le soutient l'appelant, que la bailleresse aurait accepté, sans réserve, le paiement de loyers pendant un temps assez long.

3.8 Au regard de ce qui précède, le grief de l'appelant sera écarté de sorte que l'intimée était fondée à résilier de manière extraordinaire le contrat sur la base de l'art. 257d CO.

4.             Dans un dernier grief, l'appelant fait valoir que le Tribunal aurait violé l'art. 271 al. 1 CO, pour n'avoir pas annulé le congé, qui serait selon lui contraire à la bonne foi, selon une argumentation, pour l'essentiel, similaire à son précédent grief. D'après l'appelant, le motif réel du congé consisterait dans des accusations fausses de sous-location non autorisée de l'appartement.

4.1 Selon la jurisprudence, dans le cadre d'une résiliation extraordinaire fondée pour cause d'arriéré de paiement selon l'art. 257d CO, l'annulation de celle-ci sur la base de l'art. 271 al. 1 CO, pour être contraire à la bonne foi, ne peut être invoquée que dans des circonstances particulières et à titre très exceptionnel (ATF
140 III 591 consid 1; 120 II 31 consid. 4a; Wessner, CPra Droit du bail à loyer et à ferme, op. cit., n. 43 ad art. 257d CO; cf. casuistique citée par Wessner, « L'obligation du locataire de payer le loyer et les frais accessoire » in 9e séminaire sur le droit du bail, 1996, §98, p. 24 et Lachat, op. cit., p. 881 et 882).

De telles circonstances peuvent exister si le montant impayé était insignifiant ou a été payé peu après l'expiration du délai de paiement, en particulier si le locataire avait toujours payé le loyer à temps auparavant (arrêts du Tribunal fédéral 4C_65/2003 du 23 septembre 2003, consid. 4.2.1; 4A_366/2008 du 25 novembre 2008 consid. 4); lorsque le montant réclamé est incertain, notamment lorsque la facture initialement réclamée de 1'375 fr. se montait en réalité à 436 fr., ce qui impliquait une nouvelle mise en demeure du bailleur (ATF 120 II 31 consid. 4b); lorsque les parties négociaient une baisse de loyer, en raison des défauts de la chose louée, et que le montant encore dû était imprécis, en raison de la poursuite des travaux de réfection des locaux (arrêt du Tribunal fédéral 4C_65/2003 du 23 septembre 2003, consid. 4.2).

La notion de « montant insignifiant » doit être interprétée de manière très restrictive et de manière objective, indépendamment de la situation financière des parties; il se détermine en tant que tel, et non pas par rapport au loyer mensuel (ATF 140 III 591 consid. 2). Une vingtaine de francs, représentant l'intérêts moratoire d'un arriéré de loyer, doit être considéré comme insignifiant. En revanche, des montants de 164 fr. 65, 286 fr. ou de 5'500 fr. ne peuvent être considérés comme insignifiants (ATF 140 III 591 consid. 2; 120 II 31 consid. 4b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_585/2010 du 2 février 2011 consid. 4.3; Wessner, « L'obligation du locataire de payer le loyer et les frais accessoire », Ibid.).

Le fardeau de la preuve d'un congé contraire à la bonne foi incombe au demandeur à l'action en annulation (ATF 140 III 591 consid. 1), soit le destinataire du congé (ATF 120 II 105 consid. 3c).

4.2 Comme il l'a été rappelé, l'intimée n'a pas agi de manière contraire à la bonne foi en notifiant le congé extraordinaire un peu plus de trois semaines après l'expiration du délai comminatoire. L'arriéré de loyers en question, qui n'est pas litigieux, soit 3'428 fr. 20, ne peut être qualifié d'insignifiant, ce que l'appelant ne prétend pas à juste titre. Il ressort par ailleurs des documents produits par l'intimée que l'appelant a déjà fait l'objet de nombreux rappels entre 2011 et 2019, en lien avec des retards de loyers, de sorte que son comportement ne peut être qualifié, par le passé, d'exemplaire à ce propos. Enfin, il ne ressort pas des discussions entre les parties que l'intimée aurait consenti à la continuation du bail, même si l'arriéré de loyers était résorbé après l'échéance du délai comminatoire.

Quant à la question de savoir si l'intimée aurait, en réalité, résilié le bail en raison d'un soupçon d'une sous-location non autorisée de l'appartement, celle-ci est hors de propos. En effet, à partir du moment où l'intimée était fondée, comme il l'a été vu, à résilier le contrat sur la base de l'art. 257d al. 1 CO, il appartenait à l'appelant de démontrer que l'intimée faisait un usage contraire à la bonne foi de son droit de résilier de manière extraordinaire le contrat, sur la base de cette disposition. D'autres éventuels motifs de congé n'entrent pas en ligne de compte et, en l'espèce, l'intimée n'a pas invoqué - lors de la résiliation - d'autres motifs que les retards de loyers pour justifier celui-ci.

Il résulte de ce qui précède que l'appelant n'a pas démontré que le congé était contraire à la bonne foi, de sorte que ce grief sera également rejeté.

Le jugement querellé sera en conséquence confirmé.

5.             A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 16 avril 2021 par A______ contre le jugement JTBL/149/2021 rendu le 1er mars 2021 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/22564/2019.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRYBARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Grégoire CHAMBAZ et Monsieur Jean-Philippe ANTHONIOZ, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRYBARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.