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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4091/2024

ATAS/909/2025 du 24.11.2025 ( AVS ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4091/2024 ATAS/909/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 24 novembre 2025

Chambre 1

 

En la cause

A______

 

 

recourant

 

contre

 

CAISSE INTERPROFESSIONNELLE AVS FER CIAM 106.1

 

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. La société B______SA (ci-après : la société) a été inscrite au registre du commerce du canton de Genève le 15 août 2014. Elle avait notamment pour but social la préparation artisanale de pâtisserie, glaces et tous dérivés de l'alimentation en général, l’import-export, le commerce et la vente de toutes marchandises, notamment dans le domaine alimentaire et plus particulièrement de produits italiens, de boissons et de machines industrielles destinées au conditionnement d'aliments, ainsi que l’exploitation, la direction et la gestion d'établissements dans le domaine de la restauration.

b. La société a été affiliée en qualité d'employeur auprès de la Caisse interprofessionnelle AVS de la Fédération des Entreprises Romande – FER CIAM 106.1 (ci-après : la caisse). La masse salariale était de CHF 346'689.- en 2016, CHF 46'216.- en 2017 et CHF 2'400.- en 2018.

c. A______ (ci-après également : l’intéressé) en a été l’administrateur avec signature individuelle depuis la création de la société jusqu’à fin août 2018.

d. C______ en a été l’administrateur avec signature individuelle entre fin août 2018 et juillet 2020.

e. D______ en a été l’administrateur avec signature individuelle à compter de juillet 2020.

B. a. À compter de l’année 2016, la société a rencontré des difficultés à régler ses cotisations, occasionnant rappels, sommations et poursuites. Ainsi, entre le 26 octobre 2016 et le 5 janvier 2018, la caisse a adressé à la société des sommations de paiements aux dates suivantes :

-          le 26 octobre 2016, sommation « décompte de cotisations septembre 2016 » d’un montant de CHF 4'330.95 ;

-          le 23 novembre 2016, sommation « décompte de cotisations octobre 2016 » d’un montant de CHF 4'043.95 ;

-          le 4 janvier 2017, sommation « décompte de cotisations novembre 2016 » d’un montant de CHF 4'043.95 ;

-          le 21 juin 2017, sommation « décompte final 2016 », d’un montant de CHF 7'719.75 ;

-          le 30 août 2017, sommation « décompte complémentaire 2017 », d’un montant de CHF 1'366.40 ;

-          le 27 septembre 2017, sommation « décompte de cotisations août 2017 », d’un montant de CHF 273.30 ;

-          le 22 novembre 2017, sommation « décompte de cotisations octobre 2017 », d’un montant de CHF 273.30 ;

-          le 5 janvier 2018, sommation « décompte de cotisations novembre 2017 », d’un montant de CHF 273.30.

Ces sommations ont toutes été suivies de décisions de taxation à l’échéance du délai fixé dans chaque sommation. Ces décisions de taxation n’ont pas fait l’objet d’opposition.

b. À la suite de discussions entre la caisse et la société, un plan de recouvrement a été initié à compter du mois de mars 2017, prévoyant un échéancier pour le paiement des cotisations arriérées.

c. La société n’ayant pas respecté le plan de recouvrement, la caisse a engagé des poursuites à l’encontre de celle-ci à compter du mois de janvier 2018.

d. Par courriel du 27 janvier 2018, A______ a demandé à la caisse de lui transmettre un décompte des paiements effectués pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2017.

e. Par courriel du 31 janvier 2018, la caisse a adressé à l’intéressé le relevé de compte du 1er janvier au 31 décembre 2017, dont il ressortait que les arriérés de cotisations au 31 décembre 2017 s’élevaient à CHF 19'902.85, ce qui n’incluait pas les frais de poursuite pouvant être réclamés par l’office des poursuites, ni les intérêts moratoires.

f. Le 9 mars 2018, la caisse a reçu l’intéressé pour un entretien, lors duquel ont été discutées les conditions d’octroi d’un plan de paiement.

g. Par courrier reçu le 13 mars 2018, l’intéressé a fait référence audit entretien et demandé à la caisse d’échelonner la dette de la société en plusieurs mois, au motif que son activité avait brûlé. Il devait ainsi avoir recours à ses propres fonds pour réussir à couvrir la dette. Il priait la caisse de cesser de lui envoyer des frais supplémentaires de rappel ou de poursuites.

h. Par courrier reçu le 22 mai 2018, l’intéressé a indiqué à la caisse avoir réglé une série de poursuites ainsi que les primes d’acomptes pour les mois de janvier 2018 et mars 2018. Il n’avait plus de personnel depuis le 1er mai 2018 et il demandait dès lors à la caisse de suspendre les acomptes. Il priait également la caisse de lui envoyer un décompte définitif pour sa société, afin de pouvoir régler le solde sur une période de 18 mois.

i. Par courrier reçu le 18 mars 2019, la société a à nouveau demandé à la caisse d’accepter un échelonnement des paiements pour les arriérés de cotisations. Depuis que l’entreprise avait été victime d’un incendie en 2017, elle n’avait plus de stabilité financière.

j. La caisse a répondu le 26 mars 2019, indiquant que le montant des arriérés dus à ce jour s’élevait à CHF 18'514.95. L’octroi d’un arrangement était ainsi subordonné au versement d’acomptes mensuels d’au minimum CHF 1'550.-. Une proposition concrète était attendue d’ici au 12 avril 2019, à défaut de quoi la caisse continuerait les procédures légales de recouvrement.

k. Plus d’une année plus tard, soit le 18 septembre 2020, D______, nouvel administrateur de la société, a adressé un courriel à la caisse pour lui demander quelle était la situation actuelle de la société auprès de celle-là.

l. Le 22 septembre 2020, la caisse a transmis à la société un relevé de compte, faisant état d’arriérés de cotisations et de frais de poursuite s’élevant au total à CHF 20'244.16. Cette somme n’incluait pas d’éventuels autres frais pouvant être réclamés par l’office des poursuites ni les intérêts moratoires, lesquels seraient calculés au moment où le capital serait payé.

m. À la suite des poursuites engagées à l’encontre de la société, la caisse a reçu, le 11 janvier 2021, six procès-verbaux de non-lieu de saisie, au motif que la société n’avait pas de biens saisissables au siège de la société et que les blocages bancaires avaient été infructueux. Le solde total des six poursuites engagées à l’encontre de la société s’élève à CHF 20'816.10.

C. a. Le 17 décembre 2021, la caisse a adressé à A______, par courrier recommandé, une décision en réparation de dommage s’élevant à CHF 20'725.30. Elle faisait valoir qu’à la suite des procédures de poursuites intentées à l’encontre de la société, six procès-verbaux de saisie avaient été délivrés, de sorte que les cotisations manquantes avaient causé un dommage à l’AVS. Un montant impayé de CHF 20'725.30 restait dû, correspondant aux cotisations paritaires AVS/AI/APG (CHF 10'710.95), ainsi qu'aux cotisations chômage
(AC – CHF 2'298.90) et à celles dues au régime des allocations familiales
(AF – CHF 2'251.20) des périodes de septembre 2016, novembre 2016, du décompte final 2016, de mars à août 2017, d’octobre à novembre 2017 et à un solde de frais sur la période d’octobre 2016. En raison de sa qualité d’administrateur, l'intéressé était responsable du dommage causé à l'AVS. Le montant du dommage correspondait à celui des cotisations éludées, auquel s’ajoutaient des frais administratifs (CHF 234.20), des intérêts moratoires (CHF 3'618.30), des frais de poursuites (CHF 1'211.75) et des taxes de sommation (CHF 400.-), soit un total de CHF 20'725.30.

b. Le même jour, un courrier similaire a été adressé à D______ ainsi qu’à C______, portant sur le même montant.

c. Par courrier du 22 décembre 2021, A______ a formé opposition totale contre cette décision. Il n’était pas en position de se souvenir exactement du dossier et sollicitait de la caisse qu’elle lui transmette les détails des extraits correspondant à la période durant laquelle il était effectivement en charge en tant qu’administrateur.

d. Le 25 avril 2022, la faillite de la société a été prononcée par jugement du Tribunal de première instance.

e. Le 24 juin 2022, la caisse a produit dans la faillite une créance de CHF 22'948.35. Les montants réclamés dans la faillite étaient les suivants : les créances privilégiées en 2ème classe, à savoir les cotisations AVS/AI/APG (CHF 10'710.95), les cotisations chômage (CHF 2'298.90), les cotisations dues au régime des allocations familiales (CHF 2'251.20) et au régime de l’assurance-maternité (CHF 85.80), les frais administratifs (CHF 234.20), les intérêts moratoires (CHF 3'618.30), les frais de poursuites (CHF 1'211.75), ainsi que les créances à colloquer en 3ème classe, à savoir les cotisations pour la formation professionnelle (CHF 87.-), les taxes et amendes (CHF 1'410.-), les cotisations membre individuel FER (CHF 1'040.25).

f. Par jugement du Tribunal de première instance du 20 octobre 2022, la procédure de faillite a été suspendue faute d’actifs.

g. La société a été radiée d’office le 29 novembre 2022, la procédure de faillite ayant été clôturée par jugement du 14 novembre 2022.

h. Par courrier du 9 avril 2024, la caisse a adressé à l’intéressé les pièces qu’il avait sollicitées dans son opposition du 22 décembre 2021, s’excusant du retard pris dans le traitement du dossier. Elle lui a également demandé de motiver son opposition, rappelant que, selon la jurisprudence applicable, la personne mise en cause dans une action en réparation du dommage avait un devoir de collaboration accru. Il lui appartenait ainsi de faire valoir les motifs excluant une faute au sens d’une intention ou d’une négligence grave et de fournir les preuves à cet égard.

i. Le 19 avril 2024, l’intéressé a maintenu son opposition, s’étonnant du délai de traitement de son dossier. La caisse était bien malvenue d’invoquer son devoir de collaboration, alors que c’était l’attitude de cette dernière qui l’empêchait de collaborer. Il avait été administrateur de la société de 2014 à 2017, avait vendu toutes ses parts en 2017 et avait remis toutes les pièces concernant la société au nouvel administrateur. De 2018 à ce jour, trois administrateurs s’étaient succédé. Étant étranger à la société depuis 2017, il ignorait si ceux-ci avaient transmis les documents et informations à leur successeur. Il avait entendu qu’au moment du Covid, l’administrateur en place avait obtenu un prêt important pour les dettes de la société et avait déclaré les avoir entièrement réglées. Il appartenait à la caisse de se renseigner à ce sujet auprès du nouvel administrateur, ce d’autant plus qu’elle ne lui avait envoyé aucun document malgré la demande formulée dans son opposition. Il indiquait enfin avoir été atteint dans sa santé et bénéficiaire de l’assurance-invalidité jusqu’à fin 2021, précisant être aujourd’hui au chômage.

j. Par courrier du 24 avril 2024, la caisse a précisé que les périodes des cotisations pour lesquelles l’intéressé était actionné en réparation de dommage coïncidaient avec celles où il était administrateur de la société. En acceptant le mandat d’administrateur, il avait accepté les devoirs et responsabilités qui y étaient attachés, notamment en matière de paiement de cotisations sociales. Pour le surplus, son opposition n’était toujours pas motivée et ne contenait aucune pièce pour l’étayer. La caisse l’invitait à développer les motifs pour lesquels il estimait ne pas être responsable du dommage causé. À défaut, le service juridique serait contraint de statuer sur son opposition sur la seule base des éléments actuellement contenus dans le dossier. Enfin, la caisse relevait avoir également actionné les administrateurs lui ayant succédé, lesquels répondaient solidairement avec lui du dommage. À ce jour, elle n’avait pas pu localiser D______. Quant à C______, il était sans domicile connu.

k. Le 14 mai 2024, la caisse a informé l’intéressé de ce que, dans la mesure où elle était demeurée sans nouvelles de sa part, son dossier était transmis au service juridique afin qu’il soit statué sur son opposition dans les meilleurs délais.

l. Par courrier du 7 octobre 2024, l’intéressé, représenté par un conseil juridique, a persisté dans ses conclusions. Il avait vendu toutes ses parts de la société en 2016 et, s’il était prévu qu’il donne sa démission d’administrateur à la date de vente des actions, le nouvel actionnaire avait tardé à nommer un nouvel administrateur. Partant, il n’avait pu être libéré de ses fonctions d’administrateur qu’au mois d’août 2018. Par ailleurs, compte tenu des nombreux décomptes et décomptes complémentaires adressés à la société, tant l’intéressé que son successeur ne comprenaient pas quel était le montant exact des arriérés de cotisations. Il convenait de distinguer la part de chacun des administrateurs à la date de leur entrée en fonction. En effet, un certain nombre des documents joints au courrier de la caisse du 24 avril 2024 ne le concernaient pas, puisqu’il avait été libéré de ses fonctions en août 2018. De surcroît, un important incendie avait ravagé les locaux en 2017 et détruit au passage tous les documents administratifs relatifs à la gestion du restaurant. Cet incendie avait également endetté la société, qui continuait à être redevable des charges fixes pendant les mois de fermeture des locaux, ce alors qu’elle n’avait plus de rentrée d’argent. L’intéressé avait, à plusieurs reprises, tenté d’obtenir des informations sur les arriérés dus et proposé un paiement échelonné, mais il n’avait reçu aucune réponse. Enfin, l’intéressé souhaitait savoir quand la prescription relative à la période entre 2016 et le mois de mai 2017 avait été interrompue, et si la caisse avait produit sa créance auprès de l’office des poursuites ainsi que la décision qui en avait, cas échéant, découlé.

m. Par décision sur opposition rendue le 28 octobre 2024, la caisse a rejeté l’opposition de l’intéressé et confirmé sa décision de réparation du dommage prononcée le 17 décembre 2021. Sa créance n’était pas prescrite, puisqu’elle avait agi en réparation le 17 décembre 2021, soit dans les trois ans à compter de la notification des procès-verbaux de non-lieu de saisie valant actes de défaut de biens du 7 janvier 2021. La présente décision sur opposition intervenant également dans les trois ans à compter de l’opposition, sa créance n’était pas prescrite. La caisse s’était adressée aux trois administrateurs de la société, lesquels étaient solidairement responsables de la dette. D______, localisé en Italie, n’était pas allé retirer le pli contenant la décision en réparation du dommage le concernant. Quant à C______, la caisse n’était pas parvenue à le localiser, rendant ainsi impossible le recouvrement auprès de ce dernier. S’agissant de l’intéressé, il avait été administrateur de la société depuis sa création jusqu’à fin août 2018, de sorte que le dommage portait sur une période pendant laquelle il était en fonction. Il était par ailleurs conscient de la dette, puisqu’il avait été l’interlocuteur de la caisse dans le cadre des contacts liés aux poursuites et aux demandes d’arrangements.

D. a. Par acte du 9 décembre 2024, l’intéressé a interjeté recours contre la décision sur opposition précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans), concluant à « l’irrecevabilité » de la décision du 28 octobre 2024, à son annulation et à ce qu’il soit constaté que les créances réclamées étaient prescrites. Il avait vendu le capital-actions de la société en septembre 2017. Les chiffres comptables montraient une société saine à l’époque de la cession du capital-actions. Le recourant devait être relevé de ses fonctions d’administrateur à la date de la signature de la convention de cession, mais il avait accepté de maintenir sa qualité à titre fiduciaire, le cessionnaire n’ayant pas pu faire élire de nouvel administrateur. Il n’avait toutefois plus accès à la correspondance, dont seul le nouvel actionnaire prenait connaissance. Celui-ci ne lui transmettait que ce qu’il jugeait nécessaire pour la société. Lors de la signature de la convention de cession, les charges sociales n’étaient pas encore fixées pour l’année 2016, mais elles étaient mentionnées dans l’exercice de l’année. Le recourant avait finalement été relevé de ses fonctions d’administrateur le 30 août 2018, sans aucune réserve en faveur de C______. S’agissant de la prescription, même en prenant la date alléguée de réception des procès-verbaux de non-lieu de saisie, soit le 7 janvier 2021, elle était atteinte le 7 janvier 2024. Faute d’avoir intenté une action en justice, la créance de la caisse était prescrite. Si, par impossible, la créance n’était pas prescrite, il conviendrait d’ordonner à la caisse de fournir des explications claires sur les montants réclamés, la société n’ayant produit aucun justificatif à ce sujet.

b. La caisse (ci-après : l’intimée) a répondu au recours dans un délai prolongé au 7 février 2025, concluant à son rejet et à la confirmation de la décision entreprise. Elle reprenait pour l’essentiel les arguments contenus dans sa décision sur opposition. Pour le surplus, le fait que le recourant ait accepté de rester administrateur à titre fiduciaire ne modifiait pas en soi sa responsabilité dans une action en réparation du dommage. Par ailleurs, la responsabilité des administrateurs était solidaire. Elle notait également que toutes les pièces à l’appui de sa créance avaient été adressées à la société du recourant à l’époque de leur facturation et que celle-ci ne s’était pas opposée à ces factures. Or, selon la jurisprudence, les créances de cotisations restées impayées ne faisaient plus l’objet d’un examen quant à leur étendue dans le cadre d’un procès en responsabilité, pour autant qu’elles reposent sur une décision de cotisations arriérées en force.

c. Par réplique du 16 avril 2025, le recourant a persisté dans ses conclusions. Aucun des montants réclamés ne correspondait aux pièces produites par l’intimée. Sans explication claire, il n’était pas possible de comprendre les calculs opérés. La décision querellée était ainsi entachée de vices de forme graves, qui justifiaient son « irrecevabilité ». Par ailleurs, contrairement à ce que soutenait l’intimée, la prescription ne pouvait pas avoir été interrompue par la décision du 17 décembre 2021. De surcroît, en rendant sa décision sur opposition plus de deux ans et demi après l’opposition, l’intimée avait manifestement violé le principe de célérité et commis un déni de justice. Elle ne pouvait ainsi se prévaloir de son retard pour prétendre interrompre définitivement la prescription avec la décision sur opposition entreprise. Enfin, le recourant contestait tout acte illicite. L’accumulation des problèmes rencontrés par la société en 2017 constituait un cas de force majeure.

d. Par duplique du 15 mai 2025, l’intimée a également persisté dans ses conclusions. Le relevé de compte pertinent était produit sous pièce 16 de son chargé. Il était exact qu’aucune poursuite n’avait été notifiée au recourant. La caisse avait adressé les notifiés des poursuites à l’encontre de la société, poursuites ayant engendré des frais faisant également partie de son dommage. À l’époque, le recourant avait d’ailleurs fait lui-même opposition à certains des commandements de payer au nom de la société. Si le recourant voulait contester les factures, il aurait dû le faire au moment de leur notification. Il ne pouvait les remettre en question aujourd’hui en invoquant, de manière toute générale, une baisse de l’effectif de la société. De telles allégations n’étaient pas suffisantes pour justifier un réexamen au stade de la procédure en réparation de dommage. Malgré le regrettable délai de traitement de l’opposition du recourant, celui-ci restait responsable du dommage causé à l’AVS à la suite du non-paiement des cotisations sociales de la société dont il était l’administrateur.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

Sa compétence ratione materiae pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAVS, les dispositions de la LPGA s'appliquent aux art. 1 à 97 LAVS, à moins que la loi n'y déroge expressément.

1.3 Selon l'art. 52 al. 5 LAVS, en dérogation à l’art. 58 al. 1 LPGA, le tribunal des assurances du canton dans lequel l’employeur est domicilié est compétent pour traiter le recours. Cette disposition est également applicable lorsque la caisse recherche un organe de l’employeur en réparation du dommage, et ce quel que soit le domicile dudit organe (arrêt du Tribunal fédéral H 184/06 du 25 avril 2007 consid. 2.3).

La société ayant eu son siège dans le canton de Genève jusqu'au moment de sa faillite, la chambre de céans est également compétente ratione loci.

1.4 Le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai utile, le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur la responsabilité du recourant pour le dommage subi par l'intimée du fait du défaut de paiement des cotisations sociales pour les périodes de septembre 2016, novembre 2016, du décompte final 2016, de mars à août 2017, d’octobre à novembre 2017 et d’un solde de frais sur la période d’octobre 2016.

3.              

3.1 L'art. 14 al. 1 LAVS en corrélation avec les art. 34 ss RAVS, prescrit l'obligation pour l'employeur de déduire sur chaque salaire la cotisation du salarié et de verser celle-ci à la caisse de compensation avec sa propre cotisation. Les employeurs doivent envoyer aux caisses, périodiquement, les pièces comptables concernant les salaires versés à leurs salariés, de manière à ce que les cotisations paritaires puissent être calculées et faire l'objet de décisions. L'obligation de payer les cotisations et de fournir les décomptes est, pour l'employeur, une tâche de droit public prescrite par la loi. À cet égard, le Tribunal fédéral a déclaré, à réitérées reprises, que la responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS est liée au statut de droit public. L'employeur qui ne s'acquitte pas de cette tâche commet une violation des prescriptions au sens de l'art. 52 LAVS, ce qui entraîne pour lui l'obligation de réparer entièrement le dommage ainsi occasionné (ATF 137 V 51 consid. 3.2 et les références).

3.2 Selon l’art. 52 LAVS, l'employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n'observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage à l'assurance, est tenu à réparation (al. 1). Si l'employeur est une personne morale, les membres de l'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à titre subsidiaire du dommage. Lorsque plusieurs personnes sont responsables d'un même dommage, elles répondent solidairement de la totalité du dommage (al. 2). La caisse de compensation fait valoir sa créance en réparation du dommage par voie de décision (al. 4).

Selon le message relatif à la modification de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS) du 3 décembre 2010 relatif à l’art. 52 al. 2 à
4 LAVS, la réparation du dommage est le corollaire des obligations de droit public que l’employeur assume en matière de perception, de versement et de décompte des cotisations paritaires d’assurances sociales en sa qualité d’organe d’exécution de l’AVS. Ce principe occupe une place prépondérante en droit des cotisations. En effet, d’après la jurisprudence développée par le Tribunal fédéral des assurances depuis 1970, non seulement les employeurs peuvent être tenus de réparer le dommage, mais également, à titre subsidiaire, les personnes physiques qui agissent en leur nom (ATF 114 V 219 et 129 V 11). Actuellement, il est insatisfaisant que la responsabilité subsidiaire des organes, de même que d’autres caractéristiques importantes de la réparation du dommage, ne soient pas réglées dans la loi et ne puissent qu’être déduites de l’étude d’une abondante jurisprudence. Pour le citoyen, la loi doit être conçue de manière plus transparente. La conception de base ne sera pas modifiée ; la responsabilité reste limitée à la faute grave (FF 2011 519, p. 536).

En d’autres termes, la nouvelle teneur de l’art. 52 al. 2 LAVS, entrée en vigueur le 1er janvier 2012, codifie la jurisprudence du Tribunal fédéral selon laquelle, si l'employeur est une personne morale, la responsabilité peut s'étendre, à titre subsidiaire, aux organes qui ont agi en son nom (ATAS/610/2013 du 18 juin 2013 consid. 4a).

Par arrêt – de principe – du 30 janvier 2020 (ATAS/79/2020), la chambre de céans a jugé qu’il n’existe pas de base légale suffisante pour rechercher les employeurs ou leurs organes pour le dommage résultant du défaut de paiement des cotisations dues en vertu de la loi instituant une assurance en cas de maternité et d'adoption du 21 avril 2005 (LAMat - J 5 07), cette jurisprudence valant pour la période avant l’entrée en vigueur le 1er février 2023 du nouvel art. 11A LAMat.

4.             Le recourant invoque tout d’abord que la prétention de l’intimée serait prescrite.

4.1 Selon l’art. 52 al. 3 LAVS, dans sa teneur en vigueur du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2019, le droit à réparation se prescrivait deux ans après que la caisse de compensation compétente a eu connaissance du dommage et, dans tous les cas, cinq ans après la survenance du dommage. Ces délais pouvaient être interrompus. L'employeur pouvait renoncer à invoquer la prescription. Si le droit pénal prévoyait un délai de prescription plus long, celui-ci était applicable.

Le 1er janvier 2020 est entrée en vigueur la révision du droit de la prescription de la loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), entraînant la modification de l’art. 52 al. 3 LAVS (RO 2018 5343 ; FF 2014 221). Cet alinéa prévoit désormais que l’action en réparation du dommage se prescrit conformément aux dispositions du CO sur les actes illicites.

Selon l’art. 60 CO, dans sa teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2020, l’action en dommages-intérêts ou en paiement d’une somme d’argent à titre de réparation morale se prescrit par trois ans à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne tenue à réparation et, dans tous les cas, par dix ans à compter du jour où le fait dommageable s’est produit ou a cessé (al. 1). Si le fait dommageable résulte d’un acte punissable de la personne tenue à réparation, elle se prescrit au plus tôt à l’échéance du délai de prescription de l’action pénale, nonobstant les alinéas précédents. Si la prescription de l’action pénale ne court plus parce qu’un jugement de première instance a été rendu, l’action civile se prescrit au plus tôt par trois ans à compter de la notification du jugement (al. 2).

4.2 En renvoyant désormais aux dispositions du CO sur la prescription des actions introduites en cas d’acte illicite, le délai de prescription relatif se trouve augmenté de deux à trois ans et le délai de prescription absolu de cinq à dix ans. De plus, la prescription plus longue de l’action pénale visée à l’art. 60 al. 2 CO est applicable. Le délai de prescription ne commence plus à courir à la survenance du dommage, mais le jour où le fait dommageable s’est produit ou a cessé. Les autres aspects de la prescription, notamment les motifs d’empêchement ou de suspension et les actes interruptifs, sont régis par les art. 130 ss CO (Message du Conseil fédéral relatif à la modification du code des obligations [droit de la prescription] du 29 novembre 2013, FF 2014 221, p. 260).

4.3 L’art. 49 Titre final du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) règle de manière générale les questions de droit transitoire en matière de prescription et a été réécrit lors de la révision du droit de la prescription (FF 2014 221, pp. 230 et 231). Depuis le 1er janvier 2020, cet article dispose notamment que lorsque le nouveau droit prévoit des délais de prescription plus longs que l’ancien droit, le nouveau droit s’applique dès lors que la prescription n’est pas échue en vertu de l’ancien droit (al. 1). L’entrée en vigueur du nouveau droit est sans effet sur le début des délais de prescription en cours, à moins que la loi n’en dispose autrement (al. 3). Au surplus, la prescription est régie par le nouveau droit dès son entrée en vigueur (al. 4).

Le nouveau droit s’applique dès lors qu’il prévoit un délai plus long que l’ancien droit, mais uniquement à la condition que la prescription ne soit pas déjà acquise. En d’autres termes, les délais de prescription en cours sont allongés par le nouveau droit. A contrario, une créance déjà prescrite demeure prescrite (FF 2014 221 p. 231). Par ailleurs, même si la prétention bénéficie d’un nouveau délai plus long de prescription, cela n’influence pas le point de départ de la prescription, c’est-à-dire que le délai ne recommence pas à courir au moment de l’entrée en vigueur du nouveau droit (FF 2014 221, p. 254). Pour les questions de droit de la prescription autres que celles du début et de la longueur du délai, par exemple les (nouveaux) motifs de suspension et d’interruption, la renonciation à la prescription ou le droit transitoire, seul le nouveau droit est applicable dès son entrée en vigueur pour la période suivant celle-ci et non rétroactivement. Ainsi, les déclarations de renonciation à la prescription valablement faites sous l’ancien droit restent valables sous l’empire du nouveau droit (FF 2014 221, p. 254).

4.4 Les délais prévus par les art. 52 al. 3 LAVS, dans son ancienne teneur, et 60 al. 1 CO sont des délais de prescription, de sorte qu'ils ne sont pas sauvegardés une fois pour toutes avec la décision relative aux dommages-intérêts ; le droit à la réparation du dommage au sens de l'art. 52 al. 1 LAVS peut donc aussi se prescrire durant la procédure d'opposition (ATF 135 V 74 consid. 4.2).

4.4.1 S'agissant de la prescription absolue, selon la jurisprudence rendue à propos de l'ancien droit, le dommage survient dès que l'on doit admettre que les cotisations dues ne peuvent plus être recouvrées, pour des motifs juridiques ou de fait (ATF 129 V 193 consid. 2.2 ; ATF 126 V 443 consid. 3a). Ainsi, un dommage se produit en cas de faillite, en raison de l'impossibilité pour la caisse de récupérer les cotisations dans la procédure ordinaire de recouvrement. Le dommage subi par la caisse est réputé être survenu le jour de la faillite ; le jour de la survenance du dommage marque celui de la naissance de la créance en réparation et la date à partir de laquelle court le délai absolu (ATF 129 V 193 consid. 2.2 et la référence).

Le dommage survient également lors de la délivrance d’un acte de défaut de biens (Office fédéral des assurances sociales [ci-après : OFAS], Directives sur la perception des cotisations dans l’AVS, AI et APG [ci-après : DP], état au 1er janvier 2025, n. 8020). La délivrance d'un acte de défaut de biens établit l'insolvabilité du débiteur. Cela ne signifie toutefois pas uniquement que le débiteur ne peut pas s'acquitter de la créance qui a fait l'objet de l'acte de défaut de biens mais suppose aussi qu'il n'a pas les moyens de payer les autres créances ouvertes qui n'ont fait l'objet d'aucune poursuite. Le créancier peut donc agir contre les organes du débiteur afin d'obtenir le paiement de tout ce que celui-ci lui doit, soit non seulement le montant constaté par l'acte de défaut de biens mais également l'entier des créances ouvertes (arrêt du Tribunal fédéral 9C_115/2021 du 16 décembre 2021 consid. 3.1 et la référence).

4.4.2 En ce qui concerne la prescription relative, le nouveau droit n'a pas modifié son point de départ ; il faut entendre par moment de la « connaissance du dommage », en règle générale, le moment où la caisse de compensation aurait dû se rendre compte, en faisant preuve de l'attention raisonnablement exigible, que les circonstances effectives ne permettaient plus d'exiger le paiement des cotisations, mais pouvaient entraîner l'obligation de réparer le dommage
(ATF 129 V 193 consid. 2.1). En cas de faillite, le moment de la connaissance du dommage correspond en règle générale à celui du dépôt de l'état de collocation, ou celui de la publication de la suspension de la liquidation de la faillite faute d'actifs (ATF 129 V 193 consid. 2.3 ; cf. également 141 V 487 consid. 2.2 et les références).

4.4.3 S’agissant des actes interruptifs de prescription, selon la jurisprudence rendue à propos de l’art. 52 al. 3 LAVS, dans son ancienne teneur, les délais de prescription sont interrompus par les actes énumérés à l’art. 135 CO (applicable par analogie) ainsi que par tous les actes de procédure relatifs au droit invoqué et susceptibles de faire progresser l'instance (ATF 141 V 487 consid. 2.3 p. 48 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_641/2020 du 30 mars 2021 consid. 5.3 et la référence ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_400/2020 du 19 octobre 2020 consid. 3.2.1 et la référence). Ainsi, tant la décision que l’opposition interrompent les délais de prescription (ATF 135 V 74 consid. 4.2.2). Il en est de même de la décision sur opposition (ATAS/1031/2024 du 17 décembre 2024, consid. 5).

4.5 En l’espèce, les six procès-verbaux de non-lieu de saisie, valant actes de défaut de biens (art. 115 al. 1 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 – LP – RS 281.1), ont été notifiés à la caisse le 11 janvier 2021. Ainsi, dans la mesure où la créance de la caisse n’était pas prescrite au 1er janvier 2020, c’est le délai de prescription de trois ans qui s’applique. En l’occurrence, en demandant la réparation du dommage au recourant le 21 décembre 2021, l’intimée a valablement interrompu le délai de prescription relative de trois ans. Ce délai a, à nouveau, été interrompu par l’opposition du recourant du 23 décembre 2021, puis par la décision sur opposition entreprise du 28 octobre 2024. Le délai de prescription absolue de dix ans n’étant pas échu, la créance de l’intimée n’est pas prescrite, contrairement à ce que soutient le recourant.

5.             L’action en réparation du dommage n’étant pas prescrite, il convient à présent d’examiner si les autres conditions de la responsabilité de l’art. 52 LAVS sont réalisées, à savoir si le recourant peut être considéré comme étant « l’employeur » tenu de verser les cotisations à l’intimée, s’il a commis une faute ou une négligence grave et, enfin, s’il existe un lien de causalité adéquate entre son comportement et le dommage causé à l’intimée.

5.1 S’agissant de la notion d’« employeur », l’art. 52 al. 2 LAVS prévoit que si l'employeur est une personne morale, les membres de l'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à titre subsidiaire du dommage. Lorsque plusieurs personnes sont responsables d'un même dommage, elles répondent solidairement de la totalité du dommage.

Selon la jurisprudence, si l'employeur est une personne morale, la responsabilité peut s'étendre, à titre subsidiaire, aux organes qui ont agi en son nom, notamment quand la personne morale n'existe plus au moment où la responsabilité est engagée (ATF 123 V 12 consid. 5b ; ATF 122 V 65 consid. 4a). Le caractère subsidiaire de la responsabilité des organes d'une personne morale signifie que la caisse de compensation ne peut agir contre ces derniers que si le débiteur des cotisations (la personne morale) est devenu insolvable (ATF 123 V 12 consid. 5b).

L'art. 52 LAVS ne permet ainsi pas de déclarer l'organe d'une personne morale directement débiteur de cotisations d'assurances sociales. En revanche, il le rend responsable du dommage qu'il a causé aux différentes assurances sociales fédérales, intentionnellement ou par négligence grave, en ne veillant pas au paiement des cotisations sociales contrairement à ses obligations (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 96/05 du 5 décembre 2005 consid. 4.1).

La notion d'organe selon l'art. 52 LAVS est en principe identique à celle qui se dégage de l'art. 754 al. 1 CO. En matière de responsabilité des organes d'une société anonyme, l'art. 52 LAVS vise en première ligne les organes statutaires ou légaux de celle-ci, soit les administrateurs, l'organe de révision ou les liquidateurs (ATF 128 III 29 consid. 3a ; Thomas NUSSBAUMER, Les caisses de compensation en tant que parties à une procédure de réparation d'un dommage selon l'art. 52 LAVS, in RCC 1991 p. 403).

5.2 En l'espèce, le recourant était inscrit au registre du commerce en qualité d'administrateur de la société avec signature individuelle depuis la création de la société jusqu’à fin août 2018. Il disposait ainsi de la qualité d'organe formel de la société lorsque les cotisations non payées pour les années 2016 et 2017 sont arrivées à échéance. Les sommations et décisions relatives aux cotisations non payées, objet de la demande en réparation du dommage, ont toutes été adressées à la société entre les mois d’octobre 2016 et de février 2018, soit alors que le recourant en était l’administrateur. Celui-ci était par ailleurs parfaitement conscient de la dette de la société liée à ces arriérés de cotisations, puisqu’il a été l’interlocuteur de l’intimée dans le cadre de nombreux échanges liés aux poursuites entreprises par celle-ci et qu’il a, à plusieurs reprises, sollicité des arrangements de paiement, qu’il n’a toutefois pas honorés.

Par conséquent, conformément aux dispositions précitées, le recourant peut être recherché en sa qualité d’organe formel par l'intimée pour le non-paiement des cotisations litigieuses.

6.             Il convient ensuite d’examiner si le recourant a commis une faute ou une négligence grave au sens de l'art. 52 al. 1 LAVS.

6.1 L'obligation légale de réparer le dommage ne doit être reconnue que dans les cas où le dommage est dû à une violation intentionnelle ou par négligence grave, par l'employeur, des prescriptions régissant l'assurance-vieillesse et survivants (RCC 1978 p. 259 ; RCC 1972 p. 687). Il faut donc un manquement d'une certaine gravité. Pour savoir si tel est le cas, il convient de tenir compte de toutes les circonstances du cas concret (ATF 121 V 243 consid. 4b).

La caisse de compensation qui constate qu'elle a subi un dommage par suite de la non-observation de prescriptions peut admettre que l'employeur a violé celles-ci intentionnellement ou du moins par négligence grave, dans la mesure où il n'existe pas d'indice faisant croire à la légitimité de son comportement ou à l'absence d'une faute (RCC 1983 p. 101).

Selon la jurisprudence constante, se rend coupable d'une négligence grave l'employeur qui manque de l'attention qu'un homme raisonnable aurait observée dans la même situation et dans les mêmes circonstances. La mesure de la diligence requise s'apprécie d'après le devoir de diligence que l'on peut et doit en général attendre, en matière de gestion, d'un employeur de la même catégorie que celle de l'intéressé. En présence d'une société anonyme, il y a en principe lieu de poser des exigences sévères en ce qui concerne l'attention qu'elle doit accorder au respect des prescriptions. Une différenciation semblable s'impose également lorsqu'il s'agit d'apprécier la responsabilité subsidiaire des organes de l'employeur (ATF 108 V 189). Les faits reprochés à une entreprise ne sont pas nécessairement imputables à chacun des organes de celle-ci. Il convient bien plutôt d'examiner si et dans quelle mesure ces faits peuvent être attribués à un organe déterminé, compte tenu de la situation juridique et de fait de ce dernier au sein de l'entreprise. Savoir si un organe a commis une faute dépend des responsabilités et des compétences qui lui ont été confiées par l'entreprise (ATF 108 V 199 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.2). La négligence grave mentionnée à l'art. 52 LAVS est admise très largement par la jurisprudence (ATF 132 III 523 consid. 4.6).

L’art. 716a al. 1 CO énumère les attributions intransmissibles et inaliénables des membres d’un conseil d’administration. En font partie l’exercice de la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, pour s’assurer notamment qu’elles observent la loi, les statuts, les règlements et les instructions données (ch. 5). Dans le cadre de l’exercice de cette haute surveillance, l’administrateur répond de la cura in custodiendo. C’est ainsi qu’il a non seulement le devoir d’assister aux séances du conseil d’administration, mais également l’obligation de se faire renseigner périodiquement sur la marche des affaires. Il est tenu de prendre les mesures appropriées lorsqu’il a connaissance ou aurait dû avoir connaissance d’irrégularités commises dans la gestion de la société. Ce devoir de surveillance incombe à tous les membres du conseil d’administration, nonobstant le mode de répartition interne des tâches au sein du conseil d’administration
(ATF 114 V 219 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.3 et les références).

Commet notamment une faute ou une négligence grave l'organe qui verse des salaires pour lesquels les créances de cotisations qui en découlent de par la loi ne sont pas couvertes (arrêt du Tribunal fédéral 9C_430/2021 du 7 avril 2022 consid. 5.2 et les références). Commet également une faute grave celui qui ne démissionne pas de ses fonctions alors qu'il se trouvait, en raison de l'attitude du tiers, dans l'incapacité de prendre les mesures qui s'imposaient s'agissant du paiement des cotisations ou qui se trouvait dans l'incapacité d'exercer son devoir de surveillance (voir par exemple : arrêts du Tribunal fédéral 9C_344/2011 du 3 février 2012 consid. 4.3 ; 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2).

La négligence grave est également donnée lorsque l'administrateur n'assume pas son mandat dans les faits. Ce faisant, il n'exerce pas la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, attribution incessible et inaliénable du conseil d'administration conformément à l'art. 716a CO. Une personne qui se déclare prête à assumer ou à conserver un mandat d'administrateur tout en sachant qu'elle ne pourra pas le remplir consciencieusement viole son obligation de diligence (ATF 122 III 195 consid. 3b). Sa négligence peut être qualifiée de grave sous l'angle de l'art. 52 LAVS (ATF 112 V 1 consid. 5b). Un administrateur, dont la situation est à cet égard proche de celle de l’homme de paille, ne peut s'exonérer de ses responsabilités légales en invoquant son rôle passif au sein de la société (arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2). La faute de l'homme de paille réside précisément dans le fait qu'il s'accommode de ne pouvoir exercer ses fonctions (ATF 122 III 195 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral H 126/04 du 8 septembre 2005 consid. 4).

La jurisprudence exige de l'organe factuellement exclu de la gestion de la société qu'il se soucie sérieusement de remplir ses obligations contractuelles, parmi lesquelles figure le paiement des cotisations sociales. Dans les cas où l'organe risque d'engager sa responsabilité, il doit démissionner (Marco REICHMUTH, op. cit., p. 133, n. 563 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_446/2014 du 2 septembre 2014 consid. 4.2 et 9C_ 289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2). La violation de ce devoir de surveillance constitue une négligence grave entraînant l'obligation de réparer le dommage subi par la caisse (RCC 1989 p. 115 s. consid. 4).

De même, selon le Tribunal fédéral, un administrateur ne peut se libérer de sa responsabilité en se bornant à soutenir qu'il n'a jamais participé à la gestion de l'entreprise, qu'il n'a participé à la fondation de cette dernière qu'à titre fiduciaire et qu'il n'a jamais perçu de rémunération, prétendant ainsi n'avoir joué qu'un rôle subalterne, car cela constitue déjà en soi un cas de négligence grave (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 13/03 du 21 mai 2003 consid. 3.1).

La responsabilité d'un administrateur dure en règle générale jusqu'au moment où il quitte effectivement le conseil d'administration et non pas jusqu'à la date où son nom est radié du registre du commerce. Cette règle vaut pour tous les cas où les démissionnaires n'exercent plus d'influence sur la marche des affaires et ne reçoivent plus de rémunération pour leur mandat d'administrateur (ATF 126 V 61 consid. 4a). En d'autres termes, un organe engage sa responsabilité pour les cotisations sociales qui sont venues à échéance entre le moment de son entrée en fonction et celui de sa sortie effective de la société, ainsi que pour les cotisations qui étaient déjà échues lors de son entrée en fonction, soit pendant la durée où il a exercé une influence sur la marche des affaires. Demeurent réservés les cas où le dommage résulte d'actes qui ne déploient leurs effets qu'après le départ du conseil d'administration (arrêt du Tribunal fédéral H 263/02 du 6 février 2003 consid. 3.2).

6.2 La responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS suppose enfin un rapport de causalité (naturelle et) adéquate entre la violation intentionnelle ou par négligence grave des prescriptions et la survenance du dommage. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2).

Le lien de causalité adéquate entre le comportement fautif – soit la rétention des cotisations alors même que les salaires sont versés – et le dommage survenu ne peut pas être contesté avec succès lorsque les salaires versés sont tels que les créances de cotisations qui en découlent directement ex lege ne sont plus couvertes (SVR 1995 AHV n° 70 p. 214 consid. 5 ; arrêts du Tribunal fédéral des assurances H 167/05 du 21 juin 2006 consid. 8 et H 74/05 du 8 novembre 2005 consid. 4).

6.3 Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a réitéré la portée de l'art. 52 LAVS et la jurisprudence y relative dans le cadre de l'examen de la responsabilité d'un gérant d'une Sàrl dans le préjudice subi par la caisse de compensation en raison de cotisations paritaires restées impayées par la Sàrl. Le Tribunal fédéral a rappelé qu'en sa qualité de gérant, il incombait au recourant de veiller personnellement à ce que les cotisations paritaires afférentes aux salaires versés fussent effectivement payées à la caisse de compensation, nonobstant le mode de répartition interne des tâches au sein de la société. Un gérant d'une Sàrl ne peut se libérer de cette responsabilité en se bornant à soutenir qu'il faisait confiance à un associé chargé de régler les cotisations sociales à la caisse de compensation, car cela constitue déjà en soi un cas de négligence grave. En reconnaissant qu'il faisait confiance à l'associé gérant, à qui était confiée la tâche de régler les paiements et les cotisations sociales, le recourant admet implicitement qu'il n'a pas exercé à satisfaction son devoir de surveillance (cura in custodiendo) et fait preuve de passivité, au lieu d'intervenir directement, ce qui relève d'une négligence qui doit, sous l'angle de l'art. 52 LAVS, être qualifiée de grave. Le Tribunal fédéral a également retenu que cette passivité est de surcroît en relation de causalité naturelle et adéquate avec le dommage subi par la caisse de compensation. En effet, si le recourant avait correctement exécuté sa charge de gérant, notamment en exigeant de consulter tous les documents comptables pertinents (pièces bancaires, correspondance avec l'AVS, etc.), il aurait pu veiller à ce que les cotisations sociales fussent régulièrement versées et ceci l'aurait amené à constater que les retards dans les paiements des cotisations s'accumulaient et à prendre les mesures idoines (arrêt du Tribunal fédéral 9C_463/2023 du 22 mai 2024 (consid. 3.21).

6.4 En l’espèce, dans sa décision querellée, l’intimée a considéré que la responsabilité d’organe du recourant était engagée à hauteur de CHF 20'725.30. Ce montant correspond aux cotisations paritaires AVS/AI/APG/AC ainsi qu'aux cotisations dues au régime des AF impayées des périodes de septembre 2016, novembre 2016, du décompte final 2016, de mars à août 2017, d’octobre à novembre 2017, ainsi qu’à un solde de frais sur la période d’octobre 2016.

À teneur du dossier, il n'est pas contesté ni contestable que l'intimée a subi un dommage dû au non-versement par la société des cotisations paritaires et des frais pendant les périodes précitées.

Depuis la création de la société jusqu’à fin août 2018, le recourant revêtait la fonction d'organe formel de la société. Il convient par conséquent d'examiner s’il s'est comporté avec toute la diligence requise en matière de gestion en sa qualité d'organe de l'employeur conformément à la jurisprudence précitée.

6.4.1 Le recourant invoque tout d’abord qu’il aurait vendu le capital-actions de la société en septembre 2017, qu’il avait accepté de maintenir sa qualité d’administrateur à titre fiduciaire – au motif que le cessionnaire n’avait pas fait élire de nouvel administrateur – et qu’il n’avait dès lors plus accès à la correspondance, dont seul le nouvel actionnaire prenait connaissance. Dans ce cadre, il soutient également que les charges sociales n’auraient pas encore été fixées pour l’année 2016 lors de la signature de la convention de cession.

Or, le recourant ne saurait se libérer de sa responsabilité en soutenant qu’il n’aurait, dans les faits, pas exercé d’activité de gestion après avoir cédé le capital-actions de la société, car le fait de rester administrateur sans se soucier de ses obligations constitue déjà en soi un cas de négligence grave. On rappellera que la jurisprudence s'est toujours montrée sévère lorsqu'il s'est agi d'apprécier la responsabilité d'administrateurs qui alléguaient avoir été exclus de la gestion d'une société et qui s'étaient accommodés de ce fait sans autre forme de procès (arrêt du Tribunal fédéral 9C_344/2011 du 3 février 2012 consid. 4.2 et les références). Le recourant ne peut donc pas se retrancher derrière le fait que la société était gérée, au quotidien, par le cessionnaire du capital-actions après septembre 2017. En conservant formellement son mandat qu'il n'assumait pas dans les faits ou seulement de manière imparfaite, le recourant a violé ses devoirs. Sa situation paraît avoir été comparable à celle d'un homme de paille, et c’est précisément là que réside sa faute, car celui qui se déclare prêt à assumer ou à conserver un mandat d'administrateur d'une société anonyme, tout en sachant qu'il ne pourra (ou ne voudra) pas le remplir consciencieusement viole son obligation de diligence (arrêt du Tribunal 9C_446/2014 du 2 septembre 2014 consid. 4.2 et la référence). Que le recourant ne soit pas en mesure d’exercer ses fonctions, parce que la société était dirigée en fait par le nouvel actionnaire, ou qu’il ait accepté son mandat à titre fiduciaire au motif que le cessionnaire n’aurait pas pu faire élire de nouvel administrateur et ainsi dans le seul but de permettre au conseil d’administration de satisfaire aux exigences de l’art. 708 al. 1 CO n’est pas un motif de suppression ou d’atténuation de la faute commise (arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2).

La chambre de céans relève également que la convention de cession produite par le recourant à l’appui de son recours n’est pas la version définitive, puisqu’elle ne contient pas de date, ni la signature du cédant et du cessionnaire. En tout état, comme susmentionné, le recourant était parfaitement conscient de la dette de la société liée aux arriérés de cotisations, puisqu’il a été l’interlocuteur de l’intimée dans le cadre de nombreux échanges liés aux poursuites entreprises par celle-ci et qu’il a, à plusieurs reprises, sollicité des arrangements de paiement, qui lui ont été proposés, mais qu’il n’a toutefois pas honorés. Il ne saurait dès lors être suivi lorsqu’il soutient qu’il aurait été écarté de la gestion de la société, tout comme lorsqu’il prétend avoir tenté d’obtenir des informations sur les arriérés dus et proposé un paiement échelonné, sans avoir toutefois obtenu de réponse.

De même, vu la date alléguée de cession du capital-actions (soit le mois de septembre 2017), il ne saurait prétendre que la société aurait été saine à cette date, puisqu’elle présentait déjà un important arriéré de cotisations, objet de la présente procédure, arriéré de cotisations dont il avait parfaitement connaissance.

6.4.2 Le recourant invoque ensuite qu’un important incendie aurait ravagé la société en 2017, ce qui aurait, selon lui, endetté la société et ne lui aurait dès lors pas permis de s’acquitter des cotisations dues.

Or, d’une part, l’incendie est postérieur aux premiers défauts de paiement des cotisations, qui datent du mois de septembre 2016 et qui se sont poursuivis durant l’année 2017. D’autre part, cette circonstance ne change rien au fait qu’en tant qu'organe de la société, il devait s'assurer du paiement des cotisations sociales et, même en cas de graves difficultés financières, il ne pouvait faire supporter le risque inhérent au financement d'une entreprise aux assurances sociales. La chambre de céans constate qu’il n'a pas pris toutes les mesures raisonnables pour assurer le paiement des charges sociales, les organes d'une société incapable de verser les cotisations paritaires dans leur intégralité, soit en l'occurrence le recourant, ne devant verser que les salaires pour lesquels les créances de cotisations peuvent être couvertes.

Au regard de ce qui précède, c'est à juste titre que l'intimée a retenu que le recourant avait commis une négligence devant, sous l'angle de l'art. 52 LAVS, être qualifiée de grave, les manquements du recourant relatifs au défaut de paiement des cotisations paritaires étant par ailleurs en rapport de causalité naturelle et adéquate avec le dommage subi par l’intimée.

7.             Il reste à examiner le montant du dommage subi par l'intimée.

7.1 Le montant du dommage correspond à celui pour lequel la caisse de compensation subit une perte. Appartiennent à ce montant les cotisations paritaires (cotisations patronales et d’employés ou ouvriers) dues par l’employeur selon la LAVS, la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20 ; dont l'art. 66 LAI renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale sur les allocations pour perte de gain du 25 septembre 1952 (LAPG - RS 834.1 ; dont l'art. 21 al. 2 renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale sur les allocations familiales dans l'agriculture du 20 juin 1952 (LFA - RS 836.1 ; dont l'art. 25 al. 3 renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale sur les allocations familiales et les aides financières allouées aux organisations familiales du 24 mars 2006 (LAFam - RS 836.2 ; dont l'art. 25 let. c renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0 ; dont l'art. 6 renvoie à la LAVS ; ATAS/386/2020 du 14 mai 2020 consid. 9b), ainsi que les cotisations dues en vertu de la LAMat dont l'art. 11A renvoie à l'art. 52 LAVS.

7.2 Le dommage comprend également les intérêts moratoires dus en vertu de l'art. 26 al. 1 LPGA en lien avec l'art. 41bis RAVS, les contributions aux frais d'administration des caisses de compensation (art. 69 al. 1 LAVS), les frais de sommation (art. 34a al. 2 RAVS) et les frais de poursuite (ATF 121 III 382 consid. 3/bb ; Mélanie FRETZ, La responsabilité selon l'art. 52 LAVS : une comparaison avec les art. 78 LPGA et 52 LPP, REAS 2009 p. 240).

7.3 Selon la jurisprudence, les créances de cotisations restées impayées ne font plus l'objet d'un examen quant à leur étendue dans le cadre du procès en responsabilité au sens de l'art. 52 LAVS, pour autant qu'elles reposent sur une décision de cotisations arriérées qui n'a pas été attaquée et est dès lors entrée en force. La possibilité pour la société de recourir contre la décision (sur opposition) de cotisations arriérées garantit de manière suffisante que les organes de l'employeur devenu insolvable ne soient pas confrontés à des créances en réparation injustifiées. Sont réservés les cas dans lesquels la décision de cotisations arriérées a été signifiée à la personne morale après que l'organe recherché est sorti de la société ou qu'il ressort des circonstances des indices suffisants que les cotisations fixées par la décision de cotisations arriérées reposent sur une erreur manifeste (arrêt du Tribunal fédéral 9C_381/2018 du 6 décembre 2018 consid. 4.1 et les références).

7.4 En l’espèce, huit décomptes de cotisations litigieuses (pièce 15 intimée) ont été signifiés à la société à une époque où le recourant occupait la fonction d'organe formel (soit entre les mois d’octobre 2016 et de février 2018). Ceux-ci n'ont pas été contestés par la société et sont donc entrés en force. Ils sont ainsi opposables au recourant. Faute d'éléments permettant de conclure à une inexactitude manifeste des montants fixés, il n'appartient pas à la Cour de céans de revoir lesdits décomptes.

Certains paiements étant intervenus dans l’intervalle, la caisse a initié des poursuites en décembre 2017 et en février 2018 sur la base de ces décomptes (pièces 54 à 61 intimée), sous déduction des éventuels paiements intervenus à la date de l’envoi des réquisitions de poursuite. À la suite de ces poursuites, la caisse s’est vu notifier six procès-verbaux de non-lieu de saisie, pour un total de CHF 20'816.10, la société n’ayant pas de biens saisissables au siège de la société et les blocages bancaires ayant été infructueux.

Le recourant soutient que les montants réclamés dans la décision entreprise ne correspondraient pas aux pièces produites par l’intimée. La Cour constate que le montant du dommage (CHF 20'725.30) correspond, selon ladite décision, au solde de cotisations sociales (AVS/AI/APG/AC et AF) impayées pour les années 2016 et 2017, ainsi qu’aux contributions aux frais d'administration de l'intimée, aux frais de sommation, aux frais de poursuite et aux intérêts moratoires.

Ce montant correspond à l’addition des soldes ressortant des six-procès-verbaux de non-lieu de saisie notifiés à la société le 11 janvier 2021 (soit CHF 20'816.10), sous déduction des arriérés de cotisations LAMat (s’élevant à CHF 85.90 selon la production de la caisse dans la faillite de la société) et des intérêts moratoires y relatifs. En effet, conformément à la jurisprudence de la chambre de céans, dont il ressort qu’il n’existe pas de base légale suffisante pour rechercher les employeurs ou leurs organes pour le dommage résultant du défaut de paiement des cotisations dues en vertu de la LAMat pour la période avant le 1er février 2023, la caisse n’a pas inclus le montant des arriérés de cotisations LAMat dans sa décision en réparation du dommage adressée au recourant.

Partant, contrairement à ce que soutient le recourant, les montants réclamés dans la décision entreprise sont fondés sur les pièces du dossier et correspondent au montant du dommage subi par l’intimée du fait du défaut de paiement, par la société, d’arriérés de cotisations AVS/AI/APG, AC et AF sur une période durant laquelle le recourant était organe formel de la société.

7.5 Au vu de ce qui précède, les conditions d'engagement de la responsabilité subsidiaire – et solidaire – du recourant pour le dommage subi par l'intimée à hauteur d'un montant total de CHF 20'725.30 sont donc remplies.

8.             Le recourant soutient enfin qu’en rendant sa décision sur opposition plus de deux ans et demi après l’opposition, l’intimée aurait manifestement violé le principe de célérité et commis un déni de justice.

8.1 Aux termes de l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.

Le droit de recours de l'art. 56 al. 2 LPGA sert à mettre en œuvre l'interdiction du déni de justice formel prévue par l'art. 29 al. 1 Cst. Le retard injustifié à statuer, également prohibé par l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) - qui n'offre à cet égard pas une protection plus étendue que la disposition constitutionnelle (ATF 103 V 190 consid. 2b) -, est une forme particulière du déni de justice formel (ATF 119 Ia 237 consid. 2).

8.2 Il y a refus de statuer constitutif de déni de justice lorsqu'une autorité ne rend pas de décision formelle pouvant faire l'objet d'un recours – ne serait-ce qu'une décision constatant l'irrecevabilité de la demande – alors qu'elle serait tenue de le faire selon la législation. Ce refus peut être explicite ou tacite, soit que l'autorité communique à l'administré, de manière informelle, qu'elle ne statuera pas, soit qu'elle ne lui donne aucun signe concret de son intention de se saisir de la demande. Si l'autorité rend une décision formelle par laquelle elle constate l'irrecevabilité de la demande, sa décision peut faire l'objet d'un recours ordinaire aux conditions de l'art. 56 al. 1 LPGA et non d'un recours pour déni de justice au sens de l'art. 56 al. 2 LPGA (MÉTRAL, op. cit., n°48 ad art. 56 LPGA).

8.3 Il y a retard injustifié à statuer lorsque l'autorité administrative ou judiciaire compétente ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prévu par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître comme raisonnable (ATF 131 V 407
consid. 1.1 et les références). Entre autres critères sont notamment déterminants le degré de complexité de l'affaire, l'enjeu que revêt le litige pour l'intéressé, ainsi que le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes, mais aussi la difficulté à élucider les questions de fait (expertises, par exemple ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 53/01 du 30 avril 2001 consid. 2.2), mais non des circonstances sans rapport avec le litige, telle une surcharge de travail de l'autorité (ATF 130 I 312 consid. 5.2 ; ATF 125 V 188 consid. 2a). À cet égard, il appartient au justiciable d'entreprendre certaines démarches pour inviter l'autorité à faire diligence, notamment en incitant celle-ci à accélérer la procédure ou en recourant pour retard injustifié. Si on ne peut reprocher à l'autorité quelques « temps morts », celle-ci ne saurait en revanche invoquer une organisation déficiente ou une surcharge structurelle pour justifier la lenteur de la procédure ; il appartient en effet à l'État d'organiser ses juridictions de manière à garantir aux citoyens une administration de la justice conforme aux règles (ATF 130 I 312 consid. 5.1 et 5.2 et les références). Dans le cadre d'une appréciation d'ensemble, il faut également tenir compte du fait qu'en matière d'assurances sociales le législateur accorde une importance particulière à une liquidation rapide des procès (ATF 126 V 244 consid. 4a). Peu importe le motif qui est à l'origine du refus de statuer ou du retard injustifié ; ce qui est déterminant, c'est le fait que l'autorité n'ait pas agi ou qu'elle ait agi avec retard (ATF 124 V 133 ; ATF 117 Ia 117 consid. 3a et 197 consid. 1c ; arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 819/02 du 23 avril 2003 consid. 2.1 et C 53/01 du 30 avril 2001 consid. 2).

La sanction du dépassement du délai raisonnable ou adéquat consiste d'abord dans la constatation de la violation du principe de célérité, qui constitue une forme de réparation pour celui qui en est la victime. Cette constatation peut également jouer un rôle sur la répartition des frais et dépens, dans l'optique d'une réparation morale (ATF 130 I 312 consid. 5.3 et 129 V 411 consid. 1.3). Pour le surplus, l'autorité saisie d'un recours pour retard injustifié ne saurait se substituer à l'autorité précédente pour statuer au fond. Elle ne peut qu'inviter l'autorité concernée à statuer à bref délai (ATF 130 V 90).

8.4 La Cour de céans a jugé qu’un déni de justice doit être considéré comme établi quand l’assureur-maladie ne s’est pas formellement prononcé deux ans et demi après une demande de remboursement (ATAS/354/2007). Elle en a jugé de même dans le cas d’un recourant qui était sans nouvelle de l’office cantonal de l’assurance-invalidité vingt-et-un mois après le dépôt d’une demande de révision qui avait été traitée diligemment dans un premier temps (ATAS/860/2006), et dix-huit mois après que la cause a été renvoyée à l’office pour nouvelle décision suite à l’admission partielle de son recours (ATAS/62/2007). La jurisprudence a, par contre, admis qu’un délai de quinze mois pour rendre une décision est encore admissible (ATFA non publié I 819/02 du 23 avril 2003).

8.5 Lorsqu'il invoque un déni de justice formel, le recourant doit être en mesure de faire valoir un intérêt actuel et pratique à l'admission de son recours (ATF 131 I 153 consid. 1.2). Cet intérêt doit exister tant au moment du dépôt du recours qu'au moment où l'arrêt est rendu (arrêt du Tribunal fédéral 8C_387/2016 du
24 juin 2016). Un intérêt purement théorique est insuffisant. Sous réserve d'exceptions, dès le moment où l'autorité qui y est tenue a statué, un tel recours devient irrecevable ou, s'il a déjà été formé, sans objet faute d'un intérêt juridique actuel (Yves DONZALLAZ, Loi sur le Tribunal fédéral, Berne, 2008, p. 1270, n° 3417 et les arrêts mentionnés sous notes 8369 et 8370).

8.6 En l’espèce, compte tenu de la jurisprudence précitée, le délai de plus de deux ans et demi écoulé entre l’opposition du recourant du 22 décembre 2021 et la décision litigieuse du 28 octobre 2024 apparaît effectivement critiquable. Cela étant, force est de constater que le recourant n'a pas relancé l'intimée durant cet intervalle. Or, il appartient, en principe, au justiciable d'entreprendre ce qui est en son pouvoir pour que l'autorité fasse diligence, que ce soit en l'invitant à accélérer la procédure ou en recourant, le cas échéant, pour retard injustifié (ATF 107 Ib 155 consid. 2b et c p. 158 s.), quand bien même cette obligation s'apprécie avec moins de rigueur en procédure pénale et administrative (HAEFLIGER / SCHÜRMANN, op. cit., p. 203-204; AUER / MALINVERNI / HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. II, n. 1243). Qui plus est, ce délai n'a pas eu de conséquences pour le recourant. Au contraire, l'écoulement du temps favorisait même une éventuelle prescription de la créance de l'intimée. Quoi qu'il en soit, à la teneur de la jurisprudence précitée, la conséquence d'une telle violation n'autoriserait pas une réduction du montant du dommage dû, mais, tout au plus, une indemnité à titre de dépens, qui ne se justifie toutefois pas non plus en l'espèce.

Enfin, dans la mesure où l’intimée a statué et que c’est précisément la décision sur opposition qui est l’objet du recours, le grief du recourant tendant à faire constater un déni de justice tombe à faux.

9.             Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

Le recourant, qui succombe, n’a pas droit à l’octroi de dépens (art. 61 let. g LPGA a contrario).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario et 89H al. 1 LPA).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110). Selon l’art. 85 LTF, s’agissant de contestations pécuniaires, le recours est irrecevable si la valeur litigieuse est inférieure à 30’000 francs (al. 1 let. a). Même lorsque la valeur litigieuse n’atteint pas le montant déterminant, le recours est recevable si la contestation soulève une question juridique de principe (al. 2). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Pascale HUGI

 

La présidente

 

 

 

 

Amélie PIGUET MAYSTRE

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le