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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1543/2024

ATAS/296/2025 du 24.04.2025 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1543/2024 ATAS/296/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 24 avril 2025

Chambre 5

 

En la cause

A______
représenté par Me Imed ABDELLI, avocat

 

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’intéressé), né en ______ 1952, de nationalité tunisienne, a déposé une demande de prestations complémentaires qui a été reçue par le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) en date du 21 septembre 2017 ; la demande de prestations mentionnait, notamment, qu’il habitait un appartement de 6 pièces, à l’adresse B______ à Meyrin, avec son épouse C______, née en décembre 1960, et son fils D______, né en ______ 2005. La demande a abouti à l’octroi de prestations complémentaires cantonales (PCC) et fédérales (PCF).

b. À teneur de l’extrait de l’office cantonal des populations et migrations (ci‑après : OCPM), figurant au dossier et daté du 25 septembre 2017, outre l’intéressé, son épouse et leur fils D______, les autres enfants du couple sont : E______, né en ______ 1979 ; F______, née en ______ 1981 ; G______, née en ______ 1984 ; H______, née en ______ 1986 ; I______, né en ______ 1989 et J______, né en ______ 1991.

c. Le SPC a régulièrement informé l’intéressé de ses droits et obligations et l’a invité à contrôler attentivement les montants indiqués dans les plans de calcul, afin de s’assurer que cela correspondait bien à sa situation actuelle, sans quoi il lui appartenait de signaler au SPC, spontanément et sans délai, les changements qui intervenaient dans sa situation personnelle et/ou financière. Par courrier du 15 avril 2019, l’un des fils de l’intéressé, E______, a informé le SPC qu’il était en procédure de divorce et qu’il devait donc habiter avec ses parents à l’adresse de l’intéressé, tout en précisant qu’il s’agissait d’une situation provisoire, en attendant de trouver un logement.

d. Par courrier du 2 décembre 2019, le SPC a informé l’intéressé du plan de calcul des prestations complémentaires dès le 1er janvier 2020. Dans les commentaires, il n’était pas mentionné la prise en compte d’une personne supplémentaire pour le calcul du loyer, qui était retenu à hauteur de CHF 15'000.-.

e. Par courrier du 5 décembre 2020, le SPC a informé l’intéressé du plan de calcul des prestations complémentaires favorables, selon la réforme PC 2021 dès le 1er janvier 2021. La situation prenait en compte l’intéressé, ainsi que son épouse et leur fils D______, mais pas les autres enfants du couple. Le loyer de l’appartement de Meyrin était pris en compte à hauteur de CHF 20'700.-.

f. Par courrier du 6 décembre 2021, le SPC a informé l’intéressé du plan de calcul des prestations complémentaires favorables, selon la réforme PC 2021 dès le 1er janvier 2022. La situation prenait en compte les trois personnes susmentionnées et un loyer à hauteur de CHF 20'700.-.

g. Par courrier du 6 décembre 2022, le SPC a informé l’intéressé du plan de calcul des prestations complémentaires favorables, selon la réforme PC 2021, dès le 1er janvier 2023. La situation prenait en compte l’intéressé ainsi que son épouse et leur fils D______ et le loyer à hauteur de CHF 22’140.-.

h. Par courrier du 22 septembre 2023, le SPC a demandé à l’intéressé de lui indiquer le nombre de personnes qui partageaient le logement familial de Meyrin. Par courrier du 5 octobre 2023, l’intéressé a répondu que le logement était partagé par lui-même, son épouse, leur fils D______ ainsi que leur fils I______.

i. Par courrier du 27 octobre 2023, le SPC a informé l’intéressé qu’après contrôle auprès de l’OCPM, il était apparu que le logement n’était pas seulement habité par quatre personnes, mais que d’autres enfants du couple partageaient également l’habitation de Meyrin, soit les quatre personnes indiquées par l’intéressé, ainsi que les enfants H______ et J______. Compte tenu de ces éléments, un nouveau calcul des prestations complémentaires dues avait été effectué, rétroactivement depuis le 1er septembre 2017 jusqu’au 30 juin 2023, ainsi qu’un calcul du droit aux prestations complémentaires, dès le 1er juillet 2023. En raison de la présence d’autres personnes dans l’habitation de l’intéressé, le calcul du loyer net correspondant aux dépenses reconnues avait été revu à la baisse, afin de tenir compte du nombre de personnes partageant le logement, qui devaient assumer la prise en charge d’une partie proportionnelle du loyer, ce qui influait sur le calcul des prestations.

B. a. Par décision du 27 octobre 2023, le SPC a demandé à l’intéressé le remboursement du montant de CHF 46'496.- dans un délai de 30 jours. Ledit montant correspondait à des prestations complémentaires dues pour la période allant du 1er septembre 2017 au 31 octobre 2023, après rectification des calculs, suite à la découverte du fait que l’intéressé partageait son logement avec des personnes qui n’avaient pas été déclarées au SPC.

b. Par courrier du 1er novembre 2023, l’intéressé s’est opposé à la décision du 27 octobre 2023, alléguant que le contenu de la décision n’était pas clair et qu’il souhaitait obtenir un rendez-vous, afin d’obtenir des éclaircissements.

c. En date du 17 novembre 2023, l’intéressé s’est présenté au SPC pour un entretien. À teneur du procès-verbal de l’entretien, daté du 23 novembre 2023, il était mentionné que :

-        concernant l’enfant J______, l’intéressé avait remis au SPC une lettre de ce dernier, intitulé « À qui de droit », datée du 15 novembre 2023 certifiant qu’il avait quitté le domicile de son père, depuis octobre 2016 et que, pour des raisons pratiques et liées à la nature temporaire de ses logement successifs, il avait conservé son adresse administrative au domicile de son père, mais que cela ne reflétait ni une cohabitation, ni un soutien financier ;

-        concernant l’enfant H______ et sa fille K______, née en ______ 2020, elle était partie de l’appartement aux alentours de janvier 2017, pour aller en France, puis s’était mariée et avait mis au monde sa fille, mais n’était pas retournée habiter chez son père. Elle vivait dans un appartement en France, ce qui ressortait d’un contrat de location entré en vigueur le 29 janvier 2019 et passé avec le bailleur L______, concernant un appartement situé en France, à Rillieux-la-Pape (Métropole de Lyon) ;

-        concernant l’enfant E______, l’intéressé alléguait que ce dernier s’était marié et était parti habiter avec son épouse ailleurs ; il avait remis une copie de son bail à loyer tout en précisant que, bien qu’en procédure de divorce, il n’était pas retourné habiter chez son père. À teneur d’un courrier du 12 mars 2021, le bailleur d’E______ informait ce dernier que, suite au jugement de séparation du 7 décembre 2020, il ne pouvait pas modifier les titulaires du contrat de bail à loyer de l’appartement de la rue M______ avant réception d’un jugement de divorce stipulant clairement l’attribution des droits et obligations à l’un des deux époux. Un deuxième courrier du même bailleur, daté du 20 octobre 2023, informait E______ que suite au jugement de divorce prononcé le 18 juillet 2023, il avait procédé aux modifications des titulaires du contrat de bail et que ce dernier n’était donc plus locataire de l’appartement de la rue M______ ;

-        en ce qui concernait les enfants D______ et I______, l’intéressé confirmait que les deux fils habitaient toujours avec lui.

d. Par courrier du 8 décembre 2023, le SPC a informé l’intéressé que, suite à son opposition, il apparaissait que tous ses enfants étaient encore inscrits auprès de l’OCPM à son adresse et étaient donc présumés occuper son logement. Un délai au 12 janvier 2024 lui était fixé, afin que l’intéressé fasse parvenir une copie du contrat de bail et de ses éventuels avenants couvrant la période allant du 1er septembre 2017 à ce jour, pour chacun des enfants, ainsi qu’une attestation d’hébergement et tout document propre à démontrer que les enfants J______, H______ et E______ vivaient à une adresse différente de celle de l’intéressé, depuis le 1er septembre 2017 (relevés bancaires faisant état des loyers payés pour le logement, copie de tout type de factures etc.), ainsi que les copies des formulaires d’annonces de changement d’adresse auprès de l’OCPM pour les enfants J______, H______ et E______. S’agissant de la fille H______, le SPC mentionnait être en possession du contrat de bail prenant effet au 28 janvier 2019, mais invitait l’intéressé à produire, d’une part, les pièces demandées pour la période antérieure, soit celle allant du 1er septembre 2017 au 27 janvier 2019 et, d’autre part, les preuves de paiement des derniers loyers de H______, si son logement en France était toujours d’actualité.

e. Par courrier de son mandataire, daté du 12 février 2024, l’intéressé a communiqué au SPC :

-        pour le fils J______, une attestation datée du 9 février 2024, signée par lui-même, confirmant que depuis le mois d’octobre 2016, il ne vivait plus avec ses parents à Meyrin et qu’il avait été colocataire d’un ami qu’il ne pouvait pas forcer à fournir une copie de son contrat de bail à loyer, en raison du fait que ce dernier – pour des raisons qui lui étaient personnelles – ne pouvait pas annoncer le montant de la colocation qu’il lui versait ;

-        une attestation de résidence, datée du 30 janvier 2024, par laquelle l’OCPM attestait que le fils J______ résidait désormais à l’avenue N______ ;

-        une copie d’un contrat de bail à loyer de la régie O______, daté du 14 décembre 2023 pour un studio sis à l’avenue N______, et prenant effet au 1er janvier 2024 ;

-        s’agissant du fils I______, né en ______ 1989, ce dernier attestait recevoir une aide financière de l’Hospice général depuis le 1er mars 2018 ajoutant que ledit Hospice était prêt à payer à l’intéressé un montant mensuel de CHF 300.-, à titre de participation au loyer, ce que l’intéressé avait refusé d’accepter, car il trouvait cela « déshonorant » ;

-        une attestation d’aide financière de l’Hospice général, datée du 31 janvier 2024, qui attestait que le fils I______ était aidé financièrement par cet organisme depuis le 1er mars 2018, à raison d’un montant mensuel de CHF 826.50 ;

-        pour le fils E______, une attestation signée par ce dernier et datée du 9 février 2024 à laquelle il joignait les preuves de paiement de son loyer de la rue M______, jusqu’à fin décembre 2020 ;

-        une demande de logement datée du 17 août 2020, valable jusqu’au 17 août 2021 et une demande de logement, datée du 8 février 2024, valable jusqu’au 26 janvier 2025 par lesquelles les P______, confirmaient avoir pris bonne note de ses demandes de logement ;

-        s’agissant de la fille H______, une attestation signée par cette dernière et datée du 7 février 2024 confirmant qu’elle vivait en France depuis l’année 2017 et qu’elle s’était mariée le 17 février 2018. Elle exposait que, depuis le décès de son mari intervenu le 22 janvier 2023, elle s’était trouvée totalement impuissante face aux conséquences tragiques du décès, raison pour laquelle elle était allée s’installer chez ses parents, dans l’idée d’y passer quelques semaines, puis avait décidé d’ouvrir un dossier auprès des services sociaux de la ville de Meyrin, tout en continuant à vivre provisoirement chez ses parents. Par ignorance, elle n’avait pas annoncé sa situation au contrôle des habitants, mais confirmait que ses parents n’avaient tiré aucun avantage de cette situation. Elle ajoutait tenter par tous les moyens d’assurer son indépendance résidentielle, dans les meilleurs délais ;

-        un extrait de relevé de compte de la régie immobilière L______, confirmant des facturations mensuelles depuis le mois de février 2019 jusqu’au mois de janvier 2023 ;

-        une confirmation de la Fondation nouveau Meyrin, datée du 15 janvier 2024, informant la fille H______ que sa demande d’appartement, valable jusqu’au 10 janvier 2025, avait été enregistrée ;

f. Par décision sur demande de restitution de l’effet suspensif du 21 février 2024, le SPC a rejeté ladite demande, en tant qu’elle devait être interprétée comme concluant à ce que les prestations accordées, avant reddition de la décision litigieuse, soient de nouveau versées à l’intéressé jusqu’à reddition d’une décision sur opposition. Par contre, la demande était admise en tant qu’elle concluait que soit différé, jusqu’à l’entrée en force de la décision litigieuse, le remboursement du montant de CHF 46'496.- ; un délai supplémentaire était octroyé au recourant au 22 mars 2024, pour compléter son dossier par la production de toutes pièces utiles.

g. Par courrier de son mandataire, daté du 21 mars 2024, l’intéressé a produit une quittance de participation aux loyers des mois de janvier à mars 2024 de l’Hospice général, en faveur du fils D______, indiquant que ce dernier participait, depuis cette date au paiement du loyer. Une série de copies de reçus postaux pour la période allant du mois de janvier 2019 au mois de juillet 2020, démontrait le paiement mensuel d’un montant de CHF 1’145.95, mentionné à titre de « loyer, Ville de Genève » et qui était attribué au fils E______, pour le paiement du loyer de l’appartement de la rue M______. L’intéressé alléguait, par ailleurs, que le colocataire du fils J______ refusait de confirmer la colocation et qu’en ce qui concernait le fils I______, l’intéressé avait toujours refusé de percevoir une participation au loyer ; par ailleurs, l’intéressé restait dans l’attente de divers documents, concernant à la fois les enfants I______ et H______.

h. Par décision sur opposition du 27 mars 2024, le SPC a considéré que l’intéressé ne l’avait pas renseigné sur la présence de ses enfants dans son appartement, alors qu’il avait été pourtant expressément invité à le faire chaque année. Compte tenu des inscriptions figurant à l’OCPM et de la documentation produite par l’opposant, le SPC se déterminait comme suit :

-        la présence du fils D______ dans l’appartement n’était pas contestée, si bien que le loyer proportionnel retenu par le SPC, dès le 1er juillet 2023 était confirmé ;

-        la présence du fils I______ dans l’appartement n’était pas contestée, si bien que le loyer proportionnel retenu par le SPC, dès le 1er septembre 2017, devait être confirmé, la renonciation de l’intéressé à percevoir une participation au loyer ne permettant pas de faire une appréciation différente de la situation ;

-        la présence du fils J______ durant la période litigieuse était contestée, mais aucun élément n’avait été fourni à l’appui de l’existence d’une éventuelle colocation dans un autre appartement, telle qu’elle était alléguée par l’intéressé. Partant, le loyer proportionnel depuis le 1er septembre 2017 devait être maintenu jusqu’au 31 décembre 2023, après quoi l’enfant J______ avait fait la preuve, par la production d’un contrat de bail à loyer, qu’il n’habitait plus dans l’appartement de l’intéressé ;

-        la présence du fils E______ durant la période litigieuse était contestée, mais en se fondant sur les registres de l’OCPM, le SPC considérait qu’E______ s’était installé chez ses parents, dès le 1er janvier 2019, en raison d’une séparation avec son ex-épouse. Le paiement des loyers relatifs au logement occupé par l’ex-épouse ne permettait pas au SPC de remettre en cause la prise en compte d’E______, dans le loyer proportionnel, dès le 1er janvier 2019 ;

-        en ce qui concernait la fille H______ et sa propre fille K______, le loyer proportionnel était supprimé, pour la période allant du 1er janvier 2019 au 31 janvier 2023, dès lors que l’enfant H______ avait pu faire la preuve qu’elle occupait une autre adresse pendant ce laps de temps en France.

Après avoir procédé à de nouveaux calculs, le SPC réclamait à l’intéressé la restitution du montant de CHF 35'745.- correspondant aux prestations indûment versées, pour la période du 1er septembre 2017 au 31 octobre 2023.

C. a. Par acte de son avocat, posté le 7 mai 2024, l’intéressé a recouru contre la décision sur opposition du 27 mars 2024 auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans). Il a conclu, préalablement, à la restitution de l’effet suspensif, à ce que l’audition des parties soit ordonnée, à ce que l’intéressé puisse faire entendre des témoins et à ce que le dossier de Monsieur Q______ soit produit. Principalement, il a conclu à l’annulation de la décision querellée, qu’il soit ordonné au SPC de compléter l’instruction du dossier en ce qui concerne E______ et reprendre le versement des prestations complémentaires.

b. Dans sa réponse préalable sur effet suspensif, du 21 mai 2024, l’intimé a rappelé qu’il appartenait à l’autorité d’examiner si les motifs qui parlaient en faveur de l’exécution immédiate de la décision l’emportaient sur ceux qui pouvaient être invoqués à l’appui de la solution contraire, tout en précisant qu’en procédant à la pesée des intérêts en présence, les prévisions sur l’issue du litige au fond, pouvaient être prises en considération. Il a conclu au rejet de la demande de restitution d’effet suspensif en tant qu’elle devrait être interprétée comme concluant à ce que les prestations accordées avant reddition de la décision entreprise soient de nouveau versées au recourant, jusqu’à l’issue de la présente procédure.

c. Par réponse sur le fond du 4 juin 2024, le SPC a repris les arguments déjà développés au niveau de la décision et les a confirmés, en raison du fait que le recourant n’avait pas réagi aux courriers lui rappelant son obligation spontanée de renseigner ; il avait, par son silence qualifié, réalisé une infraction à la loi sur les prestations complémentaires qui justifiait que l’on appliquât un délai de prescription plus long, tel que prévu par le droit pénal, à savoir sept ans, en lieu et place de cinq ans.

d. Par réplique du 22 juillet 2024, l’intéressé a persisté dans ses conclusions et a demandé qu’il soit procédé à l’audition des enfants J______ et H______, en l’absence objective de la possibilité de fournir des pièces qu’il ne possédait malheureusement pas.

e. Par duplique du 16 août 2024, le SPC a fait valoir que la correction du dossier du fils E______ ne remettait pas en cause le loyer partagé retenu dans le présent dossier, dès lors que la part de loyer qui n’était pas prise en compte dans le dossier des parents, était désormais prise en compte dans le dossier d’E______ et ce, rétroactivement. Pour le surplus, l’intimé persistait dans ses conclusions.

f. La chambre de céans a appointé, en date du 10 octobre 2024, une audience de comparution personnelle et d’audition de deux enfants du recourant, J______ et H______.

L’intéressé a confirmé qu’il était arrivé en Suisse en 1992, depuis la Tunisie. Sa fille H______ s’était mariée probablement autour de 2018, puis était partie s’installer à Lyon, de mémoire, dans le courant de l’année 2019. Après le décès de son mari, elle était revenue de temps en temps à la maison, avant de repartir. Pendant l’année 2023, elle était revenue s’installer dans l’appartement familial avec K______, qui était née en 2020. E______ qui était séparé de son épouse était revenu s’installer dans l’appartement familial, dans le courant de l’année 2019, puis était resté jusqu’à maintenant. Il avait d’abord tenté de trouver un appartement, puis finalement était resté dans l’appartement familial et il y habitait encore à l’heure actuelle. Il n’avait pas à proprement parler de chambre, mais dormait dans une sorte de réduit, dans lequel il n’y avait de la place que pour son lit. L’intéressé et son épouse dormaient au salon sur des canapés-lits. L’appartement comportait 6 pièces ; il y avait trois chambres à coucher dans lesquelles dormaient, respectivement, D______, I______ et H______ avec sa fille K______. L’intéressé tenait à rappeler que lorsqu’il avait déposé son dossier auprès du SPC, ce service ne lui avait pas demandé qui habitait dans l’appartement et ce n’était que lorsqu’il avait interpellé le SPC pour lui signaler que D______ venait d’avoir 18 ans, soit en avril 2023, que le SPC avait demandé qui habitait dans l’appartement et que l’intéressé avait répondu que l’appartement était occupé par son épouse et lui-même, ainsi que par D______, E______ et I______.

Entendu à titre de renseignement, J______, l’un des fils de l’intéressé, a déclaré qu’il n’habitait plus chez son père depuis huit ans, car il était parti en octobre 2016. Il est vrai qu’il n’avait pas procédé au changement de domicile auprès de l’OCPM, mais il recevait très peu de courrier chez son père, notamment pour la banque et pour les impôts, le restant des communications étant effectué via les applications numériques. Il était gestionnaire logistique auprès des R______ (ci-après : R______) depuis le mois de février 2016. Actuellement, il habitait dans le quartier de Plainpalais, mais auparavant, il habitait sur la commune d’Onex, chez quelqu’un chez qui il avait emménagé comme colocataire. Il ne voulait pas donner son identité et ne voulait pas que celui-ci dépose comme témoin, car c’était un très bon ami. Par ailleurs, il confirmait que D______ et I______ étaient toujours restés dans l’appartement familial. En ce qui concernait H______, il ne pouvait pas dire avec précision à quel moment exactement elle était revenue s’installer chez son père. Il confirmait qu’E______ vivait toujours chez son père, dans une chambrette et était à la recherche d’un nouvel appartement. Ses deux autres sœurs, G______ et F______, avaient quitté l’appartement familial depuis longtemps et vivaient, respectivement, l’une avec son mari et l’autre avec son compagnon. Il ajoutait que la famille vivait assez mal la présente procédure, car il estimait que toute la famille était honnête, que son père ne s’était pas enrichi et que lui-même ne lui avait jamais versé un sou de participation au loyer.

Entendue à titre de renseignement, H______ a confirmé qu’après le décès de son époux, en janvier 2023, elle avait fait des allers-retours entre Genève et Lyon, étant précisé que K______ souffrait de troubles du spectre autistique (ci-après : TSA) et avait besoin d’avoir des contacts avec la famille. Ce n’était que depuis trois mois qu’elle s’était véritablement installée chez ses parents et regrettait d’avoir dû occuper la chambre de ses parents, avec sa fille, ce qui contraignait ces derniers à dormir dans le salon. Elle attendait de pouvoir déménager avec sa fille, d’avoir plus d’espace et de pouvoir reprendre son travail. Par ailleurs, elle confirmait que D______, I______ et E______ vivaient dans l’appartement familial. S’agissant de J______, elle confirmait qu’il avait quitté l’appartement, en tout cas depuis octobre 2016, car c’était à ce moment-là que son père avait eu un AVC. Elle confirmait, par ailleurs, que ses sœurs G______ et F______ avaient quitté l’appartement familial depuis de nombreuses années.

g. À l’issue de l’audience, un délai de quinze jours a été donné aux parties pour se déterminer sur un éventuel problème de prescription ou de péremption, délai qui, sur demande, a été prolongé au 4 novembre 2024.

h. Par courrier du 23 octobre 2024, le SPC a relevé que l’extrait de l’OCPM daté du 25 septembre 2017, qui figurait au dossier sous pièce no 2 du chargé de pièces intimé, ne mentionnait pas que les enfants de l’intéressé étaient également domiciliés à la même adresse que leur père. Les enfants étaient répertoriés dans la rubrique « filiation », sans que leurs adresses respectives n’apparaissent. Le SPC alléguait n’avoir eu aucune raison de consulter les données de l’OCPM pour l’ensemble des enfants, dans la mesure où ils n’étaient pas mentionnés dans la demande de prestations, étant rappelé que le recourant avait été expressément invité à inscrire le nombre de personnes qui partageaient son logement. Or, ce n’était qu’en date du 22 septembre 2023, au moment d’intégrer un loyer partagé dans le calcul des prestations avec l’enfant D______ devenu majeur, que le SPC avait, pour la bonne tenue du dossier, interrogé le recourant sur le nombre de personnes partageant son logement. Cela résultait d’ailleurs de la décision de restitution du 22 septembre 2023 qui était simultanée au courrier de demande de pièces relatives au nombre de personnes qui partageaient le logement et qui était daté du même jour. Suite à la réponse du recourant du 5 octobre 2023, le SPC était allé vérifier les données de l’OCPM concernant le domicile des autres enfants, ce qui avait été fait en date du 10 octobre 2023, comme cela résultait de la pièce no 67 de son chargé de pièces. Partant, le SPC ne pouvait pas se rendre compte de cet élément avant cette date et les délais relatifs et absolus de péremption avaient été respectés.

i. Par courrier du 4 novembre 2024, le recourant a rappelé que son fils E______ avait informé le SPC qu’il habitait avec ses parents, en attendant de retrouver un appartement. Dès lors, le SPC savait qu’E______ partageait l’appartement de ses parents. S’agissant du défaut d’information, le recourant alléguait qu’il avait toujours eu à cœur de fournir une information complète et spontanée et qu’il n’avait jamais eu l’intention de dissimuler un quelconque renseignement. C’était par « ignorance, oubli ou de bonne foi » que les membres de la famille n’avaient pas procédé, spontanément à l’actualisation de leurs données auprès de l’OCPM, sans aucune volonté de tromper l’autorité. Le document du 25 septembre 2017, soit l’extrait de l’OCPM qui était présent dans le dossier dès le début de la demande de prestations, prouvait que l’intimé était au courant de la situation et ne pouvait, de ce fait, qu’assumer sa propre négligence et son manque de diligence. Le SPC aurait dû se rendre compte plus tôt de la différence existant entre les relevés de l’OCPM et la lettre du 5 octobre 2023 du recourant qui répondait à l’interpellation du SPC. Dès lors, la décision de restitution était tardive et le droit du SPC de réclamer la restitution de ses prestations était périmé. Subsidiairement, l’intimé avait violé de manière flagrante le principe de la bonne foi. Enfin, la restitution ne pouvait être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et que ladite restitution le mettrait dans une situation difficile, étant rappelé que l’intéressé avait spontanément informé le SPC du changement de la situation de son fils D______, ce qui avait déclenché la prise de la décision querellée et ce qui démontrait la bonne foi du recourant. En ce qui concernait le fils J______, ses déclarations avaient été constantes et ce dernier, ainsi que son père, n’avaient aucun intérêt à cacher la situation, par ignorance des démarches qu’ils devaient entreprendre auprès de l’OCPM. En conclusion, le recourant persistait dans ses conclusions.

j. Par courrier du 14 novembre 2024, le SPC a persisté dans ses conclusions. S’agissant de l’enfant E______, le SPC a rappelé qu’il avait finalement versé une part de loyer équivalente dans le dossier de l’enfant, sur toute la période de restitution, si bien que ce point ne pouvait plus être considéré comme litigieux. On ne pouvait pas attendre du SPC qu’il consulte systématiquement les registres de l’OPCM de l’ensemble de la famille d’un intéressé lorsqu’il instruisait une demande de prestations, étant rappelé que les bénéficiaires étaient tenus d’indiquer avec qui ils partageaient leur logement, dans le formulaire relatif à la demande. Enfin, s’agissant de la présence des enfants J______ et H______, le SPC relevait que, bien que leur présence soit contestée, aucune preuve par pièce n’avait pu être apportée dans le cadre de la présente procédure. Enfin, contrairement à ce que le recourant alléguait, il était de sa responsabilité d’informer spontanément le SPC de toute cohabitation avec des tiers, ce qui ressortait clairement du formulaire de demande de prestations ou des courriers d’information expédiés systématiquement chaque année. Quant à la demande de remise de l’obligation de rembourser, conformément à l’art. 25 al. 1 LPGA, elle était prématurée à ce stade de la procédure.

k. Par courrier du 15 novembre 2024, le recourant a, en substance, répété son argumentation et persisté dans ses précédentes explications et dans ses conclusions.

l. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

m. Les autres faits et documents seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC ‑ RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais du 7e jour avant Pâques au 7e jour après Pâques inclusivement (art. 38 al. 4 let. a LPGA et art. 89C let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]), le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de restitution du montant de CHF 35'745.- correspondant aux prestations complémentaires fédérales et cantonales versées du 1er septembre 2017 au 31 octobre 2023.

4.             Dans le cadre de la réforme de la LPC, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, de nombreuses dispositions ont été modifiées (FF 2016 7249 ; RO 2020 585).

Dans la mesure où le recours porte sur le re-calcul du droit aux prestations complémentaires, pour la période allant du 1er septembre 2017 au 31 août 2023, le présent litige est soumis à l’ancien droit pour le calcul des prestations dues jusqu’au 31 décembre 2020, et au nouveau droit pour le calcul des prestations dues dès le 1er janvier 2021, ce dernier étant plus favorable à l’intéressé, comme cela ressort du courrier du SPC du 5 décembre 2020.

5.              

5.1 En vertu de l'art. 25 LPGA, dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile (al. 1). Le droit de demander la restitution s'éteint un an après le moment où l'institution d'assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Si la créance naît d'un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant (al. 2). Depuis le 1er janvier 2021, le droit de demander la restitution s’éteint trois ans après le moment où l’institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation (art. 25 al. 2 1ère phr. LPGA dans sa nouvelle teneur dès cette date). Selon la jurisprudence, l'obligation de restituer prévue par l'art. 25 al. 1 LPGA implique que soient réunies les conditions d'une reconsidération ou d'une révision procédurale (art. 53 al. 1er et 2 LPGA) de la décision par laquelle les prestations ont été accordées (arrêt du Tribunal fédéral 9C_398/2021 du 22 février 2022 consid. 5.1).

5.2 Au plan cantonal, aux termes de l'art. 24 al. 1 LPCC, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile. Conformément à l'art. 43A LPCC, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si le bénéficiaire ou le service découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits avant (al. 1). Le SPC peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu'elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (al. 2).

Les délais de l'art. 25 al. 2 LPGA sont des délais relatif et absolu de péremption, qui doivent être examinés d'office (arrêt du Tribunal fédéral 8C_535/2020 du 3 mai 2021 consid. 3.2). Le délai de péremption absolu de cinq ans commence à courir à la date du versement effectif de la prestation. Il met un point final à un rapport d'obligation entre l'assurance et le débiteur (arrêt du Tribunal fédéral 8C_616/2009 du 14 décembre 2009 consid. 3.2).

5.3 Les dispositions pénales suivantes peuvent trouver application en lien avec la perception de prestations complémentaires.

L'alinéa premier de l'art. 31 LPC arrête qu'est puni, à moins qu'il ne s'agisse d'un crime ou d'un délit frappé d'une peine plus élevée par le Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), d'une peine pécuniaire n'excédant pas 180 jours-amende celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, obtient d'un canton ou d'une institution d'utilité publique, pour lui-même ou pour autrui, l'octroi indu d'une prestation au sens de la présente loi (let. a) ; celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, obtient sans droit une subvention au sens de la présente loi (let. b) ; celui qui n'observe pas l'obligation de garder le secret ou abuse, dans l'application de la présente loi, de sa fonction ou tire avantage de sa situation professionnelle au détriment de tiers ou pour son propre profit (let. c) ; celui qui manque à son obligation de communiquer (art. 31 al. 1 LPGA) (let. d). Cette infraction se prescrit par sept ans selon l'art. 97 al. 1 let. d CP.

Le fait de ne pas déclarer à l’organe d’exécution des prestations complémentaires des ressources déterminantes réalise les conditions objectives de l'infraction réprimée à l'art. 31 al. 1 let. d LPC (ATF 140 IV 206 consid. 6.4). Les indications écrites fournies chaque année à un titulaire de prestations complémentaires, relatives à l'obligation de communiquer tout changement de circonstances, doivent être comprises comme une exhortation à annoncer la survenance de telles modifications ; celui qui, après avoir dissimulé à l'administration une partie de ses revenus, ignore ces communications annuelles tait l'existence d'éléments pertinents pour l'octroi de prestations et commet ainsi à chaque fois une tromperie par commission (ATF 131 IV 83 consid. 2.2 et 2.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_232/2013 du 13 décembre 2013 consid. 4.1.3).

L'art. 31 al. 1 LPC vise un délit intentionnel (Urs MÜLLER, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum ELG, 3ème éd. 2015, p. 330 n. 926). Cela suppose que l'auteur ait agi avec conscience et volonté, ou par dol éventuel (ATF 138 V 74 consid. 8.4.1). Il y a dol éventuel lorsque l'auteur envisage le résultat dommageable et agit, même s'il ne le souhaite pas, parce qu'il s'en accommode pour le cas où il se produirait (ATF 137 IV 1 consid. 4.2.3). Le Tribunal fédéral a retenu que compte tenu des informations demandées dans le formulaire de demande de prestations, un assuré ne pouvait ignorer l’importance de la communication de toute information d'ordre économique le concernant et était ainsi conscient qu'il retenait des informations qu'il avait l'obligation de transmettre à l’autorité, agissant ainsi par dol éventuel. Partant, les conditions subjectives de l’infraction étaient réalisées (ATF 140 IV 206 consid. 6.4 et 6.5 dans le cas de la non déclaration à l’autorité d’un héritage perçu et de l’acquisition d’un bien immobilier).

5.4 L’art. 146 al. 1 CP, relatif à l’escroquerie, prévoit que celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l’aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire. L’escroquerie se prescrit par quinze ans en vertu de l’art. 97 CP.

Par tromperie, il faut entendre tout comportement destiné à faire naître chez autrui une représentation erronée des faits (ATF 147 IV 73 consid. 3.1). La tromperie peut être réalisée non seulement par l'affirmation d'un fait faux, mais également par la dissimulation d'un fait vrai. On distingue à cet égard la dissimulation d'un fait vrai par commission, de la dissimulation par omission, laquelle ne peut constituer une tromperie que si l'auteur se trouve dans une position de garant, à savoir s'il a, en vertu de la loi, d'un contrat ou d'un rapport de confiance spécial, une obligation qualifiée de renseigner (ATF 140 IV 206 consid. 6.3.1.2). C’est aux assurances qu’il appartient de veiller à la sauvegarde de leur propre patrimoine, par exemple en interrogeant à intervalles réguliers les bénéficiaires de prestations au sujet de l’évolution de leur état de santé, leur situation personnelle ou financière. Cela étant, si les réponses fournies par l’assuré sont contraires à la réalité ou si la perception des prestations d’assurance est accompagnée d’autres actions qui permettent objectivement d’interpréter le comportement de l’assuré comme signifiant que rien n’a changé dans sa situation, il n’est plus question d’une escroquerie par omission, mais par commission, à tout le moins par actes concluants (Andrew GARBARSKI / Benjamin BORSODI in Commentaire romand, Code pénal II, 2ème éd. 2017, n. 24 ad art. 146 CP). Une escroquerie par actes concluants a ainsi été retenue dans le cas d’un bénéficiaire de prestations complémentaires qui avait gagné à la loterie et seulement transmis l’extrait de son livret d’épargne à l'autorité compétente, comme celle-ci le lui avait demandé, sans révéler spontanément sa fortune placée sur un autre compte. Le Tribunal fédéral a considéré que la condition de l’astuce était remplie, dès lors que l’autorité ne pouvait que très difficilement déceler la fortune de l’intéressé (ATF 127 IV 163 consid. 2b).

Sur le plan subjectif, l'escroquerie est une infraction intentionnelle. L'intention doit porter sur tous les éléments constitutifs de l'infraction. L'auteur doit avoir agi dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, correspondant au dommage de la dupe (ATF 134 IV 210 consid. 5.3).

6.

6.1 Selon l’art. 9 al. 1 LPC, le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

Les revenus déterminants comprennent les prestations touchées en vertu d’un contrat d’entretien viager ou de toute autre convention analogue (art. 11 al. 1 let. e LPC).

L’art. 10 LPC définit les dépenses reconnues et fixe notamment le montant maximal reconnu pour le loyer d'un appartement.

Dès le 1er janvier 2021 et jusqu'au 31 décembre 2022, l'art. 10 al. 1 let. b ch. 1 et 2 LPC prévoyait que le montant annuel maximal reconnu du loyer était pour une personne vivant seule de CHF 16'440.- dans la région 1, de CHF 15'900.- dans la région 2 et de CHF 14'520.- dans la région 3. Si plusieurs personnes vivent dans le même ménage, un supplément de CHF 3'000.- est ajouté pour la deuxième personne dans chacune des trois régions.

À partir du 1er janvier 2023, cette disposition prescrit que le montant annuel maximal reconnu du loyer est pour une personne vivant seule de CHF 17'580.- dans la région 1, de CHF 17'040.- dans la région 2 et de CHF 15'540.- dans la région 3. Si plusieurs personnes vivent dans le même ménage, un supplément de CHF 3'240.- dans la région 1, de CHF 3'180.- dans la région 2 et de CHF 3'240.- dans la région 3 est ajouté pour la deuxième personne, de CHF 2'280.- dans la région 1 et de CHF 1'920.- dans les régions 2 et 3 pour la troisième personne et de CHF 2'100.- dans la région 1, de CHF 1'980.- dans la région 2 et de CHF 1’680.- dans la région 3 pour la quatrième personne.

Aux termes de l'art. 10 al. 1bis LPC, si plusieurs personnes vivent dans le même ménage, le montant maximal reconnu au titre du loyer est calculé individuellement pour chaque ayant droit ou pour chaque personne comprise dans le calcul commun des prestations complémentaires, puis la somme des montants pris en compte est divisée par le nombre de personnes vivant dans le ménage. Les suppléments ne sont accordés que pour les deuxième, troisième et quatrième personnes.

Selon l'art. 10 al. 1ter LPC, pour les personnes vivant en communauté d’habitation, lorsqu’il n’y a pas de calcul commun en vertu de l’art. 9 al. 2 LPC, le montant pris en considération est le montant annuel maximal reconnu au titre du loyer pour une personne vivant dans un ménage de deux personnes. Le Conseil fédéral détermine le mode de calcul du montant maximal pour les couples vivant ensemble en communauté d’habitation (let. a) et les personnes vivant en communauté d’habitation avec des enfants ayant droit à une rente d’orphelin ou donnant droit à une rente pour enfant de l’AVS ou de l’AI (let. b).

6.2 Selon l'art. 16c OPC-AVS/AI, lorsque des appartements ou des maisons familiales sont aussi occupés par des personnes non comprises dans le calcul des PC, le loyer doit être réparti entre toutes les personnes. Les parts de loyer des personnes non comprises dans le calcul des PC ne sont pas prises en compte lors du calcul de la prestation complémentaire annuelle (al. 1). En principe, le montant du loyer est réparti à parts égales entre toutes les personnes (al. 2).

Le critère est dès lors le fait de vivre ensemble en un même lieu, et non pas de s'être ou non annoncé à telle ou telle adresse auprès de l'OCPM. Certes, le SPC doit pouvoir se fier aux indications officielles, et l'annonce officielle d'un changement d'adresse constitue dès lors un indice. Il y aurait toutefois formalisme excessif à refuser de prendre en compte une situation concrète établie et prouvée par pièce (ATAS/839/2020 du 8 octobre 2020 consid. 14d et références citées).

Le dépôt de papiers ou le domicile fiscal ne crée qu'une présomption de fait que d'autres éléments peuvent permettre de renverser (arrêt du Tribunal fédéral 5A_680/2020 du 8 décembre 2020 consid. 5.1.1 ; ATAS/410/2021 du 4 mai 2021 consid. 13).

Le critère déterminant est le logement commun, indépendamment du fait de savoir s'il y a bail commun ou si l'un des occupants paie seul le loyer. Aussi, lorsque plusieurs personnes occupent le même foyer ou font ménage commun, il y a lieu de partager à parts égales le loyer pris en compte dans le calcul des prestations complémentaires (ATF 127 V 10). Peu importe la répartition réelle du paiement du loyer entre les personnes partageant le foyer.

6.3 Selon les directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, état au 1er janvier 2022 (ci-après : DPC), une communauté d’habitation correspond à la situation dans laquelle une personne seule – c’est-à-dire une personne vivant seule, un conjoint vivant séparément ou une personne dont le conjoint vit dans un home ou un hôpital – vit avec une ou plusieurs personnes qui ne sont pas comprises dans le calcul de la PC (ch. 3232.06).

Selon l’annexe 1 de l’ordonnance du DFI du 14 juin 2021 concernant la répartition des communes dans les trois régions de loyer définies par la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité et la loi fédérale sur les prestations transitoires pour les chômeurs âgés (RS 831.301.114), la commune de Meyrin est située dans la région 2.

6.4 Sur le plan cantonal, ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes qui remplissent les conditions de l’art. 2 LPCC et dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum cantonal d'aide sociale applicable (art. 4 LPCC).

Le montant annuel de la prestation complémentaire cantonale correspond à la part des dépenses reconnues qui excède le revenu annuel déterminant de l'intéressé (art. 15 al. 1 LPCC).

7.              

7.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2).

7.2 Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. aussi ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références).

8.

8.1 En l’espèce, l’intimé exige la restitution de prestations qu’il estime avoir indûment versées. Le recourant, quant à lui, allègue que le délai pour demander le remboursement des montants réclamés est prescrit ou périmé, raison pour laquelle il convient de se déterminer préalablement sur ce point.

Lorsqu'il statue sur la créance de l'institution d'assurance en restitution de prestations indûment versées, le juge doit examiner, à titre préjudiciel, si les circonstances correspondant à une infraction pénale sont réunies et, partant, si un délai de péremption plus long que les délais relatifs et absolus prévus par l'art. 25 al. 2 LPGA est applicable dans le cas particulier. Pour que le délai de péremption plus long prévu par le droit pénal s'applique, il n'est pas nécessaire que l'auteur de l'infraction ait été condamné (arrêt du Tribunal fédéral 8C_592/2007 du 20 août 2008 consid. 5.3 et les références). Les exigences constitutionnelles en matière d'appréciation des preuves en procédure pénale, notamment le principe in dubio pro reo, s'appliquent également dans le cadre d'une procédure en restitution de prestations d'assurances sociales, lorsqu'il convient d'examiner à titre préjudiciel si la créance en restitution naît d'un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long que ceux prévus à l'art. 25 al. 2 LPGA (ATF 138 V 74 consid. 7). La présomption d'innocence, garantie en procédure pénale par l’art. 6 § 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), l’art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et l’art. 10 du Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP - RS 312.0), ainsi que son corollaire le principe « in dubio pro reo » concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 9C_97/2020 du 10 juin 2020 consid. 5).

D’emblée, il apparaît que les pièces du dossier et les déclarations des parties ne permettent pas de retenir que l’intéressé a voulu réaliser une infraction intentionnelle d’escroquerie, agissant avec astuce envers le SPC, dans le dessein de se procurer un enrichissement illégitime.

Néanmoins, le fait de ne pas déclarer à l’organe d’exécution des prestations complémentaires des ressources déterminantes réalise les conditions objectives de l'infraction réprimée à l'art. 31 al. 1 let. d LPC (ATF 140 IV 206 consid. 6.4).

Ainsi, l’omission de déclarer spontanément le nombre de personnes qui occupent le logement, alors même que cela peut conduire à une diminution du loyer pris en compte pour le bénéficiaire des prestations, constitue une infraction à l'art. 31 al. 1 let. d LPC. Il convient donc d’examiner si les conditions de l’infraction sont réalisées.

8.2 À teneur du dossier, il est établi que le SPC a informé chaque année l’intéressé de ses devoirs et notamment celui d’informer spontanément l’intimé de tout changement de circonstances dans sa situation personnelle et/ou économique. Le fait que des enfants adultes partagent le même appartement que lui, alors même que le loyer est pris en compte par le SPC pour calculer le droit aux prestations complémentaires de l’intéressé, est, de toute évidence, une information personnelle qui doit être spontanément annoncée par l’intéressé.

Le cas d’une cohabitation avec un tiers majeur ou mineur est d’ailleurs spécifiquement mentionné dans le formulaire envoyé chaque année à l’intéressé, en page 3, sous « Obligation de renseigner » avec la mise en garde suivante : « Doivent être annoncés en particulier : changement d’adresse de domicile, cohabitation avec un tiers (majeur ou mineur) ».

Le plan de calcul annexé au courrier du 5 décembre 2020 mentionne clairement les trois personnes qui sont prises en compte dans le groupe familial soit : l’intéressé, son épouse et D______, alors âgé de 15 ans. Les autres enfants du recourant ne sont pas mentionnés dans les calculs. En voyant que l’enfant D______ était pris en compte pour calculer le droit aux prestations complémentaires, le recourant pouvait aisément en déduire qu’il devait annoncer au SPC l’ensemble des personnes faisant partie du groupe familial logeant sous le même toit, soit les autres enfants, ce qu’il n’a pas fait.

La même situation s’est renouvelée avec la décision de prestations complémentaires du 19 avril 2021, mentionnant comme seul enfant D______, sans que le recourant ne réagisse. Il en a été de même lors de la décision du 1er décembre 2021, puis celle du 6 décembre 2021. Par courrier du 6 décembre 2022, le SPC a rappelé, à nouveau, au recourant son obligation de renseigner, notamment au cas où des tiers majeurs ou mineurs cohabitent dans l’appartement, étant précisé que la décision du 6 décembre 2022 mentionnait uniquement l’enfant D______, dans le tableau de calcul des éléments pris en compte. La décision du 1er juin 2023, rendue alors que D______ venait d’avoir 18 ans, ne mentionne pas d’autres enfants.

Contrairement à ce qu’allègue le recourant, ce n’est pas suite à une déclaration spontanée de sa part concernant D______ que l’existence des autres enfants a été découverte, mais c’est dans le cadre de la révision du dossier, suite à l’accession à la majorité de D______ en 2023 et afin de s’assurer que ce dernier poursuivait ses études, que le SPC a commencé par demander à l’intéressé de restituer un montant correspondant aux subsides alloués par le service de l’assurance maladie (ci‑après : SAM) et qui s’élevait, pour la période allant du 1er juillet au 30 septembre 2023, à CHF 421.20. À cette occasion, l’intimé a vérifié l’inscription du domicile de D______ par le biais d’un extrait du fichier Calvin, déposé au dossier et daté du 21 septembre 2023. Un employé du SPC a mentionné, de façon manuscrite sur le document, que D______ vivait toujours chez ses parents. C’est à la suite de cette vérification que le SPC a adressé une demande de pièces à l’intéressé, par courrier du 22 septembre 2023, lui demandant de confirmer le nombre de personnes partageant le logement familial. Par courrier du 5 octobre 2023, l’intéressé a répondu à la demande de renseignements de l’intimé en mentionnant que les personnes qui habitaient dans le même appartement étaient au nombre de quatre, soit : lui-même, son épouse, leur fils D______ ainsi que leur fils I______.

Suite à la réception de cette information, le SPC a procédé à un contrôle auprès de l’OCPM et a constaté que plusieurs des enfants étaient inscrits à la même adresse que l’intimé, ce qui créait la présomption qu’ils partageaient l’appartement familial, situation qui n’avait pas été annoncée par l’intéressé au SPC. Ce dernier a demandé le remboursement d’un trop-perçu, par courrier du 27 octobre 2023, en tenant compte d’un loyer proportionnel réparti en parts égales entre les différentes personnes qui partageaient l’appartement, selon les indications fournies par l’OCPM et en mentionnant expressément que les informations fournies auparavant par l’intéressé étaient inexactes.

8.3 La chronologie des événements démontre clairement que l’intéressé a été informé régulièrement de ses obligations d’information spontanée, mais ne les a pas respectées en laissant le SPC dans l’ignorance du fait que l’appartement familial n’était pas occupé que par l’enfant D______, mais par plusieurs autres enfants.

À cela, le recourant rétorque que le SPC était au courant de la situation, ou à tout le moins disposait de toutes les informations lui permettant de savoir combien de personnes occupaient l’appartement, depuis le dépôt de la demande, raison pour laquelle il considère que la demande de remboursement est prescrite ou périmée.

Selon la jurisprudence à défaut de mise en œuvre des investigations, le début du délai de péremption doit être fixé au moment où l’administration aurait été en mesure de rendre une décision de restitution si elle avait fait preuve de l'attention que l'on pouvait raisonnablement exiger d'elle. Dans tous les cas, le délai de péremption commence à courir immédiatement s'il s'avère que les prestations en question étaient clairement indues (ATF 133 V 579 consid. 5.1 non publié).

Contrairement à la prescription, la péremption prévue à l’art. 25 al. 2 LPGA ne peut être ni suspendue ni interrompue et lorsque s’accomplit l’acte conservatoire que prescrit la loi, comme la prise d’une décision, le délai se trouve sauvegardé une fois pour toutes (arrêt du Tribunal fédéral C 271/04 du 21 mars 2006 consid. 2.5).

Lorsque la restitution est imputable à une faute de l’administration, on ne saurait considérer comme point de départ du délai le moment où la faute a été commise, mais bien celui auquel l’administration aurait dû, dans un deuxième temps (par exemple à l’occasion d’un contrôle comptable), se rendre compte de son erreur en faisant preuve de l’attention requise (ATF 124 V 380 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral C 80/05 du 3 février 2006). Le délai de péremption d'une année commence à courir dans tous les cas aussitôt qu'il s'avère que les prestations en question étaient indues (ATF 133 V 579 consid. 5.1). Cette jurisprudence vise un double but, à savoir obliger l'administration à faire preuve de diligence, d'une part, et protéger l'assuré au cas où celle-ci manquerait à ce devoir de diligence, d'autre part (ATF 124 V 380 consid. 1).

Dans le cas présent, s’il est vrai que le SPC a procédé à une vérification des données auprès de l’OCPM en date du 25 septembre 2017, les relevés figurant au dossier montrent que seule l’adresse du recourant et de son épouse ont été vérifiées. Les sept enfants du couple apparaissent uniquement sous la rubrique « filiation » du relevé de l’OCPM, avec leur nom et prénoms, leur date de naissance et leur nationalité, mais sans que leur état civil ou leur adresse n’apparaisse. Compte tenu de ces pièces, on ne peut reprocher au SPC d’avoir su, dès le dépôt de la demande de prestations, qu’une partie des enfants était domiciliée à la même adresse que leurs parents.

Ce d’autant moins que les dates de naissance des enfants, soit : 1979 pour E______, 1986 pour H______ et 1989 pour I______, montrent que ces derniers étaient âgés, au moment du dépôt de la demande en 2017, respectivement, de 38 ans pour E______, 31 ans pour H______ et 28 ans pour I______, ce qui ne permettait pas au SPC de présumer qu’ils vivaient encore avec leurs parents en raison de leur âge, comme c’était le cas pour D______, alors âgé de 12 ans en 2017.

Compte tenu de ces éléments, la chambre de céans considère que le recourant a échoué à rendre vraisemblable que l’administration devait être au courant de la présence des autres enfants, dans l’appartement familial, avant de procéder à des vérifications, par le biais du courrier du 22 septembre 2023. Ce n’est qu’en recevant la réponse de l’intéressé, par courrier du 5 octobre 2023, que le SPC a appris qu’au moins un autre enfant non déclaré, soit I______, habitait l’appartement de l’intéressé et qu’il a procédé à une investigation plus complète, en date du 10 octobre 2023, en vérifiant les adresses de l’ensemble des enfants de l’intéressé.

Partant, le moment de la découverte de l’existence de plusieurs autres personnes partageant l’appartement sera fixé au mois d’octobre 2023.

8.4 S’agissant de savoir jusqu’à quelle date le SPC peut demander le remboursement des prestations versées à tort, comme on l’a vu supra, les conditions d’application de l’article 31 LPC sont réunies, ce qui entraîne un délai de prescription plus long, ladite infraction se prescrivant par sept ans selon l'art. 97 al. 1 let. d CP.

Compte tenu du délai de prescription pénale de sept ans et de la décision de remboursement datée du 27 octobre 2023, le SPC est bien fondé à demander le remboursement de toutes les prestations versées indûment depuis le 1er septembre 2017, ces dernières n’étant ni prescrites, ni périmées.

9. Dans un deuxième grief, le recourant reproche au SPC d’avoir tenu compte, dans les calculs rétroactifs du loyer proportionnel, de la présence d’enfants qui ne partageaient pas le logement familial, pendant la période visée.

9.1 S’agissant des enfants D______ et I______, le recourant a admis leur présence dans l’appartement familial. Partant, les deux fils peuvent être pris en compte dans le calcul du loyer proportionnel. La présence de D______ ayant été connue, dès le dépôt de la demande de prestations, ce n’est que pour l’enfant I______ qu’il se justifie de demander un remboursement des prestations complémentaires, suite aux nouveaux calculs prenant en compte sa quote-part proportionnelle dans le loyer de l’appartement du recourant.

9.2 S’agissant de la fille H______, cette dernière a confirmé lors de son audition qu’elle vivait dans l’appartement familial avec sa propre fille K______. Dans la décision querellée, le SPC admet que la prise en compte d’un loyer proportionnel incluant l’enfant H______ doit être supprimée, pour la période allant du 1er janvier 2019 au 31 janvier 2023, mais, faute de justificatifs, il maintient la prise en compte de H______ dans le calcul du loyer proportionnel, pour la période allant du 1er septembre 2017 au 31 décembre 2018.

Dans son attestation du 7 février 2024 (pièce no 8 chargé du recourant), H______ expose qu’elle a vécu en France depuis l’année 2017 et que c’est en France également qu’elle a contracté mariage dans la commune française de Bezons, le 17 février 2018, ajoutant qu’il allait de soi qu’elle avait connu son défunt époux bien avant cette date. Pour la période précédant la signature du bail à loyer qu’elle produit, prenant effet le 1er janvier 2019, elle allègue s’être débrouillée pour occuper des sous-locations, aussi bien lorsqu’elle était seule, qu’après son mariage. Néanmoins, aucune pièce ne vient conforter les déclarations de la fille du recourant. À teneur des pièces rassemblées sous no 72 du chargé de l’intimé, le certificat de mariage daté du 17 février 2018 confirme le mariage de H______, avec S______, dans la ville de Bezons, en France. La copie intégrale de l’acte de mariage, daté du 6 juillet 2020, mentionne que le jour du mariage l’époux S______ était déjà domicilié dans la commune de Bezons à l’adresse : T______, alors que l’adresse de H______, qui est mentionnée sur l’acte de mariage, est celle du domicile du recourant, soit : Promenade B______ à Genève, ce qui correspond à l’adresse de l’appartement du recourant.

En dépit des nombreuses interpellations du SPC, le recourant n’a pas pu produire de documents rendant vraisemblable que sa fille n’habitait plus à son domicile depuis l’année 2017. De même, lors de son audition par la chambre de céans, H______ n’a produit aucun document susceptible de rendre vraisemblable cette situation.

La chambre de céans considère que l’on peut raisonnablement présumer, qu’à partir du jour de son mariage, au plus tard, H______ a quitté l’appartement familial pour vivre avec son époux.

À défaut de pièces produites par le recourant, ce dernier échoue à établir, au degré de la vraisemblance prépondérante, que H______ n’habitait plus l’appartement familial depuis 2017 et la chambre de céans retiendra, en se fondant sur les données de l’OCPM et sur celles figurant dans les documents de la commune de Bezons, qu’au degré de la vraisemblance prépondérante, le moment où H______ a quitté l’appartement familial, correspond au jour de son mariage, en date du 17 février 2018.

La décision querellée devra donc être corrigée par le SPC en ce sens et le calcul de la part proportionnelle du loyer pris en compte pour H______ ne devra porter que sur la période allant du 1er septembre 2017 au 17 février 2018 et non pas du 1er septembre 2017 au 31 décembre 2018.

9.3 En ce qui concerne le fils E______, le SPC retient dans la décision querellée que ce dernier s’est réinstallé chez ses parents, dès le 1er janvier 2019, en raison d’une séparation avec son ex-épouse et n’a, depuis lors, plus quitté l’appartement familial, ce qui ressort notamment des déclarations de H______ et J______ qui ont tous deux confirmé, lors de leur audition en date du 10 octobre 2024, qu’E______ vivait dans une chambrette, dans l’appartement du recourant.

Le recourant allègue que le SPC était au courant de cette situation et qu’il aurait dû réagir avant. Il se fonde pour cela sur le courrier du 15 avril 2019 que le fils E______ a adressé au SPC, dans le cadre de son propre dossier de demande de prestations complémentaires, informant ce dernier qu’il n’était pas encore en possession du jugement final de divorce, mais qu’il habitait « maintenant » avec ses parents à l’adresse du recourant, ajoutant que « momentanément », il habite avec ses parents, mais que le problème se poserait après, pour trouver un logement avec les difficultés que cela comportait à Genève.

L’information en question n’a pas été transmise par le recourant au SPC dans le cadre du dossier ayant donné lieu au présent recours, mais a été transmise par le fils du recourant, dans le cadre de son propre dossier de demande de prestations complémentaires.

En cela, il apparaît que le recourant n’a pas fourni spontanément les informations, en 2019, quant à l’arrivée d’E______ dans son appartement. On ajoutera que lorsqu’il a été interpellé par le courrier du SPC du 22 septembre 2023, le recourant n’a pas non plus annoncé la présence d’E______ dans son appartement comme cela ressort de son courrier du 5 octobre 2023, alors même que ce dernier logeait chez lui depuis plus de quatre ans, ce qui a été confirmé lors de l’audition des enfants H______ et J______.

On ne peut reprocher au SPC de n’avoir pas réagi au courrier d’E______ pour mettre en place un contrôle de la durée de sa présence dans l’appartement familial dès lors que, selon les propres termes utilisés par E______ dans son courrier, cette situation devait être provisoire. Il était du devoir du recourant, à partir du moment où la présence d’E______ dépassait ce que l’on peut raisonnablement qualifier de provisoire, d’informer le SPC de sa présence dans l’appartement.

Partant, comme cela ressort des registres de l’OCPM, il convient de retenir que le fils E______ s’est installé dans l’appartement du recourant dès le 1er janvier 2019, tel que cela figure dans la décision querellée.

9.4 Enfin, s’agissant de la situation de l’enfant J______, le SPC a demandé à plusieurs reprises au recourant de fournir des pièces rendant vraisemblable que J______ n’habitait plus l’appartement familial.

Selon le recourant, il n’a pas été en mesure de produire des pièces justificatives, dès lors que son ex-colocataire de J______ refusait de les transmettre.

Entendu lors de l’audience du 10 octobre 2024, J______ a allégué avoir quitté l’appartement familial en octobre 2016, tout en conservant l’adresse chez son père, car il recevait peu de courrier. Les seules indications qu’il a données étaient qu’il habitait sur la commune d’Onex, avec quelqu’un chez qui il avait emménagé en tant que colocataire. Malgré l’invitation du président de la chambre de céans à fournir l’identité de ce colocataire, afin qu’il puisse confirmer les dires de J______, ce dernier a obstinément refusé de donner la moindre indication, déclarant préférer éviter cela, « car c’est un très bon ami ». Il n’a pas non plus fourni le moindre document, tel qu’un courrier ou la preuve du paiement d’un loyer, pouvant documenter ses allégations.

Partant, la chambre de céans n’a d’autre choix que de se fonder sur les inscriptions figurant à l’OCPM et de considérer que la décision du SPC prenant en compte un loyer proportionnel pour J______, pendant la période allant du 1er septembre 2017 au 31 décembre 2023 est bien fondée.

9.5 Le recourant se plaint également de la violation du principe de la bonne foi, sans expliquer en quoi ledit principe serait violé. Il allègue, de manière générale, que le principe de la bonne foi est une condition essentielle à tous rapports juridiques, car les parties doivent pouvoir placer une confiance mutuelle dans la véracité de leurs déclarations et l’exactitude de leur comportement. Ce faisant, le recourant prétend n’avoir caché aucune information à l’autorité et n’avoir tiré aucun avantage du fait qu’il a rendu service à ses enfants.

Or, comme cela a été examiné supra sous ch. 8.3, le recourant n’a pas respecté son obligation de renseigner spontanément l’autorité et à même répondu de façon erronée à la demande d’informations du SPC, en ne déclarant la présence que de deux enfants ; au vu de la violation du devoir d’informer et de ses déclarations incomplètes, l’invocation du principe de la bonne foi ne lui est d’aucun secours.

9.6 Compte tenu de ces éléments, la décision querellée doit être confirmée, sauf en ce qui concerne le calcul de la part proportionnelle de loyer devant être imputée à H______, cette dernière pouvant être considérée comme ayant quitté l’appartement du recourant en date du 17 février 2018, en lieu et place de la date retenue par l’intimé, soit le 31 décembre 2018.

En dehors de cette correction, dans la mesure où les autres montants pris en compte dans les calculs du SPC aboutissant à la demande de restitution ne sont pas contestés, en tant que tels, par le recourant et n’apparaissent pas non plus contestables, ils ne seront pas revus en détail par la chambre de céans.

9.7 S’agissant de la demande de remise de l’obligation de rembourser, comme indiqué par l’intimé, le recourant a la possibilité, dans les trente jours qui suivent l’entrée en force du présent arrêt, de déposer une demande de remise de son obligation de rembourser auprès du SPC et ceci pour autant que les conditions cumulatives de la bonne foi et d’une situation (financière) difficile soient réunies (art. 4 de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 [OPGA - RS 830.11]). Ce n’est qu’une fois la présente décision entrée en force que la demande de remise pourra être examinée par le SPC.

9.8 En ce qui concerne la demande de restitution de l’effet suspensif, le SPC a précisé sa position, expliquant qu’il ne s’agissait pas de réclamer immédiatement le remboursement du montant indûment versé, nonobstant le recours, mais d’ajuster le montant des prestations versées depuis la date de la décision. Partant, la demande d’effet suspensif est sans objet.

9.9 Enfin, en ce qui concerne la demande du recourant de production de l’intégralité du dossier de Q______, on peine à comprendre la pertinence de cet acte d’instruction. À cet égard, il convient de rappeler que si le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles il doit procéder d’office, est convaincu que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; 122 III 219 consid. 3c). En l’état, par appréciation anticipée des preuves, ladite demande sera refusée.

 

10.

10.1 Le recours sera donc très partiellement admis, uniquement sur la période de prise en compte de la présence de H______ dans l’appartement du recourant et la cause renvoyée au SPC, pour nouveau calcul concernant la quote-part proportionnelle du loyer et l’établissement du montant devant être remboursé par le recourant.

10.2 Le recourant, assisté par un avocat et obtenant très partiellement gain de cause, a ainsi droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la chambre de céans fixera à CHF 800.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03).

10.3 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet très partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition du 27 mars 2024 en ce qu’elle concerne la période de prise en compte de la présence de la fille H______ au domicile du recourant et la confirme pour le surplus.

4.        Renvoie le dossier à l’intimé, pour nouveau calcul au sens des considérants et nouvelle décision.

5.        Octroie au recourant, à la charge de l’intimé, une indemnité de CHF 800.-, à titre de dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF ‑ RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le