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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1023/2022

ATAS/492/2022 du 30.05.2022 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1023/2022 ATAS/492/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 mai 2022

6ème Chambre

 

En la cause

 

Monsieur A______, domicilié c/o M. B______, à LES AVANCHETS

 

 

recourant

contre

 

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le ______ 1988, titulaire d’une attestation de formation élémentaire comme ouvrier de garage (automobiles), s’est inscrit à l’office régional de placement (ci-après : ORP) le 4 octobre 2021.

b. Le 22 novembre 2021, l’ORP a imparti à l’assuré un délai au 24 novembre 2021 pour envoyer un e-mail de postulation à deux employeurs, soit C______SA, comme assistant mécanicien en maintenance - monteur pneumatique, et à D______, comme mécanicien pour un contrat de durée indéterminée.

B. a. Le 6 décembre 2021, D______ (Madame E______) a indiqué à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) que l’assuré n’avait pas pris contact avec eux.

b. Le 9 décembre 2021, l’assuré a expliqué à l’OCE qu’il avait eu un litige avec le patron de D______, après avoir fait réparer sa voiture à cet endroit, qu’il avait téléphoné au garage et qu’on lui avait dit qu’on ne l’engagerait pas.

c. Par décision du 11 janvier 2022, l’OCE a suspendu le droit de l’assuré à l’indemnité de chômage pour une durée de quatorze jours au motif qu’il n’avait fait aucune recherche personnelle d’emploi (ci-après : RPE) en juillet et août 2021 ; cette décision a été annulée sur opposition le 17 février 2022.

d. Par décision du 9 février 2022, l’OCE a suspendu le droit de l’assuré à l’indemnité de chômage pendant une durée de quarante jours, au motif qu’il n’avait pas postulé auprès de D______ et qu’il n’avait pas amené la preuve qu’il avait téléphoné au garage ; la sanction tenait compte des précédents manquements.

e. Le 11 février 2022, l’assuré a fait opposition à la décision du 9 février 2022, en faisant valoir qu’il avait postulé le 23 novembre 2021 ; il a fourni un courrier de postulation du 23 novembre 2021 adressé à D______ et tamponné par celui-ci comme ayant été reçu le 23 novembre 2021, avec des annexes toutes également tamponnées du 23 novembre 2021.

f. A la demande de l’OCE, Madame E______, secrétaire chez D______, a indiqué le 25 février 2022 que quelques personnes étaient passées au garage, qui ne l’avaient pas intéressé, et qu’il n’avait pas gardé les noms des candidats, que l’assuré était passé à deux reprises au garage, une première fois pour une recherche d’emploi qui lui avait été refusée et, une seconde fois, pour faire tamponner les pièces transmises à l’OCE, puis il a précisé que l’assuré avait lui-même établi les papiers qui avaient été signés par le garage pour lui confirmer le refus d’engagement et qu’il était passé environ au début de décembre 2021 pour déposer son dossier de candidature.

g. Le 2 mars 2022, l’assuré a écrit à l’OCE qu’il avait omis de dire qu’il avait postulé le 23 novembre 2021.

h. Par décision du 4 mars 2022, l’OCE a partiellement admis l’opposition, en réduisant la sanction de quarante à trente-sept jours de suspension, au motif que l’assuré n’avait pas démontré avoir postulé dans le délai ; par ailleurs, il n’avait fait l’objet que de deux sanctions dans les deux ans précédents.

C. a. Le 31 mars 2022, l’assuré a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision précitée, en concluant à son annulation.

b. Le 22 avril 2022, l’OCE a conclu au rejet du recours.

c. Convoqué à une audience de comparution personnelle le 9 mai 2022, le recourant ne s’est pas présenté, sans s’excuser. L’OCE a précisé que le recourant avait déjà été sanctionné deux fois, en avril et en mai 2021.

d. Le 23 mai 2022, la chambre de céans a entendu deux témoins, Madame E______ et Monsieur F______, chef d’atelier chez D______. Le recourant ne s’est pas présenté, sans s’excuser. Madame E______ a indiqué que le recourant était passé deux fois au garage, après début décembre 2021, une fois pour faire signer des documents et une autre fois pour dire que si le chômage prenait contact, il fallait dire qu’il était bien passé au garage.

e. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

2.             Le litige porte sur le bienfondé de la suspension du droit à l’indemnité du recourant de 37 jours.

3.              

3.1 L'art. 8 LACI énumère les conditions d'octroi de l'indemnité de chômage. L'assuré doit, pour bénéficier de cette prestation prévue par l'art. 7 al. 2 let. a LACI, être sans emploi ou partiellement sans emploi, avoir subi une perte de travail à prendre en considération, être domicilié en Suisse, avoir achevé sa scolarité obligatoire et n'avoir pas encore atteint l'âge donnant droit à une rente AVS et ne pas toucher de rente de vieillesse de l'AVS, remplir les conditions relatives à la période de cotisation ou en être libéré, être apte au placement et satisfaire aux exigences de contrôle (art. 8 al. 1 LACI). Ces conditions sont cumulatives (ATF 124 V 215 consid. 2). Elles sont précisées par plusieurs dispositions de la LACI et de l’ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02), ainsi que – dans les limites d’admissibilité de telles directives administratives (ATF 144 V 202 ; 144 V 195 ; ATAS/1191/2014 du 18 novembre 2014 consid. 4 p. 5 s. et doctrine et jurisprudence citées) – par les instructions édictées par le SECO en sa qualité d’autorité de surveillance de l’assurance-chômage chargée d’assurer une application uniforme du droit (art. 110 LACI), notamment par le biais du Bulletin relatif à l’indemnité de chômage (Bulletin LACI IC).

La condition de satisfaire aux exigences de contrôle, posée par l’art. 8 al. 1 let. g LACI, renvoie aux devoirs de l’assuré et prescriptions de contrôle prévus par l’art. 17 LACI. Cette disposition-ci impose aux chômeurs des devoirs matériels (al. 1 et 3) – qui concernent la recherche et l’acceptation d’un emploi, ainsi que la participation aux mesures de marché du travail et aux séances et entretiens obligatoires – et des devoirs formels (al. 2) – qui ont pour objet l’inscription au chômage et la revendication régulière des prestations au moyen de formules officielles (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 1 ad art. 17).

3.2 Ne pas donner suite à une assignation à postuler pour un emploi à repourvoir représente une violation de l’obligation de diminuer le dommage ; cela revient à laisser échapper une possibilité concrète – quoiqu'incertaine – de retrouver un travail, le comportement de l’assuré important à cet égard plus que le résultat effectif du dépôt d’une candidature en termes d’obtention ou non d’un engagement (ATF 130 V 125 consid. 1 publié dans SVR 2004 ALV no 11 p. 31 ; ATF 122 V 34 consid. 3b). Aussi le défaut de candidature déposée est-il assimilé, sur le plan du principe, à un refus d’un emploi convenable, autrement dit à la violation d’une obligation qui, à l’instar de celle d’accepter un travail convenable, revêt une importance indéniable (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 368/99 du 16 mars 2000 ; ATAS/344/2017 du 2 mai 2017 consid. 5).

Il y a refus d’un travail convenable non seulement en cas de refus d’emploi formulé explicitement, mais aussi lorsque l’assuré ne se donne pas la peine d’entrer en pourparlers avec l’employeur potentiel, ne le fait que tardivement, ou en posant des restrictions ou manifestant des hésitations à s’intéresser véritablement au poste considéré, ou encore en faisant échouer la conclusion du contrat par un comportement trahissant un manque d’empressement voire un désintérêt manifeste à vouloir s’engager (Boris RUBIN, op. cit., n. 66 ad art. 30 et jurisprudence citée).

 

4.              

4.1 La violation de ces obligations expose l’assuré à une suspension de son droit à l’indemnité. En effet, selon l’art. 30 al. 1 LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu notamment lorsqu’il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable (let. c) ou n’observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l’autorité compétente, notamment refuse un travail convenable, ne se présente pas à une mesure de marché du travail ou l’interrompt sans motif valable, ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but (let. d).

La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute (art. 30 al. 3 LACI). L’OACI distingue trois catégories de faute – à savoir les fautes légères, moyennes et graves – et prévoit, pour chacune d'elles, une durée minimale et maximale de suspension, qui est de 1 à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne, et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 3 OACI). Selon l’art. 45 al. 4 OACI, il y a faute grave lorsque, sans motif valable, l’assuré abandonne un emploi réputé convenable sans être assuré d’obtenir un nouvel emploi (let. a) ou qu’il refuse un emploi réputé convenable (let. b). Des antécédents remontant à moins de deux ans justifient une prolongation de la durée de suspension (art. 45 al. 5 OACI ; Boris RUBIN, op. cit., n. 114 ss ad art. 30). Par motif valable, il faut entendre un motif qui fait apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère. Il peut s'agir, dans le cas concret, d'un motif lié à la situation subjective de la personne concernée (d'éventuels problèmes de santé, la situation familiale ou l'appartenance religieuse) ou à des circonstances objectives (par exemple la durée déterminée du poste). Si des circonstances particulières le justifient il est donc possible, exceptionnellement, de fixer un nombre de jours de suspension inférieur à 31 jours. Toutefois les motifs de s'écarter de la faute grave doivent être admis restrictivement (arrêt du Tribunal fédéral 8C 283/2021 du 25 août 202; 8C 313/2021 du 3 août 2021).

4.2 En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème indicatif à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour les organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas concret, en particulier de celles qui ont trait au comportement de l'intéressé au regard de ses devoirs généraux d'assuré qui fait valoir son droit aux prestations. Elles pourront le cas échéant aller en dessous du minimum prévu par le barème indicatif (arrêt du Tribunal fédéral 8C 283/2021 du 25 août 2021). Le barème du SECO prévoit une suspension d'une durée de 31 à 45 jours en cas de premier refus d'un emploi convenable d'une durée indéterminée (Bulletin LACI IC D79/2.B/1).

Sauf pour un manquement d'une aussi faible gravité qu'une absence isolée à un entretien à l'ORP, le prononcé d'une suspension ne suppose pas qu'un avertissement préalable ait été adressé à l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral 8C_834/2010 du 11 mai 2011 consid. 2.5 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 63 ad art. 30). Il n’est en particulier pas nécessaire qu’un assuré ait été renseigné au sujet de son obligation d’accepter un emploi convenable pour qu’une sanction puisse être prononcée en cas de refus d’emploi (Boris RUBIN, op. cit., n. 11 ad art. 16, n. 63 ad art. 30).

4.3 La quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation. Il y a abus de celui-ci lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 4.2 ; 8C_601/2012 consid. 4.2, non publié in ATF 139 V 164 et les références).

5.             En l’occurrence, n’ayant pas postulé pour le poste de mécanicien auprès de D______, pour lequel l’ORP lui avait remis une assignation le 22 novembre 2021, le recourant n’a pas satisfait, sur le plan du principe, à son obligation d’entreprendre tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour abréger le chômage. En effet, les déclarations des témoins entendus le 23 mai 2022, permettent d’établir que le recourant, contrairement à ses affirmations, n’est passé chez l’employeur que postérieurement au délai qui lui avait été imparti par l’intimé, au 24 novembre 2021, de sorte qu’il n’a pas respecté l’obligation qui lui était imposée par l’assignation du 22 novembre 2021. Le manquement du recourant justifie ainsi une suspension du droit à l’indemnité de chômage, en application de l’art. 30 al. 1 let. d LACI. Le premier refus d’un emploi réputé convenable constitue une faute grave qui implique le prononcé d’une suspension du droit à l’indemnité de chômage pour une durée de 31 à 45 jours, à moins que le recourant puisse se prévaloir d'un motif valable à l’appui de son refus, à savoir d’un motif lié à sa situation subjective ou à des circonstances objectives, qui ferait apparaître sa faute comme étant de gravité moyenne ou légère.

En l’occurrence, aucune circonstance particulière ne justifie de s’écarter de la présomption qu’un défaut de suite donnée à une assignation procède d’une faute grave, de sorte que la suspension minimale de 31 jours du droit à l’indemnité de chômage s’applique.

Par ailleurs, le recourant ayant subi, dans le délai de deux ans, deux autres sanctions en avril et mai 2021, la majoration de la suspension à 37 jours au lieu de 31 ne peut qu’être confirmée.

Partant, le recours sera rejeté.

Pour le surplus, la procédure est gratuite.

 

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le